BGE 116 II 33 | |||
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5. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 8 janvier 1990 dans la cause W. contre W. et consorts (recours en réforme) | |
Regeste |
Art. 608 und 621bis Abs. 1 ZGB. |
2. Es obliegt dem Teilungsrichter, nach freiem Ermessen zu entscheiden, ob ein Gewerbe ein landwirtschaftliches im Sinne von Art. 620 ZGB ist; Kriterien, die dabei zu berücksichtigen sind (E. 5a). | |
Sachverhalt | |
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Charles W. est décédé le 2 janvier 1968; il laissait pour héritiers son épouse Rosa et ses sept enfants: Lilas R., Marguerite, René, Marcel, Rodolphe, Edouard et André W.; son testament attribuait à son épouse la propriété des 3/16 de sa succession et l'usufruit des 13/16 restants, qui revenaient à parts égales à ses enfants. André W. est décédé intestat le 9 juin 1974, laissant pour héritiers sa mère et ses six frères et soeurs; sa succession consiste en une parcelle (No 410) non bâtie de 1287 m2. Rosa W. est décédée le 14 janvier 1986, sans laisser de testament; sa succession, acceptée, se compose essentiellement de ses parts de propriété sur les immeubles des successions susmentionnées; ses seuls héritiers sont ses six enfants.
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Les parcelles 410, 411 et 412 sont classées en zone de villas, secteur maraîcher. Les autres sont comprises dans une zone constructible de faible densité. Elles sont toutes reliées à une voie publique. La plupart des parcelles avoisinantes sont bâties. Les parcelles 410 et 411 sont grevées d'une servitude de canalisation en faveur de la commune de L. L'acte constitutif précise que cette canalisation devra être déplacée par le bénéficiaire en cas de construction.
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Edouard W. exploite ces terrains depuis plusieurs années. Marcel W. exploite un domaine maraîcher à M.
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B.- Le 5 octobre 1983, Lilas R., Marguerite, René et Marcel W. ont requis le partage des successions de Charles et André W. Le curateur de Rosa et Rodolphe W. ainsi qu'Edouard W. ont souscrit au principe du partage. Le 22 décembre 1983, le président du Tribunal du district a ordonné le partage des successions de Charles et André W.
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a) Par requête incidente du 26 mars 1985, Marcel W. a conclu, principalement, à ce qu'il soit prononcé que la succession de Charles W. est régie par le droit successoral dans sa teneur antérieure au 15 février 1973, celui-ci étant déclaré inapplicable du fait de la règle de partage figurant dans le testament; subsidiairement, il a conclu à ce que les art. 630 ss CC soient déclarés inapplicables aux immeubles formant les successions de Charles et André W., ceux-ci ne constituant pas une exploitation agricole. Le même jour, Lilas R., Marguerite et René W. ont pris les mêmes conclusions. Edouard W. a conclu au rejet des conclusions susmentionnées.
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b) Le 31 juillet 1985, le président du Tribunal du district a suspendu la cause et imparti un délai de trente jours à Edouard W. pour saisir la Commission foncière rurale. Le 21 mars 1986, celle-ci a assujetti les terrains successoraux aux lois fédérales du 12 décembre 1940 sur le désendettement de domaines agricoles et du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété foncière rurale.
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c) Le 17 juin 1986, Marcel W. a conclu au partage de la succession de Rosa W. et à sa jonction à celui des successions de Charles et André W. Il demandait en outre que soit tranchée à titre préalable, après disjonction, la question du droit applicable, en ce sens que les successions de Charles, André et Rosa W. ne sont pas régies par le droit successoral paysan, ancien ou nouveau. Peu après, Lilas R., Marguerite et René W. ont pris des conclusions semblables.
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Le 4 novembre 1986, les parties ont admis, par convention, le principe du partage de la succession de Rosa W. et de sa jonction au procès en partage des successions d'André et de Charles W. Elles sont également convenues qu'un jugement préjudiciel serait rendu sur la question du droit applicable.
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Le 30 septembre 1987, Edouard W. a conclu au rejet des conclusions incidentes prises par les requérants; il a notamment demandé que les art. 620 ss CC soient déclarés applicables, dans leur teneur actuelle, aux trois successions familiales. Les autres parties ainsi que Rodolphe W., représenté par son curateur, ont conclu au rejet de ces conclusions.
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C.- Par jugement préjudiciel du 27 juillet 1988, le président du Tribunal a déclaré le droit successoral paysan inapplicable aux successions de Charles, André et Rosa W. Le recours interjeté par Edouard W. contre ce jugement a été rejeté le 15 mars 1989 par la Chambre des recours du Tribunal cantonal.
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E.- Edouard W. exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral; il conclut notamment à ce que le droit successoral paysan soit déclaré applicable. Les intimés Lilas R., Marguerite, René et Marcel W. concluent au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Rodolphe W. n'a pas déposé de réponse.
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Le Tribunal fédéral rejette le recours.
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Extrait des considérants: | |
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a) Le recourant critique cette application du droit transitoire pour tirer argument de l'actuel art. 621bis al. 1 CC; un héritier disposé et apte à exploiter l'entreprise personnellement ne peut être privé de son droit à l'attribution préférentielle ni par testament, ni par pacte successoral.
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Le droit successoral paysan, régi par les art. 620 ss CC, a été modifié à plusieurs reprises: d'abord par la loi fédérale du 12 décembre 1940 sur le désendettement de domaines agricoles (LDDA; RS 211.412.12), ensuite par la loi fédérale du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété foncière rurale (LPR; RS 211.412.11), enfin par une loi fédérale du 6 octobre 1972.
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Alors que la loi fédérale sur le désendettement de domaines agricoles prévoyait à son art. 108 l'application des art. 620 ss modifiés à toute succession comprenant un domaine agricole non encore attribué par le partage à son entrée en vigueur, la loi fédérale du 6 octobre 1972, comme la loi fédérale sur le maintien de la propriété foncière rurale d'ailleurs, ne contient pas de règle de droit transitoire. Il faut donc appliquer en ce qui la concerne les règles du titre final du Code civil (ATF 96 II 11, ATF 94 II 245 et les références).
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Tandis que l'art. 1er Tit.fin. CC pose le principe général de la non-rétroactivité, l'art. 15 dispose que les rapports de droit successoral sont régis par le droit en vigueur au moment de la mort du de cujus. Cette règle s'applique d'une manière générale à tous les effets de la dévolution et en particulier aux droits et aux devoirs des héritiers (ATF 94 II 248 et les références). Certes, le Tribunal fédéral s'est écarté de ce principe dans l'arrêt cité en ce qui concerne le droit des cohéritiers à une part du gain (ATF 94 II 249 /250). Cette exception se justifie toutefois: ce n'est pas le décès du de cujus qui donne naissance directement et immédiatement à ce droit à une part de gain, mais le fait qu'un héritier se voit attribuer un immeuble à un prix inférieur à la valeur vénale. La situation est différente s'agissant du droit d'un héritier de demander que l'exploitation agricole lui soit entièrement attribuée au sens de l'art. 620 CC. Ce droit prend naissance avec la mort du de cujus qui ouvre sa succession. Il faut donc lui appliquer sans restriction l'art. 15 Tit.fin. CC (ATF 108 II 177, ATF 107 II 39; TUOR/PICENONI, n. 3 des remarques préliminaires ad art. 620 ss CC; ESCHER, Ergänzungslieferung zum bäuerlichen Erbrecht, n. 2 précédant l'art. 620 CC; BENNO STUDER, Die Integralzuweisung landwirtschaftlicher Gewerbe nach der Revision des bäuerlichen Zivilrechts von 1972, thèse Fribourg 1975, p. 151; NEUKOMM/CZETTLER, Le droit successoral paysan, 5e éd. 1983, p. 32).
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L'art. 621bis CC n'est donc pas applicable en l'espèce (ATF 108 II 177 /178 consid. 3, a contrario).
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L'argumentation du recourant selon laquelle cette jurisprudence est discutable et pourrait être revue n'est pas convaincante. La règle générale du droit transitoire ne doit pas céder le pas parce que c'est la loi fédérale sur le désendettement de domaines agricoles qui a innové en droit successoral paysan, que l'art. 621bis a été édicté dans l'intérêt public, encore qu'il faille tenir compte de la durée de l'exploitation agricole ou de la crise que traverserait l'agriculture.
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b) L'art. 608 CC est donc applicable, sans égard au nouvel art. 621bis. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir mal saisi la nature des règles de partage et d'avoir ainsi mal interprété la volonté du testateur Charles W.; le testament ne se prononcerait pas sur le mode de partage, mais se bornerait à indiquer "des proportions", sans individualiser des parts du patrimoine successoral. Mais il ne conteste pas que lesdites règles de partage ont le pas sur le droit successoral paysan des art. 620 ss CC (ATF 97 II 209 No 28, 90 II 4 ss consid. 2, ATF 81 II 596, ATF 80 II 208).
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La liberté du testateur s'étend à toutes les règles de partage, qu'elles aient pour objet l'attribution du domaine à un héritier, le morcellement de l'exploitation ou la valeur à laquelle elle doit être portée en compte; c'est à cette fin que l'on a revisé la loi et introduit le nouvel art. 620bis al. 1 (ATF 90 II 7 /8 consid. 2). Dans la cause citée, le de cujus avait aussi conféré un usufruit viager à son épouse (art. 473 al. 1 CC) - qui n'exclut pas l'attribution préférentielle à un autre héritier (ATF 92 II 319 ss, ATF 108 II 177) - et ordonné que, dans le partage, chacun de ses six enfants reçoive une part égale, notamment 1/6 des immeubles. Dans la présente espèce, Charles W. a, de plus, donné à sa femme 3/16 en propriété. Il paraît clair que la disposition pour cause de mort exprime, dans l'un et l'autre cas, la volonté de préférer l'égalité entre les descendants à l'application du droit successoral paysan (ATF 90 II 8 consid. 3) et rien dans l'arrêt déféré, ni d'ailleurs dans le dossier, ne permet de penser que le défunt aurait abusé de son droit de tester en violation des règles de la bonne foi, ce que le recourant ne prétend du reste pas. Les enfants W. doivent recevoir des "parts égales entre eux", égalité à laquelle déroge précisément le droit successoral paysan (ATF 50 II 330 in fine). Prise par un maraîcher, la disposition prévoit apparemment un partage par division en nature ou en valeur, sans quoi l'attribution à tel enfant eût été normalement évoquée. Si le testateur a avantagé son épouse, cela ne sous-entend pas nécessairement que le domaine devrait être maintenu pour qu'elle puisse y rester. Le premier juge déjà l'a bien vu, ajoutant deux indices en faveur de la règle de partage: l'attribution à la veuve d'une part en propriété incline à penser que son mari envisageait un morcellement; de même la constitution en 1952 d'une servitude préservant les possibilités de construire sur les parcelles. Si le testateur n'a pas lui-même divisé son domaine ni attribué à chaque héritier une parcelle déterminée, il n'en a pas moins voulu un résultat, qui est l'égalité entre ses enfants.
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a) Il incombe au juge du partage de dire librement si une exploitation est agricole au sens de l'art. 620 CC et si les autres conditions de l'attribution préférentielle sont réunies (ATF 83 II 112 s. consid. 4). Seule le lie la valeur fixée par l'autorité administrative en application de la loi sur le désendettement de domaines agricoles (art. 620 al. 3 CC, anciennement al. 2; ATF 87 II 74 ss, ATF 82 II 4 ss).
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Est décisif l'état de la succession à l'époque du partage (art. 617 CC). Toutefois, le seul fait qu'un fonds était à ce moment-là affecté à l'agriculture ne suffit pas à le considérer comme un immeuble agricole. L'exploitation agricole doit correspondre durablement à la nature du fonds et à sa situation; d'après le cours normal des choses, son affectation ne doit pas changer, sauf circonstances extraordinaires, notamment à des fins spéculatives; mais il ne perd pas son caractère initial parce qu'il est seulement possible qu'il soit compris un jour ou l'autre dans la zone, toujours en extension, des terrains à bâtir (ATF 83 II 113 /114 consid. 4; ATF 50 II 330). Mais le droit successoral paysan ne saurait en tout cas être appliqué à des terrains sis en zone à bâtir et immédiatement constructibles qui, pour cette raison, présentent une valeur vénale sans commune mesure avec celle de rendement, de sorte qu'il est devenu improbable et déraisonnable de les réserver à la culture.
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La volonté d'un ayant droit ne joue pas de rôle, mais seulement les critères objectifs, tels le rapport entre la valeur vénale et de rendement, l'affectation à une zone à bâtir, la possibilité de construire sans délai ou dans un proche avenir en raison du degré d'équipement et des prévisions concernant le développement futur de la région ou des projets concrets de construction. Les mesures d'aménagement revêtent une grande importance, d'autant plus qu'elles ne sont modifiées qu'après nombre d'années et que la demande de terrains à bâtir subsiste dans une agglomération urbaine et à sa périphérie (ATF 111 II 326 ss; cf. aussi la jurisprudence relative à l'art. 218bis CO: ATF 93 I 602 consid. 6; ATF 92 I 338 consid. 4).
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Le pronostic doit donc prendre en compte tout ce qui peut influencer les possibilités d'utilisation dans un proche avenir. Il peut arriver que l'inclusion dans une zone à bâtir ou industrielle ne soit exceptionnellement pas décisive, notamment si une telle zone est surdimensionnée (arrêt, non publié, Sch. c. Sch. du 3 mars 1977, cité par NEUKOMM/CZETTLER, op.cit., p. 439).
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Un domaine reste agricole s'il comprend des accessoires en rapport raisonnable avec les terres et bâtiments ruraux, ainsi deux logements outre celui du paysan (ATF 83 II 120 consid. 7). Mais lorsque l'élément non agricole l'emporte en importance, valeur ou rendement, ce caractère agricole fait défaut à l'ensemble (ATF 50 II 327 /328).
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