BGE 111 Ia 246 | |||
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42. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 10 juillet 1985 dans la cause Parti socialiste vaudois et consorts c. Conseil d'Etat du canton de Vaud (recours de droit public) | |
Regeste |
Art. 85 lit. a OG; Gewaltentrennung. | |
Sachverhalt | |
Le 23 février 1983, le Grand Conseil du canton de Vaud a adopté la loi sur la défense civile (en abrégé: LDC), qui a pour but d'organiser la défense civile sur le plan cantonal (art. 1er). L'art. 2 définit les tâches relevant de cette organisation en reprenant, dans un ordre à peine différent, l'énumération qui en est faite, à charge des cantons, dans le rapport du Conseil fédéral à l'Assemblée fédérale sur la politique de sécurité de la Suisse du 27 juin 1973 (FF 1973 II p. 105 ss).
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L'art. 3 LDC est ainsi libellé:
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"Il y a état de nécessité lorsque, en raison d'une guerre, d'une crise ou d'une catastrophe, la répartition ordinaire des compétences ne suffit plus pour que soient prises à temps les mesures exigées par les circonstances.
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Dans cette situation, le Conseil d'Etat dispose des pleins pouvoirs jusqu'à la prochaine réunion du Grand Conseil."
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L'art. 5 LDC complète l'art. 3 en précisant ce qui suit:
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Dès qu'un engagement paraît devoir dépasser sept jours, le Grand Conseil est convoqué au plus tôt, en session extraordinaire. Il prend alors les mesures commandées par les circonstances."
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Les autres dispositions de la loi formulent des règles concernant la préparation et la conduite de la défense civile, ainsi que les différents moyens et organes qui peuvent y être affectés.
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Le Parti socialiste vaudois, ainsi que trois citoyens vaudois, ont formé un recours de droit public contre les art. 3 et 5 LDC, en concluant à l'annulation de ces dispositions légales.
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Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
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Extrait des considérants: | |
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La jurisprudence et la plus grande partie de la doctrine considèrent que, même en l'absence de règles constitutionnelles, un droit de nécessité est admissible, lorsque l'Etat ou des intérêts publics fondamentaux sont menacés par des dangers qui ne peuvent être combattus que par des mesures extraordinaires (ATF 103 Ia 311 /312 consid. 3a; GRISEL, Traité de droit administratif, vol. I p. 86/87; HANGARTNER, Grundzüge des schweizerischen Staatsrechts, vol. I p. 38, HÄFELIN/HALLER, Schweizerisches Bundesstaatsrecht, p. 281, AUBERT, Traité de droit constitutionnel, vol. 2, Nos 1547 et 1772).
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Le recours est fondé sur la violation de plusieurs droits constitutionnels à laquelle s'ajoute le grief de violation des droits politiques. Il s'agit toutefois de déterminer en premier lieu si les normes dont l'annulation est requise peuvent avoir leur base constitutionnelle dans le pouvoir général de police défini par la jurisprudence (ATF 106 Ia 60 ss, ATF 103 Ia 312, ATF 100 Ia 146 consid. 4a et les références citées). En cas de réponse affirmative à cette question, les normes attaquées échapperaient aux critiques que les recourants tirent de leurs droits fondamentaux et de leurs droits politiques.
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Les compétences reconnues au Conseil d'Etat dans les dispositions critiquées s'inscrivent par conséquent à l'intérieur des limites assignées par la jurisprudence au pouvoir général de police. Il faut ainsi que les mesures à prendre se justifient par la gravité et l'imminence du danger qui menace les biens à protéger et que les moyens légaux ordinaires ne suffisent pas à prévenir ou à supprimer ce danger (ATF 106 Ia 60 ss, ATF 100 Ia 146). Il faut aussi que ces mesures respectent les principes généraux du droit constitutionnel et administratif, en particulier celui de la proportionnalité, et qu'elles procèdent d'une pesée sérieuse et objective des intérêts en présence (ATF 100 Ia 146, ATF 103 Ia 312 à 315).
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Au reste, si le Conseil d'Etat violait sans nécessité absolue les libertés individuelles garanties par la Constitution fédérale, les particuliers pourraient s'adresser en tout temps au Tribunal fédéral par la voie du recours de droit public, pour autant que les conditions posées par les art. 84 ss OJ soient réunies.
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b) Les recourants insistent précisément sur le fait que l'art. 3 al. 2 LDC confie les "pleins pouvoirs" au Conseil d'Etat. L'obligation de respecter le principe de la proportionnalité interdit toutefois d'attribuer à ces termes une portée plus grande que ne l'autorisent les limites posées par la jurisprudence au pouvoir général de police. Au demeurant, l'al. 1 de l'art. 3 LDC - qui n'évoque une dérogation à la répartition ordinaire des compétences que pour permettre que soient "prises à temps les mesures exigées par les circonstances" - constitue un rappel du principe de la proportionnalité en excluant implicitement toute interprétation extensive ou abusive de la notion de pleins pouvoirs évoquée au second alinéa.
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c) L'art. 5 al. 1 LDC impose au Conseil d'Etat d'adresser dans les meilleurs délais au Grand Conseil, après la constatation de l'état de nécessité, un rapport détaillé sur l'usage fait de ses pouvoirs. L'art. 5 al. 2 LDC n'exige une convocation de cette dernière autorité en session extraordinaire que si l'engagement des moyens de défense autorisé par l'état de nécessité paraît devoir dépasser sept jours.
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Les recourants voient dans cette réglementation un report injustifié de la remise en vigueur du principe de la séparation des pouvoirs.
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La fixation dans le texte légal d'un délai de sept jours n'est guère heureuse. Peut-être eût-il mieux valu que le législateur utilise une expression qui permette plus de souplesse dans la convocation du Grand Conseil. La teneur de l'art. 5 al. 2 LDC oblige cependant le Conseil d'Etat à faire preuve d'une grande diligence dans son appréciation. La règle de la proportionnalité postule en outre que le gouvernement évalue avec rigueur l'évolution prévisible de la situation constituant l'état de nécessité et décide sans retard de convoquer le Grand Conseil.
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d) La règle posée à l'art. 5 al. 1, selon laquelle le Conseil d'Etat "prononce l'état de nécessité", puis la fin de l'engagement des moyens de défense ordonné pour faire face à cette situation, n'est pas critiquable. L'existence d'un danger grave, direct et imminent, est la condition pour que le Conseil d'Etat puisse exercer les pouvoirs qui lui sont reconnus par la loi critiquée et les dispositions prises perdent leur validité dès la fin de l'état de chose qui les a provoquées (ATF 95 I 34). Constater les faits déterminants et en exprimer la conséquence n'ont pas d'autre effet que de préciser les obligations de l'autorité en la matière. La sécurité juridique ne peut qu'en être renforcée.
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