BGE 103 II 225 | |||
| |||
Bearbeitung, zuletzt am 15.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch) | |||
39. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 28 octobre 1977 dans la cause Kaech contre Badertscher | |
Regeste |
Art. 484 Abs. 2 ZGB. | |
Sachverhalt | |
1 | |
"J'impose à mon héritière l'obligation de donner à bail pour une durée de
| 2 |
dix ans à compter de mon décès... à Mme Badertscher l'appartement qu'elle
| 3 |
occupe actuellement,... chemin de Grange Collomb 4, moyennant un loyer de
| 4 |
175 fr. par mois..."
| 5 |
Noverraz est décédé à Genève le 24 juillet 1972, laissant pour héritière sa soeur, Marguerite Kaech. Dame Badertscher n'a pas obtenu de dame Kaech la conclusion d'un bail conforme aux dispositions du codicille. Alléguant qu'elle avait été obligée, de ce fait, de prendre un autre logement, plus onéreux, elle a actionné dame Kaech en paiement d'une indemnité de 15'000 fr., portée en cours d'instance à 23'055 fr.
| 6 |
7 | |
Marguerite Kaech a recouru en réforme au Tribunal fédéral, concluant principalement au rejet de la demande. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
| 8 |
Extrait des considérants: I | |
9 | |
La recourante critique ce raisonnement. Comme en seconde instance, elle soutient, se référant à la jurisprudence (ATF 94 II 91 /92, consid. 6), que, du moment que la charge ne donne pas naissance à une créance, son inexécution fautive n'entraîne aucun droit à des dommages-intérêts.
| 10 |
11 | |
Le legs se distingue avant tout de la charge en ce qu'il ne se borne pas à conférer aux intéressés un droit à l'exécution, mais crée une véritable créance en faveur des bénéficiaires. Si, fondé sur une disposition pour cause de mort, quelqu'un peut exiger une prestation dans son propre intérêt, on est, en règle générale, en présence, non pas d'une charge, mais bien d'un legs (ATF 101 II 27 /28 consid. 1 et les références).
| 12 |
Selon la Cour de justice, dame Badertscher ne se voit attribuer aucun droit de créance contre dame Kaech, à l'égard de laquelle elle devient au contraire débitrice du montant du loyer. Certes, disent les juges d'appel, vu la modicité de ce loyer, l'intimée devait tirer un avantage patrimonial indirect, mais l'appartement en cause n'entrait pas dans son patrimoine et il n'y avait pas constitution d'un droit réel restreint, tel un droit d'habitation.
| 13 |
C'est partir d'une conception trop étroite du legs. L'art. 484 al. 2 CC est très large: il prévoit que le disposant pourra "astreindre ses héritiers... à faire, sur la valeur des biens, des prestations en faveur d'une personne". Ainsi, n'importe quelle prestation susceptible d'être l'objet d'une obligation et destinée à procurer un avantage patrimonial peut être due par le débiteur du legs (ESCHER, n. 8 ad art. 484 CC; TUOR, 2e éd., n. 13 ad art. 484 CC; PIOTET, op.cit., pp. 114 et 118). Or la cession de l'usage d'une chose moyennant un loyer est une prestation de cette nature: c'est l'objet normal du bail à loyer (art. 253 CO; cf. REYMOND, Gebrauchsüberlassungsverträge, Schweizerisches Privatrecht VII/1, p. 213 ss).
| 14 |
Contrairement à l'opinion de la Cour de justice, on est donc dans le cadre de l'art. 484 al. 2 CC: il y a eu legs, avec cette conséquence que l'intimée peut demander des dommages-intérêts aux conditions de l'art. 97 CO, manifestement réalisées en l'espèce.
| 15 |
16 | |
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR). |