BGE 118 II 188 | |||
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39. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 18 février 1992 dans la cause société A. contre S. (recours en réforme) | |
Regeste |
Internationales Privatrecht; Arrestprosequierungsklage: örtliche Zuständigkeit, Gerichtsstandsvereinbarung und Rechtshängigkeit (Art. 4, 5 und 9 IPRG). |
2. Da die Aussetzung des Verfahrens nach neuem Recht die Regel bildet, muss sie immer dann angeordnet werden, wenn vernünftigerweise nicht ausgeschlossen werden kann, dass der im Ausland zwischen den gleichen Parteien hängige Prozess innerhalb angemessener Frist zu einem in der Schweiz anerkennbaren Urteil führen wird (E. 3b). | |
Sachverhalt | |
A.- La société A., dont le siège est à Manama (Etat de Bahrein), fait valoir une créance de 7'627'256 rials séoudiens à l'encontre de S., domicilié à Riyad (Arabie Saoudite). Le 21 juin 1987, elle a ouvert action en paiement de cette somme devant un tribunal séoudien, mais a retiré par la suite sa demande, "tous droits réservés".
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Le 27 avril 1988, ladite société a obtenu le séquestre, à Genève, de biens appartenant à son prétendu débiteur. Le 29 juin 1989, elle a introduit, à Genève également, une action en validation de ce séquestre. Le défendeur a soulevé d'entrée de cause l'exception de litispendance, en raison de l'action ouverte précédemment à Riyad, ainsi que l'exception d'incompétence ratione loci, eu égard à une clause de prorogation de for incluse dans le contrat liant les parties. Par jugement sur incident du 15 janvier 1991, le Tribunal de première instance du canton de Genève a rejeté les deux exceptions.
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La Cour de justice du canton de Genève, statuant sur appel du défendeur, a confirmé ce jugement par arrêt du 24 mai 1991.
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B.- Agissant par la voie du recours en réforme, le défendeur invite le Tribunal fédéral à annuler l'arrêt cantonal et à déclarer la demande irrecevable pour incompétence à raison du lieu des tribunaux genevois. A titre subsidiaire, il requiert la suspension de la cause pendante devant ces tribunaux jusqu'à la présentation d'un jugement définitif des tribunaux séoudiens sur le même objet. Plus subsidiairement encore, il sollicite le renvoi de l'affaire à la Cour de justice afin qu'elle complète le dossier et statue à nouveau.
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La demanderesse conclut à l'irrecevabilité du recours ou, sinon, à son rejet et à la confirmation de l'arrêt attaqué.
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Le Tribunal fédéral admet partiellement le recours, annule ledit arrêt et renvoie la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
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Extrait des considérants: | |
2. La loi fédérale sur le droit international privé, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1989, régit notamment la compétence des autorités judiciaires suisses en matière internationale (art. 1er al. 1 let. a LDIP). La compétence du juge - suisse ou étranger - ressortit donc exclusivement à la nouvelle loi (ATF 116 II 624 et les références). Il en va, en particulier, ainsi pour la validation de séquestre (art. 4 LDIP), l'élection de for (art. 5 LDIP) et la litispendance (art. 9 LDIP). Ces questions, que soulève la cause en litige, devront être examinées à la lumière de la loi nouvelle, dès lors que l'action en validation de séquestre a été introduite après l'entrée en vigueur de cette loi.
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Le for suisse du séquestre n'est cependant pas exclusif (WALDER, Einführung in das Internationale Zivilprozessrecht der Schweiz, p. 165, n. 16 ad § 5; VOGEL, Grundriss des Zivilprozessrechts, 2e éd., p. 83, n. 64a ad chap. 4). Une élection de for, au sens de l'art. 5 LDIP, est donc admissible en cette matière à la condition toutefois, comme par le passé (ATF 114 II 188 in fine, ATF 106 III 94 consid. 2a, ATF 66 III 57), que le jugement rendu au for élu puisse être reconnu en Suisse (WALDER, ibid.). C'est à celui qui introduit l'action en validation de séquestre en Suisse qu'il appartient d'établir la compétence ratione loci du juge suisse si le défendeur soulève une exception à ce sujet. En effet, sauf stipulation contraire, l'élection de for est exclusive (art. 5 al. 1 in fine LDIP). Partant, il incombe au demandeur de prouver, soit que les parties ont écarté la présomption légale d'exclusivité du for élu (BRANDENBERG BRANDL, Direkte Zuständigkeit der Schweiz im internationalen Schuldrecht, thèse Saint-Gall 1991, p. 408, note de pied 1153), soit que l'élection de for exclusive ne peut pas être prise en considération, étant donné son caractère abusif (art. 5 al. 2 LDIP) ou parce que le jugement rendu au for élu ne pourrait pas être reconnu en Suisse. Le tribunal saisi appliquera la lex fori pour décider s'il convient de faire abstraction de la clause d'élection de for (HAAS, Die prorogatio fori, thèse Berne 1943, p. 58).
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b) Une action en reconnaissance de dette introduite à l'étranger avant l'exécution du séquestre peut aussi le valider, pour autant qu'elle se rapporte à la créance pour laquelle le séquestre a été exécuté (ATF 114 II 188, ATF 106 III 94, ATF 93 III 77 consid. 2a). Que se passe-t-il, au point de vue procédural, si le demandeur, se fondant sur une clause d'élection de for, a ouvert une telle action à l'étranger contre le prétendu débiteur avant d'introduire l'action en validation de séquestre au for suisse du séquestre et que le défendeur soulève l'exception de litispendance à l'encontre de cette dernière action?
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Dans un arrêt du 7 juin 1988, publié aux ATF 114 II 183 ss, le Tribunal fédéral a indiqué que, lorsque l'on ignore si la procédure étrangère aboutira à un jugement au fond exécutoire en Suisse, le juge suisse doit mettre en balance le risque de jugements contradictoires, d'une part, celui d'une atteinte au droit à la protection juridique, d'autre part. Appliquant ce principe à la validation de séquestre, domaine dans lequel la prompte sauvegarde de prétentions compromises est d'une importance primordiale, il a posé que le juge suisse ne peut refuser la protection des tribunaux - autrement dit, admettre l'exception de litispendance - que si l'on peut s'attendre avec une certitude suffisante à ce qu'un jugement exécutoire soit rendu à l'étranger. En effet, si le juge suisse admet l'exception de litispendance et que le procès pendant à l'étranger n'aboutisse pas à un jugement qui puisse être reconnu et exécuté en Suisse, le séquestre tombe, et avec lui une prétention à la protection du droit fédéral, bien que le créancier séquestrant ait fait tout ce qu'il pouvait faire (p. 187).
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Le législateur fédéral n'a pas codifié tel quel ce principe jurisprudentiel, mais a opté pour une solution en partie différente - la suspension de la cause - préconisée par la doctrine (cf., parmi d'autres, HABSCHEID, Schweizerisches Zivilprozess- und Gerichtsorganisationsrecht, 1re éd., p. 179, n. 486; B. SCHNEIDER, L'exception de litispendance en droit international privé, in: Mélanges offerts à la Société suisse des Juristes, Genève 1976, p. 314) et à laquelle l'arrêt précité fait du reste allusion (p. 187, 2e § ). Ainsi, aux termes de l'art. 9 al. 1 LDIP, lorsqu'une action ayant le même objet est déjà pendante entre les mêmes parties à l'étranger, le tribunal suisse suspend la cause s'il est à prévoir que la juridiction étrangère rendra, dans un délai convenable, une décision pouvant être reconnue en Suisse. En vertu de l'art. 9 al. 3 LDIP, le tribunal suisse se dessaisit dès qu'une telle décision lui est présentée. La suspension de la cause étant la règle sous le régime de la loi nouvelle, elle doit être ordonnée chaque fois que l'on ne peut raisonnablement exclure que la procédure pendante entre les mêmes parties à l'étranger débouche, dans un délai convenable, sur une décision susceptible d'être reconnue en Suisse. En pareille hypothèse, la mise en balance du risque de jugements contradictoires et du risque d'une atteinte au droit à la protection juridique, qu'imposait jusqu'ici la jurisprudence fédérale, ne se justifie plus du moment que le séquestre ne tombera pas avant qu'une décision étrangère pouvant être reconnue en Suisse ait été présentée au tribunal suisse ou que celui-ci ait rendu un jugement dans la cause suspendue. S'il n'y a, en revanche, aucune chance pour que la juridiction étrangère rende, dans un délai convenable, une décision pouvant être reconnue en Suisse, le tribunal suisse renoncera à suspendre la cause et rejettera immédiatement l'exception d'incompétence, comme il l'eût fait sous l'empire de l'ancienne jurisprudence.
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Le demandeur à l'action en validation de séquestre, qui s'oppose à ce que le tribunal suisse qu'il a saisi suspende la cause jusqu'à droit connu sur l'action en reconnaissance de dette déjà pendante à l'étranger, doit établir que la juridiction étrangère ne sera pas en mesure de rendre, dans un délai convenable, une décision pouvant être reconnue en Suisse. Il est normal que cette preuve lui incombe, car c'est lui qui, après avoir ouvert action à l'étranger, vient porter l'affaire devant la juridiction suisse qu'il estime être la seule à pouvoir rendre une décision exécutoire en Suisse. A cela s'ajoute le fait que l'impossibilité de reconnaître une décision étrangère en Suisse doit être établie par celui qui l'allègue, en tout cas lorsqu'elle découle de l'un des motifs prévus à l'art. 27 al. 2 LDIP, au nombre desquels figure la violation de l'ordre public procédural (ATF 116 II 630 consid. 4b et les références).
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c) En l'occurrence, la Cour de justice a rejeté les exceptions d'incompétence ratione loci et de litispendance au motif qu'"il n'y a aucune certitude qu'un procès instruit à Riyad puisse aboutir à un jugement exécutoire en Suisse", de sorte que le risque pour la demanderesse de perdre le bénéfice de son séquestre est réel. Cette argumentation est contraire au droit fédéral, dans la mesure où elle se fonde essentiellement sur l'arrêt publié aux ATF 114 II 183 ss et fait totalement abstraction de l'art. 9 al. 1 LDIP. Les juges précédents ont cru, à tort, pouvoir se dispenser d'examiner si les tribunaux d'Arabie Saoudite sont en mesure de rendre, dans un délai convenable, une décision pouvant être reconnue en Suisse. Ils ont, en outre, fait supporter indûment au défendeur l'absence de preuve à ce sujet.
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Cela étant, l'arrêt attaqué doit être annulé et la cause renvoyée à la Cour de justice pour qu'elle complète au besoin le dossier et statue à nouveau (art. 64 al. 1 OJ). Il lui appartiendra de constater, en premier lieu, si l'action en reconnaissance de dette ouverte le 21 juin 1987 à Riyad y est toujours pendante, ce qui l'amènera nécessairement à s'interroger sur la signification du "retrait" de cette action allégué par la demanderesse, en particulier sur le point de savoir si, selon le droit séoudien, cet acte de procédure unilatéral a mis fin à l'instance - et, dans l'affirmative, s'il doit être assimilé à une décision revêtue de l'autorité de la chose jugée, qui s'opposerait en principe à ce que la même prétention soit portée devant un autre tribunal - ou s'il n'a fait que la suspendre comme le soutient le défendeur.
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La demanderesse, qui affirme avoir fait cesser la litispendance étrangère par ce retrait, devra en établir l'existence et les effets, la preuve du contenu du droit de procédure séoudien y relatif pouvant d'ailleurs lui être imposée (art. 16 al. 1, dernière phrase, LDIP). Si elle parvient à le faire et qu'il faille admettre que le retrait de l'action n'empêche pas l'introduction d'une nouvelle demande pour la même prétention, les juges précédents devront encore décider si la présomption d'exclusivité de l'élection de for a été renversée ou non par la demanderesse: dans l'affirmative, ils rejetteront l'exception d'incompétence ratione loci et entreront en matière sur l'action en validation de séquestre; dans la négative, ils l'admettront, à moins que la demanderesse ne parvienne à établir le caractère prétendument abusif de l'élection de for (art. 5 al. 2 LDIP) ou à démontrer qu'une décision rendue au for élu n'aurait de toute manière pas pu être reconnue en Suisse. S'il apparaît que l'action ouverte à Riyad est toujours pendante, ou du moins si le contraire n'est pas établi, la Cour de justice devra encore rechercher si la demanderesse a réussi à démontrer que l'on peut exclure, avec une vraisemblance confinant à la certitude, que la juridiction séoudienne puisse rendre, dans un délai convenable, une décision susceptible d'être reconnue en Suisse. S'il subsiste un doute légitime à ce propos, la cause devra être suspendue en application de l'art. 9 al. 1 LDIP. Dans le cas contraire, les exceptions soulevées par le défendeur seront définitivement rejetées.
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