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38. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 11 octobre 1985 dans la cause Schibler c. Conseil d'Etat du canton de Genève (recours de droit public) | |
Regeste |
Art. 45 BV; Wohnsitzpflicht der Beamten. | |
Sachverhalt | |
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Par arrêté du 25 juillet 1984, le Conseil d'Etat genevois a nommé Ulrich Schibler au poste de professeur ordinaire à plein temps auprès de la Faculté des sciences de l'Université, pour la période du 1er octobre 1984 au 30 septembre 1988.
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A la suite d'une absence de coordination administrative, la demande de dérogation de domicile formulée par Ulrich Schibler n'a pas été soumise au Conseil d'Etat lors de l'examen de sa nomination au poste de professeur ordinaire et, dans sa séance du 5 septembre 1984, cette autorité a refusé d'accorder à Ulrich Schibler la dérogation demandée, nonobstant le préavis favorable exprimé par le Rectorat de l'Université.
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Le 5 septembre 1984, Ulrich Schibler a signé le contrat relatif à la construction d'une villa sur le terrain qu'il avait acquis à Borex. Le 11 du même mois, il a notamment écrit au recteur de l'Université de Genève qu'il était heureux d'accepter le poste de professeur ordinaire, pour autant qu'il obtienne l'autorisation de résider en territoire vaudois.
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Le conseiller d'Etat chargé du Département de l'instruction publique ayant à nouveau saisi ses collègues du cas d'Ulrich Schibler, le Conseil d'Etat a rejeté la demande de dérogation à l'obligation de domicile et de résidence, par décision sommairement motivée du 24 octobre 1984. Il a retenu que l'intéressé avait été informé de l'obligation d'être domicilié dans le canton de Genève, en recevant le cahier des charges de l'enseignement qui lui était proposé. L'échange entre les parcelles de Belmont et Borex avait donc eu lieu ultérieurement à la prise de connaissance du cahier des charges. Compte tenu des circonstances, le Conseil d'Etat a fixé à Ulrich Schibler un délai de dix-huit mois pour trouver un domicile dans le canton de Genève.
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Le recourant a formé un recours de droit public contre cette décision pour violation des art. 4 et 45 Cst.
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Le Tribunal fédéral a admis le recours et annulé la décision du Conseil d'Etat genevois pour les
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motifs suivants: | |
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b) Aux termes de l'art. 121 de la loi genevoise sur l'instruction publique du 6 novembre 1940, les fonctionnaires ont l'obligation d'avoir leur domicile et de résider effectivement dans le canton de Genève. Le Conseil d'Etat peut en dispenser exceptionnellement les professeurs d'université qui, lors de leur engagement, donnent déjà un enseignement dans une autre université.
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La loi cantonale sur l'université du 26 mai 1973 ne prescrit pas aux professeurs ordinaires d'élire domicile dans le canton, mais ne contient pas non plus de règle qui permettrait de déroger à l'art. 121 de la loi sur l'instruction publique. Cette disposition est donc applicable aux professeurs de l'Université et constitue manifestement une base légale suffisante pour les obliger à habiter le canton, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par le recourant. Reste à examiner si les autres conditions permettant de porter atteinte à la liberté d'établissement sont réunies, en particulier l'exigence d'un intérêt public suffisant et la proportionnalité de l'atteinte.
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De son côté, le Conseil d'Etat souligne que si le canton de Genève représente un pôle d'attraction économique et sociale extrêmement fort que les structures à disposition ont quelque peine à absorber, il reste indispensable "de préserver un tissu social stable, dont le corps des fonctionnaires doit continuer à constituer une trame solide". En ce qui concerne le recourant, les grands mérites professionnels qui ont justifié sa nomination démontrent l'intérêt de l'Université et du canton tout entier à voir son nom associé à la collectivité genevoise.
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Ces principes posés par la jurisprudence demeurent toujours valables et s'appliquent dans le cas du canton de Genève pour reconnaître que l'Etat possède, d'une manière générale, un intérêt public à ce que ses fonctionnaires soient effectivement domiciliés sur son territoire. Toutefois, en l'espèce, l'intérêt public à ce que le recourant habite le canton de Genève n'apparaît pas aussi important que le prétend le Conseil d'Etat.
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c) La situation du recourant ne peut tout d'abord être comparée à celle d'un maître secondaire, au sujet duquel le Tribunal fédéral a estimé qu'il existait un intérêt public évident à ce qu'il se familiarise avec la manière de voir de la population et s'efforce de participer à la vie politique de la communauté dès lors que, par son activité pédagogique, il influence de façon importante la compréhension de ses élèves (ATF 108 Ia 251). Ces considérations ne peuvent être reprises pour un enseignant qui s'adresse à des étudiants provenant de milieux culturels les plus divers et dont l'activité sera essentiellement consacrée à la recherche.
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La comparaison avec la situation du professeur de la Haute école commerciale de Saint-Gall (ATF 106 Ia 28 ss) ne résiste pas non plus à l'examen. Dans cette affaire, le Tribunal fédéral a mis l'accent sur le fait que le canton de Saint-Gall offrait une grande liberté dans le choix de la résidence du professeur, ce qui n'est précisément pas le cas du canton de Genève, où l'on ne saurait nier que la situation du marché du logement est tendue. De plus, le professeur de Saint-Gall n'avait pas l'intention, comme le recourant, d'habiter dans un lieu situé à la périphérie du canton, proche de la Haute école, mais à Uitikon (Zurich).
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En ce qui concerne l'intérêt public, il importe encore de souligner que, selon la liste des professeurs ordinaires figurant dans le programme des cours de l'Université de Genève pour l'année académique 1985-1986, trente-neuf professeurs ordinaires sont domiciliés hors du canton, la plupart dans la région vaudoise de La Côte ou en France voisine. Une telle situation ne peut pas s'expliquer uniquement par le fait que le Conseil d'Etat n'avait plus exigé, de 1964 à 1976, que les membres du corps enseignant se soumettent à l'obligation de domicile et de résidence. Elle doit aussi être considérée comme une particularité du canton de Genève qui offre un nombre de places de travail très élevés par rapport aux possibilités d'accueil sur son territoire. Au vu du nombre de professeurs ordinaires habitant au-delà des frontières cantonales, il paraît à tout le moins difficile de prétendre, comme dans l'arrêt Nievergelt (ATF 106 Ia 32 consid. 2b), que l'intérêt d'un professeur pour l'administration de l'Université est moins grand lorsque le centre de ses intérêts vitaux se trouve ailleurs.
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d) Le Conseil d'Etat se réfère aussi au texte de l'art. 121 de la loi sur l'instruction publique du 6 novembre 1940 qui, à son avis, aurait permis, à lui seul, de refuser la dérogation sollicitée par le recourant. Cette interprétation ne peut être suivie dans la mesure où le principe de la proportionnalité commande que le droit cantonal autorise des exceptions à l'obligation générale de résidence ![]() | 21 |
En l'espèce, le recourant n'aurait, selon toute vraisemblance, pas pu trouver dans le canton de Genève une maison pour loger sa famille aux conditions qu'il a obtenues à Borex. Son intérêt privé à pouvoir conserver son domicile dans le canton de Vaud l'emporte donc manifestement sur l'intérêt public à l'obligation de résidence qui, comme on l'a vu, est très restreint dans le cas d'un professeur à l'Université domicilié à 25 km seulement de son lieu de travail. Il en résulte que la décision attaquée viole le principe de la proportionnalité, dans la mesure où elle impose au recourant l'obligation prévue par l'art. 121 de la loi genevoise sur l'instruction publique sans avoir examiné si, au vu du cas particulier, la pesée des intérêts en présence justifiait une exception à la règle générale.
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