BGE 95 II 568 | |||
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76. Arrêt de la Ire cour civile du 15 septembre 1969 dans la cause Interim Service SA contre Adia interim S.à r.l. | |
Regeste |
Gesellschaftsfirmen. Verwechslungsgefahr. Art. 951 Abs. 2 und 956 Abs. 2 OR. |
Anwendung des Gesetzes über den unlauteren Wettbewerb (Erw 3). | |
Sachverhalt | |
A.- Adia interim (anct. Adia-Bop) S.à r.l. (ci-après: Adia interim S.à r.l.) est une société à responsabilité limitée dont le siège est à Lausanne. Inscrite sous cette raison sur le registre du commerce depuis 1961, elle a pour but la mise à disposition de personnel administratif provisoire ou à temps partiel. Elle emploie les mots "Adia-Interim" comme marque, enregistrée en Suisse et par les bureaux internationaux réunis pour la protection de la propriété industrielle, littéraire et artistique.
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Le 6 juillet 1966 a été inscrite au registre du commerce de Lausanne la société anonyme Interim Service SA, de siège à Lausanne. Son but est notamment de mettre à la disposition du commerce, de l'industrie et des administrations du personnel commercial et toutes autres catégories de personnel. Elle a pour administrateur Jacques Arber, à Villeneuve, ancien directeur régional d'Adia interim S.à r.l.
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B.- Par demande du 28 août 1967, Adia interim S.à r.l. a ouvert action contre Interim Service SA devant la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois, concluant principalement à ce qu'il fût interdit à la défenderesse d'utiliser le mot "Interim" dans sa raison sociale, à la radiation, sur le registre du commerce, de la raison actuelle et au paiement d'une indemnité de 50 000 francs, subsidiairement à ce qu'il fût ordonné à la défenderesse de modifier sa raison sociale, ses papiers d'affaires et sa publicité, notamment par l'adjonction au terme "interim" d'une désignation aux caractères distinctifs nettement accusés, à la fixation d'un délai de vingt jours pour procéder à l'inscription correspondante au registre du commerce et au paiement d'une indemnité de 50 000 francs.
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Statuant le 22 avril 1969, la Cour civile a enjoint à la défenderesse de modifier sa raison sociale dans le sens requis par la demanderesse dans ses conclusions subsidiaires et l'a condamnée à verser à ladite demanderesse une indemnité de 5000 francs. C. - La défenderesse recourt en réforme. Elle conclut à l'annulation du jugement cantonal et au rejet de la demande. L'intimée conclut au rejet du recours et à la confirmation du jugement déféré.
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Considérant en droit: | |
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2. En l'espèce, les deux raisons ont en commun le mot "interim". A juste titre, les premiers juges y ont vu une désignation générique, qui doit en principe rester dans le domaine public. La demanderesse ne peut prétendre s'en réserver l'usage. Elle n'a du reste pas recouru contre le jugement cantonal qui l'a déboutée sur ce point et en a reconnu expressément le bien-fondé. En revanche, elle a le droit de s'opposer à ce que l'usage de la même désignation par un tiers crée une confusion avec sa propre raison. L'art. 951 al. 2 CO s'applique en effet même lorsque la raison inscrite en premier lieu est composée d'éléments appartenant au domaine public (RO 88 II 297; arrêt non publié du 4 octobre 1966 en la cause Agraria AG c. Agrar-Produkte AG). Dans ce cas, l'élément commun pourra notamment être complété, dans la raison la plus récente, par un élément accessoire frappant, doué d'une certaine force distinctive (RO 94 II 130 consid. 2; 82 II 158, 341; 63 II 25/26; 59 II 159; 54 II 128).
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Selon la recourante, la présence du mot "interim" dans les deux raisons ne serait pas décisive, du moment que ce mot n'est qu'un élément accessoire de la raison de la demanderesse, dont l'élément caractéristique, "Adia", n'a pas été imité. C'est ce dernier mot que la demanderesse met elle-même constamment en évidence.
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En réalité, comme la jurisprudence précitée l'a précisé de façon constante, le juge doit se fonder au premier chef sur l'impression d'ensemble. Contrairement à ce que prétend la recourante, qui déforme le texte qu'elle déclare citer, le Tribunal fédéral n'a pas jugé, dans l'arrêt Schweizer Ski-Schule Zermatt c. Zermatter Ski-Schule (RO 82 II 154), que "ce sont seulement les éléments frappants ou considérés comme spécialement caractéristiques qui peuvent être décisifs". Il a simplement précisé que le risque de confusion pouvait aussi provenir de l'identité - ou de la similitude - des seuls éléments particulièrement frappants et caractéristiques.
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En l'espèce, envisagées dans leur ensemble et selon l'impression qu'elles peuvent laisser dans la mémoire du public, les deux raisons en cause ne se distinguent pas nettement l'une de l'autre. Le mot "interim" n'apparaît pas, dans la raison de la demanderesse, comme un élément accessoire, auquel dans l'usage courant les intéressés ne prêteraient aucune attention et qu'ils laisseraient tomber. Le risque de confusion n'est nullement illusoire. Il s'est réa11sé. La demanderesse, en instance cantonale, a rapporté la preuve de nombreuses méprises commises par les services postaux et le public, en un court laps de temps. Les critiques de la recourante sur ce point visent l'appréciation des preuves et sont irrecevables (art. 55 al. 1 OJ).
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La recourante, pour les besoins de sa cause, prête au mot "Adia" une force distinctive qu'il n'a manifestement pas. Certes, selon les constatations souveraines de la cour cantonale, la demanderesse l'emploie souvent seul pour se désigner elle-même et sa clientèle par le beaucoup plus d'Adia que d'Adia interim. Mais ce nom de fantaisie, si sonore qu'il soit, ne laisse pas dans l'esprit du public une impression aussi forte qu'un nom de famille (cf. RO 74 II 235 ss.). Il n'a aucun sens propre et aucun pouvoir évocateur. Les deux entreprises ont leur siège à Lausanne et offrent les mêmes services dans la même région. Leur clientèle commune se recrute dans un très large public et non pas parmi des spécialistes d'une branche déterminée. On ne peut attendre d'elle qu'elle voue une attention profonde à l'identité des organisations de personnel temporaire avec lesquelles elle traite. Le risque de confusion apparaît dès lors très grand et la présence du mot "Adia" dans la raison de la demanderesse ne suffit pas à l'écarter.
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Le terme "service", qui accompagne "interim" dans la raison de la recourante, est lui aussi, comme le relève justement la cour cantonale, un terme générique appartenant au domaine public. Dans son acception commerciale, il désigne soit une activité humaine, soit un organisme ou un département d'une entreprise. Accolé à "interim", il ne lui ajoute rien et ne possède aucune force distinctive propre. Il ne contribue ainsi que fort peu à individualiser la raison, très faible, de la défenderesse. Au contraire, il éveille l'impression que cette dernière n'est qu'une agence ou un département de l'entreprise de la demanderesse. Le risque d'une pareille méprise est hautement vraisemblable, en raison de la mémoire généralement peu fidèle du public et s'est du reste réalisé une fois au moins. Selon la jurisprudence, la demanderesse n'est pas tenue de le souffrir (RO 94 II 131; 93 II 44; 92 II 99).
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L'expression "anct. Adia-Bop" que contient entre parenthèses la raison de l'intimée ne joue pas de rôle non plus. Aussi bien est-elle presque toujours omise dans les relations d'affaires.
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Enfin, la recourante elle-même ne soutient pas que l'indication abrégée de la forme juridique des deux sociétés - "S.à r.l." d'une part et "SA" d'autre part - ait à elle seule ou jointe aux autres éléments de la raison une force distinctive suffisante. Manifestement, le public en général n'y attache aucune importance.
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L'action en cessation de trouble est ainsi bien fondée au regard de l'art. 956 al. 2 CO.
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a) La cour cantonale ne fait qu'une brève allusion à la loi précitée, sans citer une disposition précise, en statuant sur la prétention en dommages-intérêts de la demanderesse. Elle a considéré que cette réclamation pouvait "être fondée tant sur l'art. 956 al. 2 CO que sur la loi sur la concurrence déloyale". Mais elle constate que la défenderesse a "cherché à provoquer une confusion entre son entreprise et celle de la demanderesse". Elle fixe ainsi la volonté interne d'une partie, de manière à lier le Tribunal fédéral. La faute exigée par l'art. 956 al. 2 CO est dès lors indéniable et la demande en dommages-intérêts bien fondée dans son principe au regard de ce texte.
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b) Cela étant, il importe peu qu'elle puisse ou non se fonder sur la loi sur la concurrence déloyale. On peut relever toutefois que l'argumentation de la recourante est erronée. Les deux raisons sociales en cause prêtent à confusion et, partant, induisent le public en erreur. Or le Tribunal fédéral a jugé que l'emploi d'une désignation fallacieuse est objectivement contraire aux règles de la bonne foi, dans le cas d'une raison sociale prioritaire opposée à une simple enseigne (RO 91 II 24). Dans son arrêt Helena Rubinstein AG c. Rubinia AG, il a admis qu'une société dont la raison jouit de la priorité peut s'opposer, en vertu de l'art. 1er al. 2 litt. d LCD, à l'utilisation par une société concurrente d'une raison qui suscite des confusions avec la sienne (RO 93 II 46 consid. 3). Comme la défenderesse est en faute, les conclusions subsidiaires de la demande sont aussi bien fondées en vertu de l'art. 2 al. 1 litt. b et d LCD.
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La jurisprudence citée par la recourante n'est pas pertinente. Dans l'arrêt Provins c. Société vinicole de Perroy, qui concernait une question de marque, le Tribunal fédéral a jugé que l'on ne pouvait pas obtenir, par le biais de l'art. 1er al. 2 litt. d LCD, la protection d'un signe descriptif du domaine public non susceptible d'être protégé en vertu de la LMF (RO 84 II 221 ss.).
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Il ne s'agit pas ici de marque et la raison de la défenderesse est déjà inadmissible du point de vue du droit commercial. Quant à l'arrêt "Einfach"-Reinigung AG c. Wetex AG (RO 87 II 349 ss.), où le Tribunal fédéral a reconnu licite la publicité qui utilisait une désignation générique figurant dans la raison sociale d'une maison concurrente, il traite d'une question étrangère à la présente espèce.
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
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