BGE 102 Ib 282 | |||
| |||
Bearbeitung, zuletzt am 15.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch) | |||
48. Arrêt du 17 septembre 1976 en la cause Division fédérale de police contre Donzé et Commission des recours du canton de Berne en matière des mesures à l'égard des conducteurs de véhicule à moteur | |
Regeste |
Art. 17 Abs. 1 lit. c SVG. Reformatio in pejus. |
2. Die zuständige Bundesbehörde kann ihr Recht zur Beschwerde gegen einen Entscheid ausüben, mit dem die letzte kantonale Instanz es unter Berufung auf die kantonalen Vorschriften über die reformatio in pejus abgelehnt hat, eine dem Bundesrecht widersprechende Verfügung der unteren Instanz zu ändern. Auf solche Beschwerde hin ist das Bundesgericht ohne Einschränkung befugt, zuungunsten einer Partei zu entscheiden, auch in den Fällen, wo das kantonale Recht die reformatio in pejus ausschliesst (Änderung der Rechtsprechung) (Erw. 2-4). | |
Sachverhalt | |
1 | |
Le 7 juillet 1974, il circulait au volant de son automobile dans le village de Bure. La voiture, dont la vitesse était excessive, se mit au travers de la route et heurta un véhicule qui arrivait en sens inverse. Le 18 septembre 1974, l'Office de la circulation routière du canton de Berne retira à Daniel Donzé son permis pour un mois en application des art. 16 al. 2 et 17 al. 1 lettre a LCR.
| 2 |
Le 31 mai 1975, Donzé pilotait son automobile à Saignelégier dans l'intention de s'arrêter sur une place proche du buffet de la gare. Il obliqua d'abord à droite, puis brusquement à gauche. Sous l'effet de cette manoeuvre, la voiture se retourna et parcourut quelques mètres avant d'enfoncer un mur et un autre véhicule. L'analyse du sang de Donzé révéla un degré d'alcoolémie de 1,4 à 1,45 g %o, soit une ivresse manifeste. En vertu de l'art. 16 al. 3 lettres a et b, ainsi que de l'art. 17 al. 1 lettre b LCR, Daniel Donzé fut privé, le 7 juillet 1975, de son permis pour 4 mois par l'Office de la circulation routière.
| 3 |
Il recourut contre cette décision auprès de la Commission des recours du canton de Berne en matière des mesures à l'égard des conducteurs de véhicule à moteur, en demandant que la durée du retrait soit réduite de 4 à 2 mois. Le 5 septembre 1975, la Commission rejeta le recours. La Division de police du Département fédéral de justice et police a formé, contre cette décision, un recours de droit administratif. Elle soutient que la Commission cantonale aurait dû porter la durée du retrait de 4 à 6 mois, comme l'exigeait le droit fédéral (art. 16 al. 3 lettre b, 17 al. 1 lettre c LCR).
| 4 |
A la demande du Tribunal fédéral, la Commission cantonale a précisé que l'art. 6 du décret qui la concerne renvoie à la loi sur la juridiction administrative, des 22 octobre 1961/12 septembre 1971, dont l'art. 82 al. 1 prescrit que l'autorité de jugement ne peut aller au-delà des conclusions des parties, sous réserve de dispositions spéciales. Celles-ci n'existeraient en droit bernois que dans le domaine des impôts.
| 5 |
Considérant en droit: | |
6 | |
Une loi votée le 20 mars 1975 a modifié cette disposition. La nouvelle règle est entrée en vigueur le 1er août 1975, soit entre le 7 juillet 1975, jour où l'Office de la circulation routière a statué, et le 5 septembre 1975, date de la décision de la Commission cantonale. On peut dès lors se demander si l'ancien ou le nouveau texte est applicable en l'espèce. La question peut toutefois rester indécise, l'art. 17 al. 1 lettre c LCR ayant la même portée dans l'une et l'autre hypothèses en ce qui concerne le cas particulier.
| 7 |
a) Aux termes de l'ancienne disposition, la durée du retrait du permis de conduire atteindra "six mois au minimum si le conducteur, malgré le retrait du permis, a conduit un véhicule automobile ou si le permis doit lui être retiré pour la deuxième fois en l'espace de deux ans". Ce texte répond exactement à la version allemande, qui prévoit un retrait de six mois au moins "wenn der Führer trotz Ausweisentzuges ein Motorfahrzeug geführt hat oder wenn ihm der Ausweis innert 2 Jahren zum zweitenmal entzogen werden muss", ainsi qu'à la version italienne, selon laquelle le retrait est de six mois au moins "se il conducente, nonostante la revoca della licenza, ha guidato un veicolo a motore o se la licenza gli deve essere revocata per la seconda volta in due anni".
| 8 |
Certes, si on les interprète littéralement, ces rédactions semblent signifier que l'application de l'art. 17 al. 1 lettre c LCR dépend d'un double retrait obligatoire. Toutefois, on ne se trouve pas en présence de textes absolument clairs, excluant en principe une interprétation différente du sens habituel des mots. Il s'agit bien plutôt de dispositions qui peuvent être comprises de façon diverse et dont la véritable portée doit être dégagée de tous les éléments à considérer, soit notamment du but des normes.
| 9 |
Or, si le législateur a fixé à un minimum de six mois la durée du retrait en cas de récidive, c'est parce que le conducteur fautif n'a pas tenu compte de l'avertissement que constituait la première mesure prise contre lui. Peu importe que cette dernière ait été prononcée à titre obligatoire ou facultatif; de toute manière, c'était un avertissement. Ce qui est déterminant en revanche, c'est la gravité de l'infraction qui a donné lieu au second retrait. S'il s'agit d'une infraction assez légère pour entraîner un retrait facultatif en vertu de l'art. 16 al. 2 LCR, on peut admettre que le conducteur n'a pas méconnu le premier avertissement au point de devoir être privé de son permis pendant 6 mois au minimum. Au contraire, lorsque la seconde infraction tombe sous le coup de l'art. 16 al. 3 LCR et motive le retrait obligatoire du permis, il se justifie pleinement de porter à 6 mois la durée de cette mesure. La ratio legis exige donc uniquement que le second retrait soit obligatoire, le premier pouvant avoir été ordonné à titre facultatif ou obligatoire.
| 10 |
b) Le texte entré en vigueur le 1er août 1975 lève toute équivoque. En français, il vise le cas où le permis doit être "retiré pour cause d'infraction commise dans les deux ans depuis l'expiration du dernier retrait" (en allemand, "wenn ihm der Ausweis wegen einer Widerhandlung entzogen werden muss, die er innert zwei Jahren seit Ablauf des letzten Entzuges begangen hat"; en italien, "se la licenza gli deve essere revocata a causa di un'infrazione commessa entro due anni dalla scadenza dell'ultima revoca"). Ainsi, l'art. 17 al. 1 lettre c LCR s'applique dès que le second retrait est obligatoire. Vu le silence des textes au sujet de la nature du premier retrait, il faut en déduire qu'elle peut être facultative aussi bien qu'obligatoire.
| 11 |
c) Dans le cas particulier, l'art. 16 al. 3 lettres a et b LCR obligeait l'autorité à retirer à Daniel Donzé son permis, après qu'il eut conduit sa voiture le 31 mai 1975 en état d'ébriété et, de ce fait, compromis gravement la sécurité de la route. Le second retrait, de nature obligatoire, devait durer 6 mois au minimum en vertu de l'art. 17 al. 1 lettre c LCR. La décision attaquée, qui confirme la durée de 4 mois fixée en première instance, est donc contraire au droit fédéral. Le problème de la reformatio in pejus doit être examiné.
| 12 |
13 | |
L'application de ces principes jurisprudentiels devrait conduire en l'espèce au rejet du recours de la Division fédérale de police. Selon les déclarations non contestées de la Commission de recours, la reformatio in pejus est exclue en procédure administrative bernoise, sauf en matière fiscale. Dès lors, à en juger sur la base du droit cantonal, il n'était pas arbitraire de renoncer à élever de 4 à 6 mois la durée de la mesure prise contre Daniel Donzé. Par conséquent, le droit cantonal faisant règle, l'inobservation du droit fédéral par l'autorité cantonale n'entraînerait pas l'annulation de sa décision.
| 14 |
15 | |
a) A lui seul, le texte de l'art. 24 al. 5 lettre c LCR n'est pas déterminant. Cette disposition, qui s'applique dans le cas particulier en vertu de l'art. 2 al. 1 de l'arrêté du Conseil fédéral du 2 juillet 1975 concernant l'entrée en vigueur des dispositions modifiées de la LCR, se borne à attribuer à la Division fédérale de police le droit de former un recours de droit administratif devant le Tribunal fédéral. Or, contrairement à l'avis de la recourante, cela ne signifie pas nécessairement qu'elle puisse s'affranchir des règles cantonales sur la reformatio in pejus.
| 16 |
En effet, si l'art. 24 al. 5 lettre c LCR n'avait pas été adopté, c'est le Département fédéral de justice et police qui, selon l'art. 103 lettre b OJ, aurait qualité pour saisir le Tribunal fédéral d'un recours de droit administratif contre la décision cantonale de dernière instance en matière de retrait de permis. Pour que la Division fédérale de police fût en droit d'agir à la place du Département, il fallait une disposition spéciale, que requiert expressément l'art. 103 lettre b OJ et qui figure maintenant à l'art. 24 al. 5 lettre c LCR. Ainsi, cette dernière disposition a simplement substitué à un Département une de ses Divisions. Si le Département de justice et police eût été lié par les règles cantonales sur la reformatio in pejus, la Division fédérale de police se trouverait dans la même situation.
| 17 |
b) Le principe de la suprématie du droit fédéral sur le droit cantonal n'est pas non plus décisif. Le droit fédéral ne prévaut sur le droit cantonal que dans la mesure où l'un et l'autre ont le même objet. En revanche, lorsque le législateur fédéral réserve aux cantons la compétence de réglementer un domaine déterminé, les dispositions cantonales s'y appliquent exclusivement; il n'est pas question d'une contradiction entre les deux droits. Or, à l'art. 1er al. 3, la loi fédérale sur la procédure administrative renonce, d'une manière générale, à régir la procédure qui se déroule devant les autorités cantonales de dernière instance, appelées à statuer en vertu du droit public fédéral, mais non pas à titre définitif. Aussi peut-on se demander si, en tant que règles de procédure, les règles cantonales sur la reformatio in pejus ne s'appliquent pas en l'occurrence, alors même que le droit fédéral de fond risquerait de n'être pas respecté.
| 18 |
Au demeurant, on ne saurait tirer argument de la jurisprudence qui ouvre la voie du recours de droit administratif contre des décisions fondées sur des dispositions de procédure cantonales, mais de nature à paralyser l'application du droit public fédéral (ATF 100 Ib 370, ATF 99 Ib 394, ATF 99 V 55, 184, ATF 98 Ib 336). Selon cette jurisprudence, le Tribunal fédéral ne censure de telles décisions que si elles sont arbitraires, ce qui n'est pas le cas ici.
| 19 |
c) En réalité, c'est ailleurs qu'il faut rechercher la solution du problème soulevé. On ne peut certes se borner à constater que, dans le Message à l'appui de la modification de la LCR, le Conseil fédéral a proposé l'adoption de l'art. 24 al. 5 lettre c pour assurer l'application uniforme du droit de la circulation routière (FF 1973 II 1156). D'une part, ce passage ne signifie pas en lui-même que le droit fédéral l'emporte sur les règles de procédure cantonales. D'autre part, même si aucun député ne les a combattues, les opinions exprimées par le Gouvernement n'engagent pas nécessairement le Parlement.
| 20 |
Il n'en est pas moins vrai que, pour déterminer la portée de l'art. 24 al. 5 lettre c LCR, il y a lieu de tenir compte du but de cette disposition, tel qu'il doit répondre raisonnablement à la volonté du législateur. En particulier, il faut considérer que, si ce dernier vote un texte, c'est avec l'intention de lui attribuer une efficacité suffisante. Or, la jurisprudence de l'arrêt Division fédérale de police c. d'Amour et Conseil d'Etat du canton d'Obwald porte au droit de recours de l'autorité fédérale une atteinte qui le prive d'une partie considérable de ses effets. Certes, ce droit ne serait pas supprimé entièrement. L'autorité fédérale conserverait la faculté de recourir dans trois éventualités, soit lorsque la procédure cantonale admet la reformatio in pejus, ou que l'autorité cantonale de dernière instance a modifié la décision de première instance en faveur de l'administré, ou encore qu'une seule autorité cantonale a statué. En revanche, elle n'aurait pas la possibilité d'attaquer utilement la décision cantonale de dernière instance si l'autorité qui a rendu cette décision, tranchant sur recours, n'a pas modifié en faveur de l'administré la décision de première instance et ne pouvait réformer celle-ci in pejus. Non seulement ces conditions sont maintenant déjà souvent réalisées, mais elles le seront toujours davantage en raison de l'essor grandissant des tribunaux administratifs cantonaux. En principe, ceux-ci revoient les actes de l'administration, statuant ainsi en deuxième ou troisième instance; de plus, si on reconnaît assez largement au supérieur hiérarchique la compétence de réformer in pejus les décisions de ses subordonnés, on refuse en général ce pouvoir aux juridictions indépendantes, tels les tribunaux administratifs cantonaux, face à l'administration (cf. les réglementations différentes de l'art. 62 al. 2 PA et de l'art. 114 al. 1 OJ; GRISEL, Droit administratif suisse, pp. 456/457). Dès lors, au fur et à mesure que se multiplient les tribunaux administratifs cantonaux et que leur ressort s'étend, il apparaît de plus en plus nécessaire que, pour assurer l'application uniforme du droit fédéral, l'autorité fédérale puisse recourir au Tribunal fédéral sans égard aux règles cantonales sur la reformatio in pejus.
| 21 |
Enfin, la jurisprudence de l'arrêt précité implique des divergences de solutions qui ne se justifient guère et, en tout cas, s'accordent mal avec le principe d'égalité. On ne s'explique pas pourquoi l'autorité fédérale pourrait attaquer sans réserve les décisions des autorités cantonales qui statuent en instance unique, et d'une manière toujours plus limitée celles des autorités cantonales de recours. On se demande aussi pourquoi l'application du droit fédéral serait moins bien garantie dans les cantons qui refusent la reformatio in pejus que dans les autres.
| 22 |
Il résulte des développements précédents que, suivant le but qu'il est raisonnable d'assigner à l'art. 24 al. 5 lettre c LCR aussi bien qu'à l'art. 103 lettre b OJ, l'autorité fédérale compétente peut exercer son droit de recours, en vertu de ces dispositions, contre une décision cantonale de dernière instance qui, pour se conformer aux règles cantonales sur la reformatio in pejus, a refusé de modifier une décision de première instance contraire au droit fédéral. Sur recours de l'autorité fédérale compétente, le Tribunal fédéral a la latitude d'aggraver la situation d'une partie dans les cas mêmes où le droit cantonal exclut la reformatio in pejus. Les arguments qui plaident pour cette solution prévalent sur le souci de ménager la souveraineté cantonale et la crainte d'encourager un procédé aussi discutable que la reformatio in pejus (cf. RSJ vol. 41 p. 135 ss, vol. 45 p. 133 ss).
| 23 |
24 | |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
| 25 |
26 | |
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR). |