BGE 104 II 136 | |||
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22. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 31 mars 1978 dans la cause P. contre S. | |
Regeste |
Art. 44 ff. OG, Art. 594 Abs. 2 ZGB. | |
Sachverhalt | |
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"... si celui-ci (Antoine S.) revend mes immeubles de l'avenue de Morges 12 à 18, à Lausanne, il devra verser à titre de legs: à mon neveu Charles P. 700'000 fr., à ma nièce Monique B. 500'000 fr., à ma petite-nièce Martine S. 200'000 fr., à mon petit-neveu Christian S. 200'000 fr., à mon petit-neveu Marc Henri S. 200'000 fr."
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La valeur des immeubles, de 1'600'000 fr., est inférieure de 200'000 fr. au montant total des legs modaux. Ces immeubles représentent l'essentiel de la succession.
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- principalement, à ce que l'héritier fût invité à constituer en sa faveur une sûreté immobilière sous forme d'une cédule hypothécaire de 700'000 fr.;
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- subsidiairement, à l'inscription à titre de sûreté d'une hypothèque de 700'000 fr.;
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- plus subsidiairement, à l'annotation d'une restriction du droit d'aliéner;
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- plus subsidiairement encore, à ce qu'interdiction fût faite à l'héritier de disposer des immeubles en cause.
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Le président du Tribunal civil du district de Lausanne a rejeté la requête le 16 décembre 1976.
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Charles P. a recouru au Tribunal cantonal vaudois, qui, par arrêt du 11 novembre 1977, a rejeté le recours.
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Charles P. a recouru en réforme au Tribunal fédéral, reprenant ses conclusions premières mais limitant ses moyens à la fausse application de l'art. 594 al. 2 CC.
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Le Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable.
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Extrait des considérants: | |
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2. a) Dans un arrêt Marchand contre Marchand, rendu sous l'empire de la loi fédérale sur l'organisation judiciaire fédérale de 1893, telle qu'elle avait été modifiée en 1911, le Tribunal fédéral a jugé que la décision ordonnant la liquidation officielle d'une succession ne règle pas une contestation civile et partant ne peut pas être déférée au Tribunal fédéral par la voie du recours en réforme: il n'y a pas prétention de droit matériel formulée par une partie contre une partie adverse, mais simple requête présentée par une partie à une autorité, qui statue dans le cadre de la procédure non contentieuse, non comme autorité de jugement (ATF 39 II 433). Le Tribunal fédéral relève que le projet Jaeger (1909) de revision de la loi d'organisation judiciaire de 1893 prévoyait un recours de droit civil contre la décision relative à la liquidation officielle d'une succession, disposition qui a été supprimée.
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Il résulte des travaux préparatoires de la loi de modification de 1911 que le juge fédéral Jaeger, auteur du projet, estimait qu'une telle décision ne peut pas être l'objet d'un recours en réforme, parce qu'il n'y a pas contestation civile. A côté du recours en réforme, le projet de 1909 instituait un recours en cassation (Kassationsbeschwerde) (art. 105-115 du projet; cf. l'exposé des motifs, p. 72 ss) comprenant trois catégories de cas, savoir:
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- à l'art. 106, quatorze cas relevant de la juridiction non contentieuse, dont les cas des articles actuels 44 lettres b, d, e et 45 lettre b OJ, ainsi que, parmi d'autres, la liquidation officielle;
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- à l'art. 107, des décisions en matière d'exécution forcée, comme, par exemple, la mainlevée provisoire;
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- à l'art. 108, les cas qui font actuellement l'objet du recours en nullité de l'art. 68 OJ.
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Le projet du Conseil fédéral a conservé le recours de droit civil, tout en réduisant la liste des cas de recours non contentieux de l'art. 106 du projet Jaeger. Il l'a supprimé, entre autres, pour la liquidation officielle des successions. Il explique cette modification par le motif qu'il s'agit de cas soulevant avant tout des questions de fait et, partant, que l'unité du droit fédéral ne saurait souffrir de ce que les juridictions cantonales statuent en dernier ressort (Message du Conseil fédéral du 11 mai 1911, texte français, p. 7/8). La liste a encore été réduite lors des débats parlementaires. Comme le remarque l'arrêt Marchand, ces suppressions ont été dictées par le souci de diminuer le nombre des recours de droit civil, et non pas parce que les cas éliminés auraient été considérés comme susceptibles d'être l'objet d'un recours en réforme.
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Le système de 1911 est demeuré: la loi de 1943, actuellement en vigueur, a maintenu la notion de contestation civile, dont le contenu n'a pas été modifié. Elle a conservé, sous le nom de "recours en nullité", le recours de droit civil, le limitant aux cas de l'art. 68 OJ et transportant au chapitre du recours en réforme les cas de recours contre les décisions de nature non contentieuse (art. 44 lettres b, d, e; 45 lettre b OJ).
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Ainsi, il apparaît clairement que l'organisation judiciaire fédérale a toujours restreint, sous réserve de quelques exceptions, le recours en réforme aux contestations civiles et que la décision relative à la liquidation officielle d'une succession a toujours été rangée dans la procédure non contentieuse. On ne peut sur ce point que reprendre l'argumentation de l'arrêt Marchand: destinée à sauvegarder les droits des créanciers de la succession, soit à garantir la conservation d'un droit, la décision de liquidation officielle a un caractère purement conservatoire et ne statue nullement sur l'existence des droits respectifs des créanciers et des successeurs à cause de mort (cf. GULDENER, Grundzüge der freiwilligen Gerichtsbarkeit der Schweiz, Zurich 1954, p. 4, 15/16; Schweizerisches Zivilprozessrecht, 2e éd., Zurich 1958, p. 39; PIOTET, Droit successoral, Traité de droit privé suisse, IV, p. 736).
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b) Le recourant fait également état de l'opinion de Lemp (n. 44 ad art. 205 CC, reprise par WURZBURGER, Les conditions objectives du recours en réforme au Tribunal fédéral, thèse Lausanne 1964, p. 29), selon lequel le litige relatif aux sûretés en garantie des apports de la femme (art. 205 CC) relève de la juridiction contentieuse: ces sûretés ne sont pas assimilables à un séquestre ou à une mesure provisoire devant garantir l'exécution rapide d'un droit exigible; il s'agit d'une garantie durable, identique à un gage conventionnel (en sens contraire: la jurisprudence et la doctrine citées par WURZBURGER, op.cit., p. 29 n. 91; voir cependant ATF 82 II 94 ss, où le Tribunal fédéral est directement entré en matière sur le point de savoir si un conjoint survivant usufruitier est tenu de fournir des sûretés en faveur des cohéritiers, en vertu de l'art. 464 CC).
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Mais l'opinion de Lemp ne peut pas être invoquée dans le cadre du présent litige. On peut envisager que, lorsque la loi prévoit directement l'obligation de fournir des sûretés, comme dans les cas des art. 205, 464, 490, 760 CC, il y a un droit légal à des sûretés, avec le même effet qu'aurait une convention: dès lors, le litige relatif à la constitution de telles sûretés peut être qualifié de contestation civile en ce sens qu'il tranche sur l'existence d'un droit matériel, fondé sur la règle légale. Il en va autrement quand la loi prévoit des mesures conservatoires indéterminées: dans ce cas, le créancier ne peut soutenir qu'il est de par la loi au bénéfice d'un droit à la constitution d'un gage.
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La solution contraire étendrait le recours en réforme là où le législateur l'a délibérément exclu. Par ailleurs, les mesures conservatoires de l'art. 594 al. 2 CC ont été prévues en substitution de la liquidation officielle, qui, contrairement à ce qu'avait envisagé le législateur, n'a pas été accordée aux légataires (cf. PIOTET, op.cit., pp. 754 ss): elles vont donc moins loin qu'une telle mesure, contre laquelle le recours en réforme n'est pas ouvert.
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