BGE 84 II 221 | |||
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31. Arrêt de la Ire Cour civile du 3 mars 1958 dans la cause Provins, fédération de producteurs de vins du Valais, contre la Société vinicole de Perroy SA | |
Regeste |
Weinmarken. |
2. Begriff der Sachbezeichnung. Die für Weine verwendeten Bezeichnungen "trois plannts" und "deux plants" sind Sachbezeichnungen (Erw. 2a). |
3. Voraussetzungen der Schutzfähigkeit von Sachbezeichnungen als Fabrik- oder Handelsmarken (Erw. 2b). |
4. Unlauterer Wettbewerb. Art. 1 Abs. 2 lit. d UWG gewährt keinen Schutz für eine nach dem MSchG gemeinfreie Sachbezeichnung (Erw. 3). | |
Sachverhalt | |
A.- Provins, fédération de producteurs de vins du Valais, est une société coopérative qui a notamment pour but la vente en commun des vins produits par ses membres. Le 10 juin 1946, elle a déposé au Bureau fédéral de la propriété intellectuelle, sous numéro 115 811, une marque mixte, à la fois verbale et figurative, destinée à des vins valaisans issus d'un mélange de trois cépages. Parmi d'autres mdications, cette marque comprend la mention "trois plants" écrite en grands caractères. Sous forme d'étiquette, elle habille les bouteilles du vin blanc que Provins vend sous la dénomination "trois plants".
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Le 6 août 1955, la Société vinicole de Perroy SA a déposé, sous numéro 158 126, une marque mixte destinée à un mélange comprenant un vin rouge et un vin blanc. Dans cette marque figure notamment l'indication "Vin de deux plants coupage rouge et blanc", les mots "deux plants" ressortant en caractères gras. La Société vinicole de Perroy SA appose sa marque à titre d'étiquette sur les bouteilles d'un coupage qu'elle met dans le commerce sous l'appellation "deux plants".
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B.- Estimant que la marque de la Société vinicole de Perroy SA ne se distinguait pas suffisamment de la sienne, Provins a actionné cette société devant le Tribunal cantonal vaudois. Elle invoquait à l'appui de sa demande la loi concernant la protection des marques de fabrique et de commerce ainsi que la loi sur la concurrence déloyale et elle concluait, en bref, à la radiation de la marque de la défenderesse, à ce que celle-ci se vît interdire d'utiliser l'appellation "vin de deux plants", à la destruction de tous les prix courants, étiquettes et autre matériel publicitaire portant cette mention, à la publication du jugement et, enfin, à ce que la défenderesse fût condamnée à lui payer 2000 fr. en principal à titre de dommagesintérêts.
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La Société vinicole de Perroy SA a conclu au rejet de l'action.
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Par jugement du 18 décembre 1957, le Tribunal cantonal vaudois a débouté la demanderesse de ses conclusions.
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C.- Provins recourt en réforme au Tribunal fédéral, en reprenant les conclusions qu'elle a formulées dans l'instance cantonale.
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Considérant en droit: | |
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En l'espèce, il est constant que, si l'on excepte les mentions "trois plants" et "deux plants", les marques litigieuses sont complètement différentes l'une de l'autre. Mais ces indications sont mises en évidence par des caractères gras et se distinguent nettement du contexte et des éléments figuratifs. Elles constituent dès lors les éléments caractéristiques qui restent dans le souvenir des acheteurs. Aussi bien les parties elles-mêmes, dans leurs prix courants et leur matériel de propagande, appellent-elles simplement "trois plants" et "deux plants" les vins auxquels sont destinées les marques en présence (cf. RO 43 II 95, 64 II 248).
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a) Comme le Tribunal fédéral l'a déjà jugé, il n'y a pas d'imitation prohibée lorsque l'identité entre deux marques ne porte que sur des éléments qui, pris en eux-mêmes, sont du domaine public (RO 49 II 315, 83 II 218). C'est le cas s'il s'agit de signes descriptifs, qui indiquent notamment la nature, la composition ou les qualités des marchandises auxquelles ils se rapportent. Il ne suffit du reste pas d'une allusion quelconque; il faut que le rapport soit immédiat et ne requière ni association d'idées ni travail de réflexion (RO 83 II 218 et les arrêts cités). En revanche, un signe est descriptif dès que ces conditions sont remplies dans une des régions linguistiques de la Suisse; on ne saurait en effet protéger à titre de marque dans toute la Confédération un signe qui, sur une partie de ce territoire, doit être considéré comme faisant partie du domaine public (RO 82 I 51 et les arrêts cités).
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Or le Tribunal cantonal a constaté qu'en Suisse romande, le mot "plant" appliqué à la vigne désigne un cep et qu'on l'utilise fréquemment comme synonyme de "cépage". C'est ainsi - dit-il - qu'on par le de "plant du Rhin" pour désigner un cépage de Johannisberg, ou de "plant de muscat" et de "plant de chasselas" pour indiquer de tels cépages; de façon générale, les vignerons, les commerçants et les amateurs de vin emploient souvent le terme de "plant" pour désigner une variété de vigne. Toutes ces constatations lient le Tribunal fédéral. Le dossier contient du reste de nombreuses étiquettes où le terme "plant" est effectivement employé dans le sens de "cépage" ("Vieux plants", "Aux vieux plants du Valais", "Plant du Rhin", etc.).
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La recourante soutient cependant que "trois plants" est un signe de fantaisie, car elle n'offre pas à sa clientèle "un vin provenant d'un mélange de trois plants différents". Pour juger si cette allégation est exacte, il faut se fonder sur l'impression qu'aura l'acheteur moyen en lisant ou en entendant l'expression "trois plants" appliquée à un vin. Or, sachant que le terme "plant" désigne fréquemment une variété de vigne, il admettra tout naturellement que le vin en cause est un mélange et provient de trois cépages différents. Une telle conclusion sera immédiate; elle ne requiert en effet ni imagination ni travail de réflexion. Du reste, la recourante a d'abord partagé cette opinion, puisqu'elle a déposé sa marque pour "des vins valaisans issus d'un mélange de trois cépages" et qu'elle a encore déclaré dans sa demande: "Cette marque désigne un vin blanc valaisan, issu d'un mélange de trois cépages différents".
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Provins relève toutefois que, à supposer que le signe "trois plants" indique que le vin provient de trois cépages, il ne précise en tout cas pas quelles sont ces variétés, de sorte qu'il pourrait servir à désigner des vins totalement différents; il ne saurait dès lors s'agir d'un signe descriptif. Cette argumentation est erronée. Pour qu'un signe soit descriptif, il n'est pas nécessaire qu'il précise la nature et la composition de la marchandise. Il suffit qu'il en indique une des qualités. C'est le cas des termes "trois plants", qui signifient que le vin auquel ils se rapportent provient de trois cépages différents. Dès lors, cette mention, de même que l'indication "deux plants", est un signe descriptif.
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Du reste, l'art. 336 al. 1 OCDA statue que les indications relatives au cépage doivent être conformes à la réalité et exclure toute possibilité de confusion. Cette condition ne serait pas remplie si l'on permettait à Provins de tenir le signe "trois plants" pour une simple désignation de fantaisie. En effet, il induirait en erreur les nombreux acheteurs qui le considéreraient comme une mention descriptive et en concluraient qu'il désigne un mélange issu de trois cépages.
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b) La recourante allègue cependant que, même si la mention "trois plants" est en soi un signe faible, elle s'est imposée dans les affaires par un usage suivi et prolongé et a ainsi acquis la force d'un signe original.
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Ce raisonnement pèche déjà dans son premier élément. En effet, la mention "trois plants" n'est pas seulement un signe faible, c'est-à-dire une désignation dont le pouvoir distinctif est restreint. C'est un signe descriptif qui, utilisant des notions nécessaires au commerce, ne peut en principe être monopolisé par le titulaire d'une marque et fait dès lors partie du domaine public.
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Toutefois, le Tribunal fédéral a déjà jugé qu'un usage étendu et de longue durée peut imposer comme signe distinctif des produits d'une entreprise déterminée des désignations qui n'étaient pas susceptibles en elles-mêmes d'être protégées à titre de marques de fabrique ou de commerce. De tels signes doivent alors être admis comme marques, à moins qu'il ne s'agisse de notions dont le commerce ne peut se passer (RO 64 II 247/248).
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En l'espèce, on peut se demander si la désignation "trois plants" n'est pas indispensable au commerce des vins. Mais il n'est pas nécessaire de résoudre cette question, car il n'est point établi que ces termes éveillent immédiatement dans les milieux intéressés l'idée d'un produit bien déterminé, savoir un vin de la recourante. Selon le Tribunal cantonal, en effet, Provins, à qui incombait le fardeau de la preuve sur ce point (RO 72 II 139), a seulement établi qu'elle avait utilisé la marque litigieuse de façon suivie dès 1946, que, pour le vin vendu sous cette marque, elle avait publié de nombreuses annonces publicitaires dans divers journaux et fait imprimer un important matériel destiné à la décoration des vitrines, qu'enfin, le débit de ce vin était assez grand. En revanche, les juges vaudois n'ont pas admis comme prouvés les chiffres indiqués par Provins au sujet de ses frais de publicité et des quantités de "trois plants" vendues. La recourante critique vainement ce dernier chef du jugement cantonal, qui relève de l'appréciation des preuves et lie par conséquent le Tribunal fédéral (art. 63 al. 2 OJ). Or les éléments de fait retenus par les premiers juges ne signifient nullement que la mention "trois plants" se soit imposée dans l'esprit des acheteurs comme désignation d'un vin de la recourante. Dans la mesure admise par le Tribunal cantonal, la publicité de Provins et la quantité de vin écoulée sous la dénomination "trois plants" ne dépassent pas ce qui est usuel dans l'exploitation d'une marque. En outre, la recourante n'a proposé aucune preuve pour établir l'influence qu'ont eue sur les consommateurs la publicité qu'elle a faite et l'emploi de la désignation "trois plants". On ne saurait donc admettre que cette dénomination éveille immédiatement, dans l'esprit des intéressés, l'idée d'un produit de la recourante. Dès lors, celle-ci n'a pas acquis un droit individuel sur cette désignation. Elle ne le prétend du reste pas, mais elle allègue simplement que sa marque "a nécessairement conquis une certaine notoriété". Or cela est insuffisant pour qu'un signe descriptif doive être protégé à titre de marque.
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Ainsi, les désignations "trois plants" et "deux plants" font toutes deux partie du domaine public et ne peuvent être protégées. Comme l'analogie entre les deux marques litigieuses porte uniquement sur ces éléments, celle de l'intimée ne constitue pas une imitation prohibée de la marque de Provins. Dès lors, en tant que l'action était fondée sur la loi concernant la protection des marques, elle a été rejetée avec raison par la juridiction cantonale.
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Mais, cette dernière désignation étant un signe descriptif, on ne peut, par le moyen de la loi sur la concurrence déloyale, interdire à autrui de l'utiliser ou de choisir une dénomination qui s'en rapproche. Chacun doit avoir la faculté de désigner ses marchandises en se servant d'expressions qui en indiquent la nature, les qualités, le but, etc., sans en être empêché par la marque d'un autre. Sinon on accorderait à celui-ci, par le détour de la loi sur la concurrence déloyale, une protection que la législation sur les marques lui refuse expressément (RO 80 II 174). En particulier, celui qui met dans le commerce un mélange issu de deux cépages différents doit pouvoir désigner ce produit par un terme qui en indique la composition. On ne saurait donc empêcher l'intimée d'utiliser la dénomination "deux plants".
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Provins soutient, il est vrai, que le vin de l'intimée est un coupage de qualité inférieure et que la société vinicole de Perroy SA a cherché pour cette raison à provoquer une confusion avec le "trois plants". Mais ce moyen n'est pas pertinent. Du moment que la mention "trois plants" est un signe descriptif, tout tiers peut l'utiliser pour indiquer notamment la nature ou les qualités de sa marchandise. Du reste, le produit que la recourante vend sous cette dénomination n'est pas non plus de qualité supérieure; c'est en effet le meilleur marché des vins qu'elle met dans le commerce. Ainsi, Provins invoque à tort la loi sur la concurrence déloyale et, sur ce point encore, son recours doit être rejeté.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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