BGE 106 Ia 88 | |||
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21. Arrêt de la IIe Cour civile du 15 septembre 1980 dans la cause GIM Compagnie d'investissements S.A. contre F. Ferrari S.A. et Genève, Cour de justice (recours de droit public) | |
Regeste |
Zulässigkeit neuer Beweismittel, die in einem Rechtsmittel wegen Gesetzesverletzung vorgebracht werden. | |
Sachverhalt | |
A.- En avril 1978, GIM Compagnie d'investissements S.A. (GIM S.A.) chargea F. Ferrari S.A. de lui chercher une employée pour un poste d'assistante de gestion. Les parties se référèrent à des conditions générales prévoyant une rémunération de 15% du traitement annuel versé à l'employée. Le premier tiers des honoraires, calculé d'après le montant du traitement prévu, devait être versé immédiatement, le deuxième tiers, à la fin des travaux de F. Ferrari S.A., et le solde, deux mois après l'entrée en service de la candidate proposée et engagée. Si le mandat était révoqué après présentation du dossier d'une première candidate, F. Ferrari S.A. avait droit aux deux tiers de ses honoraires présumés. Les parties soumirent leur contrat au droit suisse et se référèrent aux art. 394 ss CO. GIM S.A. versa immédiatement le premier tiers des honoraires présumés, soit 1040 francs.
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F. Ferrari S.A. soumit à GIM S.A. les dossiers de plusieurs candidates, sans qu'un contrat de travail puisse être conclu. GIM S.A. chercha alors elle-même une employée et la trouva. Le 7 août 1978, elle dénonça le contrat conclu avec F. Ferrari S.A., laquelle lui adressa une note de 1040 francs représentant le second tiers de ses honoraires présumés. GIM S.A. refusa de payer, soutenant que F. Ferrari S.A. avait agi comme courtier et que son intervention n'avait pas abouti.
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B.- F. Ferrari S.A. a requis la mainlevée provisoire de l'opposition. A l'audience du 11 janvier 1980, GIM S.A. a soutenu que le contrat était nul parce qu'illicite. A son avis, F. Ferrari S.A. était un bureau de placement soumis à la loi fédérale du 22 juin 1951 sur le service de l'emploi. Or F. Ferrari S.A. n'avait pas obtenu l'autorisation indispensable à l'exercice de son activité (art. 7) et ne pouvait percevoir une taxe supérieure à celle fixée par le canton (art. 8 al. 2); à Genève, cette taxe était de 9% du premier salaire mensuel versé à l'employé.
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Le 16 janvier 1980, le Tribunal de première instance de Genève a débouté la créancière pour les motifs invoqués par la débitrice.
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F. Ferrari S.A. a fait appel. Elle a produit devant la Cour de justice un échange de correspondance avec l'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail et avec le Département de la prévoyance sociale du canton de Genève. Ces pièces devaient établir qu'elle n'était pas soumise à la loi fédérale sur le service de l'emploi.
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Par arrêt du 28 mars 1980, la Première Section de la Cour de justice a annulé la décision entreprise et, statuant à nouveau, a accordé la mainlevée provisoire de l'opposition. Elle a admis la validité du contrat et nié que F. Ferrari S.A. fût un bureau de placement soumis à la loi fédérale sur le service de l'emploi. Elle a accepté de prendre en considération les pièces nouvelles produites par F. Ferrari S.A., car elles permettaient à l'appelante de réfuter un argument de la débitrice.
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C.- GIM S.A. a interjeté un recours de droit public pour violation de l'art. 4 Cst. Elle soutient que la Cour de justice ne pouvait se fonder sur des pièces produites en instance d'appel seulement. La décision attaquée serait manifestement insoutenable et donc arbitraire; elle constituerait en outre un revirement de jurisprudence portant atteinte au principe de l'égalité de traitement.
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Considérant en droit: | |
1. Le Tribunal de première instance connaît en dernier ressort des demandes de mainlevée et sa décision n'est susceptible d'appel que dans les cas prévus à l'art. 339 de la loi de procédure civile du 13 octobre 1920 (art. 20 lettre b, 23 al. 2 et al. 3 lettre b de la loi d'application dans le canton de Genève de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 16 mars 1912). Selon l'art. 339 al. 1 lettre c LPC, l'appel est ouvert si le jugement consacre une violation de la loi; l'appréciation juridique erronée d'un point de fait est assimilée à la violation de la loi.
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La loi de procédure civile genevoise ne règle pas de manière explicite la production de moyens nouveaux en instance d'appel. L'art. 362 LPC interdit en principe le dépôt de chefs de demande qui n'ont pas été soumis au premier juge. Toutefois, l'art. 357 al. 2 permet de condamner aux dépens la partie, même victorieuse, qui fait usage en appel de pièces, exceptions ou moyens décisifs qu'elle n'a pas présentés en première instance. La Cour de justice en a déduit que les parties peuvent, dans certaines limites, produire en appel des pièces nouvelles à titre de moyens de preuve (SJ 1969 p. 536 ss, 1964 p. 86 ss, 1931 p. 540). L'art. 357 al. 2 serait en effet sans portée si tel n'était pas le cas (YUNG, Des faits nouveaux en appel, SJ 1938 p. 578 ss, p. 583; HELBERG, Die Rechtsmittel des genferischen Zivilprozessrechtes, p. 65 ss).
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En prenant en considération les pièces nouvelles versées au dossier par l'appelante, la Cour de justice a interprété la loi conformément à son texte. Sa solution ne peut dès lors être qualifiée d'arbitraire, à moins qu'elle n'aille manifestement à l'encontre du sens réel ou du but de la loi (ATF 103 Ia 229, 103 Ia 117, 91 I 167 et les arrêts cités).
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L'appel prévu à l'art. 339 al. 1 lettre c LPC se distingue de l'appel ordinaire en ce qu'il n'est ouvert que pour violation de la loi. La Cour de justice en a déduit que la juridiction de recours est liée aux faits constatés par le Tribunal de première instance, à moins que l'appréciation du juge inférieur ne soit arbitraire ou formellement contredite par les pièces ou les témoignages (SJ 1979 p. 371, 1977 p. 380, 1976 p. 107 s., 1976 p. 446, 1954 p. 608 et les arrêts cités). Elle a également jugé qu'elle doit, pour apprécier la violation de la loi invoquée par le recourant, se placer dans la situation où se trouvait le juge inférieur et qu'en principe elle ne peut donc fonder sa conviction sur des pièces produites pour la première fois en appel (SJ 1979 p. 371, 1965 p. 107 ss, 1958 p. 316, 1942 p. 387, 1940 p. 366, 1935 p. 141, 1933 p. 223, 1922 p. 348; cf. toutefois SJ 1968 p. 264 ss). Il est clair que si les parties pouvaient présenter librement tous moyens de preuve nouveaux en instance d'appel, la limitation de la voie de recours aux points de droit serait en partie éludée. L'admission de moyens nouveaux, lorsqu'on la restreint à ceux qui n'ont pu être présentés devant le juge inférieur, n'est en revanche pas manifestement incompatible avec la nature d'un recours pour violation de la loi. Le législateur fédéral en a par exemple jugé ainsi aux art. 19 al. 1 LP et 79 al. 1 OJ. On ne saurait donc soutenir que la Cour de justice méconnaisse l'esprit de l'art. 339 LPC en acceptant, dans l'appel pour violation de la loi, la production de pièces qui n'ont pu être versées en première instance.
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La recourante n'avait jamais, avant l'audience du 11 janvier 1980, soutenu que l'entreprise de la créancière fût soumise à la loi fédérale sur le service de l'emploi. La créancière ne pouvait prévoir que ce moyen serait soulevé en plaidoirie et, à l'audience, elle n'était plus en mesure de réunir et de produire les pièces qui lui eussent permis de le réfuter. La Cour de justice n'est donc pas tombée dans l'arbitraire en l'autorisant à compléter son dossier en appel.
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Le revirement de jurisprudence contesté par la recourante repose sur des considérations que l'autorité cantonale pouvait légitimement tenir pour décisives. La nouvelle pratique de la Cour de justice permet à une partie de faire valoir ses moyens contre des objections auxquelles elle ne pouvait s'attendre, et cela sans restreindre la partie adverse dans la défense de ses droits ni porter atteinte à la nature de l'appel prévu à l'art. 339 al. 1 lettre c LPC. Elle évite au plaideur diligent d'être surpris par des moyens soulevés à la clôture des débats et d'être, pour ce seul motif, exposé à la perte de ses droits. Au demeurant, la Cour de justice est revenue en l'espèce au principe général de la procédure civile genevoise, qui est l'admission, dans certaines limites, des preuves nouvelles en appel, et elle n'a donc fait qu'appliquer restrictivement une exception d'origine jurisprudentielle.
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La décision attaquée ne restreint pas les droits de procédure des parties, mais au contraire les étend. Le changement de pratique pouvait donc intervenir sans avertissement. La recourante soutient certes que, se fiant à l'ancienne jurisprudence, elle a renoncé à déposer ses pièces pour infirmer celles qu'avait produites l'appelante. Elle n'en subit toutefois aucun préjudice, car les pièces qu'elle aurait versées n'auraient pu être prises en considération. La recourante ne saurait prétendre se mettre au bénéfice de la nouvelle jurisprudence de la Cour de justice. Elle n'avait en effet pas à réfuter un argument de l'appelante, mais à justifier le moyen qu'elle avait elle-même soulevé. Si elle disposait de pièces à cet effet, elle devait les produire en première instance.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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