BGE 95 I 233 | |||
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34. Arrêt du 25 août 1969 dans la cause X. contre Chambre d'accusation et Procureur général du canton de Genève. | |
Regeste |
Persönliche Freiheit. Untersuchungshaft. |
Hiefür sachlich zuständige Behörde (Erw. 5). |
Notwendige Voraussetzungen für die Anordnung der Sicherheitshaft (Erw. 6). | |
Sachverhalt | |
A.- X. a causé, le 23 juin 1962, un accident de la circulation qui a entraîné la mort de six personnes. Ecroué sous mandat de dépôt décerné le 27 juin 1962 par la Chambre d'accusation de Genève, il a été mis en liberté provisoire le 2 novembre 1962, sous caution de 10 000 fr., selon décision du 26 octobre 1962 de la même chambre; il a été arrêté à nouveau le 27 juin 1969, à l'ouverture des débats de la Cour correctionnelle. Cette juridiction, siégeant avec le concours du jury, a condamné X. le 28 juin 1969, à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement, sous imputation de quatre mois et seize jours de détention préventive. Le condamné a formé auprès de la Cour de cassation cantonale un recours qui est toujours pendant.
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Immédiatement après le jugement, le Procureur général de Genève a signé un ordre d'écrou à l'encontre de X. qui est depuis lors incarcéré.
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X. a formé successivement, les 1er et 3 juillet 1969, deux demandes de libération provisoire auprès de la Chambre d'accusation genevoise. Celle-ci les a déclarées irrecevables, faute de compétence. Ses ordonnances, des 2 et 4 juillet 1969, sont motivées, en bref, comme il suit.
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Selon l'art. 26 lettre b Cst. gen., toute personne arrêtée en vertu d'un mandat a le droit de demander, en tout état de cause, sa mise en liberté provisoire, sous caution de se représenter à tous les actes de procédure et à l'exécution du jugement, aussitôt qu'elle en sera requise. L'art. 156 PP gen. prévoit de même que tout inculpé a le droit de demander en tout état de cause sa mise en liberté provisoire, sous caution de se représenter à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement, aussitôt qu'il en sera requis. La liberté provisoire dure jusqu'à l'ouverture de l'audience à laquelle la cause est appointée (art. 167 PP). Le 27 juin 1969, X. a donc cessé d'en bénéficier. Depuis le jugement, il n'est plus détenu en vertu du mandat, qui a cessé de déployer ses effets, puisque la période d'instruction est close. Ce n'est pas la détention préventive qui se prolonge, comme lorsqu'il en est appelé d'un jugement du Tribunal de police. Il y a dans ce dernier cas une disposition spéciale, l'art. 407 PP, qui prévoit le maintien en détention préventive. En revanche, l'individu condamné par la Cour correctionnelle ou la Cour d'assises est en état d'arrestation pendant le délai de recours en cassation et jusqu'à l'arrêt de cassation, en vertu de l'ordre d'écrou signé par le Procureur général après la prononciation du jugement de condamnation, ordre qui n'est nullement assimilable à un mandat. Dès lors, la période d'instruction étant close, la Chambre d'accusation n'est plus compétente pour statuer sur la requête de X. Celui-ci, qui n'est plus inculpé, mais condamné, et qui n'est plus détenu en vertu d'un mandat, mais d'un jugement, ne peut plus fonder sa demande de mise en liberté provisoire sur l'art. 26 Cst. gen., applicable seulement aux personnes arrêtées en vertu d'un mandat, ni sur l'art. 156 PP, gen., qui ne vise que l'inculpé, lequel doit être nettement distingué du condamné. Aucune disposition du droit genevois ne donne au condamné le droit de demander sa libération provisoire et ne désigne l'autorité chargée de statuer sur cette demande, à l'encontre du droit français. Seul le Procureur général, qui exécute les jugements selon les art. 459 et 460 PP, aurait eu la faculté de différer l'incarcération. La chambre ne peut se substituer à lui.
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Quant au fond, il est évident qu'un individu condamné à une lourde peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être relâché pendant quelque temps du seul fait qu'il a déposé un recours en cassation. Une telle pratique heurterait le sens commun. Le recours en cassation n'étant pas une voie d'appel, le jugement subsiste tant qu'il n'est pas annulé.
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B.- X. a déposé le 8 juillet 1969 un recours de droit public, par lequel il requiert le Tribunal fédéral d'annuler les deux ordonnances de la Chambre d'accusation et de renvoyer la cause à cette juridiction pour qu'elle statue sur la demande de mise en liberté provisoire qu'il a déposée; subsidiairement, d'ordonner sa mise en liberté provisoire sous caution de 10 000 fr. Il se plaint d'arbitraire, ainsi que de violation de diverses dispositions de la constitution cantonale, et argumente, en substance, comme il suit:
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En vertu de l'art. 360 PP applicable aux causes correctionnelles selon l'art. 383 PP, l'exécution du jugement est suspendue de plein droit jusqu'à l'arrêt de cassation. Ce jugement ne peut donc être le fondement de la détention que le recourant subit. Du reste, l'art. 460 PP n'autorise le Procureur général à exécuter le jugement qu'après l'expiration du délai pour recourir en cassation ou le rejet du pourvoi. Selon la Chambre d'accusation, X. ne serait pas détenu en vertu du mandat de dépôt précédemment décerné contre lui, mandat qui aurait cessé de déployer ses effets au moment du jugement. Il résulterait de cette affirmation qu'il est détenu sans jugement, ni mandat, donc en violation de la constitution. En réalité, le mandat continue de déployer ses effets jusqu'au jugement définitif et la Chambre d'accusation doit statuer sur la demande de liberté provisoire. En refusant de le faire, elle a commis un déni de justice.
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C.- Par acte du 25 juillet 1969, X. a formé un second recours de droit public contre "la décision de M. le Procureur général de Genève d'exécuter le jugement rendu par la Cour correctionnelle de Genève le 28 juin 1969 condamnant sieur X. à dix-huit mois d'emprisonnement". Il requiert le Tribunal fédéral d'annuler ladite décision et argumente, en substance, comme il suit:
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L'art. 360 PP gen. dispose qu'il est sursis à l'exécution de l'arrêt de la Cour d'assises pendant le délai de recours en cassation et en cas de recours jusqu'à l'arrêt de cassation. Cet article s'applique aux causes correctionnelles en vertu de l'art. 383 PP gen. La suspension de l'exécution est ainsi de droit. L'ordre d'écrou est illégal et viole la constitution genevoise.
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D.- La Chambre d'accusation conclut implicitement au rejet du premier recours, en tant qu'il est recevable. Elle estime que l'arrêt de la Cour correctionnelle, prononçant une peine de dix-huit mois d'emprisonnement, ordonne implicitement l'arrestation. Pour le surplus, elle persiste dans son argumentation.
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E.- Le Procureur général de Genève conclut au rejet du recours dirigé contre les ordonnances de la Chambre d'accusation, en se ralliant à l'argumentation de celle-ci.
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Il conclut également au rejet du recours dirigé contre l'ordre d'écrou, en relevant que l'argumentation du recourant est en complète contradiction avec celle qu'il soutient dans son premier recours de droit public. Il ajoute que X. ne purge pas sa peine, mais est détenu préventivement en vertu du jugement de condamnation. Le recours de droit public n'est pas ouvert contre l'acte d'exécution que constitue son ordre d'écrou. Au reste, cet ordre d'écrou n'est pas arbitraire. Il serait absurde de devoir relâcher un condamné durant l'examen de son recours en cassation.
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F.- Par arrêt du 22 juillet 1969, la Cour de cassation genevoise a déclaré irrecevable la requête de mise en liberté provisoire présentée devant elle par X.
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G.- Le 28 juillet 1969, le Président de la Chambre de droit public chargée des recours fondés sur l'art. 4 Cst. a déclaré irrecevable à titre de demande de mesures provisionnelles la requête de libération provisoire présentée par X. avec son premier recours de droit public.
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Considérant en droit: | |
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L'incarcération d'un individu pour une durée prolongée est toujours une atteinte grave à sa liberté personnelle. Le Tribunal fédéral reverra donc avec plein pouvoir la constitutionnalité de la mesure prise à l'encontre du recourant (RO 90 I 39; cf. RO 91 I 35). Il interprétera librement les dispositions légales cantonales qui organisent la protection de cette liberté ou la restreignent.
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b) Dans ses deux ordonnances des 2 et 4 juillet 1969, la Chambre d'accusation de Genève a "déclaré irrecevable la demande de X. et refusé en conséquence sa mise en liberté provisoire". Ce dispositif doit être interprété à la lumière des motifs (RO 84 II 140 et les références). Ceux-ci montrent que la chambre a constaté sa propre incompétence, tout en invoquant subsidiairement un motif de fond, soit l'absence, dans le droit genevois, d'une disposition autorisant le condamné ayant recouru en cassation à demander sa mise en liberté provisoire. Seule la déclaration d'incompétence a ainsi une portée juridique. Décision finale rendue en dernière instance cantonale, elle peut faire l'objet d'un recours de droit public (art. 87 OJ), que le Tribunal fédéral n'examinera toutefois que sous l'angle de l'arbitraire, car il s'agit uniquement de l'application de dispositions qui ne mettent pas directement en cause la liberté personnelle du recourant (cf. RO 95 I 16).
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3. Selon l'art. 167 PP gen., la liberté provisoire dure jusqu'à l'ouverture de l'audience à laquelle la cause est appointée. Dès ce moment, le prévenu se trouve de nouveau en état de détention préventive par le seul effet de la loi. On peut admettre qu'il reste ensuite détenu, sauf ordre contraire. Aussi bien l'art. 334 PP prescrit-il à la cour d'ordonner la mise en liberté du prévenu acquitté. Les autorités genevoises peuvent donc affirmer que la Cour correctionnelle a ordonné implicitement la prolongation de la détention.
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Comme l'art. 360 PP dispose que l'exécution de l'arrêt de la cour est suspendue pendant le délai de recours en cassation et jusqu'à l'arrêt de cassation, X. ne purge pas encore sa peine et la détention ordonnée est préventive. Les autorités genevoises l'admettent expressément.
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a) Selon l'art. 26 lettre b Cst. gen., le droit de demander la mise en liberté provisoire sous caution existe en tout état de cause. Cette dernière expression, reprise de la législation française, ne peut signifier qu'une chose: la mise en liberté provisoire peut être demandée - et doit être accordée si les conditions légales sont réunies - jusqu'à jugement définitif et exécutoire. Sans doute les autorités genevoises relèvent-elles que cette disposition s'applique à toute personne arrêtée en vertu d'un mandat et que l'ordre implicite contenu dans l'arrêt de la Cour correctionnelle n'est pas un mandat, ni un acte assimilable au mandat. Cette interprétation stricte ne rend cependant pas compte du sens exact du texte constitutionnel. Selon celui-ci, la caution garantit l'obligation de la personne mise en liberté provisoire de se présenter non seulement aux actes de la procédure, mais encore pour l'exécution du jugement. Cette dernière précision n'aurait aucun sens si la détention préventive était la conséquence inéluctable d'une condamnation sans sursis. Elle suppose nécessairement que la liberté provisoire puisse se prolonger au-delà du jugement de première instance.
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b) L'art. 156 PP, qui se réfère expressément à l'art. 26 litt. b Cst. gen., donne de même à l'inculpé le droit de demander en tout état de cause sa mise en liberté provisoire, sous caution de se représenter à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement. Contrairement à l'opinion de la Chambre d'accusation, le terme d'inculpé ne doit pas être pris restrictivement et opposé à celui de condamné. A la raison donnée ci-dessus s'en ajoute une autre. La terminologie du code n'est pas toujours stricte. Ainsi, aux art. 168 et 169 PP, le terme d'inculpé vise manifestement aussi l'individu qui est sous le coup d'une condamnation définitive.
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En outre, en vertu de l'art. 466 PP, le Procureur général a, en matière correctionnelle et de police, la faculté d'accorder de son chef des sursis pour l'exécution d'une peine. Cela suppose nécessairement que le condamné n'est pas incarcéré lorsque la condamnation devient définitive, ou que le Procureur général peut alors le libérer provisoirement. Il serait profondément illogique d'exclure absolument des mesures semblables à l'égard d'une condamnation non exécutoire.
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La Chambre d'accusation s'est déclarée incompétente. Cette opinion échappe en tout cas au grief d'arbitraire. On peut, en effet, avec de bonnes raisons, soutenir que la Chambre d'accusation est chargée de la surveillance de l'instruction préparatoire et que ses pouvoirs cessent lorsqu'un tribunal de jugement est saisi de la cause, ou, au plus tard, lorsque ce tribunal a statué. Il est au demeurant exact que, contrairement au droit français, l'organisation judiciaire genevoise fait de la Chambre d'accusation une autorité hiérarchiquement inférieure à la Cour correctionnelle.
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La Cour de cassation s'est aussi déclarée incompétente. Son arrêt n'est pas attaqué. Il n'est du reste pas arbitraire non plus.
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Quant à la Cour correctionnelle, personne ne la dit compétente. De toute façon, en tant qu'elle est assistée du jury, elle n'est pas une autorité permanente.
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On ne saurait toutefois conclure à l'existence d'un conflit de compétence négatif. La Chambre d'accusation admet que le Procureur général peut surseoir à l'incarcération du condamné. Elle lui reconnaît ainsi un pouvoir analogue à celui que l'art. 466 PP lui donne en matière de jugements définitifs. Or, dès l'instant que le Procureur général peut renoncer à le donner, l'ordre d'écrou n'est plus un acte de pure exécution, mais une décision ressortissant à la compétence propre du Ministère public. C'est ainsi au Procureur général qu'il appartient de statuer en unique instance cantonale sur la demande de mise en liberté provisoire du condamné. Certes, le Procureur général n'admet pas expressément cette thèse et se retranche derrière l'ordre implicite de la Cour correctionnelle. Mais il ne conteste pas qu'il ait le pouvoir que la Chambre d'accusation lui reconnaît. En l'espèce, en se déterminant par trois fois négativement à l'égard des demandes adressées par X. à d'autres autorités, il a montré qu'il n'entendait pas en user.
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Cela étant, le recours dirigé contre les ordonnances de la Chambre d'accusation doit être rejeté. Il convient toutefois de relever que le Tribunal fédéral n'a examiné que sous l'angle de l'arbitraire les questions de procédure cantonale. Son opinion sur ces points ne lie pas les autorités genevoises, qui auront toute latitude pour interpréter le droit cantonal, en combler les lacunes et régler autrement, si elles le jugent utile, la compétence en matière de mise en liberté provisoire du condamné pendant la procédure de seconde instance.
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La liberté personnelle est garantie par le droit constitutionnel fédéral non écrit. Le législateur cantonalpeut certes la restreindre dans l'intérêt public, mais il ne peut le faire dans une mesure qui reviendrait à la supprimer ou à la vider de sa substance (RO 90 I 37). Il n'est pas nécessaire de décider si des prescriptions cantonales ordonnant dans tous les cas l'incarcération du condamné pendant la procédure de seconde instance toucheraient à l'essence même de la liberté personnelle, qui doit rester hors de toute atteinte de l'Etat. Tel n'est pas, on l'a vu, le sens de la constitution et du code de procédure pénale genevois. Quel que soit l'acte qui l'ordonne, la détention préventive n'est compatible avec la liberté individuelle que si elle repose sur une base légale et si elle est dans l'intérêt public.
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a) La question de la base légale ne crée pas de difficulté. Du point de vue formel, elle peut être déduite de l'interprétation de l'art. 167 PP (cf. consid. 3 ci-dessus). Matériellement, le code prévoit expressément l'incarcération de l'inculpé durant l'instruction préparatoire. Même à défaut de disposition spéciale, cette mesure doit à plus forte raison être possible durant la procédure de seconde instance.
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b) Le constituant et le législateur genevois se sont montrés respectueux de la liberté personnelle et ont organisé un système de garanties formelles en faveur de l'inculpé. En revanche, ils ont laissé à la prudence des magistrats compétents l'appréciation des conditions pouvant justifier matériellement la détention préventive. Ceux-ci ne disposent pas pourtant d'un pouvoir discrétionnaire. N'importe quel intérêt public ne peut pas justifier n'importe quelle atteinte aux droits constitutionnels des citoyens. Mesure extrêmement grave pour celui qu'elle touche, la détention préventive ne devra être ordonnée et prolongée, dans chaque cas particulier, que si des motifs impérieux d'intérêt public la rendent indispensable.
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Ces motifs peuvent être pris, dans la phase de l'instruction préparatoire, de la nécessité d'assurer l'instruction, de protéger l'ordre et la sécurité publics ou d'éviter que l'inculpé ne se soustraie par la fuite à l'exécution de la peine. Les mêmes motifs valent en principe pour la durée de la procédure de seconde instance. Peu importe que le pouvoir de cognition de la cour supérieure soit limité. Même s'il était si restreint qu'une modification essentielle du jugement fût impossible, la détention préventive, qui n'est pas une peine et qui ne doit pas en tenir lieu, ne pourrait être ordonnée en raison seulement de l'existence de ce jugement. Quant à l'exécution immédiate de la peine, elle est exclue par l'art. 360 PP.
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Dans ses observations, le Procureur général ne soutient pas que des motifs de fond justifient la détention de X. De fait, ces motifs n'existent pas. La Cour de cassation jugeant en droit et non en fait, le risque de collusion n'est plus à craindre. On ne voit pas que la sécurité ou l'ordre publics exigent maintenant l'incarcération, alors que X. est demeuré en liberté provisoire pendant plus de six ans. Reste le risque de fuite. Jamais complètement exclu au cours d'une procédure pénale, il peut devenir plus pressant après le jugement de première instance. Mais même à ce moment, l'autorité n'est pas dispensée d'en apprécier la gravité dans chaque cas particulier. Il ne suffit pas que la fuite soit objectivement possible. Il faut encore que le risque de voir le condamné se soustraire à l'exécution présente une certaine vraisemblance. En l'espèce, le condamné, âgé de cinquante-six ans, a en Suisse sa famille et sa situation professionnelle. Il a donné suite pendant plusieurs années aux convocations des autorités chargées de la poursuite. La peine prononcée est certes importante, mais elle n'est pas de nature à ruiner son avenir économique et sa position sociale. Dans ces conditions, le risque de fuite n'est pas tel qu'il puisse justifier la détention préventive. La caution fournie et qui n'a pas été libérée doit suffire à y parer.
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Le recours dirigé contre l'ordre d'écrou doit être admis. En pareille occurrence, la fonction de la Chambre de droit public ne se limite pas à casser la décision inconstitutionnelle. Pour rétablir une situation conforme à la constitution, elle ordonnera la mise en liberté provisoire du recourant. Il appartiendra aux autorités genevoises de la révoquer par une décision motivée si des circonstances graves survenant au cours de la procédure de seconde instance venaient à rendre la détention indispensable (cf. art. 167 al. 2 PP).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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