BGE 114 II 345 | |||
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64. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 8 novembre 1988 dans la cause Fédération des Travailleurs de la Métallurgie et de l'Horlogerie contre S. | |
Regeste |
Schutz der Persönlichkeit des Arbeitnehmers (Art. 328 Abs. 1 OR); Aktivlegitimation von Berufsverbänden. | |
Sachverhalt | |
La Fédération des Travailleurs de la Métallurgie et de l'Horlogerie (FTMH) a ouvert action contre S. en demandant qu'ordre lui soit donné de démonter ou mettre hors service les installations de surveillance vidéo des ateliers de son entreprise. La Cour civile du Tribunal cantonal du Jura a débouté la FTMH pour défaut de qualité pour agir. La FTMH recourt en réforme auprès du Tribunal fédéral.
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Extrait des considérants: | |
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b) S'agissant de la qualité pour agir des associations professionnelles, la jurisprudence l'a reconnue quand elles entendent défendre un intérêt collectif comprenant non seulement l'intérêt personnel de leurs membres mais aussi celui des personnes qui, sans compter parmi leurs adhérents, exercent cependant le métier de ces derniers. Toutefois, même dans cette hypothèse, la qualité pour agir des associations est subordonnée à la condition qu'elles soient habilitées par leurs statuts à sauvegarder les intérêts économiques de leurs membres et que ceux-ci aient eux-mêmes qualité pour intenter l'action (ATF 86 II 21 consid. 2, ATF 73 II 65). Si elles peuvent ester en justice pour défendre les intérêts communs d'une profession, elles ne sauraient en revanche avoir cette qualité pour réclamer la réparation d'un dommage subi par un de leurs membres personnellement (ATF 86 II 23). Ces principes ont été rappelés dans un arrêt rendu en matière de cartel, où ils ont été appliqués par analogie (ATF 103 II 299 ss consid. 2 à 5). Pour ce qui concerne plus particulièrement la protection de la personnalité fondée sur l'art. 28 CC, la revision de 1983 ne conduit pas à une solution différente (TERCIER, Le nouveau droit le la personnalité, n. 809 ss).
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c) La cour cantonale, après avoir rappelé que les débats étaient limités quant au fond - à l'examen de la qualité pour agir de la demanderesse, a retenu que ses statuts (art. 3) prévoient qu'elle défend les intérêts sociaux, professionnels et matériels de ses membres, en particulier en ce qui concerne les conditions de travail et la protection des travailleurs. Elle a tenu pour établi que certains des travailleurs de l'entreprise du défendeur étaient et sont encore membres de la FTMH. Elle a enfin relevé que ceux-ci auraient personnellement qualité pour intenter une action en cessation de trouble. Elle a toutefois nié que l'atteinte à la personnalité alléguée présenterait "un caractère de précédent par la gravité de cette atteinte" et refusé en conséquence de considérer que la demanderesse pouvait se prévaloir d'un intérêt collectif qui dépasse les intérêts individuels de ses membres.
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La demanderesse fait grief à l'autorité cantonale de n'avoir pas examiné in abstracto si les intérêts des travailleurs auraient pu être lésés de telle manière que leur association professionnelle puisse les défendre. Selon la recourante, le jugement attaqué viole le droit fédéral en niant l'existence d'un intérêt collectif pour le motif que l'installation litigieuse n'emporterait aucune atteinte à la personnalité des travailleurs. On en viendrait ainsi à limiter la qualité pour agir d'une organisation professionnelle aux cas dans lesquels le bien-fondé de la cause est d'emblée établi.
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d) Il découle des principes exposés plus haut que, pour juger de la qualité pour agir, la cour cantonale devait rechercher uniquement si la demanderesse, en tant qu'association professionnelle, pouvait faire valoir en son propre nom la prétention à la cessation du trouble que l'installation litigieuse porterait aux droits de la personnalité des travailleurs, tels qu'ils découlent des art. 328 al. 1 CO et 28 ss CC. Elle n'avait pas à se demander, à ce stade de la procédure, si l'installation en cause constituait une telle atteinte et, en cas de réponse affirmative, quelle était l'importance de cette atteinte. L'autorité cantonale ne s'y est pas trompée lorsqu'elle a reconnu que les travailleurs auraient eu la qualité pour agir. Dès qu'elle avait admis que les statuts de la demanderesse remplissaient la première condition posée par la jurisprudence, elle n'avait plus qu'à rechercher si la seconde - l'existence d'un intérêt collectif dépassant l'intérêt personnel des membres - était aussi réalisée. La demanderesse a pris des conclusions tendant à ce qu'ordre soit donné à la défenderesse de démonter ou mettre hors service les installations de surveillance vidéo des ateliers, alléguant que de telles installations, qui permettent d'apercevoir sur les écrans de contrôle non seulement les machines mais aussi les travailleurs, porteraient atteinte aux droits de la personnalité de ces derniers. Ce faisant, elle invoque un intérêt qui dépasse celui de ses membres et qui touche manifestement toute personne exerçant le même métier. Cet intérêt ne dépendant pas des autres conditions matérielles de l'action, l'autorité cantonale a contesté à tort l'existence d'un intérêt collectif et, partant, la qualité pour agir de la demanderesse. En faisant dépendre cette qualité de la gravité de l'atteinte et de son caractère de précédent, elle a posé des conditions qui ne sont exigées ni par la loi ni par la jurisprudence. Certes, la demanderesse était partie de la même exigence d'une atteinte qualifiée. Cette circonstance ne saurait lui porter préjudice, puisque la qualité pour agir est examinée d'office par le Tribunal fédéral (ATF 108 II 217).
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Les débats ayant été expressément limités à la qualité pour agir de la FTMH, l'autorité cantonale ne peut examiner les autres questions de fond avant de les avoir instruites. Le recours doit être admis et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau, après avoir complété au besoin le dossier (art. 64 al. 1 OJ) dans les limites de la procédure cantonale.
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