BGE 139 I 325 | |||
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31. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause X. contre Service de la population du canton du Jura (recours en matière de droit public) |
2C_365/2013 du 30 août 2013 | |
Regeste |
Art. 8 EMRK; Tragweite des Entscheids des EGMR Udeh gegen die Schweiz vom 16. April 2013. | |
Sachverhalt | |
A. X., ressortissant du Kosovo, né en 1982, est semble-t-il entré une première fois en Suisse avec ses parents en 1991 et y aurait séjourné jusqu'en 1993. Il serait ensuite retourné quelques mois au Kosovo, avant de demeurer en Allemagne pendant plusieurs années, de 1994 à 2000. Il est revenu en Suisse le 28 juin 2001, date à laquelle il a déposé une demande d'asile, qui a été rejetée par décision de l'Office fédéral des réfugiés du 4 mars 2003.
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Dans l'intervalle, à la suite de son mariage le 14 décembre 2001 avec une ressortissante suisse, X. a obtenu une autorisation de séjour annuelle (permis B) dans le canton du Jura. Le couple s'est toutefois séparé après quelques mois. L'intéressé a en outre fait l'objet de différents rapports de dénonciation pour vols et dommages à la propriété de la part des polices jurassienne et neuchâteloise, ce qui lui a valu, le 16 janvier 2003, une condamnation par le Tribunal de police de Neuchâtel à 75 jours d'emprisonnement avec sursis pendant trois ans, ainsi qu'une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis pendant cinq ans, assortie d'une expulsion du territoire suisse pendant trois ans avec sursis pendant cinq ans, peine prononcée le 4 mai 2006 par la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton du Jura.
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B. Sur la base des rapports de dénonciation et en raison de la séparation du couple, le Service de la population du canton du Jura (ci-après: le SPOP) a refusé de renouveler l'autorisation de séjour de l'intéressé et ordonné son renvoi par décision du 10 janvier 2003, confirmée sur opposition le 2 avril 2003, puis par arrêt du 16 septembre 2003 de la Cour administrative du Tribunal cantonal du canton du Jura (ci-après: le Tribunal cantonal). L'intéressé a été renvoyé dans son pays d'origine le 28 novembre 2003.
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C. Le 31 décembre 2003, X. a épousé, au Kosovo, Y., ressortissante du Kosovo, titulaire d'une autorisation de séjour en Suisse (permis B). X. a dès lors déposé une demande de regroupement familial, laquelle a été rejetée par décision du SPOP du 31 mars 2005, confirmée sur opposition le 9 juin 2005, puis sur recours le 29 septembre 2005. Une deuxième requête de regroupement familial a été déposée le 29 mai 2006, qui a également été rejetée par décision du 25 juillet 2006, confirmée sur opposition le 16 novembre 2006.
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D. Une troisième requête a été déposée le 23 mai 2007, Y., l'épouse de l'intéressé, ayant obtenu une autorisation d'établissement en Suisse (permis C). Le SPOP a autorisé le regroupement familial le 3 août 2007. L'intéressé est entré en Suisse le 22 août 2007 et a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour annuelle, renouvelée régulièrement jusqu'au 22 août 2011.
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De l'union des époux X. et Y. sont nés trois enfants: A., en 2006, B., en 2008 et C., en 2011.
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Le 29 avril 2009, X. a été condamné à une peine pécuniaire de 10 jours-amende pour dommages à la propriété, ainsi que, le 22 décembre 2009, à une amende pour conduite inconvenante. En outre, par jugement de la Cour d'assises du canton de Neuchâtel du 8 dé-cembre 2009, il a été condamné à une peine privative de liberté de 15 mois avec sursis pendant 5 ans pour infraction à la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121).
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E. Alors que X. sollicitait une nouvelle prolongation de son autorisation de séjour, le SPOP l'a rendu attentif au fait qu'à la suite des nombreux jugements pénaux rendus à son encontre en Suisse, il envisageait de refuser de renouveler son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi. Après lui avoir donné la possibilité d'exercer son droit d'être entendu, le SPOP a refusé le renouvellement de son autorisation de séjour et lui a imparti un délai de huit semaines dès l'entrée en force de la décision pour quitter la Suisse. Cette décision a été confirmée sur opposition. Saisi d'un recours contre le prononcé sur opposition, le Tribunal cantonal l'a rejeté par arrêt du 11 mars 2013.
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F. A l'encontre de cet arrêt, X. forme un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Il requiert, sous suite de frais et dépens, principalement l'octroi d'une autorisation de séjour, subsidiairement le renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouveau jugement dans le sens des considérants.
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Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
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(résumé)
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Extrait des considérants: | |
Erwägung 2 | |
2.4. Le recourant fonde son recours quasiment exclusivement sur l'arrêt de la CourEDH Udeh contre Suisse du 16 avril 2013 (in Plaidoyer 2013 3 p. 58), lequel a abouti à une condamnation de la Suisse pour violation de l'art. 8 CEDH. Il convient d'abord de mentionner que ce jugement, qui n'est pas une décision de principe (cf. arrêts 2C_339/2013 du 18 juillet 2013 consid. 2.9; 2C_139/2013 du 11 juin 2013 consid. 7.5) et qui n'est au demeurant pas encore définitif (cf. art. 44 par. 2 CEDH), n'énonce aucun principe nouveau qui n'aurait été consacré auparavant dans la jurisprudence de la CourEDH, notamment dans l'affaire (...) Üner contre Pays-Bas (du 18 octobre 2006, Recueil CourEDH 2006-XII p. 159 §§ 54-60), auquel cet arrêt se réfère, ou dans celle du Tribunal fédéral. De ce point de vue, il ne s'agit donc que d'un arrêt parmi une abondante jurisprudence consacrée à l'art. 8 par. 2 CEDH.
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Ensuite, il n'est pas possible de faire abstraction du fait que la condamnation de la Suisse résulte presque exclusivement de la prise en compte par la CourEDH de faits postérieurs à l'arrêt rendu par le Tribunal fédéral. Alors que ce dernier est contraint par l'art. 105 al. 1 LTF de fonder son jugement sur les faits retenus par l'autorité précédente - en l'espèce le Tribunal cantonal -, la CourEDH a pris en considération les faits survenus non seulement après l'arrêt du Tribunal cantonal, mais encore après l'arrêt rendu par le Tribunal fédéral. Ainsi, le Tribunal fédéral a fondé son jugement et l'appréciation du comportement du recourant sur des faits arrêtés au 14 mai 2008, alors que la CourEDH a pris en compte des faits survenus entre cette date et le 4 décembre 2012, respectivement le 26 mars 2013, ce qui ne va pas sans poser des problèmes de coordination entre les juridictions nationales et la CourEDH. En effet, la CourEDH rappelle fréquemment qu'aux termes de l'art. 35 par. 1 de la Convention, elle ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes. La finalité de cette disposition est de ménager aux Etats contractants l'occasion de prévenir ou de redresser les violations alléguées contre eux avant que la Cour n'en soit saisie. La règle de l'art. 35 par. 1 se fonde sur l'hypothèse, envisagée à l'art. 13, avec lequel elle présente d'étroites affinités, que l'ordre interne offre un recours effectif quant à la violation alléguée, ledit recours devant par ailleurs être "à la fois relatif aux violations incriminées, disponible et adéquat" (voir, parmi de nombreux autres, les arrêts Polidario contre Suisse du 30 juillet 2013 § 49; Claes contre Belgique du 10 janvier 2013 § 77). La règle en question n'a ainsi de sens que dans la mesure où le Tribunal fédéral peut corriger une violation incriminée, donc déjà survenue, non pas une éventuelle violation commise après son arrêt. La doctrine a d'ailleurs pu estimer que prendre en compte de tels faits "foule aux pieds la ratio legis de la règle d'épuisement des voies de recours" (SÉBASTIEN VAN DROOGHENBROECK, La proportionnalité dans le droit de la convention européenne des droits de l'homme, Bruxelles 2001, ch. 362 p. 267).
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De plus, la CourEDH prend en considération non seulement des faits postérieurs à l'arrêt contesté devant elle, mais encore des circonstances relatives notamment à la vie conjugale qui existaient lorsque les juridictions nationales ont statué, mais qui ont disparu par la suite. En procédant de la sorte, elle relève tous les éléments qui plaident en faveur du requérant, sans que ceux-ci aient été réalisés en même temps.
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Par ailleurs, la CourEDH rappelle également constamment que les autorités nationales jouissent d'une certaine marge d'appréciation pour se prononcer sur la nécessité, dans une société démocratique, d'une ingérence dans l'exercice d'un droit protégé par l'art. 8 et sur la proportionnalité de la mesure en question au but légitime poursuivi (cf. p. ex. arrêt Hasanbasic contre Suisse du 11 juin 2013 § 56, in Plaidoyer 2013 4 p. 56). En ce sens, selon la jurisprudence constante de la CourEDH, sa tâche consiste à déterminer si les mesures litigieuses ont respecté un juste équilibre entre les intérêts en présence, à savoir, d'une part, les droits de l'intéressé protégés par la Convention et, d'autre part, les intérêts de la société. Or, un tel mécanisme de contrôle ne saurait s'exercer qu'en fonction de la situation dans laquelle se trouvait la juridiction nationale au moment de trancher, dans la mesure en tout cas où le recours en question était effectif et que la cause ne concerne pas des mesures provisionnelles. En d'autres termes, savoir si un Etat défendeur a outrepassé la marge d'appréciation dont il jouissait dans un cas d'espèce est une question qui ne peut être tranchée qu'au regard des faits déterminants dont la juridiction nationale concernée avait connaissance au moment de trancher. Cela ne peut se faire en incorporant - qui plus est en leur reconnaissant une importance déterminante - des faits postérieurs à l'arrêt national. Ce principe a d'ailleurs été énoncé par la CourEDH elle-même en de nombreux arrêts (cf. VAN DROOGHENBROECK, op. cit., ch. 359 ss et note de bas de page 429, ainsi que les arrêts cités, notamment Baghli contre France du 30 novembre 1999, Recueil CourEDH 1999-VIII p. 187 § 36; Lithgow et autres contre Royaume-Uni du 8 juillet 1986, série A vol. 102 § 132; Engel et autres contre Pays-Bas du 8 juin 1976, série A vol. 22-A § 72; W. contre Suisse du 26 janvier 1993, série A vol. 254-A § 33). Si une dérogation à ce principe peut se justifier dans certaines hypothèses particulières, tel n'est pas le cas lorsque le justiciable, comme en droit administratif suisse, peut formuler ultérieurement une nouvelle requête devant les autorités administratives, en faisant précisément valoir que, depuis l'arrêt de la dernière instance nationale, la situation a évolué de manière à justifier l'ouverture d'une nouvelle procédure tendant à l'obtention d'une autorisation de séjour. A cette occasion, il peut invoquer tant l'écoulement du temps que, par exemple, le fait qu'il s'est entre-temps comporté de manière conforme au droit.
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