BGE 99 Ia 518 | |||
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63. Extrait de l'arrêt du 24 octobre 1973 dans la cause Comité référendaire de Cheseaux-sur-Lausanne contre commune de Cheseaux-sur-Lausanne et Conseil d'Etat du canton de Vaud. | |
Regeste |
Referendum gegen einen rechtsetzenden Erlass. | |
Sachverhalt | |
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A.- Le Conseil communal (assemblée délibérante) de Cheseaux-sur-Lausanne a adopté le 19 septembre 1972 un règlement sur les égouts et l'épuration des eaux usées, dont les art. 41 à 49 prévoient le prélèvement de diverses taxes, les unes uniques, les autres annuelles. L'art. 44 prévoit, pour tout bâtiment raccordé directement ou indirectement aux collecteurs aboutissant aux installations collectives d'épuration, la perception: a) d'une taxe unique d'introduction à la station d'épuration de 3 de la valeur d'assurance incendie, selon l'indice de l'année en cours et payable selon les dispositions de l'art. 42, sous déduction de la participation déjà versée; b) d'une taxe annuelle proportionnelle à la quantité d'eau concédée et dont le tarif est arrêté par le Conseil communal.
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B.- Un comité référendaire a déposé le 22 septembre au greffe municipal une demande de référendum selon laquelle devait être soumise à l'assemblée de commune la question suivante:
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"Acceptez-vous, à l'art. 44 du règlement sur les égouts et l'épuration des eaux usées, que pour tout bâtiment raccordé directement ou indirectement aux collecteurs et aboutissant aux installations collectives d'épuration, il soit perçu une taxe unique d'introduction à la station d'épuration, calculée au taux de 3 de la valeur de l'assurance incendie selon l'indice de l'année en cours et payable selon les dispositions de l'art. 42, sous déduction de la participation déjà versée?"
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La demande de référendum a obtenu dans le délai légal le nombre de signatures requis par la loi. Par lettre du 4 octobre 1972, la Municipalité de Cheseaux a cependant informé le comité référendaire que cette demande ne pouvait pas être soumise au vote du peuple, parce que contraire à la loi. En effet, disait la Municipalité, "un référendum ne peut pas être dirigé contre une seule disposition d'un règlement mais doit viser le règlement dans son ensemble".
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C.- Saisi d'un recours contre la décision de la Municipalité, le Conseil d'Etat l'a rejeté.
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D.- Agissant par la voie du recours de droit public fondé sur l'art. 85 lettre a OJ, le comité référendaire demande au Tribunal fédéral d'annuler les décisions prises par la Municipalité de Cheseaux et par le Conseil d'Etat, puis d'ordonner que soit soumise au peuple la question qui avait fait l'objet de la demande de référendum. Après avoir relevé que le référendum est une soupape essentielle de notre système démocratique, que le droit vaudois en restreint déjà l'exercice par la brièveté du délai et par le nombre de signatures exigé, et enfin que la taxe contestée n'a pas une importance financière décisive pour la commune de Cheseaux, le recourant s'en prend à l'interprétation selon laquelle un nouveau règlement ne peut faire l'objet d'un référendum que dans son entier; il qualifie cette interprétation d'arbitraire et reproche au Conseil d'Etat d'avoir péché par excès de formalisme.
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Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
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Extrait des motifs: | |
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a) Le droit public vaudois ne tranche pas expressément la question, ni dans un sens, ni dans l'autre. Il faut donc l'interpréter, pour remédier à ce qui constitue une véritable lacune. Le Tribunal fédéral peut le faire avec un pouvoir de libre examen. En effet, lorsqu'il est saisi comme en l'espèce d'un recours fondé sur l'art. 85 lettre a OJ, il examine en principe librement l'application du droit constitutionnel cantonal et des lois qui précisent le contenu et l'étendue du droit de vote (RO 98 I a 205 consid. 3, 97 I 32 s. et 663 consid. 3, 94 I 33).
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L'art. 90 bis Cst. cant. soumet au référendum facultatif les "décisions" prises par le Conseil communal, tout en laissant au législateur le soin d'en définir l'objet possible. A son art. 114, qui est une paraphrase du texte constitutionnel, la loi cantonale sur l'exercice des droits politiques reprend ce terme de "décision" sans lui apporter aucune précision; l'art. 116 se borne à énumérer les actes qui, par exception au principe, sont soustraits au référendum.
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Dans le langage du droit public, le mot "décision" au sens large vise habituellement toute résolution que prend une autorité et qui est destinée à produire un certain effet juridique ou à constater l'existence ou l'inexistence d'un droit ou d'une obligation; au sens étroit, c'est un acte qui, tout en répondant à cette définition, intervient dans un cas individuel et concret. De toute évidence, c'est dans le sens large que l'art. 90 bis de la constitution vaudoise utilise le mot "décision", avec cette conséquence que le référendum facultatif est en principe ouvert sur le plan communal aussi bien contre des actes législatifs (règlements communaux) que contre des actes administratifs individuels du Conseil communal. Cela n'est d'ailleurs contesté en l'espèce par aucune des parties.
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S'agissant d'actes législatifs (règlements), il n'y a qu'une seule décision au sens de la définition qu'on vient de rappeler: c'est celle qui, dans un vote final, approuve l'acte dans son ensemble et qui tend à lui donner force de loi, sous réserve de référendum ou de l'approbation d'une autre autorité. Certes, il est d'usage qu'un projet de loi ou de règlement soit d'abord discuté article par article, avec vote éventuel sur chacun d'eux. Mais il ne s'agit encore que de décisions préliminaires et provisoires qui resteront sans effet si le projet n'est pas finalement adopté dans son ensemble, avec les amendements qui lui ont été apportés au cours des débats. En droit vaudois, la loi sur les communes (du 28 février 1956) ne prescrit même pas cette procédure fractionnée, si bien qu'elle considère implicitement un projet de règlement soumis au Conseil communal comme formant un tout quant à la décision à prendre. En revanche, la manière de procéder de chaque Conseil communal fait généralement l'objet d'un règlement que ce Conseil établit lui-même. Or celui de la commune de Cheseaux, qui date du 20 février 1962, consacre la procédure usuelle à son art. 65. Il y est dit que lorsque l'objet en discussion embrasse diverses questions, la discussion est ouverte sur chacun des articles qu'il renferme, qu'une votation éventuelle intervient sur chacun d'eux, et qu'après une discussion générale a lieu une votation de l'ensemble de la proposition telle qu'elle a été amendée dans la votation des articles. Formellement, c'est cette votation d'ensemble, et elle seule, qui constitue la "décision" susceptible de référendum.
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Ainsi les textes applicables, interprétés de cette façon, conduisent à dire que le référendum ne peut pas être demandé contre certains articles seulement d'un règlement nouvellement adopté. Pour qu'il puisse l'être, il aurait fallu que le législateur cantonal le dise expressément, ce qu'il n'a pas fait. En revanche, il va de soi qu'une décision modifiant un règlement existant, fût-ce dans un seul de ses articles, est susceptible de référendum, car c'est bien une décision au sens défini plus haut.
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b) Fondée sur des motifs d'ordre formel, cette conclusion est en outre matériellement raisonnable. Certes, en ouvrant le référendum facultatif contre certaines dispositions seulement d'une loi ou d'un règlement, on élargirait de façon séduisante l'exercice des droits démocratiques: on permettrait aux citoyens qui admettent, dans son principe et dans sa généralité, une nouvelle réglementation de demander que le peuple se prononce sur quelques points particulièrement controversés, et cela sans le risque de faire échouer le tout; on fermerait en outre la porte - mais en partie seulement - aux marchandages qui se produisent parfois à propos de certains articles d'un projet de loi, sous la menace d'un référendum contre le tout.
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Mais à ces avantages s'opposent de graves inconvénients. Tout d'abord, quant à son contenu, une loi forme à tel point un tout qu'on risquerait d'en compromettre l'harmonie, la cohérence ou l'efficacité en permettant au peuple lui-même d'en retrancher, par un choix plus ou moins arbitraire, certains de ses éléments seulement. Et il ne saurait évidemment être question d'admettre le référendum partiel de cas en cas, suivant qu'il doit porter ou non sur des éléments essentiels: on créerait alors une intolérable insécurité juridique qui serait la source de nombreuses contestations parfois insolubles.
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D'autre part, dans le cas où le peuple rejetterait certains articles seulement d'une nouvelle réglementation, il faudrait se demander si ce rejet ne devrait pas entraîner la caducité de toute la réglementation, ou du moins la caducité d'autres dispositions étroitement liées à celles qui ont été condamnées (cf. AUBERT, Le référendum populaire, RDS 1972, p. 480 ss., N. 56 et 66). Il est vrai que la même difficulté peut se présenter pour le législateur - et pour le juge - en cas d'annulation judiciaire partielle; mais cela ne justifie pas d'ouvrir encore la porte à d'autres complications du même genre. Enfin, le référendum partiel aurait pour résultat, s'il était admissible, qu'une même réglementation pourrait faire parallèlement l'objet de plusieurs, voire de nombreuses demandes de votations séparées, ce qui créerait la confusion pour l'électeur.
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c) Des raisons de ce genre expliquent probablement que, de façon assez générale en droit public suisse, le référendum législatif facultatif est nécessairement global et ne peut porter que sur la loi contestée dans son ensemble.
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Il en est ainsi en droit fédéral (AUBERT, Traité de droit constitutionnel suisse, N. 1133 p. 423) et dans la majorité des cantons. Plusieurs font à vrai dire exception, tels que Zurich (art. 30 al. 3 Cst. cant.), Zoug (§ 34 al. 3 Cst. cant.), Soleure (art. 17 al. 2 Cst. cant.), Schaffhouse (art. 42 al. 4 Cst. cant.), Saint-Gall (art. 47 Cst. cant.) et Argovie (art. 25 al. 2 Cst. cant.); jusqu'en 1969, Lucerne était aussi du nombre (ancien § 39 al. 4 Cst. cant., cf. RO 80 I 168 ss.). Mais dans tous ces cantons - que le référendum législatif y soit obligatoire ou facultatif - c'est au Grand Conseil qu'il appartient de décider, à titre exceptionnel généralement, qu'il y aura des votations séparées sur certains éléments déterminés de la loi soumise au peuple. On a probablement considéré que cette autorité pouvait seule apprécier s'il est opportun de fractionner la votation sans risque sérieux d'aboutir à une réglementation essentiellement incomplète. Mais nulle part, semble-t-il, les citoyens ne peuvent euxmêmes demander - là où le référendum est facultatif - que le peuple se prononce sur certains articles seulement ou qu'il y ait plusieurs votations séparées sur les divers éléments d'une loi.
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De lege ferenda, la question est peut-être discutable. Mais la tendance générale du droit public suisse est telle que, de lege lata, on doit exiger une disposition expresse de la constitution ou de la loi pour que le référendum partiel soit possible. Or une telle disposition fait défaut en droit vaudois.
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d) Pour ces divers motifs, la Municipalité de Cheseaux, puis le Conseil d'Etat, ont eu raison de déclarer irrecevable la demande de référendum portant sur un seul article - et même sur l'un de ses éléments seulement - du nouveau règlement communal sur les égouts et l'épuration des eaux usées. Bien loin de tomber dans l'arbitraire, les autorités communales et cantonales ont choisi la solution juste. Contrairement à ce que soutient le recourant, elles n'ont pas non plus fait preuve d'un formalisme excessif, car la décision prise avait une importance de fond pour l'équilibre du nouveau règlement.
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Le Tribunal fédéral n'a cependant pas à examiner ici ces questions, étant donné que le recourant ne les a pas soulevées et qu'il n'y voit donc pas de motif d'annuler la décision attaquée. En matière de recours de droit public, même fondé sur l'art. 85 lettre a OJ, le Tribunal fédéral se considère comme lié par les moyens que les parties ont invoqués, au moins implicitement.
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