BGE 110 II 136 | |||
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28. Arrêt de la Ire Cour civile du 10 avril 1984 dans la cause B. contre M. (recours en réforme) | |
Regeste |
Haftung des Tierhalters. Art. 56 OR. |
2. An den Entlastungsbeweis ist ein strenger Massstab zu legen. Bleiben über die entlastenden Tatsachen Zweifel bestehen, so kann der Halter von der Haftung nicht befreit werden (E. 2). | |
Sachverhalt | |
A.- Le 24 juin 1969, B. circulait au volant de son automobile sur la route d'Hermance. Peu avant Anières, il fut heurté sur l'avant droit par la chienne dalmatienne "Myrta", laquelle avait brusquement surgi sur la chaussée. L'animal, mortellement atteint, fut projeté sur la gauche de la route, tandis que le véhicule de B., ayant soudainement obliqué à gauche, vint percuter l'avant d'une automobile circulant normalement en sens inverse. B. fut grièvement blessé.
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La chienne appartenait à M. Le jour de l'accident, ce dernier était en voyage à l'étranger. Sa femme a dit à la police avoir laissé l'animal dans la cuisine de la villa qu'elle occupe avec son mari à Anières, devant se rendre à Genève en voiture. Quelques minutes plus tard, l'accident survenait.
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La propriété de M. est située au bord du lac. Son terrain est clôturé par un treillis sur trois côtés, la grève étant libre d'accès. La propriété est pourvue de trois portails donnant accès sur le chemin du Nant d'Aisy, qui lui-même débouche un peu plus loin sur la route d'Hermance.
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Par jugement du 28 septembre 1982, le Tribunal de première instance de Genève a admis la responsabilité du défendeur, estimant cependant que la part de risque représentée par l'animal était de 55% et celle du risque inhérent au véhicule automobile de 45%. Il a alloué au demandeur un montant de près de fr. 300'000.-- plus intérêts, sous déduction de fr. 40'000.-- d'acomptes versés par une assurance.
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Statuant sur appel du défendeur, la Cour de justice du canton de Genève a réformé le jugement de première instance et débouté B. de toutes ses conclusions.
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C.- En temps utile, B. a interjeté un recours en réforme au Tribunal fédéral. Il conclut à la réforme de l'arrêt cantonal et à la condamnation du défendeur au paiement des montants qui avaient été alloués par le Tribunal de première instance.
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Le défendeur et intimé M. est décédé postérieurement à l'arrêt cantonal. Ses héritiers ont déclaré qu'ils entendaient poursuivre le procès. Ils ont conclu au rejet du recours.
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Le Tribunal fédéral a admis le recours pour les
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motifs suivants: | |
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a) Selon la jurisprudence la plus récente du Tribunal fédéral, doit être considéré comme détenteur, au sens de l'art. 56 CO, celui qui exerce la maîtrise effective sur l'animal et qui se trouve en mesure de prêter l'attention requise sur lui. Lorsque ces conditions sont remplies, on doit également tenir pour détenteur celui qui n'a que momentanément la garde de l'animal. Savoir, toutefois, si ce dernier doit être considéré seul comme détenteur ou conjointement avec le propriétaire de l'animal ou s'il perd la qualité de détenteur en cas de négligence du propriétaire, dépend des circonstances du cas particulier (ATF 104 II 25 consid. 2a).
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b) En l'espèce, la chienne ayant causé le dommage est un animal familier (cf. METZGER, FJS No 302, p. 8). Le fait que M. était absent de son domicile le jour de l'accident ne lui a pas fait perdre, pendant ce temps, sa qualité de détenteur. Il n'a en effet d'aucune manière abandonné sa maîtrise sur la chienne à un tiers, contrairement à ce qui était le cas, par exemple, en la cause du propriétaire de manège qui avait loué son cheval à une cavalière (ATF 104 II 23 ss cité ci-dessus). Peu importe que M. n'ait pas eu, lors de l'accident, la maîtrise immédiate de l'animal, dès lors qu'il en conservait la maîtrise médiate. Son épouse était alors son auxiliaire, dans la mesure où il lui avait confié la garde de l'animal. La cour cantonale dénie à tort cette qualité à dame M., en se fondant sur l'absence de lien de subordination entre époux et sur la considération que la femme n'avait pas à recevoir d'instructions spéciales de son mari. En effet, la responsabilité du détenteur ne se fonde pas sur l'art. 55 CO, mais sur l'art. 56 CO (cf. OFTINGER, II/1, p. 102), dans le cadre duquel le détenteur répond de la manière dont la personne à laquelle il a remis la garde de la bête accomplit sa tâche (ATF 67 II 28).
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c) Ainsi, M., détenteur de la chienne, répond du comportement de son épouse dans la surveillance exercée sur l'animal.
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a) L'art. 56 al. 1 CO institue une responsabilité causale du détenteur d'animal. Il prévoit toutefois que ce dernier peut se libérer de sa responsabilité en prouvant avoir gardé et surveillé l'animal avec toute l'attention commandée par les circonstances. Le juge doit se montrer strict en ce qui concerne la preuve de cette exception libératoire (ATF 102 II 235 et les arrêts cités; cf. également OFTINGER, II/1, pp. 155/156, 219). Ainsi, en cas de doute quant à la réalité des faits invoqués par le détenteur pour se libérer, ce dernier ne saurait être exonéré de sa responsabilité. A cet égard, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans l'arrêt attaqué (art. 63 al. 2 OJ).
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b) Pour mesurer le danger que pouvait présenter un chien en fuite pour les usagers de la route, il importe peu que celui-ci fût de caractère doux et paisible. Il sied, en revanche, de rechercher si, nonobstant l'absence d'antécédents vagabonds chez lui, des mesures de précaution particulières s'imposaient et, le cas échéant, si elles ont effectivement été prises par le détenteur ou l'auxiliaire agissant à sa place. Compte tenu de l'intensité de la circulation routière de nos jours, la jurisprudence formule à cet égard des exigences accrues (cf. ATF 85 II 245 ss).
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L'arrêt attaqué ne renferme aucune constatation dont on pourrait inférer que la chienne était rompue au trafic routier; aussi n'est-il pas nécessaire d'examiner quelle diligence serait exigée du détenteur dans une telle hypothèse. Dès lors, il fallait compter avec la possibilité que, laissée en liberté, la chienne s'engage inopinément au travers d'une chaussée de grande circulation, située à peu de distance, et qu'il en résulte un dommage pour autrui. Aussi s'imposait-il au détenteur, comme précaution la plus élémentaire, d'empêcher la chienne de sortir de la propriété et de gagner la route toute proche.
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Or, en l'occurrence, on ignore totalement de quelle manière l'animal a pu s'échapper de la propriété. Si la cour cantonale reproduit la déclaration de dame M., selon laquelle elle aurait laissé la chienne dans la cuisine de la maison avant de se rendre en voiture en ville, elle ne déclare pas faire sienne cette version des faits. On en est dès lors réduit à des hypothèses quant à la façon dont l'animal s'est retrouvé sur la route d'Hermance. C'est ainsi que la chienne, qui à l'évidence n'est pas restée enfermée dans la cuisine après le départ de dame M. en ville, a pu sortir de la propriété soit par le côté lac, puisque celui-ci n'est pas clôturé, soit par l'un des portails donnant accès au dehors, qu'un tiers l'ait ouvert ou que dame M. ne l'ait pas refermé lors de son départ en voiture. En tous les cas, on ne saurait considérer que le détenteur a, de manière indubitable, prouvé que la chienne avait été gardée enfermée et que sa fuite résulterait d'une circonstance dont il n'a pas à répondre lui-même.
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c) On doit donc en conclure que le défendeur n'a pas rapporté la preuve libératoire qui lui incombait et, partant, que sa responsabilité est en principe engagée. Sur ce point, il n'y a pas lieu de renvoyer la cause à la cour cantonale pour complément de l'état de fait.
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3. En revanche, il convient de lui renvoyer la cause afin qu'elle examine les questions de fait et de droit qu'elle a pu se dispenser d'aborder dans l'arrêt attaqué, compte tenu de la solution à laquelle elle est parvenue. C'est ainsi qu'il lui appartiendra de se pencher sur le problème d'une éventuelle faute du demandeur, ainsi que sur celui du risque inhérent du véhicule et du taux de répartition entre les deux responsabilités objectives, avant de déterminer le montant de la réparation.
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