BGE 97 I 893 | |||
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129. Extrait de l'arrêt du 1er décembre 1971 dans la cause Küpfer contre Conseil d'Etat du canton de Genève | |
Regeste |
Initiativrecht. Unterschriftensammlung auf öffentlicher Strasse. Art. 85 lit. a OG |
2. Meinungsäusserungsfreiheit, Initiativrecht; Umfang dieser Rechte (Erw. 4). |
3. Es ist mit der Meinungsäusserungsfreiheit und mit dem Initiativrecht vereinbar, die Sammlung von Unterschriften auf öffentlicher Strasse von einer behördlichen Bewilligung abhängig zu machen (Erw. 5). |
4. Voraussetzungen, von denen die Bewilligung abhängig gemacht werden darf (Erw. 6 und 7). | |
Sachverhalt | |
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A.- Les 10 août et 14 septembre 1971, le Département de justice et police du canton de Genève a été saisi de deux requêtes tendant à obtenir l'autorisation de récolter des signatures sur la voie publique à l'appui de l'initiative populaire fédérale concernant la "décriminalisation de l'avortement". Ces requêtes émanaient toutes deux de membres du Comité d'initiative fédéral ou genevois. La seconde relevait notamment que la récolte de signatures pour la même initiative s'était faite sur la voie publique à Bâle, Berne, Thoune, Berthoud, Soleure, Aarau, Zurich, Winterthur, Schaffhouse, Saint-Gall, Bellinzone, Lausanne, Yverdon et Neuchâtel, sans qu'il en soit résulté aucun trouble quelconque pour l'ordre public.
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Dans les deux cas, le département a refusé l'autorisation demandée, dans le second après en avoir référé au Conseil d'Etat. Il déclarait que, de façon constante et depuis longtemps, il s'était toujours opposé à la récolte de signatures sur la voie publique, un tel mode de faire étant de nature à gêner la circulation et à provoquer des attroupements, voire des affrontements et des incidents, suivant l'objet de l'initiative, du référendum ou de la pétition. Comme il est exclu, disait-il, d'accorder ou de refuser l'autorisation en fonction de cet objet, la seule solution possible est de refuser dans tous les cas la récolte de signatures sur la voie publique, le droit d'initiative pouvant facilement s'exercer par d'autres moyens.
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Ces deux premières décisions n'ont pas fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral.
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B.- Déclarant agir au nom du "Comité onésien de soutien à l'initiative fédérale pour la décriminalisation de l'avortement", Anne-Marie Küpfer a demandé à son tour au Département cantonal de justice et police et au Conseil d'Etat, par lettres du 20 septembre 1971, l'autorisation de récolter des signatures sur la voie publique à Onex, "notamment dans l'agglomération et dans le centre commercial". A la différence des deux précédentes, cette requête ne précisait pas que des stands ou des tables seraient installés sur la voie publique; elle ne disait rien de la façon dont on procéderait à la récolte des signatures.
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C.- Contre la décision du Conseil d'Etat, Anne-Marie Küpfer a formé en temps utile un recours de droit public. Elle conclut à l'annulation de la décision attaquée, tout en demandant au Tribunal fédéral de dire qu'aucune autorisation préalable n'était nécessaire en l'espèce et que, par conséquent, la recourante pourra collecter librement sur la voie publique, aux emplacements indiqués dans sa requête initiale, des signatures à l'appui de l'initiative en cause.
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A la forme, le recours se fonde sur les art. 84 al. 1 lettre a et 85 lettre a OJ. Quant au fond, la recourante allègue la violation de la liberté d'expression, de ses droits politiques et du principe d'égalité.
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Le Conseil d'Etat conclut au rejet du recours.
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Les motifs du recours et de la réponse seront repris ci-dessous, dans la mesure utile.
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Extrait des motifs: | |
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Ainsi que le Tribunal fédéral l'admet depuis longtemps, le droit d'initiative et le droit de référendum font partie des droits politiques des citoyens, sont considérés comme des droits constitutionnels garantis par la constitution fédérale et bénéficient de la protection de l'art. 85 lettre a OJ (RO 59 I 121, 94 I 124 consid. 1a et les arrêts cités). Sans doute cette opinion a-t-elle généralement été émise à l'occasion de cas où l'autorité compétente refusait de soumettre au vote populaire une demande d'initiative qu'elle considérait comme irrecevable, ou de cas dans lesquels un acte législatif sujet au référendum facultatif ou obligatoire y était soustrait. Le citoyen actif se trouvait alors privé de la faculté d'exercer son droit de vote dans une affaire à propos de laquelle la constitution ou la loi lui donnait le droit de s'exprimer. Mais il n'y a pas de raison de ne pas mettre déjà la récolte des signatures - en faveur d'une initiative ou d'une demande de référendum - au bénéfice de la protection de l'art. 85 lettre a OJ. Le droit d'initiative populaire comprend en effet la double faculté de lancer une initiative et de tout mettre en oeuvre pour recueillir les signatures nécessaires à son aboutissement, sans être entravé de façon injustifiée de la part des pouvoirs publics.
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La recourante pouvait donc fonder son recours sur l'art. 85 lettre a OJ pour se plaindre de la violation de ses droits politiques, comme sur l'art. 84 al. 1 lettre a OJ en alléguant la violation du principe de l'égalité et de la liberté d'expression.
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Lorsque la recourante demande de pouvoir organiser sur la voie publique une collecte de signatures en vue d'une initiative populaire, sa prétention sort donc du cadre de la simple liberté d'expression. En revanche, le droit d'initiative populaire en tant que droit politique dont se prévaut aussi la recourante va plus loin que la simple liberté d'expression, en ce qu'il comprend la faculté pour chaque citoyen non seulement de lancer une initiative populaire, mais encore d'agir de façon efficace pour la faire aboutir, dans le respect de l'ordre public et de la liberté d'autrui. Mais, en principe, un droit constitutionnel du citoyen ne va pas jusqu'à comprendre la faculté d'exiger une prestation quelconque de la part des pouvoirs publics, en dehors de facultés qui peuvent découler de la nature même d'un certain droit (cf. RO 97 I 230, consid. 4 d; AUBERT, Traité de droit constitutionnel suisse, p. 630, no 1751), ou qui sont prévues par une disposition expresse (à Genève, faculté de faire tenir des listes à la disposition des électeurs dans les mairies et au département, prévue par l'art. 125 de la loi du 25 juin 1961 sur les votations et élections). En l'absence de disposition applicable en l'espèce, il s'agit donc d'examiner si la recourante peut se fonder sur le droit d'initiative pour exercer la faculté qui lui a été refusée.
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5. La recourante soutient qu'une autorisation n'était pas nécessaire pour recueillir sur le domaine public des signatures à l'appui de l'initiative. Elle se fonde en particulier sur l'arrêt Aleinick (RO 96 I 586). Quant à l'exigence d'une base légale pour imposer le régime de l'autorisation préalable, elle prétend que le règlement concernant la tranquillité publique ne pouvait être invoqué comme base légale par le Conseil d'Etat, car il ne soumet à autorisation préalable que l'exercice de la liberté de réunion et de manifestation, et non l'exercice de la liberté d'expression. Le Conseil d'Etat, dans sa réponse, invoque encore comme base légale la loi sur le domaine public du 24 juin 1961.
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Selon la jurisprudence, les pouvoirs publics peuvent subordonner à une autorisation préalable l'usage privatif du domaine public par un particulier même lorsque aucune disposition légale ne le prévoit (RO 95 I 249 consid. 3 et les arrêts cités). Dans l'arrêt Aleinick (RO 96 I 591 consid. 5) le Tribunal fédéral a laissé ouverte la question de savoir si la distribution de tracts sur le domaine public constituait un usage accru de ce domaine. Il s'est demandé en revanche si les règles relatives à l'utilisation du domaine public (notamment l'exigence de l'autorisation préalable même sans base légale) s'appliquaient aussi lorsque était en jeu l'exercice des libertés fondamentales du citoyen. Il n'a pas résolu la question pour la généralité des cas, mais seulement pour le cas d'espèce, où il a estimé qu'une autorisation préalable n'était pas nécessaire, s'agissant de la distribution de tracts par une seule personne sur un trottoir à la sortie d'une usine. Pour les raisons indiquées ci-dessous, on peut également se dispenser de trancher ici ce point.
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Il ne saurait être question, en effet, de laisser recueillir des signatures sur la voie publique n'importe où et n'importe quand. Si une telle récolte se fait par exemple sur des trottoirs étroits ou très passants, l'attroupement qu'elle provoque - même sans installation de tables ou de stands - ne manque pas de gêner la circulation des piétons et peut aller jusqu'à créer un danger pour le trafic des véhicules à moteur sur la chausése elle-même, les piétons devant emprunter cette chaussée pour pouvoir passer. D'autre part, la cueillette simultanée de signatures pour des initiatives ou pétitions portant sur des objets opposés peut provoquer des incidents, voire des affrontements violents. Il est dès lors indispensable, dans la plupart des cas, de régler l'organisation de telles collectes et de fixer des conditions de lieux et de temps qui permettent d'éviter les inconvénients signalés ci-dessus.
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Même si une réglementation n'était pas indispensable dans certains cas, le simple fait qu'elle soit le plus souvent nécessaire suffit à justifier le principe général de l'autorisation préalable, à défaut de quoi la situation juridique serait incertaine - le départ entre les deux catégories de cas étant difficile à faire dans la pratique - et créerait facilement l'impression d'une inégalité de traitement.
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Sans doute peut-on se demander si la mesure un peu moins restrictive consistant simplement à annoncer à l'autorité la collecte envisagée ne suffirait pas; elle permettrait à l'autorité d'intervenir à temps en imposant les conditions requises par la sauvegarde de l'ordre et de la tranquillité publics, voire en prononçant une interdiction totale ou partielle lorsque des circonstances spéciales le justifieraient. Mais cela reviendrait pratiquement au même, car le régime de l'autorisation préalable ne signifie pas que l'autorité peut accorder ou refuser selon son bon plaisir l'autorisation sollicitée (RO 96 I 232). D'autre part, lorsqu'il s'agit de récolter des signatures sur la voie publique, les initiateurs disposent en général du temps nécessaire pour entreprendre les démarches préalables, contrairement à ce qui peut se passer pour des manifestations spontanées, question que le Tribunal fédéral a évoquée dans l'arrêt Nöthiger(RO 96 I 233), sans qu'il ait eu besoin de la trancher.
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Il faut admettre en conclusion que le régime de l'autorisation préalable pour la collecte de signatures sur la voie publique ne viole pas la liberté d'expression, ni le droit d'initiative qui appartient à chaque citoyen.
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a) Comme on l'a déjà relevé plus haut, l'autorité n'est pas libre d'accorder ou de refuser l'autorisation d'utiliser le domaine public, surtout pas lorsqu'il s'agit de l'exercice des libertés fondamentales.
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Elle doit apprécier objectivement les intérêts qui s'affrontent. Elle doit en outre respecter le principe de la proportionnalité et ne pas opposer un refus là où une autorisation assortie de certaines conditions et charges restrictives peut suffire. Alors même qu'il faut laisser à l'autorité cantonale une certaine marge d'appréciation, le Tribunal fédéral jouit d'un pouvoir de libre examen, s'agissant de l'exercice d'un droit constitutionnel; tout au plus s'impose-t-il une certaine retenue en raison des circonstances locales, que les autorités cantonales, plus proches, sont mieux à même de saisir et d'apprécier.
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b) En l'espèce, l'autorité cantonale a refusé l'autorisation pour des raisons de principe, conformément à sa pratique constante dès 1952 en matière d'initiative populaire et de référendum: la récolte des signatures sur la voie publique est de nature à gêner la circulation et à provoquer des attroupements, voire des incidents, alors que d'autres moyens sont à disposition, qui ne présentent pas les mêmes inconvénients. Le Conseil d'Etat n'a donc pas statué in casu, selon son bon plaisir. Le grief d'inégalité de traitement, d'ailleurs non motivé, est en tout cas mal fondé.
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Aux motifs invoqués jusqu'à maintenant, le Conseil d'Etat en ajoute un autre dans sa réponse au recours: la collecte de signatures sur la voie publique porte atteinte à la liberté du citoyen de signer ou de ne pas signer une initiative ou un référendum, les passants pouvant être entraînés, contre leur gré, à donner leur accord sous la pression de la rue.
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c) Il y a lieu d'examiner ces différents motifs et leur compatibilité avec les droits constitutionnels invoqués.
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aa) Le Conseil d'Etat mentionne tout d'abord l'entrave à la circulation sur la voie publique. Il est vrai que la récolte de signatures est plus gênante que la vente d'insignes ou d'autres objets, elle-même sujette à autorisation et très souvent autorisée; elle peut également provoquer des attroupements et aller parfois jusqu'à créer des dangers pour la circulation des véhicules sur la chaussée elle-même, ainsi qu'on l'a relevé plus haut (consid. 5). Mais ces inconvénients peuvent être écartés par une autorisation assortie de conditions restrictives: exclusion de certains endroits resserrés ou à trafic particulièrement dense, limitation de la récolte à des endroits ou en des moments déterminés. Le refus d'autorisation ne pourrait donc se fonder sur ce seul motif.
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bb) Le Conseil d'Etat insiste surtout sur le risque d'attroupements, d'incidents et de contre-manifestations que peut engendrer la récolte de signatures sur la voie publique. Il fait état du climat d'agitation entretenu par des groupements extrémistes qui ont organisé ces derniers temps des manifestations et contre-manifestations violentes, au cours desquelles il y eut des blessures, parfois graves, notamment parmi les forces de police.
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Ces manifestations étaient cependant étrangères à l'exercice du droit d'initiative ou de pétition. La liste des demandes d'autorisations présentées depuis 1952 en vue de récolter des signatures sur la voie publique montre que, d'une façon générale, les objets pour lesquels le public était sollicité d'apporter son appui par une signature n'étaient pas de nature à provoquer des incidents graves et des affrontements violents. Au surplus, des collectes semblables, organisées dans d'autres villes, n'ont pas causé de difficultés spéciales aux organes de la police.
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On ne peut donc pas se fonder sur les incidents éventuels que pourrait provoquer l'une ou l'autre initiative ou pétition pour interdire de façon générale la cueillette de signatures sur le domaine public.
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Il est vrai qu'en l'espèce, le gouvernement genevois fait encore état d'une demande d'autorisation présentée par les adversaires de l'initiative, en vue de récolter sur la voie publique des signatures à l'appui d'une pétition intitulée "oui à la vie, non à l'avortement et à l'immoralité". Mais il est possible d'éviter les incidents et heurts que pourrait provoquer la collecte simultanée de signatures pour deux objets opposés en fixant des conditions de lieux et de temps bien précises, propres à éliminer les risques de tels incidents. Et si une telle autorisation devait malgré tout engendrer des troubles, les pouvoirs publics garderaient la faculté de la révoquer, même dans le cas où les perturbateurs directs ne seraient pas les organisateurs de la collecte; car on ne saurait admettre que l'autorisation d'utiliser le domaine public à des fins spéciales soit l'occasion de troubles pour l'ordre public.
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Il n'est d'ailleurs pas exclu qu'en raison de risques sérieux et imminents pour l'ordre public, engendrés par des circonstances spéciales de temps, de lieux et même d'objet (par exemple le fait qu'une initiative s'en prendrait à une catégorie déterminée de personnes), l'autorisation de récolter des signatures sur la voie publique puisse être refusée d'emblée.
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cc) Le Conseil d'Etat estime enfin que la récolte de signatures sur la voie publique n'est pas souhaitable, parce qu'elle ne respecte pas suffisamment la liberté de l'électeur. Il est vrai que, sous la pression de la rue, certaines personnes pourraient être entraînées à donner une signature qu'elles refuseraient dans d'autres conditions. Mais ce n'est pas là une raison suffisante pour interdire une telle collecte: d'une part, il est dans l'ordre normal des choses que chacun s'efforce, sur le plan politique, de gagner d'autres personnes à ses idées; d'autre part, la pression exercée n'est en réalité pas très forte, et l'on peut attendre des citoyens et citoyennes qu'ils sachent résister à des opinions qu'ils ne partagent pas.
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d) Si l'on examine l'intérêt qu'ont les partisans d'une initiative à pouvoir récolter des signatures sur la voie publique, on doit admettre que cet intérêt est important: ce mode de faire compte certainement parmi les moyens les plus efficaces et les plus faciles d'arriver au but visé. C'est sur la voie publique, surtout dans les villes, que l'on peut atteindre en moins de temps le maximum de personnes. Il est vrai que d'autres moyens existent: récolte lors d'assemblées politiques, signature au secrétariat communal ou au département cantonal (à Genève), voire dans les magasins et établissements publics, collecte de porte à porte, distribution de cartes postales munies d'une partie à détacher et renvoyer, annonce dans la presse avec formule à découper et renvoyer. Cependant, la plupart de ces autres moyens sont en général moins efficaces, soit qu'ils ne permettent d'atteindre qu'un petit nombre de citoyens et citoyennes, soit qu'ils demandent beaucoup de temps et qu'ils nécessitent le concours d'un très grand nombre de collaborateurs; mais surtout, la plupart d'entre eux sont beaucoup plus coûteux, ce qui peut constituer un obstacle majeur pour les citoyens et groupements de citoyens qui ne disposent pas de moyens financiers importants. Sans doute l'interdiction d'utiliser la voie publique à Genève n'a-t-elle pas empêché plusieurs initiatives et demandes de référendums d'aboutir au cours de ces dernières années. Mais ce n'est pas là une raison suffisante pour refuser de mettre à disposition le domaine public en vue de faciliter l'exercice d'un droit populaire.
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e) En mettant finalement en opposition, d'une part l'intérêt de l'Etat à éviter les causes de désordre, d'autre part l'intérêt des citoyens à ce que soit facilité l'exercice d'un droit constitutionnel important pour le bon fonctionnement de la démocratie, on doit constater qu'en l'espèce le second doit l'emporter: en effet, les risques de troubles pour la libre circulation des piétons, pour l'ordre et la tranquillité publics et pour la liberté du citoyen peuvent être atténués, voire évités, par des mesures moins incisives qu'une interdiction pure et simple. Ils ne sont pas assez importants pour justifier la décision attaquée.
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Le recours doit dès lors être admis.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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