BGE 98 Ia 537 | |||
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80. Arrêt de la Chambre de droit public du 31 octobre 1972 dans la cause Chomé contre Gianturco. | |
Regeste |
Art. 3 des schweiz.-italienischen Abkommens vom 3. Januar 1933 über die Anerkennung und Vollstreckung gerichtlicher Entscheidungen; Art. 84 lit. c OG; Anerkennung eines italienischen Urteils. |
2. Das schweiz.-italienische Abkommen unterscheidet zwischen der Anerkennung und der Vollstreckung gerichtlicher Entscheidungen. Die Kantone haben die Möglichkeit, ein besonderes Verfahren vorzusehen, in welchem die Interessierten die Anerkennung der Rechtskraft eines nach ausländischem Recht ergangenen Feststellungsurteils verlangen können (Erw. 6). | |
Sachverhalt | |
A.- Bartolo Gianturco, avocat, occupait jusqu'en 1943 en qualité de locataire un appartement et un garage sis au Palais Doria d'Angri à Naples et appartenant à veuve Yvonne Doria née Schmitz. Au moment de l'occupation de Naples par les troupes anglo-américaines, les locaux furent réquisitionnés par l'autorité militaire alliée, puis ils furent donnés à bail par le gérant de l'immeuble à l'avocat Amedeo Pistolese.
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B.- Aux fins d'obtenir la restitution des locaux loués et la réparation du dommage résultant pour lui de leur occupation par un tiers, alors que son propre bail était encore en cours, Gianturco á intenté action devant le Tribunal civil de Naples contre Yvonne Doria, demeurant en Suisse, et contre Pistolese. Faisant élection de domicile à Naples, dame Doria est entrée en matière sans réserve sur le fond du litige.
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Après que le Tribunal eut débouté Gianturco, la Cour d'appel de Naples a pour l'essentiel, les 4 avril-7 mai 1951, condamné les défendeurs à remettre les locaux litigieux au demandeur, admis que dame Doria devait à Gianturco des dommagesintérêts à fixer quant à la quotité dans une instance séparée et rejeté la demande de dommages-intérêts dirigée contre Pistolese.
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Il ressort de jugements ultérieurs (jugement du Tribunal de Naples des 26 janvier-26 mars 1959, jugement de la Cour d'appel de Naples des 27 avril-23 juillet 1960, arrêt de la Cour de cassation des 21 avril-4 août 1961) que le jugement de la Cour de Naples des 4 avril-7 mai 1951 a été confirmé par la Cour de cassation les 14 mars-31 juillet 1951 dans un arrêt rejetant un recours formé par Pistolese.
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C.- Pistolese a, à la suite de cette procédure et après avoir bénéficié de prorogations du délai qui lui avait été imparti, évacué les locaux en 1956. Dès 1953, Gianturco avait introduit devant le Tribunal de Naples une nouvelle action dirigée à la fois contre Yvonne Doria et contre Alfonso Marino, acquéreur de l'immeuble.
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Par jugement des 27 avril-23 juillet 1960, la Cour d'appel de Naples a condamné dame Doria à payer à Gianturco à titre de dommages-intérêts le montant de 18 millions de lires plus intérêts légaux; elle a débouté Gianturco de sa demande à l'encontre de Marino. Ce jugement a été rendu par défaut contre dame Doria; cette dernière, qui habitait à Lausanne, n'avait pas été assignée par citation personnelle, mais par voie édictale, et n'avait pas comparu.
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La Cour de cassation, saisie d'un recours formé par Gianturco, a confirmé le jugement de la Cour d'appel (arrêt des 21 avril-4 août 1961).
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D.- Dame Doria est décédée pendant l'instance, le 12 août 1959. Son unique héritière est sa fille, Noëlle Chomé, à Lausanne.
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E.- Gianturco a fait notifier à dame Chomé le 3 avril 1968 un commandement de payer le montant de 133 821 fr. 80, plus intérêts à 5% du 27 avril 1960, cette somme étant due en vertu du "jugement définitif et exécutoire de la Cour d'appel de Naples du 27 avril 1960, confirmé en cassation, contre la marquise Yvonne Doria née Schmitz, décédée entre-temps, dont la débitrice est la fille unique et par conséquent l'unique héritière".
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Opposition ayant été formée par Noëlle Chomé, le président du Tribunal du district de Lausanne, puis, le 27 novembre 1969, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud, statuant sur recours, ont rejeté la requête de mainlevée en application de l'art. 1er ch. 4 de la convention italo-suisse du 3 janvier 1933, dame Doria n'ayant pas été régulièrement citée devant les tribunaux italiens pour le second procès.
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F.- Gianturco, par requête du 1er juillet 1970, s'est adressé au Conseil d'Etat du canton de Vaud, lui demandant de prononcer l'exequatur du jugement de la Cour d'appel de Naples du 18 mai 1951 (recte: des 4 avril-7 mai 1951).
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Par décision du 26 janvier 1972, le Conseil d'Etat a admis la requête d'exequatur "du jugement rendu le 18 mai 1951 par la Cour d'appel de Naples" et a "en conséquence déclaré exécutoire" ledit jugement dans le canton de Vaud. Dame Chomé a été condamnée en outre aux frais et dépens.
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G.- Noëlle Chomé forme contre cette décision un recours de droit public en application de l'art. 84 al. 1 litt. c OJ; elle se plaint de la violation de la convention italo-suisse du 3 janvier 1933 sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires. Elle demande que la décision du Conseil d'Etat vaudois soit "réformée en ce sens que l'exequatur n'est pas accordé au jugement de la Cour d'appel de Naples du 18 mai 1951 dans la cause divisant l'avocat B. Gianturco d'avec dame Yvonne Doria-Schmitz". Le recours contient des conclusions complémentaires concernant les frais de l'instance fédérale et de la procédure cantonale, mais la recourante a renoncé à ces conclusions par lettre du 3 mars 1972.
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H.- Le Conseil d'Etat, tout en contestant le bien-fondé de l'argumentation de la recourante, déclare s'en remettre à justice. L'intimé conclut au rejet du recours.
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Considérant en droit: | |
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2. La recourante fait grief à l'autorité cantonale d'avoir violé un traité international. Son recours est fondé sur l'art. 84 al. 1 litt. c OJ, aux termes duquel le recours de droit public est recevable contre une décision ou un arrêté cantonal pour violation de traités internationaux, sauf s'il s'agit d'une violation de leurs dispositions de droit civil ou de droit pénal. L'art. 3 de la convention italo-suisse du 3 janvier 1933, dont la violation est alléguée, a trait à l'exécution forcée, de sorte qu'il ne relève ni du droit civil ni du droit pénal (RO 81 I 142).
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Le moyen est ainsi recevable en principe au regard de l'art. 84 OJ. Le Tribunal fédéral, saisi d'un recours fondé sur la violation d'un traité international, examine librement les questions de fait et de droit (RO 98a I 230), mais il n'examine que les griefs qui sont formés dans le recours; il n'a pas à rechercher si la décision attaquée présente d'autres vices que ceux qui ont été allégués (RO 85 I 44; arrêt Gehrig du 17 mai 1972).
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En effet, le jugement de la Cour de Naples n'est pas une décision de dernière instance; il a fait l'objet devant la Cour de cassation d'un recours qui, d'après les jugements ultérieurs, aurait été rejeté. Mais l'arrêt de la Cour de cassation ne semble pas avoir été produit devant l'autorité cantonale et ne figure pas dans le dossier soumis au Tribunal fédéral. Le Conseil d'Etat déclare dans sa décision que le jugement dont l'exequatur a été demandé "a été confirmé ultérieurement en cassation". Il ajoute que les pièces établissant que la décision est passée en force de chose jugée et qu'elle est exécutoire ont été produites en original. Bien qu'en fait, de tels documents originaux ne figurent pas au dossier, l'autorité cantonale pouvait cependant admettre comme suffisante la production des jugements ultérieurs, notamment de l'arrêt de la Cour de cassation des 24 avril-4 août 1961, dans lequel il est dit que le jugement de la Cour d'appel de 1951 a été confirmé par la Cour de cassation.
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De toute façon, le Tribunal fédéral n'a pas à examiner ce point d'une manière plus approfondie, car la recourante admet expressément que l'arrêt de la Cour de Naples des 7-18 mai 1951 (recte: 4 avril-7 mai 1951) a été "confirmé par la Cour de cassation italienne par un arrêt des 14 mars et 31 juillet 1952". 4. - Le jugement rendu en 1951 par la Cour d'appel de Naples a été rendu entre trois parties: Gianturco, Yvonne Doria et Pistolese. Son dispositif comprend les points suivants:
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1o Condamnation de Pistolese et de dame Doria tendant à la remise à Gianturco des locaux occupés par Pistolese, via Roma 28, à Naples.
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2o Condamnation de dame Doria au paiement de dommagesintérêts à l'égard de Gianturco, le montant de ces dommagesintérêts devant être fixé dans une instance séparée.
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3o Rejet de la demande de dommages-intérêts formée par Gianturco à l'encontre de Pistolese.
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4o Condamnation de dame Doria au paiement des frais et dépens du procès en faveur de Gianturco.
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5o Compensation des frais et dépens entre Gianturco et Pistolese.
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a) Dans sa requête adressée au Conseil d'Etat, Gianturco a déclaré agir contre dame Chomé, fille et héritière de dame Doria, et il n'a fait allusion qu'à la deuxième partie du judicatum contenu dans le jugement de la Cour de Naples, soit à la condamnation de dame Doria au paiement de dommagesintérêts d'un montant indéterminé. Il n'a rien dit en revanche des autres points du dispositif de l'arrêt, et notamment des points qui concernent Pistolese. Dame Chomé ayant répondu que la partie du jugement ordonnant la restitution des locaux à Gianturco a été exécutée peu après l'arrêt de la Cour d'appel, le Conseil d'Etat, dans sa décision du 26 janvier 1972, déclare que cet argument est "dénué de pertinence", car dame Chomé "passe sous silence le deuxième élément qui porte précisément sur la condamnation de dame Doria-Schmitz à des dommagesintérêts, ainsi qu'aux frais et dépens en faveur de Me Gianturco". A la suite de quoi le Conseil d'Etat, sans formuler de réserve, déclare exécutoire le jugement dans le canton de Vaud. Il a mis les frais et dépens à la charge de dame Chomé, en ajoutant - mais dans les considérants seulement - que "les frais de la procédure d'appel de Naples sont à ajouter" au montant des frais dus a l'administration vaudoise.
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Cependant, ni devant l'autorité cantonale, ni devant le Tribunal fédéral, aucune des parties en litige n'a fait une allusion quelconque au point du dispositif de l'arrêt de la Cour de Naples relatif aux frais et dépens. Ni la recourante ni l'intimé n'ont commenté le passage de la décision du Conseil d'Etat relatif à ce point, et le dossier ne permet d'ailleurs pas de dire si les frais et dépens fixés par le jugement de 1951 ont été payés par dame Doria ou par la recourante.
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b) Il convient dès lors de constater que l'arrêté du Conseil d'Etat - si, dans son dispositif, il prononce l'exequatur du jugement de 1951 sans réserve aucune - a entendu conférer l'exequatur à deux des points du dispositif: celui qui concerne la condamnation de dame Doria à des dommages-intérêts d'un montant indéterminé, et celui qui concerne sa condamnation au paiement des frais et dépens taxés par l'arrêt. En revanche, le Conseil d'Etat n'a pas entendu considérer que sa décision concernait la condamnation à l'évacuation des locaux, ce point du jugement ayant été exécuté, et il ne s'est dès lors pas préoccupé non plus de l'existence d'une troisième partie à la procédure italienne, Amedeo Pistolese.
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Elle prétend que le Conseil d'Etat a violé cette disposition en accordant force exécutoire à un jugement en constatation de droit, alors qu'aux termes de l'al. 2 de l'art. 3 susmentionné, les décisions rendues en Italie ne peuvent être déclarées exécutoires en Suisse que si elles ont "pleine force exécutoire dans l'Etat où elles ont été rendues". Un jugement en constatation de droit, dit-elle, n'est pas susceptible d'exécution en utilisant les voies offertes par la loi sur la poursuite pour dettes. Le seul problème qui puisse se poser est celui de sa reconnaissance. Or la reconnaissance d'un jugement italien "devient automatique".
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On entend par reconnaissance d'une décision rendue par une juridiction de l'un des Etats contractants le fait de reconnaître que celle-ci a "l'autorité de la chose jugée" sur le territoire de l'autre Etat (art. 1er). Lorsque la décision est non seulement reconnue, mais "déclarée exécutoire", elle peut donner lieu à exécution forcée et faire l'objet de formalités telles que l'inscription ou la transcription sur les registres publics (art. 3).
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a) Le jugement auquel le Conseil d'Etat vaudois a conféré l'exequatur n'est pas uniquement un jugement en constatation de droit. Il l'est sans doute en ce qui concerne le deuxième point du judicatum, mais non pas en ce qui concerne les autres et notamment celui qui concerne la condamnation de dame Doria aux frais et dépens et que vise aussi le Conseil d'Etat dans les considérants de sa décision. Cette question, toutefois, n'a pas été soulevée par la recourante.
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b) Quant au deuxième point du dispositif, seul en cause ici - soit la condamnation de dame Doria à des dommages-intérêts dont le montant n'a pas été déterminé - il ne peut évidemment donner lieu à exécution forcée. D'après le texte même du jugement, si le principe de la condamnation d'Yvonne Doria est acquis, le montant des dommages-intérêts à payer doit faire l'objet d'un autre jugement, et seul ce second jugement pourrait être mis à exécution. C'est d'ailleurs ainsi qu'a procédé Gianturco, qui, par le procès qu'il a introduit en 1953 devant le Tribunal de Naples, a voulu obtenir contre dame Doria une condamnation exécutoire, mais qui n'a pas fait citer régulièrement la défenderesse, de sorte que la mainlevée de l'opposition formée par Noëlle Chomé à la poursuite que Gianturco lui a fait notifier sur la base du jugement de 1960 n'a pas été prononcée.
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c) Il y a donc lieu d'examiner si, en prononçant l'exequatur du jugement sur le deuxième point du judicatum, le Conseil d'Etat a violé la convention italo-suisse.
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L'art. 3 al. 2 de la convention, qui déclare que "ne seront déclarées exécutoires dans l'Etat requis que les décisions qui ont pleine force exécutoire dans l'Etat où elles ont été rendues", a été de toute évidence inséré dans le texte conventionnel pour éviter que l'exécution forcée ne soit engagée sur la base d'un jugement qui n'a pas encore force exécutoire dans le pays où il a été rendu, par exemple parce que la loi nationale prévoit que cette force exécutoire ne prend effet qu'à l'expiration d'un certain délai après que ce jugement est passé en force de chose jugée (cf. STAUFFER, Die Verträge der Schweiz mit Österreich und mit der Tschechoslowakei über die Anerkennung und Vollstreckung gerichtlicher Entscheidungen, p. 54; HAGENBÜCHLE, Prozessuale Probleme der formellen Rechtskraft und Vollstreckbarkeit, RDS, vol. 67, 1948, p. 22) ou encore qu'elle ne soit engagée sur la base d'une décision qui a perdu le caractère exécutoire qu'elle avait précédemment acquis (Message du Conseil fédéral du 6 février 1933, FF 1933 I 248).
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La distinction entre la reconnaissance et l'exécution des jugements qui a été faite dans les conventions conclues par la Suisse a notamment pour origine le texte du projet de convention sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires adopté en 1925 par la Conférence de La Haye de droit international privé. La Conférence avait considéré qu'il était utile de prévoir la reconnaissance de l'autorité de la chose jugée par exemple pour les "sententiae declaratoriae ... qui peuvent servir de base à des nouvelles actions dans un autre pays" (rapport de la Deuxième Commission, Conférence de La Haye de droit international privé, actes de la 5e session, p. 184). L'art. 3 de la convention italo-suisse correspond dans sa substance à l'art. 2 du projet de la Conférence de La Haye, qui prévoit que "les décisions judiciaires rendues dans un des Etats contractants peuvent être mises à exécution dans l'autre Etat après y avoir été déclarées exécutoires" et que "l'exequatur est accordé, si la décision est exécutoire dans l'Etat où elle a été rendue et si elle remplit les conditions énumérées" pour l'obtention de la reconnaissance. La Deuxième Commission de la Conférence a inscrit dans le texte du projet la précision relative à la force exécutoire de la décision pour tenir compte du fait que "le moment où le jugement est passé en force de chose jugée et le moment où le jugement est exécutoire ne peuvent pas (recte: peuvent ne pas) être concordants", notamment d'après les législations de la Norvège et du Danemark (déclaration de M. Merz, président de la commission, loc.cit., p. 173/4).
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La disposition de l'art. 2 du projet de La Haye, tout comme celle de l'art. 3 de la convention italo-suisse, n'a certainement pas eu pour but, en revanche, d'empêcher que force exécutoire ne soit donnée à des décisions de pure constatation - sententiae declaratoriae - puisque ces décisions ne peuvent, de par leur nature même, pas faire l'objet d'une exécution forcée.
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d) En ce qui concerne la simple reconnaissance de l'autorité de la chose jugée, la convention italo-suisse (art. 1er al. 2) prévoit - comme d'ailleurs elle le fait pour la déclaration de force exécutoire (art. 3 al. 3) - qu'il appartient à chaque Etat de décider de la procédure à suivre pour cette reconnaissance. En Suisse, la procédure civile est régie en principe par le droit cantonal, et c'est la procédure cantonale qui est au premier chef déterminante à cet égard. La doctrine et la jurisprudence admettent que le prononcé d'une "déclaration de reconnaissance" n'est pas nécessaire, et que les tribunaux saisis d'un litige et devant lesquels un jugement répondant aux conditions posées par la convention est invoqué doivent admettre - sans déclaration préalable de reconnaissance - l'autorité de la chose jugée pour ce jugement (cf. ALEXANDER, Die internationale Vollstreckung von Zivilurteilen, insbesondere im Verhältnis zu den Nachbarstaaten, RSJB, vol. 67, p. 4; PETITPIERRE, Les conventions conclues par la Suisse avec l'Allemagne, l'Autriche et la Tchécoslovaquie concernant la reconnaissance et l'exécution des jugements civils, Société suisse de droit international, publication No 31 p. 37; SCHNITZER, Handbuch des internationalen Privatrechts, 4e éd., 1958, II p. 903; FJS No 967/1961, p. 1; LEUCH, Die Zivilprozessordnung für den Kanton Bern, 3e éd., 1956, p. 395; RO 64 II 77). Les cantons peuvent néanmoins instituer une procédure spéciale pour qu'il soit dit droit sur les demandes tendant à la reconnaissance de la force de chose jugée (LEUCH, loc.cit.; GULDENER, Das internationale und interkantonale Zivilprozessrecht der Schweiz, p. 94; RO 30 I 684).
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e) Le code de procédure civile du canton de Vaud (CPC) du 20 novembre 1911 (qui était applicable à la demande d'exequatur, celle-ci ayant été déposée avant l'entrée en vigueur du nouveau code de 1966) ne par le pas de la reconnaissance mais seulement de la déclaration rendant exécutoire un jugement rendu hors du canton (art. 586-587 CPC). Cependant, cela n'exclut pas nécessairement que l'exequatur prononcé par l'autorité cantonale soit considéré aussi comme pouvant constituer simplement une décision de reconnaissance du jugement en cause. En effet, un certain nombre d'auteurs considèrent que l'exequatur peut s'entendre aussi d'une décision de reconnaissance de l'autorité de chose jugée d'un jugement (cf. PETITPIERRE, op.cit., p. 38; La reconnaissance et l'exécution desjugements civils étrangers en Suisse, p. 171 et 203; GULDENER, op.cit., p. 114; Schweiz. Zivilprozessrecht, 2e éd., 1958, p. 601 n. 27; LEUCH, loc.cit.).
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D'après le code de procédure civile vaudois, tous lesjugements cantonaux passés en force de chose jugée sont revêtus de la déclaration d'exécuter prévue par l'art. 590 CPC (voir aussi JdT 1935 III 69). Le greffier du tribunal (le juge de paix pour les jugements de sa compétence) déclare exécutoires les jugements contre lesquels aucun recours n'a été formé ou en cas d'abandon du recours. La loi ne distingue pas à cet égard entre lesjugements de condamnation et les jugements de constatation. La distinction intervient au stade suivant, celui de l'exécution forcée. Les jugements de constatation de droit sont considérés comme des jugements qui emportent "exécution par eux-mêmes" (art. 598 CPC), tandis que pour les autres jugements la déclaration exécutoire est suivie de l'exécution forcée (art. 599 ss. CPC; GROSS, De l'exécution forcée des obligations non pécuniaires, thèse Lausanne 1934, p. 106).
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Lorsqu'il s'agit d'un jugement rendu hors du canton, dans la mesure où ce jugement n'est pas susceptible d'être exécuté par la voie de la poursuite pour dettes, la déclaration de la force exécutoire est donnée par le Conseil d'Etat (art. 586 CPC).
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f) Il résulte de là que, si même le Conseil d'Etat a "déclaré exécutoire" le jugement de la Cour d'appel de Naples, cela ne signifie pas que ce jugement puisse, en tant qu'il se borne à constater un droit, donner lieu à exécution forcée sur le territoire du canton de Vaud. S'il a utilisé les mêmes termes que ceux qui figurent dans l'art. 3 de la convention italo-suisse à l'égard des jugements qui sont exécutoires au sens propre du terme, il a évidemment entendu reconnaître à ce jugement l'autorité de la chose jugée. C'est d'ailleurs ainsi que le Conseil d'Etat lui-même interprète sa décision dans les observations qu'il a produites en réponse au recours: "En déclarant exécutoire dans le canton de Vaud un jugement dont il admettait par ailleurs qu'il était en constatation de droit, le Conseil d'Etat n'a pas fait autre chose que de lui reconnaître l'autorité de la chose jugée". Le Conseil d'Etat donne au terme "exécutoire" le même sens que celui qui résulte de l'art. 61 Cst., qui se rapporte aux jugements civils définitifs rendus dans un canton; lorsque cette disposition porte que lesdits jugements sont "exécutoires", elle entend par là non seulement qu'ils doivent donner lieu à exécution forcée, mais aussi, notamment lorsqu'ils ne peuvent pas donner lieu à une telle exécution, qu'ils doivent être "reconnus" (RO 87 I 67, 95 II 644; AUBERT, Traité de droit constitutionnel suisse, I, p. 326; GULDENER, Das internationale und interkantonale Zivilprozessrecht, p. 84).
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La décision du Conseil d'Etat ne pourrait violer la convention italo-suisse que si elle avait pour effet de donner à l'une des parties - soit à l'intimé - un droit que lui refuse cette convention. Or, en déclarant "exécutoire" un jugement qui, de par sa nature même, ne peut donner lieu à exécution forcée, le Conseil d'Etat n'a pu porter aucun préjudice à la recourante, puisque sa décision ne peut faire plus que de reconnaître au jugement italien l'autorité de la chose jugée.
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Or non seulement la recourante ne conteste pas que toutes les conditions prévues par la convention italo-suisse pour la reconnaissance de l'autorité de la chose jugée au sens de l'art. 1er de la convention soient réunies en l'espèce, mais elle déclare que la reconnaissance du jugement italien "devient automatique". Bien plus, elle a admis devant l'autorité cantonale que "personne ne conteste la validité pleine et entière" de l'arrêt de la Cour de Naples.
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Il résulte ainsi de l'argumentation de la recourante qu'elle considère la décision du Conseil d'Etat comme inutile. Peut-être, mais cela n'emporte pas qu'elle ait été rendue en violation de l'art. 3 de la convention italo-suisse.
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Par ailleurs, le Conseil d'Etat, en se prononçant sur la reconnaissance de l'autorité de chose jugée du jugement de la Cour de Naples, n'avait pas à statuer sur le moyen tiré de la prescription. C'est dans le procès au fond, s'il est ouvert par l'intimé, que la recourante pourra, si elle s'y estime fondée, faire valoir cette exception, qui peut être invoquée même devant le juge de mainlevée (RO 35 I 466).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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