BGE 111 Ib 312 | |||
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57. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 25 septembre 1985 dans la cause C. contre Office fédéral de la police (recours de droit administratif) | |
Regeste |
Auslieferung. Staatsvertrag zwischen der Schweiz und den Vereinigten Staaten von Amerika. Prinzip der beidseitigen Strafbarkeit; Tragweite von Art. 36 Abs. 2 IRSG. |
Art. 36 Abs. 2 IRSG erlaubt keine Abweichung vom Prinzip der beidseitigen Strafbarkeit. Es erlaubt die akzessorische Auslieferung bei mehreren strafbaren Handlungen nur für die auch nach schweizerischem Recht strafbaren Handlungen, die aber die Bedingung der Minimalstrafe gemäss Art. 35 Abs. 1 lit. a IRSG nicht erfüllen (E. 5). | |
Extrait des considérants: | |
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a) Selon la demande, le recourant est accusé d'avoir, avec la complicité d'au moins deux individus de nationalité américaine, obtenu une somme totale de 3,6 millions de dollars de financiers belges, devant lesquels il aurait fait miroiter la réalisation d'une affaire immobilière qu'il n'était manifestement pas en mesure de conclure. De tels faits constituent une escroquerie d'argent ou d'autres biens au moyen de fausses allégations, délit mentionné sous ch. 6 de l'art. II du Traité. S'ils avaient été commis en Suisse, ils tomberaient de toute évidence sous le coup de l'art. 148 CP qui réprime l'escroquerie.
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Le recourant prétend toutefois, en se fondant sur la qualification juridique donnée dans la demande à ce chef d'accusation, que l'Etat requérant ne veut pas le punir pour escroquerie, mais seulement pour avoir utilisé abusivement les moyens de communication interétatiques aux fins de commettre ce délit. Ce point de vue est erroné: il ne tient pas compte des spécificités du droit criminel matériel américain, de sa structure fédéraliste et de la répartition des compétences entre les autorités de répression de l'Etat central et celles de chacun des Etats membres de l'Union.
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b) Si l'on fait abstraction du crime de "conspiracy" dont il sera question plus loin, le recourant est poursuivi aux Etats-Unis sur la base des art. 1343 et 2314 du Titre 18 USC. Ces dispositions ont la teneur suivante, selon la traduction, certifiée conforme, présentée par le Chef du service de traduction du Département d'Etat américain:
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Article 1343:
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"Quiconque, ayant établi ou ayant l'intention d'établir un stratagème ou un subterfuge quelconque aux fins soit d'escroquer, soit d'obtenir des fonds ou des biens au moyen de faux-semblants, de déclarations ou de promesses fausses ou frauduleuses, transmet ou fait transmettre au moyen de communications télégraphiques, de radio ou de télévision sur réseaux inter-Etats ou internationaux, tous écrits, signes, signaux, images et sons, dans le but de mettre à exécution ledit stratagème ou subterfuge, est passible d'une amende ne dépassant pas 1'000 dollars ou d'une peine d'emprisonnement ne dépassant pas cinq ans, ou des deux."
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Article 2314 (in parte qua):
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"Quiconque, ayant établi ou ayant l'intention d'établir un stratagème ou un subterfuge aux fins d'escroquer ou d'obtenir des fonds ou des biens au moyen de faux-semblants, de déclarations et de promesses fausses ou frauduleuses, transporte ou fait transporter ou incite toute personne à emprunter un moyen de transport réglementé par la législation inter-Etats aux fins d'exécution ou de dissimulation d'un stratagème ou d'un subterfuge afin d'escroquer à cette personne des fonds ou des biens d'une valeur de 5'000 dollars au moins, est passible d'une amende ne dépassant pas 10'000 dollars ou d'une peine d'emprisonnement ne dépassant pas dix ans, ou des deux."
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L'Etat requérant s'est exprimé de manière très claire dans le corps de la demande sur la portée de ces dispositions:
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"Les clauses auxquelles il est fait référence respectivement en ce qui concerne l'utilisation de communications télégraphiques inter-Etats et le fait d'inciter la personne victime de la fraude à emprunter un moyen de transport réglementé par la législation inter-Etats constituent les bases juridictionnelles de ces délits et sont incluses dans le seul but d'invoquer la juridiction fédérale aux termes du droit constitutionnel des Etats-Unis. L'acte auquel s'applique chacune desdites lois est le stratagème aux fins d'escroquerie. En conséquence, la nature de chaque délit est le stratagème aux fins d'escroquerie et non pas la base juridictionnelle."
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Ainsi, contrairement à l'opinion du recourant, c'est bien à la répression de l'escroquerie, au sens où l'entend l'art. 148 CP, que tendent les deux dispositions principales citées dans la demande d'extradition. Le fait que la personne poursuivie ait utilisé les moyens de communication ou de transport interétatiques a essentiellement pour conséquence de fonder, d'une part, l'applicabilité de la législation fédérale et, d'autre part, la compétence des autorités fédérales. C'est ainsi que si l'escroquerie avait été commise dans les limites territoriales strictes de l'un des Etats membres de l'Union, l'auteur serait passible des peines prévues par la législation de cet Etat et son acte entrerait dans la compétence des autorités répressives de celui-ci. Il est d'ailleurs significatif, à cet égard, que l'Etat de la Californie ait renoncé à toute poursuite pénale. Il s'agit donc uniquement ici des conditions de punissabilité de l'infraction dans l'Etat requérant, lesquelles sont sans importance au regard de l'obligation de coopération de l'Etat requis, dès lors que les faits incriminés sont réprimés par la législation de l'un et de l'autre Etat dans le sens de l'art. II du Traité (cf. arrêt non publié S. du 12 mai 1982, consid. 5b).
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"Si deux ou plusieurs personnes complotent soit pour commettre une infraction à l'encontre des Etats-Unis, soit pour commettre un acte de fraude à l'encontre des Etats-Unis ou de tout organisme des Etats-Unis par un procédé quelconque ou à des fins quelconques, et qu'une ou plusieurs desdites personnes commettent effectivement un acte afin de parvenir au but du complot, chacune de ces personnes sera passible d'une amende d'un maximum de 10'000 dollars ou d'une peine d'emprisonnement d'un maximum de cinq ans, ou des deux."
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La demande d'extradition s'exprime aussi sur la portée de cette disposition:
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"Il ne s'agit pas de complicité. Il y a complot lorsque au moins deux personnes conviennent de se livrer à des activités criminelles et que lesdites personnes commettent des actes qui aident à la réalisation de l'objet dudit accord."
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Le sens de cet art. 371 USC est donc clair: il ne vise pas la participation à une infraction déterminée, mais considère le complot comme une infraction en soi. Il s'agit là d'un délit analogue, sinon identique, à l'association de malfaiteurs, telle qu'elle est réprimée par certains droits étrangers et en particulier par l'actuel art. 416 du code pénal italien, qui punit la réunion d'individus en vue de la commission d'un nombre indéterminé d'infractions indépendamment de la question de savoir si les infractions projetées ont été commises ou non (cf. ATF 92 I 286 consid. 5d; HANS SCHULTZ, Das schweizerische Auslieferungsrecht, p. 113, n. 163, et p. 280/281). Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de constater que le droit suisse ne connaît pas cette notion de complot - ou encore d'association ou d'entente - du droit anglo-saxon (ATF 97 I 380); il ne l'appréhende, dans certains cas (cf. notamment art. 137 ch. 2 et 139 ch. 2 CP), que comme une cause d'aggravation de la peine (cf. ATF ATF 95 I 466 consid. 3b), mais non en tant que délit distinct (ATF 78 IV 234). Si aucune infraction n'a été commise, le complot ou l'association de malfaiteurs ne peut être qu'un acte préparatoire, lequel n'est pas punissable, en dehors des cas prévus au nouvel art. 260bis CP ainsi qu'à l'art. 19 al. 1 LStup (RS 812.121; cf. ATF 108 Ib 535 /536 consid. 5c, ATF 97 I 380). L'art. 371 du Titre 18 USC traite le complot, concrétisé par la commission de n'importe quel acte préparatoire, comme un délit punissable en soi. Il n'a donc manifestement pas son correspondant en droit suisse, de sorte que la condition de la double incrimination n'est pas réalisée en ce qui concerne le délit de "conspiracy".
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a) L'art. 36 al. 2 EIMP a la teneur suivante:
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"L'extradition peut être accordée pour la totalité des infractions, si l'une d'entre elles est de nature à y donner lieu (art. 35 al. 1)."
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A première vue, ce texte paraît signifier que lorsqu'une infraction, objet d'une demande étrangère, donne lieu à l'extradition de la personne recherchée, celle-ci peut aussi être extradée pour tous les autres faits qui lui sont imputés dans la demande, même s'ils ne sont pas punissables selon le droit suisse. L'autorité intimée s'en est tenue à cette interprétation littérale de l'art. 36 al. 2 EIMP. C'est ce que le Tribunal fédéral avait fait lui-même dans son arrêt V. du 28 mars 1984, sans toutefois approfondir cette question qui ne revêtait, en l'occurrence, qu'une importance secondaire (consid. 6 non publié in ATF 110 Ib 185 ss). L'interprétation littérale de cette disposition facultative (Kann-Vorschrift) pourrait cependant conduire à des résultats discutables au regard des principes sur lesquels se fonde le nouveau droit interne de l'entraide pénale internationale. Elle constituerait une brèche sérieuse dans le principe de la légalité, en laissant une latitude de jugement excessive à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur l'opportunité d'une extradition accessoire. Il lui serait loisible de décider, selon un choix purement arbitraire, de livrer un individu soupçonné d'avoir commis un acte également puni en Suisse, pour qu'il réponde d'autres actes punissables dans l'Etat requérant mais dont la répression pourrait heurter les conceptions suisses. Cela ne saurait être le sens raisonnable de cette disposition, adoptée à un moment où le législateur avait fait de la protection de la personne recherchée, placée momentanément sous la juridiction suisse, l'un de ses objectifs importants. Cette conclusion résulte d'ailleurs aussi des travaux préparatoires.
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b) Devenu l'actuel art. 36 EIMP, l'art. 32 du projet du Conseil fédéral, présenté le 8 mars 1976 à l'Assemblée fédérale, avait la teneur suivante (FF 1976 II 487):
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"Dérogation à l'art. 31
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1 La personne poursuivie peut être exceptionnellement extradée pour des faits qui pourraient être réprimés en Suisse, si des circonstances particulières le justifient, notamment la possibilité d'un meilleur reclassement social.
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2 L'extradition peut être accordée pour la totalité des infractions, si l'une d'entre elles remplit les conditions de l'art. 31, 1er alinéa.
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3 Il est exceptionnellement possible d'extrader aussi pour un fait qui n'est pas punissable en Suisse, si ce fait est réprimé à l'étranger en raison de circonstances particulières et qu'il paraisse mériter une sanction, selon les principes généraux du droit suisse."
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aa) L'al. 3 de cette disposition prévoyait ainsi la faculté de déroger à la condition de la double incrimination. Il reprenait en effet une règle ancienne, alors contenue à l'art. 4 de la loi fédérale du 22 janvier 1892 sur l'extradition aux Etats étrangers (LExtr.), qui permettait d'extrader pour des infractions non punissables selon le droit suisse, si cette exemption provenait uniquement de circonstances externes, inhérentes notamment à des différences géographiques entre les deux pays. Comme cas d'application de l'ancien art. 4 LExtr., on envisageait par exemple une violation de prescriptions pénales contenues dans des législations étrangères relatives à la navigation maritime (cf. HANS SCHULTZ, Das neue Schweizer Recht der internationalen Zusammenarbeit in Strafsachen, RSJ 77/1981, p. 95). Le Conseil des Etats (BO, CE, 1977 p. 631), suivi par le Conseil national (BO, CN, 1979 I p. 849), a toutefois décidé de biffer l'al. 3 de l'art. 32 du projet, pour le motif qu'il visait des éventualités exceptionnelles de peu d'importance pratique (intervention du rapporteur Schlumpf, BO, CE, 1977 p. 631).
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bb) Reste donc l'art. 36 al. 2 EIMP, qui reproduit rigoureusement, du point de vue matériel, l'art. 32 al. 2 du projet. Les travaux préparatoires démontrent que la réglementation de l'extradition accessoire, régie par cette disposition, est calquée sur l'art. 2 par. 2 de la Convention européenne d'extradition conclue à Paris le 13 décembre 1957 et entrée en vigueur pour la Suisse le 20 mars 1967 (CEExtr.; RS 0.353.1). L'art. 2 par. 2 CEExtr. prescrit en effet que, si la demande d'extradition vise plusieurs faits distincts punis chacun par la loi de la Partie requérante et de la Partie requise d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté privative de liberté, mais dont certains ne remplissent pas la condition relative aux taux de la peine, la Partie requise aura la faculté d'accorder également l'extradition pour ces derniers. Le rapport entre l'art. 36 al. 2 EIMP et l'art. 2 par. 2 CEExtr. a été explicitement souligné dans le Message du Conseil fédéral du 8 mars 1976: se référant au Message du 1er mars 1966 relatif notamment à l'approbation de la Convention européenne d'extradition (FF 1966 I 465 ss, spéc. ch. 3, p. 471 à 473), il exposait que la réglementation de l'extradition accessoire correspond à la déclaration faite au sujet de l'art. 2 par. 2 CEExtr. (FF 1976 II 448). Au demeurant, l'adoption de l'art. 36 al. 2 EIMP a imposé une modification de la déclaration faite par la Suisse à l'art. 2 par. 2 CEExtr. (cf. FF 1966 I 473; art. 2 de l'AF du 27 septembre 1966: RO 1967, 846). C'est ainsi que le Conseil fédéral a donné à cette déclaration la teneur suivante:
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"Si une extradition est ou a été accordée pour une infraction à raison de laquelle l'extradition est autorisée par le droit suisse, la Suisse peut en étendre les effets à tout autre fait punissable selon une disposition de droit commun de la législation suisse (RO 1983 I 165)."
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En adhérant à la Convention européenne d'extradition, la Suisse a donc bien précisé son attachement à ses propres conceptions de l'extradition accessoire: cette mesure doit être réservée aux infractions qui sont elles-mêmes punissables selon la législation pénale suisse de droit commun, mais qui, prises isolément, ne donneraient pas lieu à extradition, parce que le droit suisse ne les frappe pas d'une sanction privative de liberté d'un maximum d'au moins un an ou d'une sanction plus sévère au sens de l'art. 35 al. 1 lettre a EIMP. Adopté après un rappel de ces conceptions, l'art. 36 al. 2 EIMP ne saurait avoir la portée étendue qui lui a été donnée en l'espèce par l'autorité intimée. Calqué sur l'art. 2 par. 2 CEExtr., il ne bat pas en brèche le principe de la double incrimination (cf. ATF 101 Ia 423 consid. 3d, ATF 95 I 467 consid. 4), auquel la Suisse n'a jamais songé à renoncer. Il n'autorise l'extradition accessoire pour la totalité des infractions que lorsqu'il s'agit de délits punissables selon le droit suisse mais qui ne remplissent pas la condition de la peine minimum de l'art. 35 al. 1 lettre a EIMP.
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