BGE 101 Ib 422 | |||
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71. Arrêt du 19 septembre 1975 en la cause Société anonyme S. contre Commission fédérale des banques. | |
Regeste |
Anlagefonds. Verletzung der Treuepflicht. |
2. Der Hauptaktionär der Leitungsgesellschaft, der fast sämtliche Anteilscheine zu den Ausgabepreisen zeichnet und sie dann im Publikum zu einem höheren Preis unterbringt, verletzt den allgemeinen Grundsatz von Treu und Glauben im Geschäftsverkehr und die besondere Regel des Art. 14 Abs. 1 AFG, wenn er nicht dafür sorgt, dass jedes Missverständnis über die wirklichen Bedingungen des vorgeschlagenen Vertrags auf seiten der Käufer vermieden wird (Erw. 3 und 4). |
3. Wieweit kann die Leitungsgesellschaft für das unlautere Verhalten ihres Hauptaktionärs verantwortlich gemacht werden? (Erw. 5). |
4. Art. 43 und 44 AFG: Ist nach den Umständen anzunehmen, dass das Vertrauen wiederhergestellt werden kann, und würde durch den Entzug der Bewilligung zur Tätigkeit als Fondsleitung oder als Depotbank voraussichtlich den Anlegern ein bedeutender Schaden zugefügt, so ist nicht Art. 44 Abs. 1 AFG anzuwenden, sondern sind die in Art. 43 AFG vorgesehenen Massnahmen zu treffen (Erw. 6). | |
Sachverhalt | |
1 | |
X. dirige à Genève un bureau d'études économiques et financières dénommé B., qu'il a fait inscrire au registre du commerce sous sa raison individuelle. Il détient 970 des 1375 actions de la société S. Son frère, qui est également actionnaire, est administrateur de la société et secrétaire de son conseil d'administration. X. en revanche ne fait pas partie de ce conseil et n'est pas inscrit au registre du commerce comme fondé de procuration de la société S.
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En 1973, le secrétariat de la Commission fédérale des banques (CFB) a informé la société S. et X. qu'il entreprenait une enquête sur les méthodes et les modalités de distribution des parts P. Il a exigé de X. qu'il lui fournisse certains renseignements (cf. RO 99 Ib 415 ss).
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A la suite de cette enquête, la CFB a constaté que de décembre 1971 à novembre 1972, X. avait souscrit la quasi-totalité des parts émises par le fonds de placement P., puis les avait placées dans le public à un prix supérieur au prix d'émission.
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Le 16 septembre 1974, la Chambre pour les fonds de placement de la CFB a décidé de retirer à la société S. l'autorisation de gérer les fonds de placement P. et S. Elle lui reproche d'avoir toléré des actes qui constituent, de la part de son actionnaire majoritaire, une violation grave des dispositions légales concernant le calcul du prix d'émission et du devoir de loyauté auquel il était astreint, qu'il ait agi comme organe ou représentant de la société S., ou comme personne proche de la direction au sens de l'art. 14 al. 4 de la loi fédérale sur les fonds de placement, du 1er juillet 1966 (LFP).
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La société S. a formé un recours de droit administratif contre cette décision.
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Considérant en droit: | |
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a) Selon l'art. 8 LFP, le contrat qui lie le porteur de parts et la direction du fonds de placement est, d'après son but, un contrat de placement collectif et, d'après sa nature, un mandat (voir le Message du Conseil fédéral, du 23 novembre 1965, FF 1965 III p. 299). Il constitue un contrat de mandat individuel avec prestation supra-individuelle du mandataire. La direction du fonds n'administre pas séparément les différentes sommes qui lui sont confiées par les porteurs de parts. Elle exécute en même temps et par une seule opération toutes les obligations qu'elle a contractées à l'égard de ceux-ci (cf. PETER JÄGGI, La loi sur les fonds de placement, JdT 1967 I p. 234/5). Le contrat de placement collectif est, pour le porteur de parts, un pur contrat d'adhésion. Mais la direction du fonds ne peut en fixer le contenu librement. Elle est liée à cet égard par le règlement du fonds. Elle doit accepter tous les porteurs de parts aux mêmes conditions. "Le but même du fonds de placement et la loyauté dans les affaires sont ici en jeu. Le contrat de placement collectif est donc rigoureusement standardisé. Seul le nombre des parts à souscrire peut être stipulé individuellement dans chaque cas" (PETER JÄGGI, op.cit., p. 235).
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b) Le règlement du fonds, établi par la direction avec l'accord de la banque dépositaire et approuvé par l'autorité de surveillance (art. 9 al. 1 LFP), détermine de manière impérative et uniforme les droits et les obligations de la direction à l'égard de tous les porteurs de parts. En particulier, selon l'art. 11 lettres c et e LFP, "le règlement doit contenir des dispositions sur le calcul du prix d'émission et de rachat des parts et sur la nature et le calcul de toutes les rémunérations de la direction et de la banque dépositaire, y compris les commissions d'émission et de rachat, ainsi que les frais spéciaux dont le fonds peut être débité". Lors de la conclusion de chaque contrat de placement collectif, la direction doit fixer le prix d'émission à payer par le souscripteur en se conformant aux dispositions du règlement et de la loi, soit notamment de l'art. 12 LFP qui est de nature impérative (art. 8 al. 4 LFP; RO 95 I 488 consid. 5). Elle ne peut percevoir une commission d'émission supérieure à celle qui est fixée dans le règlement du fonds. En outre, la loyauté dans les affaires exige que la direction fixe un prix d'émission identique pour tous les preneurs de parts et qu'elle s'abstienne ainsi de favoriser certains souscripteurs au détriment des autres: "pour n'être pas exprimé par le texte légal, le principe de l'égalité des porteurs n'en appartient pas moins au système de la loi. Il serait inadmissible, par exemple, qu'une direction à court de liquidités émette des certificats à un prix inférieur à la valeur d'inventaire, ou qu'elle accorde à certains porteurs des avantages particuliers aux dépens des autres" (voir RAYMOND JEANPRÊTRE, Le contrat de placement collectif dans le système du droit des obligations, in Festgabe für Wilhelm Schönenberger, 1968, p. 290/1).
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c) En l'espèce, le règlement du fonds de placement immobilier P. a été approuvé le 29 avril 1969 par la CFB et publié peu après dans la Feuille officielle suisse du commerce; selon l'art. 16 ch. 1 et 6, les indemnités versées à la direction du fonds au titre de commission d'émission et de rachat étaient fixées respectivement à un maximum de 5 1/2% et à 3%. Par jugement du 1er décembre 1972, le Tribunal de première instance de Genève a modifié ces dispositions réglementaires, en portant à un maximum de 7 1/2% la commission d'émission et en réduisant à 1% la commission de rachat. La recourante a fait imprimer le texte du règlement avec ces deux modifications, mais sous l'en-tête de la Feuille officielle suisse du commerce du ... 1969 et sans préciser que les nouveaux taux, relatifs aux commissions d'émission et de rachat, n'étaient applicables qu'à partir du 1er décembre 1972. Toutefois, bien que la date de l'impression de ce règlement ne figure pas sur ce document, il ne semble pas que le public ait pu être trompé sur cette question du taux de la commission d'émission ou de rachat; la CFB n'a d'ailleurs jamais fait état de plaintes à ce sujet.
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Par ailleurs, il résulte clairement des décomptes établis par la banque dépositaire au sujet des émissions de parts P. au cours de la période sur laquelle a porté l'enquête de la Commission que la direction du fonds n'a pas prélevé des commissions d'émission supérieures aux taux maximums autorisés par l'art. 16 du règlement en vigueur jusqu'au 30 novembre 1972. Aucune irrégularité n'a été établie à la charge de la recourante à cet égard; la CFB ne lui a d'ailleurs adressé aucun reproche sur ce point.
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Enfin, la CFB n'a pas prétendu que des souscripteurs privés auraient payé un prix d'émission supérieur à celui qu'acquittaient X. ou B. La décision de retirer à la société S. l'autorisation de gérer les fonds P. et S. n'est d'ailleurs pas fondée sur des irrégularités commises dans la procédure formelle d'émission des parts P. La CFB n'a pas non plus retenu à la charge de la recourante les observations qui ont été faites au sujet du rapport de gestion de la société S. au 30 septembre 1973. Il n'y a donc pas lieu d'examiner si, dans cette affaire où se posaient des questions purement techniques de gestion et de comptabilisation et qui a été liquidée, la recourante a pu commettre des irrégularités, en violation de ses obligations contractuelles ou légales.
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3. La CFB fonde sa décision de retrait d'autorisation essentiellement sur les agissements de X. qui, selon elle, se serait substitué à la direction du fonds dans la procédure d'émission publique des parts P. Il convient de se prononcer tout d'abord sur la réalité des faits que l'autorité de surveillance lui reproche.
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a) Selon les décomptes que la Caisse hypothécaire du canton de Genève a établis en sa qualité de banque dépositaire, X. a souscrit lui-même (sous sa raison individuelle B.) le 99,4% des parts P. émises pendant l'exercice 1971-72 et le 93,4% des parts émises au cours de l'exercice 1972-73. Ces chiffres n'ont pas été contestés. La CFB pouvait ainsi constater que "X. a souscrit quasiment la totalité des parts P. émises", précisant en outre qu'"à part la souscription, il s'est procuré des part en les achetant chez les banques". C'est à tort que X. lui reproche à ce sujet une "affirmation tendancieuse". Le fait qu'il a souscrit seulement 3365 parts P. au cours de l'année 1973 est à cet égard sans pertinence.
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b) Jusqu'en 1974, les bureaux de la société S. et du bureau financier de X. se trouvaient tous deux au No 114 de la rue Y. à Genève, à des étages différents; mais ils avaient les mêmes numéros de téléphone. X. a ouvert, au No 2, route F. à Genève, un bureau qu'il considérait comme une annexe de son bureau financier et dont il confia la direction à un tiers. Celui-ci recruta un certain nombre de courtiers, rémunérés uniquement à la commission et chargés de recueillir dans le public, en Suisse et à l'étranger, les commandes de parts P. pour le compte du bureau financier de X. Chaque commande était inscrite sur un bon de commande, signé par le client, selon une formule que X. avait fait imprimer et sur laquelle figurent notamment les mentions suivantes:
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"Bureau d'études financières
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B.
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114, rue Y.
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Genève
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Bon de commande No 0000
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Veuillez, s.v.p. me/nous procurer
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PARTS au prix d'émission de SFrs par part, pour un total
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de SFrs ."
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Sur un certain nombre de ces bons figure aussi, apposée par un timbre humide, la mention suivante:
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"Je désire réinvestir mes coupons en parts P. avec une réduction de 5%
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En outre, dès la fin du mois de juin 1972, la mention suivante a été apposée par un timbre humide sur environ les 4/5 de ces bons de commande:
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"P.
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Service d'information
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2, route de F.
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1206 Genève"
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En revanche, la lettre d'envoi des parts P. mentionnait dans la grande majorité des cas qu'il s'agissait d'un "achat"; de même, la quittance que le client signait précisait "selon achat du..."
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c) Le secrétariat de la CFB a procédé à un contrôle détaillé de ces bons de commande, en comparant dans chaque cas le "prix d'émission" payé par le client au prix officiel d'émission de la part P. en vigueur au moment de la commande. Il a constaté que X., au cours des mois d'octobre 1971 à fin décembre 1972, a placé dans le public un certain nombre de parts P. à un prix inférieur ou égal au prix officiel d'émission; il n'a pas tenu compte de ces bons de commande dans la procédure d'enquête. En revanche, retenant les cas dans lesquels les clients ont payé visiblement plus que le prix officiel d'émission en vigueur au moment de la commande, le secrétariat de la Commission a constaté que, pour les mois de décembre 1971 à fin novembre 1972, X. a encaissé de ses clients un montant total de 39'190'734 fr.s. pour 28'160 parts P. qu'il a dû souscrire au prix officiel en payant 37'076'370,50 fr.s. La CFB en conclut qu'"il a donc été demandé aux acheteurs de ces parts un surplus d'environ 2 millions de francs par rapport au prix officiel".
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La recourante et X. reprochent à la CFB et à son secrétariat d'avoir abrégé de trois mois (octobre et novembre 1971, décembre 1972) la période sur laquelle portait l'enquête, commettant ainsi "une grave altération des données matérielles de l'enquête"; ils les accusent aussi d'avoir établi des calculs et des chiffres qui "sont faux" et "engageraient gravement la responsabilité individuelle et collective de la CFB s'ils étaient pris comme base d'une décision".
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Ces critiques sont dénuées de fondement. La question litigieuse étant celle de savoir si X. avait placé dans le public des parts souscrites à un prix supérieur au prix d'émission, il était parfaitement logique de ne retenir que les cas où les clients avaient payé plus que le prix d'émission. Il était par ailleurs inutile en l'espèce de rechercher si X. a finalement réalisé un bénéfice ou s'il a subi une perte.
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C'est également en vain que la société anonyme S. et X. tentent de remettre en question les chiffres qui ont été retenus comme prix officiels (bruts) d'émission en vigueur pendant les mois d'octobre 1971 à fin décembre 1972. Le tableau indiquant les prix d'émission et établi par le secrétariat de la CFB a été soumis à la recourante qui, par lettre du 26 novembre 1973, en a approuvé le contenu. La société anonyme S. a par ailleurs elle-même indiqué les prix valables pour les mois de novembre 1971, novembre et décembre 1972; ces chiffres furent confirmés par la banque dépositaire. Ce sont eux que la CFB a finalement retenus. Dès lors, le reproche d'"incompétence (sinon de malveillance)" que X. a adressé au secrétariat de la Commission est non seulement dénué de tout fondement, mais aussi contraire aux règles de la bonne foi: selon l'art. 12 al. 1 LFP, c'est la direction du fonds qui "décide ... des prix d'émission", conformément aux dispositions légales et réglementaires. L'autorité de surveillance n'avait donc aucune raison de "rectifier" les prix d'émission établis par la société anonyme S. et confirmés par la banque dépositaire. En outre, dans le calcul du prix officiel d'émission des parts, il n'y a évidemment pas lieu de faire intervenir une commission de courtage, qui n'est pas prévue à l'art. 16 du règlement du fonds.
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d) Il faut ainsi admettre, en fait, que X., agissant sous sa raison individuelle B. a souscrit la quasi-totalité des parts P. émises au cours des mois de décembre 1971 à fin novembre 1972 ou, tout au moins, la grande majorité des parts P. émises durant les exercices 1971-72 et 1972-73; en outre, il s'est procuré un certain nombre de parts déjà émises, en les rachetant à des banques ou à des particuliers et en payant un prix qui, généralement, était inférieur au prix officiel d'émission jusqu'en mars 1972 et légèrement supérieur à celui-ci dès avril 1972. X. a placé ces parts dans le public, parfois à un prix inférieur, mais, dans la grande majorité des cas, à un prix supérieur au prix officiel d'émission.
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4. Il convient dès lors d'examiner si la direction du fonds (ou une personne dont cette dernière doit répondre), qui réalise cette double opération de souscription des parts et de leur placement dans le public à un prix supérieur au prix officiel d'émission, viole de ce fait ses obligations légales ou contractuelles (art. 43 et 44 LFP).
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a) La législation suisse ne contient aucune règle particulière relative au contrat de "seconde main" (ou "hors bourse") par lequel un porteur cède la propriété de ses parts contre paiement d'un certain prix: juridiquement, il s'agit d'une vente qui porte sur des certificats de parts déjà émis (et normalement déjà mis en circulation dans le public), soit sur des papiers-valeurs au porteur ou à ordre (art. 20 al. 2 LFP; BRUNO GEIGER, Der zivilrechtliche Schutz des Anlegers, thèse Zurich 1971, p. 138 ss) destinés à circuler librement. Selon la doctrine, "le transfert du certificat s'opère conformément au droit commun (art. 967 et 968 CO). La loi spéciale n'y déroge sur aucun point" (RAYMOND JEANPRÊTRE, op.cit., p. 297). Il en résulte que le prix de vente, dans le cadre de ce "marché hors bourse", est fixé librement par les parties selon la loi de l'offre et de la demande. Il découle aussi du principe de la liberté contractuelle que la direction et la banque dépositaire peuvent être parties (en tant qu'acheteur ou vendeur) au contrat de vente de parts du fonds qu'elles administrent; elles sont également en droit de souscrire pour leur propre compte des parts de ce fonds (voir RAYMOND JEANPRÊTRE, op.cit., p. 291). Selon la jurisprudence, une société de direction peut acquérir à son profit des parts du fonds qu'elle dirige, pour autant toutefois qu'elle dispose de fonds propres dans les proportions minimales fixées aux art. 3 al. 3, 4 al. 1 LFP et 7 de l'ordonnance d'exécution (RO 98 Ib 48, consid. 4). Au surplus, en leur imposant l'obligation de gérer le fonds exclusivement dans l'intérêt des porteurs de parts, l'art. 14 al. 1 LFP n'interdit pas, en principe, aux directions et aux banques dépositaires d'acquérir, puis de revendre au public des parts des fonds qu'elles administrent (RO 100 Ib 218 consid. 5; cf. aussi GUNTER MÜLLER, Die Rechtsstellung der Depotbank im Investmentgeschäft nach deutschem und schweizerischem Recht, thèse Genève 1969, p. 99 et 100; ALAIN HIRSCH, Note sur l'arrêt publié au RO 95 I 485 ss, JdT 1970 I p. 253 in fine). Dans sa décision, la CFB a d'ailleurs expressément rappelé ce principe; et c'est aussi dans ce sens que le secrétariat de la Commission avait répondu à X., venu se renseigner sur la possibilité d'organiser un marché hors bourse des parts P. Selon une note établie le 1er décembre 1971 par le secrétaire général de la Caisse hypothécaire du canton de Genève, X. aurait posé "la question de savoir si l'émission projetée par le fonds en ce sens que la totalité de l'émission sera prise ferme par le bureau B. en rapport très étroit avec la direction du fonds était valable ou non" et le secrétaire de la Commission "a répondu comme suit: la Commission fédérale des banques ne peut pas s'opposer à une telle émission ... Par contre, le critère de base que la Commission fédérale des banques applique est qu'en aucun cas la direction du fonds ou des organismes très proches de ladite direction, comme la régie B. dans le cas particulier, ne peut bénéficier de faveurs quant au prix d'émission. Ce dernier doit être calculé selon les mêmes critères qui seraient appliqués à n'importe quel autre souscripteur de parts". L'égalité de traitement, admise en doctrine comme l'un des principes fondamentaux de la LFP, interdit à la direction et aux personnes qui lui sont proches de bénéficier de faveurs quant au prix d'émission. Le même principe paraît également s'opposer à ce que ces personnes se réservent le monopole de la souscription des parts. La création d'un tel monopole semble d'ailleurs contraire à la notion d'appel au public. Selon le rapporteur de la commission du Conseil national, "il faut un appel au public. La souscription doit donc être libre" (voir Bull.stén. CN 1966 p. 245). La question peut cependant rester ouverte en l'espèce, car la CFB ne reproche pas ä S. S.A. ou à X. d'avoir empêché des tiers de souscrire de nouvelles parts P.
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Il faut donc admettre qu'en principe tout au moins, la société S. aurait pu, sans violer ses obligations contractuelles ou légales, souscrire elle-même des parts P. (au prix officiel d'émission) ou acheter des certificats déjà émis, pour revendre ces titres au public à un prix librement fixé selon la loi de l'offre et de la demande; rien ne s'opposait donc, en principe, à ce qu'elle laisse X. réaliser ce marché pour son propre compte.
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b) Lorsqu'elles s'adressent au public pour obtenir des commandes de parts, la direction d'un fonds de placement et les personnes dont elle doit répondre assument, à l'égard des épargnants qu'elles sollicitent, une certaine obligation d'information qui, selon les circonstances, peut résulter déjà du principe général de la bonne foi (ou de la loyauté en affaires) au sens de l'art. 2 CC, mais qui se trouve précisée et renforcée dans le cadre particulier de la LFP (et notamment de l'art. 14 al. 1 LFP).
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Selon la jurisprudence, en vertu des règles de la bonne foi, chacun des contractants assume, dès le moment où il entame des pourparlers, l'obligation de renseigner son partenaire, dans une certaine mesure, sur les circonstances propres à influencer sa décision de conclure le contrat et de le conclure à certaines conditions. Une partie qui ne respecte pas cette obligation répond de ce chef non seulement lorsque au cours des pourparlers, elle a agi astucieusement, mais déjà lorsque son attitude a été de quelque manière fautive, qu'il s'agisse de dol ou de négligence, dans les limites tout au moins de la responsabilité qu'elle encourt sous l'empire du contrat envisagé par les parties (RO 90 II 455 consid. 4 et les arrêts cités; 77 II 137; cf. également WALTER YUNG, Devoirs généraux et obligations, Festgabe für Wilhelm Schönenberger, p. 171). Il n'existe pas, en revanche, un devoir général de renseigner son partenaire sur tous les éléments essentiels du contrat (RO 92 II 334 consid. 3b; voir aussi HANS MERZ, n. 270 ss ad art. 2 CC); mais chacun a le devoir (négatif) de ne pas donner de faux renseignements et d'éviter de créer un vice de consentement chez son partenaire, par inadvertance, laisser-aller ou ambiguïté (voir PIERRE ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, p. 135). En particulier, "eine besondere Aufklärungspflicht trifft denjenigen, der eine zweideutige Rechtslage geschaffen hat. Er ist verpflichtet, auf die Unklarheit und auf seine Deutung aufmerksam zu machen, wenn er nicht den Anspruch auf deren Durchsetzung verwirken will" (HANS MERZ, n. 275 ad art. 2 CC; voir aussi RO 83 II 149/50)...
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A l'égard de la direction d'un fonds de placement et des personnes dont elle doit répondre, cette obligation de renseigner leurs partenaires (c'est-à-dire les épargnants) est renforcée par le devoir strict de loyauté que leur impose la règle impérative de l'art. 14 LFP. Dans le Message du 23 novembre 1965, le Conseil fédéral avait déjà, dans ce sens, insisté sur l'importance de l'information: "S'il faut garantir à la direction du fonds sa liberté d'action, il importe, en contrepartie, d'attacher la plus grande importance à ce que le porteur de parts soit pleinement informé... Le fonds de placement ne doit pas avoir de secrets pour le porteur de parts". (FF 1965 III p. 290.) Il est vrai qu'il entendait ainsi se référer principalement aux règles des art. 15 et 22 LFP, mais cela n'exclut pas la possibilité d'en conclure que, dans son esprit, les acquéreurs de parts (et non pas seulement les porteurs au sens étroit du terme) doivent être pleinement renseignés. En particulier, celui qui désire participer à un fonds de placement doit savoir s'il souscrit des parts nouvelles ou s'il achète des certificats déjà émis: dans le premier cas, il aura à payer le prix officiel d'émission alors que, dans le second cas, il paiera un prix fixé librement selon la loi de l'offre et de la demande dans le cadre d'un marché hors bourse. Dans le même sens, le Tribunal fédéral a d'ailleurs précisé que les parts d'un porteur qui a fait usage de son droit de dénonciation selon l'art. 21 LFP ne peuvent pas, à son insu, être rachetées par la direction ou par la banque dépositaire pour leur propre compte, au lieu d'être remboursées à la charge du fonds de placement (RO 100 Ib 219).
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c) X. est le principal actionnaire de la société S. En vertu de l'art. 14 al. 4 LFP, il est donc soumis, en tant que membre de la société de direction, au même devoir de loyauté que la direction de fonds ou la banque dépositaire (art. 14 al. 1 à 3; voir, dans ce sens, J. B. SCHUSTER, Anlagefondsgesetz, 2e éd., n. 3 ad art. 14 al. 4). Se substituant à l'une ou l'autre de celles-ci pour organiser à son propre compte un appel au public, il reprenait à sa charge l'obligation de loyauté (Treuepflicht) que leur impose l'art. 14 al. 1 LFP; il devait dès lors agir dans l'intérêt exclusif des porteurs de parts. X. ne pouvait d'ailleurs pas l'ignorer car, en novembre 1971, le secrétariat de la CFB avait déjà attiré son attention (comme aussi celle de la société S. et de la Caisse hypothécaire du canton de Genève) sur le fait "qu'en aucun cas la direction du fonds ou des organismes très proches de ladite direction, comme la régie B. dans le cas particulier, ne peut bénéficier de faveurs quant au prix d'émission". Dès lors, le reproche que la recourante adresse au secrétariat de la Commission, coupable selon elle d'avoir induit X. en erreur sur les conditions dans lesquelles il pouvait organiser un marché hors bourse, apparaît dénué de tout fondement et à la limite de la bonne foi. En outre, c'est en vain que la société S. invoque l'intérêt que les porteurs de parts avaient à c que X. organisât un marché hors bourse des parts P. car son actionnaire principal avait, le tout premier, un intérêt personnel à obtenir le développement du fonds.
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X. pouvait organiser un marché hors bourse des parts P.; la CFB ne lui reproche pas de l'avoir fait. Mais en raison des circonstances, selon le principe général de la loyauté en affaires et la règle particulière de l'art. 14 al. 1 LFP, il devait prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter de créer une confusion dans l'esprit des acheteurs; en particulier, il devait veiller à ce que ses démarcheurs donnent aux personnes qu'ils visitaient des renseignements complets sur les conditions réelles du contrat proposé; de plus, avant de conclure ce contrat, chaque acheteur aurait dû normalement être informé de la possibilité qu'il avait de souscrire ses parts directement auprès de la direction du fonds ou de la banque dépositaire en payant le prix officiel d'émission. X. n'a jamais déclaré avoir pris de telles mesures. Au contraire, il a lui-même créé une situation juridique pour le moins ambiguë, sinon trompeuse, en faisant signer des bons de commande sur lesquels il avait fait imprimer la mention "prix d'émission" ("Ausgabepreis", "prezzo d'emissione" ou "issuing price"), alors que le prix fixé était, dans la très grande majorité des cas, supérieur à celui-ci. Selon une règle admise en jurisprudence et en doctrine (RO 77 II 136/37; cf. également HANS MERZ, n. 275 ad art. 2 CC), qu'il ait agi astucieusement ou par négligence importe peu. Il ne pouvait pas encaisser un prix supérieur au prix officiel d'émission sans en avoir préalablement informé chacun de ses acheteurs. Ne l'ayant pas fait, il a gravement violé son devoir de loyauté à l'égard des épargnants qu'il sollicitait et tous les arguments que la recourante fait valoir pour tenter de justifier ces agissements sont dénués de pertinence. En particulier, il n'est pas sérieux de soutenir que la mention "prix d'émission" imprimée sur tous les bons de commande (selon les instructions de X., soit d'un financier parfaitement au courant de la signification des termes employés dans le marché des papiers-valeurs) était une "expression, impropre et regrettable" et que "dans l'usage courant prix d'émission est souvent dit pour prix de vente". De plus, le fait que les lettres de livraison des parts et les reçus signés faisaient référence à des achats n'est en soi pas décisif; ces documents, postérieurs à la signature des bons de commande, ne permettaient pas aux acquéreurs de découvrir qu'ils avaient en réalité payé un prix supérieur au prix d'émission. A cela s'ajoute encore le fait que dès le mois de juillet 1972, la grande majorité des bons de commande portait la mention "P., Service d'information", donnant à B. l'apparence d'être un organisme officiel du fonds de placement P.: les acheteurs n'avaient ainsi aucune raison de mettre en doute la sincérité des renseignements qu'ils recevaient d'un service d'information du fonds lui-même.
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X. a ainsi gravement violé ses obligations contractuelles (ou précontractuelles) et légales à l'égard de tous les acquéreurs de parts P. auxquels il a réclamé le paiement d'un prix supérieur au prix d'émission. Pour l'autorité de surveillance, seul ce fait est décisif. Selon la jurisprudence, la CFB soit se soucier de la protection des droits des porteurs de parts. Il ne lui appartient pas en revanche de mener des procès civils ni de trancher des contestations de droit civil entre la direction du fonds - ou la banque dépositaire - et les porteurs de parts (RO 96 I 77 ss consid. 1; voir aussi RO 100 II 52 ss consid. 1). Elle n'avait donc pas le devoir de vérifier si le prix fixé par X. pouvait en fait correspondre à la valeur réelle des parts ou si, compte tenu des frais et des commissions versées aux démarcheurs, l'opération s'est finalement révélée, dans son ensemble, bénéficiaire ou déficitaire pour l'actionnaire majoritaire de la société recourante.
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a) Aux termes de l'art. 55 CC, "la volonté d'une personne morale s'exprime par ses organes. Ceux-ci obligent la personne morale par leurs actes juridiques et par tous autres faits". Or, selon la jurisprudence et contrairement à la thèse soutenue par la recourante, si l'on veut ne pas rendre illusoire la protection qu'institue l'art. 55 CC, on ne peut pas se borner à qualifier d'organe la personne ou le groupe de personnes auxquels, suivant l'espèce de personnes dont il s'agit, la loi confère cette qualité; mais encore faut-il qu'il s'agisse de personnes ou groupes de personnes qui, de par la situation qu'ils occupent dans l'affaire et les pouvoirs qui leur sont dévolus par les statuts ou les règles qui régissent l'organisation interne de l'affaire, participent effectivement et d'une façon décisive à la formation de la volonté sociale (RO 81 II 226/27; voir aussi PETER PORTMANN, Organ und Hilfsperson im Haftpflichtrecht, Berne 1958, p. 20 ss, 28). De même, en vertu de l'art. 718 al. 3 CO, la société anonyme répond des agissements non seulement des administrateurs et des directeurs, mais aussi de toutes les personnes qui, ayant la compétence de prendre des décisions indépendantes, participent à la gestion des affaires sociales ("die mit selbständig entscheidenden Kompetenzen an der Geschäftsführung teilnehmen"; voir E. SCHUCANY, Kommentar zum schweizerischen Aktienrecht, n. 4 ad art. 718 CO; WOLFHART BÜRGI, Die Aktiengesellschaft, n. 20 ad art. 718 CO; RO 65 II 6). Ainsi, après l'entrée en vigueur du Code civil, le Tribunal fédéral a estimé qu'il fallait, le cas échéant, ranger au nombre des organes aussi les personnes auxquelles les administrateurs de la société ou de l'association confiaient la direction effective de leur entreprise sous leur surveillance, par exemple le secrétaire d'une société coopérative dont les attributions s'étendaient à des parties importantes de la gestion. Le Tribunal a considéré comme un facteur décisif la collaboration du secrétaire avec l'organe supérieur de l'administration, notamment pour exprimer la volonté de la personne morale (RO 68 II 289/290 et les références citées).
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Il convient dès lors d'admettre que X. avait la qualité d'organe et qu'il pouvait ainsi engager la responsabilité de la société S. en vertu des art. 55 al. 2 CC et 718 al. 3 CO. Le fait qu'il n'a jamais fait officiellement partie du conseil d'administration n'est à cet égard nullement déterminant. En revanche, ce qui est décisif en l'espèce, c'est son comportement comme maître du fonds P. qu'il a lui-même créé. Jusqu'en 1973, année au cours de laquelle le secrétariat de la CFB a estimé devoir intervenir sur ce point, X. signait seul, comme "secrétaire" de la société S., la plupart des lettres engageant la direction dans la gestion du fonds; auprès de la banque dépositaire, il disposait de la signature individuelle pour les comptes de la société S. (P. et Sociétés immobilières de P.).
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b) Pour que la responsabilité de la personne morale soit engagée, il faut que l'organe ait agi comme tel. Le dommage doit ainsi être la conséquence d'opérations qui, vu la nature de l'organe, sont de sa compétence (RO 54 II 144 consid. 1; 55 II 27). En outre, la personne morale ne répond pas des actes faits par un organe lorsque celui-ci agit manifestement non pas pour elle, mais comme particulier (RO 68 II 98 consid. 3; voir aussi PETER PORTMANN, op.cit., p. 33 ss).
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Or, au moins dans tous les cas où il avait fait figurer sur les bons de commande la mention "P. Service d'information", X. n'agissait pas manifestement, au sens de cette jurisprudence, comme un particulier; son bureau B. apparaissait comme un organisme officiel du fonds P., de sorte que dans ces cas (les plus fréquents dès juillet 1972) la responsabilité de la société S. ne peut pas être exclue. Au surplus, en novembre 1971, il avait été annoncé au secrétariat de la CFB que l'opération prévue serait faite par X. "en étroite relation avec la direction du fonds"; dans ces conditions, les administrateurs de la société S. avaient le devoir de contrôler au moins l'organisation, voire la réalisation concrète de cette opération; en s'en abstenant, ils engageaient la responsabilité de la société de direction par leur négligence. D'ailleurs, le frère de X., comme fondé de pouvoir de B., ne pouvait pas ignorer les agissements déloyaux de X.; par sa complicité ou sa passivité, il a engagé la responsabilité de la société S. en sa qualité d'administrateur. Selon la jurisprudence, il suffit qu'un seul des membres d'un organe collectif ait eu connaissance des circonstances pour que la responsabilité de la société soit engagée (RO 56 II 188).
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c) On peut d'ailleurs se demander si la société de direction n'a pas à répondre objectivement des actes contraires à la loi, notamment au devoir de loyauté prévu à l'art. 14 al. 1 à 3 LFP, commis par une ou plusieurs des personnes ou sociétés visées à l'art. 14 al. 4 LFP. Il semblerait en effet choquant que la direction d'un fonds puisse impunément laisser ces personnes agir contrairement aux intérêts des porteurs de parts; dans son arrêt du 21 septembre 1973, le Tribunal fédéral n'a d'ailleurs pas exclu la responsabilité de la société S. (RO 99 Ib 420 consid. 2b in fine). La question peut toutefois rester ouverte en l'espèce.
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a) Selon l'art. 43 al. 1 LFP, l'autorité de surveillance prend les mesures nécessaires au rétablissement de l'ordre légal et contractuel et à la suppression des irrégularités, si elle constate que la loi ou le règlement ont été violés ou que d'autres irrégularités ont été commises. Par ailleurs, aux termes de l'art. 44 al. 1 LFP, cette même autorité retire à la direction ou à la banque dépositaire l'autorisation d'exercer son activité si les conditions de l'autorisation ne sont plus remplies ou si elle a violé gravement ses obligations légales ou contractuelles. Selon la jurisprudence, il y a là pour l'autorité de surveillance une obligation, et non pas une simple faculté (RO 99 Ia 513). Savoir s'il y a eu infraction grave est une question de droit, que le Tribunal fédéral revoit en principe librement.
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Dans son arrêt publié au RO 99 Ia 513, le Tribunal fédéral s'est demandé si, conformément au principe de la proportionnalité, il ne faut pas commencer par appliquer l'art. 43 al. 1 LFP avant de prendre la mesure extrême que constitue le retrait de l'autorisation. "Mais si les infractions commises sont graves au point que la direction ne paraît plus digne de confiance et qu'il en résulte des risques pour les porteurs de parts, le retrait immédiat se justifie, dans l'intérêt de ceux-ci. L'autorité de surveillance ne pourrait y renoncer que dans les cas où la direction a pris des mesures propres à rétablir pleinement la confiance (RO 96 I 480). Les art. 43 al. 1 et 44 al. 1 LFP ne s'excluent donc pas l'un l'autre".
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Tout le système de la LFP repose sur l'idée fondamentale que les porteurs de parts doivent être protégés. Il appartient à l'autorité de surveillance de veiller à ce que leurs intérêts soient sauvegardés. Il importe donc que la direction soit digne de confiance. En présence de violations de la loi ou du règlement, ou d'irrégularités, l'autorité de surveillance prend les mesures nécessaires au rétablissement de la confiance que les porteurs doivent pouvoir avoir en la direction. Si cette confiance ne peut être restaurée, ce qui est en règle générale le cas lorsqu'il y a violation grave des obligations légales ou contractuelles, l'autorisation d'exercer l'activité de direction doit être retirée. Par ailleurs, même si les irrégularités sont de nature à être redressées au profit des porteurs de parts et qu'elles l'ont été, la révocation de l'autorisation est admissible suivant les circonstances (RO 99 Ib 514).
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L'intérêt des porteurs de parts doit ainsi être pris en considération à un double point de vue. Il importe que ces porteurs puissent à l'avenir faire confiance à la direction. Il faut par ailleurs que la mesure prise n'ait pas pour effet de leur causer un préjudice plus important que celui qui résulte ou pourrait résulter des irrégularités constatées. Lorsque les circonstances du cas sont de nature à faire admettre que la confiance pourra être rétablie, l'application de l'art. 44 al. 1 LFP doit être écartée au profit des mesures prévues par l'art. 43 LFP, si le retrait de l'autorisation d'exercer l'activité de direction ou de banque dépositaire est de nature à causer aux porteurs un dommage important.
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b) X. a utilisé sa position dominante dans la société S. pour organiser, dans son intérêt personnel, une vaste opération d'appel au public qu'il a induit en erreur sur un point important. Il a donc gravement manqué à son devoir de loyauté à l'égard des acquéreurs de parts. Les administrateurs de la société de direction n'ont rien fait pour l'en empêcher. Dans la cadre de la présente procédure, la recourante a d'ailleurs repris à son compte de graves accusations formées à tort par X. contre la CFB et son secrétariat. Elle a ainsi gravement violé ses obligations légales et contractuelles.
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Il convient cependant de remarquer que les irrégularités commises ne paraissent pas avoir incité les porteurs de parts à intervenir auprès de la direction du fonds, de la banque dépositaire ou de la CFB. Par ailleurs, il n'est pas prétendu que la société S. ne serait pas à même d'assumer à l'avenir la direction du fonds sans que cela fasse courir des risques aux porteurs de parts. A la condition notamment que X. soit écarté de la gestion de la recourante, celle-ci pourrait encore être considérée comme étant digne de confiance, et l'on ne peut exclure que des mesures adéquates puissent être prises pour rétablir cette confiance.
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Il faut enfin et surtout prendre en considération le fait que le retrait de l'autorisation de gérer les fonds P. et S. serait de nature à causer un préjudice important aux porteurs de parts. Selon l'art. 45 al. 2 LFP, dans le délai d'une année, le gérant propose à l'autorité de surveillance de nommer une nouvelle direction ou de dissoudre le fonds de placement. Dans les conditions actuelles du marché immobilier, la dissolution d'un fonds aussi important que P. paraît probable, car il serait difficile sinon impossible au gérant de proposer, dans le délai précité, la nomination d'une nouvelle direction capable de reprendre dans de bonnes conditions la gestion du fonds. De ce fait, la mise en vente de nombreux immeubles provoquerait vraisemblablement, pour les porteurs de parts, la perte définitive d'une partie importante des capitaux investis.
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Au vu des circonstances, il convient donc d'écarter in casu l'application de l'art. 44 LFP et de prendre les mesures prévues par l'art. 43 LFP. C'est en ce sens que le présent recours doit être admis. La cause est renvoyée à l'autorité de surveillance pour nouvelle décision. Il importe en effet, dans l'intérêt des porteurs de parts, que la société S. fasse le nécessaire pour éviter, à l'avenir, que les irrégularités commises ne se renouvellent. Il convient en particulier que la CFB décide les mesures qu'il y a lieu d'adopter afin d'écarter X. de la gestion de la société de direction. Des moyens de contrôle pourront être mis sur pied afin que l'autorité de surveillance soit à même de s'assurer de la sauvegarde des intérêts des porteurs de parts.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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