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74. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 13 décembre 1994 dans la cause R. contre République d'Irak (recours en réforme) | |
Regeste |
Arbeitsvertrag. Gerichtsbarkeits-Immunität fremder Staaten. | |
Sachverhalt | |
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Les rapports de travail ont apparemment pris fin en 1992.
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B.- Le 18 janvier 1993, R. a assigné la République d'Irak devant les tribunaux genevois en vue d'obtenir le paiement d'un montant qu'il a arrêté à 73'405 fr. 60 dans ses dernières conclusions. La défenderesse a excipé de son immunité de juridiction.
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Par jugement du 24 juin 1993, le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève a admis cette exception et prononcé l'irrecevabilité de la demande.
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C.- Le demandeur interjette un recours en réforme tendant à l'annulation de l'arrêt cantonal, au rejet de l'exception soulevée par la défenderesse et au renvoi de la cause à la juridiction des prud'hommes pour qu'elle statue sur le fond. A l'appui de ce recours, il fait valoir, en résumé, qu'il n'était qu'un employé subalterne de l'Etat défendeur, car il ne disposait d'aucun pouvoir de décision. Il allègue, par ailleurs, une violation de l'art. 6 par. 1 CEDH.
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Le Tribunal fédéral admet le recours et fait droit aux conclusions du demandeur.
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Extrait des considérants: | |
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Les actes accomplis jure imperii, ou actes de souveraineté, se distinguent des actes accomplis jure gestionis, ou actes de gestion, non par leur but mais par leur nature. Pour qualifier un acte donné, l'autorité appelée à statuer peut également recourir à des critères extérieurs à cet acte. Elle procédera aussi, dans chaque cas d'espèce, à une comparaison de l'intérêt de l'Etat étranger à bénéficier de l'immunité avec celui de l'Etat du for à exercer sa souveraineté juridictionnelle et celui du demandeur à obtenir une protection judiciaire de ses droits. Enfin, de tout temps, la jurisprudence suisse a marqué une tendance à restreindre le domaine de l'immunité (pour l'ensemble de ces principes, cf. l' ATF 113 Ia 172 consid. 2 et les arrêts cités).
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b) En matière de contrat de travail, la jurisprudence admet que, si l'Etat accréditant peut avoir un intérêt important à ce que les litiges qui l'opposent à des membres de l'une de ses ambassades exerçant des fonctions supérieures ne soient pas portés devant des tribunaux étrangers, les circonstances ne sont pas les mêmes lorsqu'il s'agit d'employés ![]() | 10 |
Pour décider si le travail accompli par une personne qui est au service de l'Etat accréditant ressortit ou non à l'exercice de la puissance publique, il faut partir des constatations souveraines de la dernière autorité cantonale touchant l'activité litigieuse, telle qu'elle a été déployée dans le cas concret, sans tenir compte des allégations contraires ou nouvelles des parties à ce sujet (art. 63 al. 2 OJ). En effet, à défaut de législation déterminant quelles fonctions permettent à l'Etat accréditant de se prévaloir, à l'égard de leurs titulaires, de son immunité, la désignation de la fonction exercée ne saurait être, à elle seule, un critère décisif. Aussi bien, selon les tâches qui lui sont confiées, tel employé apparaîtra comme un instrument de la puissance publique alors que tel autre, censé occuper un poste identique, devra être classé dans la catégorie des employés subalternes. L'activité de traducteur-interprète n'échappe pas à la règle, nonobstant les tentatives qui ont été faites, ici et là, de la rattacher, in abstracto, à l'une des deux catégories en présence (à ce sujet, cf. PHILIPPE CAHIER, Le droit diplomatique contemporain, 2e éd., p. 313/314 et les références; voir aussi l' ATF 110 II 255 consid. 4d p. 264 in limine, où le Tribunal fédéral range les traducteurs dans la catégorie du personnel de bureau).
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c) En l'espèce, le demandeur, qui n'est pas un ressortissant de l'Etat défendeur, a été recruté au moyen d'une annonce que la défenderesse avait fait paraître dans un hebdomadaire genevois et il a été engagé au for de la Mission. Touchant un salaire modeste, il a assuré la traduction de l'arabe en français, et vice versa, de l'ensemble des documents concernant la Mission, a rédigé lui-même certaines lettres et a participé, comme interprète, à des conférences ou réceptions organisées dans les locaux de la Mission. Outre ces activités, il a assisté les enfants de l'ambassadeur dans leurs tâches scolaires. Ce dernier travail ne constituait assurément pas un acte jure imperii. La même conclusion s'impose s'agissant de l'activité de traducteur-interprète proprement dite, même si l'on se trouve sans doute en présence d'un cas limite. En effet, le traducteur-interprète ne participe pas, en règle générale, à la formation de la volonté de celui qui l'emploie, mais s'attache uniquement à rendre le plus fidèlement ![]() | 12 |
Cependant, cette circonstance ne suffit pas à elle seule pour que la Suisse puisse connaître du litige. Tout rapport de droit privé assumé par un Etat étranger ne peut pas donner lieu à des mesures de procédure en Suisse. Encore faut-il que le rapport de droit en cause ait certains liens avec le territoire suisse ("Binnenbeziehung"), c'est-à-dire qu'il y soit né ou doive y être exécuté ou, tout au moins, que le débiteur ait accompli certains actes de nature à y créer un lieu d'exécution (ATF 106 Ia 142 consid. 3b; EGLI, L'immunité de juridiction et d'exécution des Etats étrangers et de leurs agents dans la jurisprudence du Tribunal fédéral, in: Festschrift 100 Jahre SchKG/Centenaire de la LP, p. 208 et les autres arrêts cités). En l'occurrence, le demandeur, qui séjournait en Suisse depuis 1983, a été recruté et engagé à Genève, ville dans laquelle il a exercé son activité. La relation avec la Suisse est ainsi incontestable.
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Force est, dès lors, de constater, au terme de cet examen, que l'exception d'immunité soulevée par la défenderesse est mal fondée, contrairement à l'avis des juridictions genevoises, ce qui entraîne l'admission du recours, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le moyen pris de la violation de l'art. 6 par. 1 CEDH, l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour qu'elle se prononce sur le fond après avoir examiné, le cas échéant, les autres questions de recevabilité qui pourraient se poser.
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