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34. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause Comité d'initiative 119, Marie-Paule Blanchard-Queloz, René Ecuyer et Pierre Vanek contre Grand Conseil du canton de Genève (recours de droit public) |
1P.40/2003 du 25 septembre 2003 | |
Regeste |
Art. 85 lit. a OG; Einheit der Materie. | |
Sachverhalt | |
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Titre XIIIA
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Art. 170C Caisse cantonale d'assurance-maladie (nouveau)>
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1. Le canton est doté d'une caisse d'assurance-maladie et accidents au sens du droit fédéral, ayant pour mission de garantir aux habitant-e-s du canton et aux personnes qui y travaillent, une couverture de soins complète. Cette caisse à but social est constituée sous forme d'établissement public autonome dans le cadre des limites fixées par la loi.
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2. Elle a pour dénomination "caisse cantonale d'assurance-maladie" et elle offre comme prestations l'assurance-maladie et accidents de base et l'assurance individuelle d'indemnités perte de gain, conformément aux dispositions du droit fédéral, sous forme d'assurance individuelle ou collective. L'assurance maternité cantonale est réservée.
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4. Elle fixe ses primes de manière à ce qu'elles soient au moins 10% inférieures à la moyenne des primes des autres caisses-maladie exerçant leur activité sur le territoire du canton. Elle soumet toute augmentation de celles-ci à l'approbation du Conseil d'Etat.
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5. Elle doit appliquer le principe du tiers payant et rembourser directement les factures de soins, d'hospitalisation, de médicaments et de rééducation.
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6. La caisse est gérée par un conseil formé de six membres désignés par le Conseil d'Etat et d'un membre par parti représenté au Grand Conseil, élus par lui.
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7. Elle est soumise au contrôle financier et de gestion de l'Etat. Elle soumet ses comptes, qui sont rendus publics, à un organe de contrôle indépendant désigné par le Conseil d'Etat.
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8. Elle bénéficie d'un fonds de réserve constitué par l'Etat, d'une garantie financière de celui-ci et de subventions destinées à diminuer progressivement les primes des personnes seules ou de couples dont le revenu annuel net imposable est inférieur à 50 000 fr., respectivement 75 000 fr., ou ayant plus d'un enfant mineur à charge. Les limites de revenus sont réadaptées chaque année en fonction de l'évolution de l'indice genevois des prix à la consommation.
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9. Les personnes dont le canton prend en charge les primes d'assurance-maladie dans le cadre de ses lois de prestations sociales sont tenues de s'affilier à la caisse-maladie publique pour bénéficier de cette prise en charge financière.
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Titre XIIIB
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Art. 170D Sauvegarde des services publics (nouveau)
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Aucune privatisation, transfert ou sous-traitance d'une activité relevant de l'Etat, d'un service public, d'un établissement, d'une fondation ou d'une autre institution de droit public à une entreprise ou une institution de droit privé ne peut être effectué sans avoir fait l'objet d'une loi votée par le Grand Conseil soumise au référendum obligatoire. Il en est de même pour toute cessation d'activité ou transfert d'actifs à un établissement public autonome ou à une entreprise ou une institution de droit privé.
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Dans son rapport au Grand Conseil du 29 mai 2002, le Conseil d'Etat a considéré que l'initiative ne respectait pas le principe d'unité de la matière puisqu'elle visait d'une part à créer un établissement cantonal d'assurance-maladie, et d'autre part à assurer la sauvegarde ![]() | 16 |
Se fondant sur l'avis exprimé le 11 avril 2002 par l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), le Conseil d'Etat estimait en outre que, sur plusieurs points, l'initiative violait les prescriptions de la LAMal (RS 832.10): l'art. 170C al. 1 et 3 dans la mesure où les assurés peuvent être domiciliés dans un autre canton; l'art. 170C al. 2, en tant qu'il prévoit une assurance collective pour l'assurance obligatoire des soins; l'art. 170C al. 4, car il ne permet pas de fixer les primes en fonction des coûts; l'art. 170C al. 5, qui impose le système du tiers payant aux assureurs et aux prestataires de soins; l'art. 170C al. 7, le canton ne pouvant substituer son contrôle à celui de l'OFAS; l'art. 170C al. 8, dans la mesure où la caisse cantonale ne serait pas gérée de façon autonome; l'art. 170C al. 9 en tant qu'il oblige à s'affilier à la caisse cantonale pour bénéficier du subside intégral. Même si, avec l'annulation de ces dispositions, l'initiative perdait l'essentiel de sa substance, il pouvait se justifier de soumettre au peuple le principe d'une caisse cantonale d'assurance-maladie, soumise aux mêmes contraintes légales et économiques que les autres caisses pratiquant à Genève.
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S'agissant de l'art. 170D, le Conseil d'Etat l'estimait recevable, tout en se demandant si les signatures recueillies pour l'initiative l'eussent également été pour ce seul objet. Le Conseil d'Etat proposait également le rejet de cette partie de l'initiative, ou éventuellement la formulation d'un contre-projet.
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Par décision du 13 décembre 2002, publiée sans motivation dans la Feuille d'Avis Officielle du 18 décembre suivant, le Grand Conseil genevois a déclaré nulle l'IN 119.
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Par acte du 16 janvier 2003, le Comité d'initiative, ainsi que ses membres agissant à titre personnel, forment un recours de droit public par lequel ils concluent à l'annulation de cette dernière décision.
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Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
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Extrait des considérants: | |
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Ce principe est rappelé à l'art. 66 al. 2 Cst./GE, selon lequel il doit exister un "rapport intrinsèque" entre les diverses parties d'une initiative. Les recourants semblent soutenir que ce principe devrait être appliqué de manière plus souple, notamment compte tenu des buts de la révision de la constitution genevoise de 1992. Le libellé de l'art. 66 al. 1 Cst./GE ne justifie pas une telle interprétation: la notion de "rapport intrinsèque" est commune aux droits constitutionnels genevois et fédéral, et doit s'interpréter de la même manière: le principe d'unité de la matière est inhérent à la notion même d'initiative, celle-ci devant poser une question claire aux citoyens au moment du vote. Le critère déterminant est donc de savoir si, telle qu'elle est proposée, l'initiative permet d'exprimer librement la véritable volonté des citoyens (GRISEL, Initiative et référendum populaires, Berne 1997, p. 250-251).
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Force est par conséquent d'admettre qu'il n'existe pas un lien objectif suffisant entre, d'une part, les dispositions relatives à la création d'une caisse cantonale d'assurance-maladie, comportant des règles détaillées de gestion de la caisse et, d'autre part, la soumission au référendum facultatif de toute décision relative à la privatisation ou au transfert de l'ensemble des activités de l'Etat. Il n'y a pas en l'occurrence une idée centrale que viendraient concrétiser diverses propositions, mais bien deux projets de nature totalement distincte.
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Le principe d'unité de la matière n'est donc manifestement pas respecté, de sorte qu'il convient d'examiner si l'annulation totale prononcée par le Grand Conseil constitue une sanction conforme aux droits politiques, et en particulier à l'art. 66 al. 2 Cst./GE.
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En réplique, les recourants soutiennent que le texte de l'initiative pourrait faire l'objet d'une interprétation conforme au droit fédéral, compte tenu de la loi cantonale d'application qui devrait être adoptée, ainsi que des diverses réformes que la LAMal pourrait subir. L'adaptation du texte de l'initiative, par la suppression de certains passages, serait possible, ce qui permettrait de soumettre au peuple les trois premiers alinéas de l'art. 170C: l'expression "ou collective" pourrait être supprimée à l'al. 2, ainsi que la mention de l'al. 3 selon laquelle la caisse "est également ouverte aux personnes hors du canton, mais qui y exercent une activité lucrative ou y paient leurs impôts". Le principe du tiers payant (al. 5) devrait être interprété conformément au droit fédéral, ce qui sous-entendrait la conclusion d'accords préalables avec les fournisseurs de prestations. Les alinéas 6 et 7 ne seraient pas contestés, et l'alinéa 8 pourrait être supprimé, le cas échéant, en maintenant l'appui financier de l'Etat. Même amputée des dispositions controversées, notamment ses alinéas 4 et 9, l'initiative garderait un contenu cohérent et pourrait être soumise au peuple. Si tel n'était pas le cas, l'art. 170C devrait être annulé, mais l'art. 170D devrait en tout cas être soumis au peuple. Les recourants se plaignent enfin d'une inégalité de traitement par rapport à de précédentes initiatives (IN 114 "Pour le libre choix du moyen de transport", IN 113 "Pour une contribution de solidarité temporaire des grandes fortunes et des gros bénéfices", et IN 116 "Pour un toit à soi"), qui ont fait l'objet de diverses scissions de la part du Grand Conseil.
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4.1 L'art. 66 al. 2 Cst./GE prévoit précisément la scission de l'initiative qui ne respecte pas l'unité de la matière, pour autant que ses différentes parties soient en elles-mêmes valides (à savoir lorsque ![]() | 37 |
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La règle d'unité de la matière ne tend pas uniquement à une libre manifestation de la volonté des citoyens au moment de la votation au sujet de l'initiative: elle s'applique également au moment de la récolte des signatures (cf. ATF 116 Ia 466 consid. 5 p. 471), et tend à éviter en particulier que la juxtaposition de réformes différentes ne permette d'atteindre plus facilement le nombre de signatures requises (ATF 123 I 63 consid. 4b p. 72). On peut en effet concevoir que des citoyens signent une initiative lorsqu'ils en approuvent certains aspects qu'ils jugent importants, même s'ils sont opposés aux autres propositions. La manifestation de volonté s'en trouve faussée (ATF 81 I 192 consid. 5 p. 198-199). Sous cet aspect, le vice entachant l'initiative ne serait pas réparable par une scission puisqu'il affecterait aussi la validité de la récolte de signatures (arrêt du 18 décembre 1984 précité, consid. 9d).
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En dépit de cette objection, le droit fédéral n'impose pas la nullité d'une initiative non conforme au principe d'unité de la matière: la sanction à prendre en pareil cas peut être définie, de manière plus souple, par le droit cantonal. En l'occurrence, le droit genevois prévoit la scission de l'initiative en différentes parties, pour autant que chacune d'entre elles est en soi valide. Cette possibilité de scinder présuppose que le vice qui peut affecter la récolte de signatures n'est ![]() | 40 |
Par ailleurs, l'acte par lequel le citoyen appuie une initiative en la signant n'a pas la même portée que son approbation au moment de la votation. Dans le premier cas, le citoyen manifeste simplement une adhésion de principe, soit sa volonté de voir un objet débattu, puis soumis au scrutin; la récolte de signatures n'est en général précédée d'aucun débat politique, et a lieu dans des conditions qui ne permettent pas aux signataires d'arrêter définitivement leur opinion. C'est seulement au moment du vote que le citoyen prend sa décision sur le fond, en connaissance de cause, notamment après avoir entendu les avis des partisans du projet, de ses opposants et, le cas échéant, de l'autorité. En définitive, le droit fédéral exige que le principe d'unité de la matière soit respecté au moment de la votation, mais n'empêche pas le droit cantonal de réparer une violation de ce principe au stade de la récolte de signatures, l'essentiel restant la liberté de vote au moment du scrutin (AUER, Problèmes et perspectives du droit d'initiative à Genève, Lausanne 1987, p. 28). Tel est le sens de l'art. 66 al. 2 Cst./GE tel qu'il est déjà implicitement retenu dans l' ATF 123 I 63. L'interprétation du Grand Conseil, qui consiste à refuser la scission du simple fait qu'il n'y a pas unité de la matière, viderait de tout son sens l'art. 66 al. 2 Cst./GE.
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4.3 Cela ne signifie pas pour autant que les auteurs d'une initiative puissent, dans chaque cas, exiger la scission de celle-ci en autant de parties qu'elle contient de propositions. Admettre un tel mode de procéder permettrait d'ignorer totalement le principe d'unité de la matière, et de contourner systématiquement les règles cantonales relatives au nombre de signatures, ce qui n'est pas admissible. Ainsi, selon la jurisprudence, les auteurs d'une initiative qui ne respecte pas l'unité de la matière ne sauraient exiger une scission, permettant de sauver leur démarche - lorsque ce procédé est admis par le droit cantonal -, à n'importe quelles conditions (cf. KÖLZ, Die kantonale Volksinitiative in der Rechtsprechung des Bundesgerichts, ZBl 83/1982 p. 21). L'abus manifeste ou l'utilisation insensée des institutions ![]() | 42 |
La scission a ainsi été refusée pour une initiative genevoise comportant un grand nombre de propositions différentes s'apparentant au programme d'un parti politique; la démarche des initiants apparaissait comme abusive, et il n'était pas possible, pour des raisons pratiques et de clarté, de séparer les différents volets de l'initiative (ATF 123 I 63 consid. 6 p. 74). L'irrecevabilité peut aussi être prononcée à l'encontre d'une initiative comportant un nombre plus restreint de propositions, lorsqu'il apparaît que la volonté des opposants a été délibérément de profiter de la possibilité d'une scission, en créant par exemple un lien artificiel entre les diverses propositions.
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Certes, tel qu'il est rédigé, l'art. 66 al. 2 Cst./GE ne se présente pas comme une norme potestative. On ne saurait toutefois considérer que le Grand Conseil a l'obligation d'opérer la scission de l'initiative à la seule condition que ses différentes parties soient valides. Compte tenu des principes rappelés ci-dessus, le Grand Conseil peut aussi refuser la scission lorsque cela présente des difficultés pratiques insurmontables, ou lorsque le principe d'unité de la matière est violé d'une façon si flagrante que la démarche des initiants ne mérite pas protection. L'autorité cantonale dispose ainsi d'une marge dans l'appréciation de ces critères, et le Tribunal fédéral doit pour sa part s'imposer une certaine retenue dans son contrôle.
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4.3.1 Pour le Grand Conseil, les recourants auraient réuni, sous un titre avantageux, des propositions n'ayant rien en commun, dissuadant les citoyens d'étudier le texte attentivement avant de signer. Tel qu'il est présenté dans le formulaire de signatures, le texte de l'initiative fait toutefois distinctement ressortir les deux aspects de celle-ci, soit la création de la caisse publique d'assurance-maladie et la protection du service public. Le titre lui-même de l'initiative est suffisamment clair à ce propos; il apparaît aussi clairement que l'initiative porte sur deux dispositions distinctes et, même si le texte en est relativement long, on ne distingue aucun artifice qui pourrait dissuader les signataires de prendre connaissance des deux objets ![]() | 45 |
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Comme cela est relevé ci-dessus, les deux propositions de l'initiative sont totalement différentes quant à leur nature, puisque l'une porte sur un projet concret et limité, soit la réalisation d'une institution publique déterminée, l'autre pouvant être assimilée à une partie de programme politique, soit la lutte contre le démantèlement du service public. Ces deux propositions sont à ce point différentes dans leur objet, que rien ne peut permettre de supposer que l'adhésion à la première implique l'acceptation de la seconde. Par ailleurs, comme cela est relevé ci-dessus, il était inutile de prévoir une disposition particulière pour soumettre au référendum obligatoire tout changement dans le statut public de la caisse-maladie cantonale; les justifications des recourants quant à l'utilité de l'art. 170D par rapport à l'art. 170C sont dépourvues de toute pertinence. Cela étant, force est de constater que le lien allégué entre les deux parties de l'initiative est totalement artificiel, ce dont ne pouvaient manquer de s'apercevoir les auteurs de l'initiative, parlementaires cantonaux. Il apparaissait d'emblée que les deux dispositions constitutionnelles devaient faire chacune l'objet d'une initiative distincte. Le principe d'unité de la matière est violé de manière particulièrement évidente, et la sanction à apporter pouvait, conformément au principe de la proportionnalité, être à la mesure de cette violation. Dans ces conditions, ![]() | 48 |
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4.5 Les recourants se plaignent enfin - en réplique également - d'une inégalité de traitement en relevant que le Grand Conseil a, à plusieurs reprises, scindé en différentes parties des initiatives qui lui étaient précédemment soumises. Toutefois, conformément à l'art. 90 al. 1 let. b OJ, il leur appartenait de démontrer en quoi ces initiatives présentaient des similitudes telles qu'un traitement identique s'imposait en l'espèce. Cette démonstration fait totalement défaut, ce qui entraîne l'irrecevabilité du grief.
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