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7. Arrêt de la Ie Cour civile du 3 mars 1998 dans la cause S. contre société A. (recours de droit public) | |
Regeste |
Feststellung des ausländischen Rechts; Anspruch auf rechtliches Gehör (Art. 4 BV, Art. 16 IPRG). | |
Sachverhalt | |
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Le litige a pour origine un contrat dit de "lease", portant sur de l'équipement lourd de construction, que le défendeur, désigné comme preneur, avait signé le 19 mars 1983 avec une société saoudienne, ![]() | 2 |
Sur le fond, le défendeur a conclu au déboutement de la demanderesse. Contestant avoir été partie au contrat de "lease", qu'il aurait signé au nom d'une société tierce, il soutenait, en toute hypothèse, que la convention du 19 mars 1983 était nulle, au regard du droit saoudien, parce qu'elle combinait des éléments de la vente et du bail.
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Le Tribunal a ordonné aux parties de prouver le contenu du droit saoudien applicable au litige, conformément à l'article 16 al. 1 de la loi fédérale sur le droit international privé (LDIP; RS 291). Les parties ont alors déposé des écritures complémentaires s'appuyant sur divers avis de droit.
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Par jugement du 12 août 1996, le Tribunal, faisant sien l'argument du défendeur relatif à la nullité de la convention litigieuse, a rejeté la demande.
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B.- La demanderesse ayant appelé de ce jugement, la Cour de justice du canton de Genève a sollicité un avis de droit de l'Institut suisse de droit comparé (ISDC), à Lausanne, en lui transmettant ceux qui avaient été produits par les parties. L'avis de droit de l'ISDC a été établi le 14 mars 1997.
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Statuant par arrêt du 23 mai 1997, la Cour de justice a annulé le jugement de première instance et condamné le défendeur à payer à la demanderesse la somme de 7 627 256 SR sans intérêts. Elle a considéré, en bref, sur le vu de l'avis de droit de l'ISDC, que la convention du 19 mars 1993 était valable, si bien que les conclusions de la demanderesse pouvaient être accueillies, hormis celle qui avait trait au paiement d'un intérêt moratoire.
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C.- Parallèlement à un recours en réforme, le défendeur exerce un recours de droit public pour violation de l'art. 4 Cst. Il conclut à l'annulation de l'arrêt rendu par la Cour de justice.
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Le Tribunal fédéral admet le recours et annule l'arrêt attaqué.
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Considérant en droit: | |
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La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu, en particulier, le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier et celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos. En effet, le droit d'être entendu est à la fois une institution servant à l'instruction de la cause et une faculté de la partie, en rapport avec sa personne, de participer au prononcé de décisions qui lèsent sa situation juridique (ATF 122 I 53 consid. 4a, 109 consid. 2a; ATF 114 Ia 97 consid. 2a et les arrêts cités).
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b) Selon l'art. 16 LDIP, le contenu du droit étranger est établi d'office. A cet effet, la collaboration des parties peut être requise. En matière patrimoniale, la preuve peut être mise à la charge des parties.
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c) Sur le plan de la procédure, à Genève notamment, les avis de droit destinés à établir le contenu d'un droit étranger ne sont pas assimilés à des rapports d'experts, car le contenu de ce droit ne relève pas du fait (BERTOSSA/GAILLARD/GUYET, Commentaire de la loi de procédure civile genevoise, n. 3 in fine ad art. 255). Cela n'implique pas forcément que les parties ne puissent pas en prendre connaissance et se déterminer à leur propos comme à l'égard des preuves proprement dites. Le droit d'être entendu confère en effet aux parties le droit de s'exprimer sur tous les points importants avant qu'une décision soit prise; si cette règle s'applique sans restriction pour les questions de fait, il est admis que, pour ce qui est de la qualification juridique de ceux-ci, elle vaut dans l'hypothèse où une partie change inopinément son point de vue juridique ou lorsque l'autorité a l'intention de s'appuyer sur des arguments juridiques inconnus des parties et dont celles-ci ne pouvaient prévoir l'adoption (ATF 114 Ia 97 consid. 2a; cf. G. MÜLLER, in: Commentaire de la Constitution fédérale, n. 105 ad art. 4).
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A propos de la preuve du droit étranger, le Tribunal fédéral a posé, en se référant à la doctrine, qu'il ne s'agit pas là d'une preuve au sens strict du terme ("dabei geht es um den Nachweis, nicht um einen ![]() | 17 |
Ainsi que le relèvent avec pertinence KNOEPFLER et SCHWEIZER (op.cit., n. 559), il n'y a rien d'incohérent à considérer la norme étrangère comme une règle de droit tout en assimilant la recherche de son contenu à l'élucidation d'un point de fait. Le principe jura novit curia ne s'y oppose pas, car la règle étrangère n'appartient pas au système dont les normes doivent être connues, appliquées et concrétisées par les autorités chargées d'en assurer le fonctionnement (cf. également: P. VOLKEN, Die internationale Rechtshilfe in Zivilsachen, p. 139/140).
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d) Un arrêt publié de la Cour de cassation de Zurich (ZR 95/1996 n. 2, p. 7 ss), cité par DUTOIT (Commentaire de la loi fédérale du 18 décembre 1987, 2e éd., n. 5 in fine ad art. 16) et par FRANK/STRÄULI/MESSMER (op.cit., n. 19 ad § 57), pose toutefois le principe selon lequel l'art. 16 LDIP ne ferait pas obligation au juge de donner aux parties la possibilité de prendre position sur le droit applicable entre la fin de l'instruction et l'application du droit étranger. D'après le même arrêt, dans les causes patrimoniales, lorsque le juge renonce à la collaboration des parties et applique le droit étranger déterminé selon les règles de la LDIP, il ne serait pas davantage tenu, sur la ![]() | 19 |
A supposer que cette manière de voir soit fondée - ce qui n'est pas forcément le cas, comme on l'a indiqué plus haut, lorsque le juge s'appuie sur des arguments juridiques inconnus des parties et dont celles-ci ne pouvaient prévoir l'adoption (cf. FRANK/STRÄULI/MESSMER, op.cit., n. 15 ad § 56 et n. 16a ad § 57) -, elle ne pourrait concerner que les cas où le juge applique le droit étranger sur la base de données générales qui sont à sa disposition, comme il le fait lorsqu'il applique le droit suisse. Mais il est exclu qu'elle s'applique lorsque le juge fait appel à des avis de tiers, autorités, experts, ou instituts. Dans une telle hypothèse, comme on l'a vu et comme on doit le poser fermement, la possibilité doit être offerte aux parties de prendre connaissance du résultat des recherches du juge, afin qu'elles puissent faire valoir leurs observations à cet égard.
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e) Cela étant, il est manifeste, en l'occurrence, qu'en sollicitant un avis de droit de l'ISDC, dont elle n'a pas donné connaissance aux parties, et en se fondant entièrement sur ce document qui s'écartait des autres avis de droit produits par les parties, la cour cantonale a violé le droit d'être entendu de celles-ci, tel qu'il est garanti par l'art. 4 Cst.
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