BGE 95 II 132 | |||
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19. Arrêt de la Ire Cour civile du 11 mars 1969 dans la cause Vuerchoz contre dame da Campo. | |
Regeste |
Art. 8 ZGB; 44 und 339 OR. |
2. Wann kann man dem Dienstherrn vorwerfen, dem Dienstpflichtigen nicht ausdrücklich verboten zu haben, bei der Bedienung einer Maschine eine bestimmte gefährliche Bewegung auszuführen? (Erw. 1). |
3. Art. 339 OR verpflichtet den Dienstherrn, den Dienstpflichtigen nicht nur gegen objektiv vermeidbare Betriebsgefahren zu schützen, sondern auch gegen solche, die sich erst infolge einer Unachtsamkeit oder Unvorsichtigkeit des Dienstpflichtigen verwirklichen, soweit diese nicht ausserhalb der normalen Voraussehbarkeit liegen (Erw. 3). |
4. Anwendung dieses Grundsatzes auf eine zwar gut unterhaltene Hotel-Wäschemange, bei der jedoch die Schutzvorrichtungen die Gefahr einer Verstümmelung nicht ausschliessen, wenn die sie bedienende Person unvorsichtigerweise die Hand oberhalb der Schutzstange in die Maschine einführt (Erw. 3). |
5. Herabsetzung der Entschädigung wegen Selbstverschuldens des Verletzten (Erw. 4). | |
Sachverhalt | |
A.- Dame Lucia da Campo, née en 1934, de nationalité italienne, mère de deux enfants, est venue travailler en Suisse avec son mari en 1956. Elle avait reçu une instruction rudimentaire et travaillé auparavant à la campagne. Dans notre pays, elle a occupé plusieurs emplois subalternes dans des hôtels. Elle était bonne repasseuse. En juillet 1960, elle est entrée au service de Georges Vuerchoz, qui exploite l'Hôtel du Château, à Villeneuve. Elle était occupée principalement comme femme de chambre et lingère. Elle travaillait un ou deux jours par semaine à la calandre, avec d'autres employées. Elle était habituée à utiliser cet appareil.
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La calandre de l'Hôtel du Château est un modèle "Righi-Kulm" à gaz de la marque Schulthess, construit en 1949. Cet appareil comprend un bâti de fonte formé de deux parois latérales reliées à une cuvette horizontale en forme de demicylindre creux à faible distance du fond de laquelle tourne un cylindre ou rouleau perforé de 2 m 30 de long et 0 m 30 de diamètre. Déposé dans un boîtier attenant à la machine, le linge à calandrer est acheminé par une ouvrière dans l'espace laissé libre entre la cuvette et le cylindre. La cuvette est chauffée à une température de 1600 à 1700 par le moyen d'une rampe de brûleurs à gaz. En tournant, le rouleau entraîne le linge pendant un demi-tour, puis le dépose de l'autre côté de la machine, séché et repassé par l'effet conjugué de la pression et de la température; il est alors reçu par une autre ouvrière. Pour éviter que la main de la repasseuse ne soit entraînée dans la cuvette surchauffée, à l'instar du linge, la calandre est munie d'un dispositif de sécurité qui arrête immédiatement la rotation du rouleau lorsqu'une légère pression est exercée sur une barre métallique montée parallèlement à l'axe de la machine, quelques centimètres en avant du rouleau et 17 à 19 mm au-dessus de la planche sur laquelle on introduit le linge. Tout corps introduit dans la calandre et dont l'épaisseur excède cette valeur de 17 à 19 mm provoque le déplacement de la barre et par conséquent l'arrêt du rouleau. Les doigts de la main d'une ouvrière peuvent avancer sans aucun risque jusqu'au moment où l'articulation métacarpo-phalangienne - même celle d'une main très fine - vient pousser la borne de sécurité. Le repassage s'opère normalement par l'introduction du linge tendu bien à plat entre le rouleau et la cuvette, en le passant entre la planche d'introduction et la barre du système de sécurité. En revanche, si la main qui introduit le linge passe par-dessus la barre de sécurité - soit entre elle et le rouleau - et exerce sur celle-ci une pression en sens inverse de celle qui est prévue, le système de sécurité ne fonctionne pas. Il s'agit donc d'une manoeuvre dangereuse qui du reste est la cause de l'accident caractéristique mais heureusement rare provoqué par ce genre de machine.
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Georges Vuerchoz avait acheté d'occasion, en 1958, la calandre qui avait été contrôlée et montée dans son hôtel par le constructeur. Le service d'entretien était fait chaque année.
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En général, dame da Campo recevait le linge repassé. Elle était néanmoins capable d'introduire le linge dans la machine. La femme de son patron et deux employées plus anciennes, dame Clément et dlle Macchietto, l'ont instruite à l'emploi de la calandre. Elles lui ont donné à cet effet des explications verbales et elles ont procédé à des démonstrations pratiques. Elles ont attiré son attention sur le danger que présentait l'appareil, notamment sur le fait qu'il ne faut pas passer la main par-dessus la barre de sécurité. Dame da Campo a compris les explications et les instructions qui lui étaient données. Elle a manifesté qu'elle se rendait compte du danger que l'on courait en passant la main par-dessus la barre de sécurité.
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Le 15 septembre 1961, dame da Campo travaillait à la calandre avec dlle Macchietto. Elle repassait une nappe en gros lin. Alors qu'elle introduisait la pièce dans la machine, sa main droite a été prise entre le rouleau et la cuve de la calandre. Dame da Campo a été gravement mutilée et, malgré les soins des médecins, elle est pratiquement privée de l'usage de sa main droite, amputée des quatre doigts longs et de la phalange distale du pouce. L'invalidité permanente a été fixée par l'expert médical à 60%.
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Membre de l'Association cantonale vaudoise des hôteliers, Georges Vuerchoz était tenu par un contrat collectif d'assurer son personnel contre les accidents, notamment pour une somme de 20 000 francs en cas d'invalidité totale. En fait, il avait contracté auprès de l'Assurance mutuelle vaudoise une assurance contre ce risque pour une somme de 10 000 francs. La compagnie a payé la moitié de cette somme, soit 5000 francs, sur le vu d'un rapport médical qui estimait le dommage permanent à 50% de la capacité de travail de la victime.
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B.- Par demande du 1er octobre 1964, dame da Campo a assigné Georges Vuerchoz devant la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois en paiement de 76 428 francs avec intérêt à 5% dès le 15 septembre 1961, représentant le dommage consécutif à l'accident, après déduction des prestations de l'assurance contre les accidents que son employeur avait contractée en faveur de son personnel. Subsidiairement, elle a requis le paiement d'une somme de 5000 francs, avec intérêt à 5% dès le 15 septembre 1961, soit de la différence entre la prestation qu'elle a reçue de l'assurance susmentionnée et le montant qu'elle aurait reçu si le contrat d'assurance avait été conforme aux dispositions du contrat collectif de la branche. A l'appui de ses conclusions, la demanderesse invoquait l'art. 339 CO.
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Le défendeur a conclu à libération des fins de la demande. Statuant le 15 octobre 1968, la Cour civile vaudoise a condamné Georges Vuerchoz à payer à dame da Campo 28 694 francs avec intérêt à 5% dès le 15 septembre 1961 et mis les trois quarts des frais et dépens à la charge du défendeur, le solde demeurant à la charge de la demanderesse. La juridiction cantonale a rejeté les conclusions de la demande pour le surplus. Se fondant sur le rapport de l'expert, elle a constaté en fait que l'accident provenait de ce que la demanderesse avait passé la main par-dessus la barre de sécurité. Tout en reconnaissant que la machine utilisée ne présentait aucun défaut et que dame da Campo avait été mise en garde contre le risque dont elle était consciente, la cour cantonale a jugé que Georges Vuerchoz n'avait pas apporté la preuve qu'il eût interdit à son employée de passer la main par-dessus la barre de sécurité, ni qu'il eût exercé une surveillance suffisante. Elle a considéré que la demanderesse, de son côté, avait commis une faute grave, qui justifiait une réduction de l'indemnité due par l'employeur à 40% du dommage arrêté à 74 123 francs; elle a imputé sur l'indemnité de 29 649 francs les versements du défendeur, soit 955 francs.
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C.- Contre ce jugement, Georges Vuerchoz recourt en réforme au Tribunal fédéral. Il conclut au rejet intégral de la demande. Subsidiairement, il requiert que la réduction de l'indemnité soit portée à 90% du dommage, de telle sorte qu'il ne serait reconnu débiteur de sa partie adverse que de 7412 francs 30 en capital.
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Dame da Campo a formé un recours joint. Elle demande que la réduction de l'indemnité soit ramenée à 40% du dommage et réduit ainsi ses conclusions initiales à 44 474 francs en capital. Subsidiairement, elle requiert le paiement de 5000 francs en réparation du dommage consécutif à la sous-assurance du personnel de son employeur.
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Chacune des parties propose le rejet des conclusions de son adversaire.
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Considérant en droit: | |
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En l'espèce, la cour cantonale a considéré que, protégeant non pas contre tous les dangers, mais contre le risque que présente un usage normal de la calandre, le système de sécurité était suffisant au regard de la technique en 1961, à la condition toutefois que l'employeur apporte la preuve qu'il l'avait assorti d'une interdiction de faire la manoeuvre dangereuse, soit de passer la main par-dessus la barre de sécurité, ainsi que d'une surveillance assez stricte pour prohiber toute infraction à cette défense. Or elle estime que le recourant a échoué dans la preuve d'une interdiction expresse faite à l'intimée de passer la main par-dessus la barre de sécurité, ainsi que d'une surveillance suffisante.
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Assurément, l'obligation imposée à l'employeur d'instruire et de surveiller l'employé dépend du risque que présente l'utilisation de la machine. Le juge doit néanmoins apprécier séparément deux facteurs distincts. Tout d'abord, il déterminera le risque que présente la machine, en soi, et recherchera si les dispositifs de sécurité sont suffisants pour qu'elle puisse être confiée à un employé, compte tenu de sa formation et de son aptitude. Puis il examinera si l'employeur a satisfait à son devoir d'instruction et de surveillance.
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En revanche, l'appréciation du risque que constitue une installation mécanique ne saurait être subordonnée à la preuve que l'employeur ait satisfait à des exigences spéciales, comme l'interdiction formelle de faire tel mouvement déterminé, sanctionnée par un contrôle. Une pareille condition impliquerait un renversement du fardeau de la preuve. En vertu de l'art. 8 CC, c'est à l'employé qu'il appartient de prouver que l'employeur a objectivement omis de prendre une mesure de sécurité qui lui incombait (RO 31 II 237, 60 II 117 s., 90 II 229). Sans doute s'agit-il de la preuve d'un fait négatif et, en pareil cas, la jurisprudence, fondée sur l'art. 2 CC, impose à la partie non instante à la preuve l'obligation de prendre une part active à la procédure probatoire en rapportant elle-même la preuve contraire, l'échec de cette preuve contraire pouvant constituer un indice (RO 65 III 137; 66 II 147; 74 IV 94). Encore faut-il que le fait négatif ait été articulé par la partie qui prétend en déduire un droit. Or le jugement déféré ne constate rien de tel. L'intimée a allégué devant la juridiction cantonale que la machine était défectueuse, que personne n'avait attiré son attention sur le danger de l'appareil, qu'elle n'avait pas compris les explications données. Ce sont autant de points où ses preuves ont échoué. En revanche, elle n'a pas invoqué l'absence d'ordres formels ni le défaut de surveillance.
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De plus, il est excessif dans les circonstances de l'espèce d'exiger de l'employeur qu'il interdise expressément à son employée de passer la main par-dessus la barre de sécurité. Il est vrai que, dans deux arrêts (RO 83 II 30, 89 II 120), le Tribunal fédéral a fait grief à l'employeur de n'avoir pas donné un ordre exprès à son employé. Mais dans les deux cas, celui-ci s'exposait sous ses yeux à un risque évident, en se comportant imprudemment lors d'un transport. Il appartenait dès lors à l'employeur de réagir. Rien de tel en l'espèce où le geste imprudent, d'ailleurs instantané, s'est produit en l'absence de l'employeur. L'intimée était familiarisée avec l'emploi de la machine. Elle avait été initiée à cet emploi et rendue attentive au danger que l'on courait en passant la main par-dessus la barre de sécurité. Elle était consciente de ce danger, qui du reste est évident. Elle ne travaillait jamais seule à la calandre, mais toujours avec une autre employée, le plus souvent dlle Macchietto, présente le jour de l'accident. On ne saurait exiger davantage du recourant en ce qui concerne l'instruction de l'intimée. Au demeurant, une interdiction expresse n'aurait rien ajouté à la mise en garde que constate le jugement déféré.
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Le grief d'une surveillance insuffisante n'est pas précisé par les juges cantonaux. Le recourant avait d'autant moins de raisons de veiller par des inspections à ce que la manutention fût correcte que l'intimée travaillait toujours à la calandre avec une employée plus expérimentée. Et des contrôles intermittents n'auraient pas empêché que, dans l'intervalle, les employées relâchent leur attention et commettent une imprudence dont elles se fussent gardées en présence de l'employeur. Au surplus, il est pour le moins douteux qu'une relation de cause à effet soit établie entre le défaut de contrôles sur place et l'accident. Le jugement ne constate pas un pareil lien de causalité.
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Le recourant ayant ainsi satisfait à son obligation d'instruire son employée du fonctionnement et des risques de l'utilisation de la calandre, il faut examiner si, en soi, l'appareil était pourvu d'un dispositif de sécurité suffisant.
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Dans l'industrie et dans les branches de l'artisanat pour lesquelles l'affiliation à la Caisse nationale d'assurance en cas d'accidents est obligatoire, l'assurance procure une couverture générale convenable, qui s'étend à tous les risques d'exploitation, jusqu'au moindre incident, et même aux accidents non professionnels. Dans d'autres branches de l'industrie et de l'artisanat, comme la blanchisserie ou l'hôtellerie, aucune assurance obligatoire n'est instituée, quand bien même les risques d'exploitation, pour certains employés, sont aussi grands que pour de nombreux ouvriers affiliés obligatoirement à la Caisse nationale. Ni le législateur, ni l'administration n'ont tiré les conséquences qu'impose l'emploi généralisé de machines dans toutes les formes d'exploitation et que commanderait d'ailleurs, à elle seule, l'évolution des conceptions sociales.
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Sans doute, les conventions collectives tendent-elles à pallier ces insuffisances. Mais elles sont loin de compte. D'une part, l'affiliation aux syndicats patronaux et ouvriers n'est pas générale. Et c'est vrai surtout pour les ouvriers étrangers. D'autre part, les prestations minimales des assurances contre les accidents qu'imposent les conventions collectives sont insuffisantes. Et beaucoup d'employeurs ne dépassent pas le minimum prescrit, quand ils s'y tiennent. En l'espèce, la convention collective prévoit l'assurance pour une indemnité de 20 000 francs en cas d'invalidité complète et le recourant n'a contracté une assurance que pour une somme de 10 000 francs. L'insuffisance d'une pareille assurance est patente.
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Le système de prévention sociale actuellement en vigueur présente ainsi une lacune choquante. Seule une application sévère de l'art. 339 CO permet de tempérer l'injustice que cette lacune entraîne pour les employés qui sont victimes d'accidents du travail. Aussi le devoir de diligence que cette disposition légale impose à l'employeur doit-il être apprécié selon des exigences rigoureuses.
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Appliqué avec sévérité, pour les motifs exposés ci-dessus, l'art. 339 CO oblige l'employeur à prémunir ses employés non seulement contre les risques d'exploitation objectivement évitables, mais aussi contre ceux qui ne se réalisent que par une inattention ou une imprudence de l'employé, pour autant que celles-ci ne sortent pas des prévisions normales. Certes, l'employé doit agir avec attention et diligence. Mais l'employeur doit compter, dans la prévention des accidents, avec ceux que l'on peut prévoir selon le cours ordinaire des choses, compte tenu de l'inattention, voire de l'imprudence de l'employé. L'obligation de sécurité que la loi impose à l'employeur comprend ainsi la prévention de tout accident qui n'est pas dû à un comportement imprévisible et constitutif d'une faute grave de la victime.
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3. Il est constant que, lors de l'accident, la calandre du recourant était en bon état de fonctionnement. En particulier, elle ne présentait aucune défectuosité dans le fonctionnement du système de sécurité. En soi, le dispositif n'exclut pas tout risque, du fait qu'il n'empêche pas la lingère de passer la main par-dessus la barre de sécurité. Tant que les doigts restent sous cette barre, il n'y a aucun danger. Il ressort des croquis et des photographies versées au dossier que la lingère, introduisant le linge, le pousse, les mains à plat, sous la calandre et que normalement, s'il ne se produit pas d'incident, son travail s'effectue sous la barre de sécurité. Mais cette pièce est placée assez bas par rapport à l'axe du rouleau. Il est ainsi facile de passer la main par-dessus la barre, entre celle-ci et le rouleau. Le jugement déféré constate que c'est une manoeuvre dangereuse qui est la cause de l'accident caractéristique mais heureusement rare provoqué par ce genre de machine.
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L'emploi de la calandre du recourant présentait donc un risque grave, soit le risque d'une mutilation. Certes, cet accident se produit rarement. Mais la réalisation du risque doit être envisagée. Il est vrai aussi que le risque en question est évident. L'employé peut éviter qu'un accident se produise, au prix d'une attention constante et du respect de quelques règles de prudence élémentaires. Mais c'est un fait d'expérience que pour un tel travail, exécuté par deux jeunes femmes, une inattention ou une distraction, fautive ou non, se produira fatalement une fois ou l'autre, l'accoutumance au danger aidant. Il est naturel, ainsi que le relève l'expert, que lorsqu'une pièce de linge passe difficilement sous la barre et grippe la machine, une ouvrière passe la main par-dessus la barre afin de donner une pression sur celle-ci, sans arrêter au préalable la machine. Un pareil geste constitue certes une imprudence et une infraction aux instructions reçues, mais il se produit, comme le prouvent les accidents, si rares soient-ils.
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Dès lors, il incombait au recourant, soit de pourvoir la calandre d'un dispositif de sûreté empêchant de passer la main au-dessus de la barre, soit, si cela se révélait impossible ou trop coûteux, de renoncer à confier cet appareil à des employées non qualifiées et qui n'avaient reçu qu'une formation générale rudimentaire, comme l'intimée.
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Assurément, ce n'est qu'au début de l'année 1965, soit plus de trois ans après l'accident, que le fabricant de cette calandre l'a munie d'un système de sécurité plus perfectionné, par lequel le rouleau est soulevé dès que la main entre en contact avec une grille de protection. Et ce nouveau dispositif, qui n'existait pas encore lors de l'accident, ne pouvait être installé sans grands frais sur la machine du recourant. Le jugement déféré constate cependant que d'autres constructeurs ont placé sur leurs machines des grilles de sécurité moins perfectionnées, mais suffisantes pour empêcher, dans une certaine mesure tout au moins, que l'employé ne passe la main par-dessus la barre de sécurité. Si vraiment le travail se fait sous la barre de sécurité, l'installation d'une grille ou d'un boîtier de protection, amovible au besoin, au-dessus de la barre ne paraît ni difficile ni coûteuse.
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Ainsi, le recourant n'a pas satisfait à son obligation de pourvoir sa calandre d'un dispositif de sécurité suffisant pour écarter un risque grave, dont la réalisation, même si elle implique une inattention de l'employé, apparaît possible selon une appréciation objective, compte tenu des qualifications du personnel auquel la machine était confiée. Dès lors, le recourant est en principe responsable du dommage subi par l'intimée.
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Les premiers juges ont retenu avec raison une faute concomitante à la charge de l'intimée. Le danger était évident. Elle y avait été rendue attentive. Elle avait compris la gravité du risque. Elle pouvait éviter l'accident en apportant à son travail une attention constante et en s'abstenant d'une manoeuvre dont le caractère imprudent ne lui avait pas échappé.
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D'autre part, c'est en posant des exigences sévères quant au devoir de diligence de l'employeur que l'on admet une infraction du recourant à son obligation de sécurité. Dès lors, la faute de l'employeur doit être qualifiée en l'espèce de légère.
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La fixation de l'indemnité relève surtout de l'appréciation du juge du fait. La cour cantonale a vu et entendu les parties, procédé à une inspection locale et formé sa conviction sur les circonstances de la cause par des constatations directes. Elle était ainsi à même d'apprécier la mesure de la réduction des dommages-intérêts selon l'art. 44 CO. On peut dès lors considérer qu'en arrêtant l'indemnité à 40% du dommage, la juridiction vaudoise n'a pas excédé les limites de son pouvoir d'appréciation, ni partant violé le droit fédéral.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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