BGE 96 I 4 | |||
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2. Arrêt du 4 février 1970 dans la cause Chavannes contre Etablissement Parsilo et Cour de justice civile du canton de Genève. | |
Regeste |
Staatsrechtliche Beschwerde. Provisorische Rechtsöffnung. Willkür. |
Prüfungsbefugnis des Rechtsöffnungsrichters und des mit einer staatsrechtlichen Beschwerde angerufenen Bundesgerichtes, wenn der Betreibungsschuldner unter Berufung auf Art. 20 OR und 157 StGB die Nichtigkeit des vom Gläubiger als Schuldanerkennung vorgelegten Vertrages (hier: Darlehen mit angeblich übersetztem Zins) einwendet (Erw. 2 und 3). | |
Sachverhalt | |
A.- Le 13 août 1965, l'Etablissement Parsilo, à Vaduz (en abrégé: Parsilo), et Christophe Chavannes, administrateur, à Cologny (Genève), ont conclu une "Convention de prêt partiaire avec garantie hypothécaire". Par cet accord, Parsilo prêtait à Chavannes une somme de deux millions de francs suisses, avec intérêt à 7% l'an, somme mise à la disposition de l'emprunteur dès l'inscription au registre foncier de l'hypothèque de garantie. Le débiteur déclarait vouloir payer les intérêts de la première année au moment de la mise à disposition des fonds, de telle sorte qu'il lui fut versé la somme nette de 1 860 000 fr., les intérêts de la première année représentant un montant de 140 000 fr., soit le 7% de 2 000 000 fr.
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Selon l'article 2 de la convention, l'emprunteur consentait une garantie hypothécaire maximale de 2 500 000 fr., sur des parcelles sises à Cologny, sous la forme d'une inscription hypothécaire au montant de 2 100 000 fr. et de cédules hypothécaires au porteur pour une somme globale de 400 000 fr. L'hypothèque et les cédules étaient inscrites en deuxième rang et en concours entre elles, après une hypothèque en premier rang de 600 000 fr. Les deux parties ont admis que la valeur vénale des parcelles grevées était, au moment de la convention, de 9 000 000 fr.
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Le prêt de 2 000 000 fr. était consenti pour une durée de trois ans, d'après l'article 4 de la convention. La date du remboursement était fixée jour pour jour à l'échéance des trois ans, sans dénonciation du prêt et sans mise en demeure en cas de retard. Il était précisé que la somme prêtée serait remboursée à l'échéance, compte tenu de l'indexation de la dette sur l'indice officiel suisse des prix à la consommation au jour de l'échéance, la différence étant due en plus au prêteur.
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L'article 5 prévoyait au surplus, vu notamment le caractère partiaire du prêt, que le prêteur, en plus de l'intérêt de 7%, avait droit, à l'échéance du remboursement du prêt ou en cas de vente des parcelles grevées pour le prix de 9 000 000 fr. au maximum, à un montant de 200 000 fr. "à titre de participation au résultat de l'opération et d'indemnité forfaitaire et transactionnelle", et en cas de vente des parcelles grevées à un prix supérieur à 9 000 000 fr., au 20% de la différence entre la somme de 9 000 000 fr. et le prix de vente obtenu, étant entendu que la participation totale de 20% ne pourrait être en aucun cas inférieure à 200 000 fr.
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En outre, l'article 6 de la convention conférait au prêteur, sur les parcelles grevées, un droit de préemption s'exerçant aux prix et conditions acceptés par un tiers acquéreur, l'emprunteur s'engageant, faute par lui de respecter les obligations découlant du droit de préemption, à verser au prêteur une indemnité "fixée forfaitairement et transactionnellement à 200 000 fr., sans préjudice des autres obligations découlant de la convention".
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Parsilo était représenté par Me X., avocat à Genève. C'est le débiteur Chavannes qui lui versa, pour cette opération, des honoraires à concurrence de 60 000 fr. Il paya également les frais et débours du notaire Z. par 18 284 fr. 60, à la suite de la constitution et de l'inscription de la garantie hypothécaire.
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B.- Après avoir payé les intérêts par tranches de 70 000 fr. (chaque six mois dès la deuxième année), Chavannes ne versa pas la dernière tranche de 70 000 fr. dont il devait s'acquitter le 13 août 1968 et s'opposa au remboursement du prêt de 2 000 000 fr. échu à cette même date. Parsilo lui fit alors notifier un commandement de payer dans la poursuite en réalisation d'un gage immobilier no 882 436, lui réclamant les sommes suivantes:
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a) 2 000 000 fr. avec intérêt au 7% dès le 13 août 1968 (montant du prêt résultant de la convention du 13 août 1965);
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b) 70 000 fr. (solde des intérêts conventionnels) avec intérêt au 5% du 13 août 1968;
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c) 200 000 fr. (indemnité conventionnelle), avec les mêmes intérêts;
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d) 231 664 fr. (adaptation à l'indice officiel du coût de la vie), avec les mêmes intérêts.
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Chavannes fit opposition totale au commandement de payer. Sur requête de Parsilo, le Tribunal de première instance de Genève, statuant par voie de procédure sommaire et en dernier ressort, prononça la mainlevée provisoire de l'opposition, sauf pour le montant de 70 000 fr., relatif à la dernière période des intérêts, partant de l'idée qu'ils auraient été réglés, le requérant n'ayant pas prétendu le contraire.
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C.- Chavannes appela de cette décision à la Cour de justice civile du canton de Genève. Il demanda l'annulation du jugement dans la mesure où la mainlevée provisoire avait été prononcée. Il invoquait la nullité de la convention du 13 août 1965, qu'il tenait pour illicite (art. 20 CO).
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Statuant le 18 avril 1969, la Première Section de la Cour de justice civile du canton de Genève a déclaré irrecevable l'appel de Chavannes, attendu que le jugement attaqué n'était pas entaché d'une violation de la loi. En revanche, elle a déclaré recevable et fondé l'appel de Parsilo et prononcé la mainlevée provisoire également pour le montant de 70 000 fr. susmentionné, considérant que le premier juge l'avait refusée à la suite d'une erreur matérielle.
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L'arrêt est motivé en substance comme il suit:
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Chavannes ne peut plus invoquer la lésion au sens de l'art. 21 CO, les conditions prévues par la loi n'étant pas réalisées. Du reste, l'appelant est un homme d'affaires avisé et ne saurait alléguer ni son inexpérience ni sa légèreté. Il ne par le d'ailleurs que de sa gêne.
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La nullité fondée sur l'art. 20 CO supposerait que Chavannes ait prouvé séance tenante par pièces que les avantages obtenus de lui dépassent le taux de l'intérêt conventionnel autorisé par le Concordat intercantonal du 8 octobre 1957 et les dispositions cantonales en la matière édictées en application de l'art. 73 al. 2 CO. L'art. 1er du concordat autorise un taux maximum de 1,5% de la somme réellement due au début de chaque mois (1% à titre d'intérêt, de provision, de commission et d'émolument, 0,5% pour frais et débours justifiés). En l'espèce, en plus de l'intérêt de 7%, les parties ont prévu une indemnité conventionnelle de 200 000 fr., une indexation du capital à rembourser suivant le coût de la vie, d'où il résulte finalement un montant de 231 664 fr. à la charge du débiteur, les honoraires de Me X. par 60 000 fr. et les honoraires du notaire Z. par 18 284 fr. 60, soit un montant total de 509 948 fr. 60 pour trois ans, ce qui représente par année un intérêt supplémentaire de 8,50%. L'intérêt total étant de 15,50% et par conséquent inférieur au taux autorisé de 18%, la convention litigieuse n'est pas nulle au sens de l'art. 20 CO.
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D'ailleurs, même si les intérêts et les autres avantages stipulés avaient dépassé le taux prévu par la loi, seules les clauses relatives à l'indemnité de 200 000 fr. et à l'indexation du capital, qui se traduit par un supplément de 231 664 fr., auraient pu être considérées comme nulles, le droit au remboursement du capital et à un intérêt normal subsistant de toute façon (RO 93 II 192).
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Quant au grief d'usure invoqué également par Chavannes, qui est une notion essentiellement pénale (art. 157 CP), il ne peut pas non plus être retenu. La preuve notamment des conditions subjectives du délit (exploitation de l'état de gêne ou de dépendance, de la faiblesse d'esprit, de l'inexpérience, de la faiblesse de caractère ou de la légèreté d'une personne) n'a pas été rapportée, sur le vu des pièces produites.
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D.- Agissant par la voie du recours de droit public pour violation de l'art. 4 Cst., Chavannes requiert le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 18 avril 1969. Il se plaint d'une violation flagrante et arbitraire des art. 20 CO et 157 CP.
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A l'appui de son recours, il a produit notamment un avis de droit dont l'auteur examine si la convention du 13 août 1965 tombe sous le coup de l'art. 157 CP qui réprime l'usure.
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Parsilo conclut à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.
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La Cour de justice civile de Genève s'est référée à son arrêt, tout en se déterminant sur quelques points particuliers.
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Considérant en droit: | |
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2. Aux termes de l'art. 82 al. 1 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire. Le juge la prononce, si le poursuivi ne justifie séance tenante de sa libération (art. 82 al. 2 LP). Selon la jurisprudence, il suffit que le débiteur rende sa libération plausible ou vraisemblable (cf. PANCHAUD/CAPREZ, La mainlevée d'opposition, § 26, p. 59). La procédure est sommaire (art. 25 ch. 2 LP) et le juge statue sur la demande de mainlevée, sinon dans le délai d'ordre de cinq jours prévu à l'art. 84 LP, du moins à bref délai, les parties entendues.
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Saisi d'un recours de droit public pour violation de l'art. 4 Cst., le Tribunal fédéral ne procède pas à un libre examen de toutes les circonstances de la cause et ne rend pas un arrêt au fond, qui se substituerait à la décision attaquée. Il se borne à contrôler si l'autorité cantonale a observé les principes que la jurisprudence a déduits de l'art. 4 Cst. Son examen ne porte du reste que sur les moyens invoqués par le recourant et motivés conformément aux exigences de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ.
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Le recourant se plaint en l'espèce d'inégalité de traitement. Mais en réalité, son grief essentiel est celui d'arbitraire. Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement et manifestement une norme juridique ou un principe de droit clair et incontestable ou encore lorsqu'elle heurte d'une manière choquante le sentiment de la justice (RO 90 I 139). Pour qu'une décision soit annulée à la suite d'un recours de droit public pour arbitraire, il ne suffit pas qu'elle apparaisse simplement erronée ou inopportune. Il faut qu'elle soit insoutenable, dépourvue de toute justification sérieuse, prise en violation d'un droit certain (cf. FAVRE, Droit constitutionnel suisse, p. 255).
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a) La jurisprudence admet qu'un contrat de prêt d'une somme d'argent est entaché de nullité partielle au sens de l'art. 20 al. 2 CO lorsque l'intérêt convenu apparaît contraire aux moeurs ou illicite parce qu'il viole les prescriptions du droit public cantonal réprimant les abus en matière d'intérêt conventionnel, réservées par l'art. 73 al. 2 CO (RO 80 II 327, 93 II 189). Le concordat intercantonal réprimant les abus en matière d'intérêt conventionnel du 8 octobre 1957, auquel le canton de Genève est partie (ROLF 1958 p. 384), n'autorise qu'un intérêt maximal de 1% par mois et une prestation supplémentaire à la charge de l'emprunteur de 0,5% par mois au maximum pour les frais et les débours justifiés du prêteur. Examinant le moyen soulevé par le recourant, qui se prévalait d'une violation des règles concordataires, la Cour de justice civile de Genève, appréciant les pièces produites, a jugé que l'intérêt et les prestations supplémentaires convenus en l'espèce ne dépassaient pas la limite fixée par le concordat. Dans son recours de droit public, Chavannes affirme que cette décision est arbitraire. Il se trompe. Sur le vu des pièces produites dans la procédure de mainlevée, il n'était en tout cas pas insoutenable de conclure que le poursuivi n'avait pas rendu vraisemblable que la convention du 13 août 1965 fût nulle pour cause de violation des prescriptions susmentionnées. Du reste, on peut se demander si le concordat intercantonal, qui visait surtout, dans l'intention de ses auteurs, les abus en matière de petit crédit (cf. par exemple l'exposé des motifs du Conseil d'Etat vaudois, Bulletin des séances du Grand Conseil du canton de Vaud, automne 1957, p. 600), est applicable à un prêt de 2 000 000 fr. consenti par un établissement financier à un homme d'affaires qui pratique des opérations immobilières. La Chambre de droit public n'a pas à résoudre la question. Ce sera l'affaire du tribunal arbitral qui statuera, après une instruction complète, sur l'action en libération de dette que Chavannes a déjà ouverte.
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b) La juridiction cantonale a nié également que le recourant ait rendu sa libération vraisemblable en alléguant que le contrat du 13 août 1965 était nul parce qu'il tombait sous le coup de l'art. 157 CP qui réprime l'usure. Sans exclure absolument que le poursuivi puisse invoquer, pour justifier de sa libération au sens de l'art. 82 al. 2 LP, la commission d'une infraction réprimée par la loi pénale, il convient de rappeler que la procédure sommaire de mainlevée d'opposition ne se prête guère à la présentation d'un pareil moyen. Néanmoins, la juridiction cantonale a soigneusement examiné les griefs du recourant et apprécié les pièces qu'il avait produites à l'appui de ses allégations. Or il n'était en tout cas pas insoutenable de juger en l'espèce que le poursuivi n'avait pas rendu suffisamment vraisemblable, au regard de l'art. 82 al. 2 LP, qu'il était la victime d'un crime d'usure au sens de l'art. 157 CP. A cet égard non plus, la décision attaquée n'est pas arbitraire.
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4. Le recours de droit public apparaît ainsi comme entièrement mal fondé, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs, qui se rapportent au fond de la cause. Il appartiendra à Chavannes de faire valoir ses moyens dans l'action en libération de dette qu'il a intentée à Parsilo et dont le sort n'est évidemment pas préjugé par le présent arrêt, ni du reste par la décision rendue par l'autorité cantonale dans la procédure de mainlevée d'opposition.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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