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22. Extrait de l'arrêt de la Ie Cour de droit public du 28 avril 1997 dans la cause X. contre Office fédéral de la police (recours de droit administratif) | |
Regeste |
Überstellung an das internationale Strafgericht für Ruanda (ISGR). |
Dem Überstellungsentscheid kommt auch die Bedeutung zu, dass eine von den Militärgerichtsbehörden - unter dem Vorbehalt der Überstellung - entschiedene Verfahrensabtretung wirksam wird (E. 3). |
Die gesetzlichen Voraussetzungen für die Überstellung sind vorliegend erfüllt (E. 4), und der Anspruch des Betroffenen auf rechtliches Gehör wurde gewahrt (E. 6). |
Es gilt die Vermutung, dass das Verfahren vor einem internationalen Strafgericht von der Art des ISGR den Anforderungen an einen fairen Prozess genügt: Es ist nicht angezeigt, an die Überstellung Bedingungen zu knüpfen, beim ISGR über die Modalitäten der amtlichen Verteidigung der Angeschuldigten Erkundigungen einzuholen (E. 7a und b) oder die Möglichkeiten der Verbüssung einer allfälligen vom ISGR verhängten Freiheitsstrafe in der Schweiz zu erörtern (E. 7c). |
Abweisung des Gesuchs um Freilassung, soweit darauf eingetreten werden konnte (E. 8). | |
Sachverhalt | |
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Le 12 mars 1996, la Chambre de première instance du Tribunal pénal international pour le Rwanda, à Arusha (Tanzanie; ci-après: le TPIR) a officiellement demandé le dessaisissement en sa faveur de toutes les procédures engagées contre X.
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Par décision du 8 juillet 1996, le Tribunal militaire de cassation a donné suite à cette demande. Il s'est estimé compétent pour statuer en vertu de l'art. 9 de l'arrêté fédéral urgent relatif à la coopération avec les tribunaux internationaux chargés de poursuivre les violations graves du droit international humanitaire, du 21 décembre 1995. Les parties avaient eu un accès suffisant au dossier. La demande de dessaisissement portait manifestement sur les mêmes faits que ceux pour lesquels le prévenu était poursuivi en Suisse, et le TPIR était, à teneur de son Statut, compétent pour en connaître à raison de la matière, de la personne, du lieu et du temps. Le dessaisissement ![]() | 3 |
Le 26 août 1996, le Greffier du TPIR a présenté à la Suisse une demande de transfèrement, à l'appui de laquelle il produisait les documents suivants:
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- un acte d'accusation du 11 juillet 1996 du Procureur auprès du TPIR. X. s'y voit reprocher d'avoir, entre avril et juin 1994, amené des personnes armées dans la région de Bisesero, et de leur avoir ordonné d'attaquer des civils qui étaient venus y chercher refuge; X. aurait personnellement pris part à certaines attaques. Les chefs d'accusation sont: (1) crimes de génocide, pour meurtres ou atteintes graves à l'intégrité physique ou mentale de membres d'une population dans l'intention de détruire, en tout ou partie, un groupe ethnique ou racial comme tel; (2) entente en vue de commettre le génocide; (3,4,5) crimes contre l'humanité, pour avoir assassiné et exterminé, dans le cadre d'une attaque généralisée et systématique, et commis d'autres actes inhumains contre une population civile en raison de son appartenance politique, ethnique ou raciale; (6) violation de l'art. 3 commun aux Conventions de Genève et du Protocole additionnel II, pour avoir commis ou donné l'ordre à d'autres personnes de perpétrer des actes de violence portant gravement atteinte à la vie, à la santé et au bien-être physique ou mental de personnes;
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- une décision de confirmation de l'acte d'accusation rendue le 15 juillet 1996 par la Chambre de première instance du TPIR;
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- un "mandat d'arrêt portant ordonnance de remise" rendu le même jour. Le TPIR y demande la remise de X., afin qu'il réponde des crimes mentionnés dans l'acte d'accusation; l'accusé devait être informé de ses droits de procédure, et prendre connaissance de l'acte d'accusation.
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Entendu le 31 octobre et le 14 novembre 1996 par le Juge d'instruction du canton de Neuchâtel, X. a refusé de répondre sans l'assistance d'un avocat. Le 20 novembre 1996, l'Office fédéral de la police (ci-après: l'OFP) a désigné Me Y., avocate à Genève, comme défenseur d'office de X.
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Dans son mémoire du 5 décembre 1996, X. s'est opposé à son transfèrement. Il se plaignait en premier lieu d'une violation de son droit d'être entendu et de ses droits de défense dans le cadre de la procédure de transfèrement. Il faisait ensuite valoir que l'acte ![]() | 9 |
Par décision du 30 décembre 1996, l'OFP a prononcé le transfèrement de X. au TPIR pour les faits mentionnés dans la demande du 26 août 1996. Ces faits étaient aussi punissables en droit suisse, et ils relevaient de la compétence du TPIR. Le droit d'être entendu avait été respecté puisque X. avait eu la possibilité de s'exprimer devant le Juge d'instruction neuchâtelois, et que son avocate avait pu présenter ses observations. Les griefs relatifs au respect des droits de la défense devant le TPIR n'avaient pas à être examinés dans le cadre de la présente procédure.
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Agissant par la voie du recours de droit administratif, X. prend les conclusions suivantes: annuler la décision de transfert, inviter l'OFP à obtenir du TPIR toute précision chiffrée sur les montants alloués à la défense et les facilités accordées à cette dernière, et interpeller ou inviter l'OFP à interpeller le Conseil fédéral sur l'engagement de la Suisse d'admettre X. à subir une éventuelle peine privative de liberté sur son territoire.
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Le 28 février 1997, X. a formé une demande de mise en liberté provisoire. Il y fait valoir principalement que la procédure d'instruction est close et que, sur le vu des garanties à obtenir de la part du TPIR, la procédure de transfèrement risque de perdurer. Il conteste l'existence d'un risque de fuite. Sa détention serait d'ailleurs illégale puisque l'OFP n'a pas émis de mandat d'arrêt aux fins de transfèrement.
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Extrait des considérants: | |
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Dans sa Résolution 955 du 8 novembre 1994, le Conseil de sécurité a décidé la création d'un Tribunal spécial chargé de juger les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit international humanitaire commis au Rwanda et, dans les Etats voisins, par les citoyens rwandais, entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994, et adopté le Statut du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Cette Résolution comporte les mêmes obligations pour les Etats que la Résolution 827 (1993). Selon l'art. 8 par. 2 de son Statut, le Tribunal international a la "primauté" sur les juridictions nationales en cas de compétences concurrentes, et peut demander en tout temps le dessaisissement en sa faveur (cf. également l'art. 9 al. 2 de l'arrêté).
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b) Le 2 février 1994, puis le 20 mars 1995, le Conseil fédéral a décidé d'appliquer de manière autonome ces deux résolutions, en considérant que ces textes s'inscrivent dans le cadre du chapitre VII de la Charte des Nations Unies (maintien de la paix), qu'ils visent l'application effective du droit international humanitaire, plus particulièrement des Conventions de Genève, et que la Suisse a pris part ![]() | 17 |
c) Le 21 décembre 1995, l'Assemblée fédérale a adopté l'arrêté fédéral urgent relatif à la coopération avec les tribunaux internationaux chargés de poursuivre les violations graves du droit international humanitaire. Répondant aux problèmes spécifiques posés par ce type spécial de collaboration, et destinées à simplifier les procédures en évitant les retards causés par la mise en oeuvre des règles sur la protection juridique, les dispositions de l'arrêté sont pour partie entièrement nouvelles, et pour partie inspirées de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale (EIMP, RS 351.1), avec les adaptations nécessaires. Sauf dispositions contraires, les règles de l'EIMP et de son ordonnance d'application sont applicables par analogie à la coopération avec ces tribunaux internationaux (art. 2 de l'arrêté).
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L'arrêté régit la collaboration avec les Tribunaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, et le Conseil fédéral peut en étendre le champ d'application à la collaboration avec d'autres tribunaux du même genre institués par le Conseil de sécurité (art. 1). Il pose en son art. 9 les conditions du dessaisissement de la juridiction suisse en faveur des tribunaux internationaux. Le chapitre 2 est consacré aux conditions (art. 10) et à la procédure (art. 11 à 15) de transfèrement des personnes. Le chapitre 3 traite des autres actes d'entraide. Le chapitre 4 régit l'exécution en Suisse des peines privatives de liberté prononcées par les tribunaux internationaux, en en fixant les conditions (art. 29) et la procédure (art. 30 à 33).
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3. Dans sa décision du 8 juillet 1996, le Tribunal militaire de cassation a prononcé le dessaisissement de l'autorité pénale suisse en faveur du TPIR. Il s'est estimé compétent pour statuer, en vertu de l'art. 9 al. 2 de l'arrêté fédéral. Selon cette disposition, le dessaisissement est prononcé si la demande porte sur les mêmes faits que ceux qui font l'objet de la procédure pénale ouverte en Suisse (let. a) et si l'infraction relève de la compétence du tribunal international (let. b). Le Tribunal militaire de cassation a estimé que ces conditions étaient réunies. La demande du TPIR portait manifestement sur les mêmes faits - indépendamment de leur qualification juridique - ![]() | 20 |
Le dessaisissement conditionnel prononcé par le Tribunal militaire de cassation est ainsi entré en force, et la demande formée le 26 août 1996 par le TPIR a pour but non seulement d'obtenir le transfèrement de X., mais également de rendre effectif le dessaisissement de la Suisse.
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a) Sans paraître en faire un grief distinct, le recourant estime (partie en fait du recours) que l'acte d'accusation du TPIR serait insuffisant, faute de détailler les faits qui lui sont reprochés. Aucune instruction sérieuse n'aurait encore été menée par le TPIR. Durant l'enquête en Suisse, il n'aurait pas bénéficié d'une défense effec-tive de la part de son avocat; en particulier, aucune confrontation n'aurait été mise sur pied avec les témoins à charge. Les témoins entendus au Rwanda ne seraient pas crédibles.
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Ces arguments ne sont guère pertinents. En effet, saisie d'une demande de transfèrement, l'autorité suisse requise n'a pas à vérifier le bien-fondé de l'accusation portée contre l'intéressé. L'autorité requérante n'a pas à prouver les faits qu'elle allègue, ni même à les ![]() | 24 |
Il n'y a donc pas lieu de procéder aux auditions requises par le recourant, ni d'ordonner l'apport de tout le dossier de la procédure pénale menée devant le TPIR.
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b) Le recourant ne conteste pas, avec raison, que les deux conditions posées par l'art. 10 de l'arrêté sont réalisées en l'espèce. Les agissements qui lui sont reprochés à teneur de l'acte d'accusation du 11 juillet 1996 sont qualifiés de génocide et d'entente en vue de commettre le génocide, de crime contre l'humanité et de violation grave de l'art. 3 commun aux Conventions de Genève et au Protocole additionnel II; ils tombent dans la compétence du TPIR en vertu des art. 2, 3 et 4 du Statut. S'agissant d'actes commis durant l'année 1994 sur le territoire du Rwanda, la compétence ratione loci et temporis du TPIR n'est pas douteuse (art. 7 du Statut). Par ailleurs, comme l'a déjà relevé le Tribunal militaire de cassation, les civils qui, à l'occasion d'un conflit armé, commettent une violation du droit des gens, se rendent coupables de violation des lois de la guerre au sens de l'art. 109 CPM (RS 321.0). Les faits reprochés à X. seraient donc aussi punissables en droit suisse.
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a) Dans son mandat d'arrêt portant ordonnance de remise, du 15 juillet 1996, le Tribunal international requiert l'autorité suisse de faire connaître à l'accusé l'ensemble de ses droits énoncés à l'art. 20 du Statut. Sous le titre "Les droits de l'accusé", cette disposition a la teneur suivante:
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2. Toute personne contre laquelle des accusations sont portées a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement, sous réserve des dispositions de l'art. 21 des statuts [protection des victimes et témoins].
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3. Toute personne accusée est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie conformément aux dispositions du présent statut.
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4. Toute personne contre laquelle une accusation est portée en vertu du présent statut a droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes:
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a) A être informée, dans le plus court délai, dans une langue qu'elle comprend et de façon détaillée, de la nature et des motifs de l'accusation portée contre elle;
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b) A disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et à communiquer avec le conseil de son choix;
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c) A être jugée sans retard excessif;
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d) A être présente au procès et à se défendre elle-même ou à avoir l'assistance d'un défenseur de son choix; si elle n'a pas de défenseur, à être informée de son droit d'en avoir un, et, chaque fois que l'intérêt de la justice l'exige, à se voir attribuer d'office un défenseur, sans frais, si elle n'a pas les moyens de le rémunérer;
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e) A interroger ou faire interroger les témoins à charge et à obtenir la comparution et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;
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f) A se faire assister gratuitement d'un interprète si elle ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience;
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g) A ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable.
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Selon la demande, le recourant devait aussi être informé de son droit de garder le silence, être averti que toute déclaration faite par lui serait enregistrée et pourrait être retenue contre lui, et prendre connaissance de l'acte d'accusation et de la décision de confirmation.
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b) Le recourant relève avoir été entendu par le Juge d'instruction de Neuchâtel sans la présence de son avocate; on ne lui aurait pas donné connaissance des droits et documents mentionnés ci-dessus. Le même magistrat l'aurait menacé d'un transfert de force et aurait refusé de lui nommer un avocat d'office, sans transmettre la requête à l'autorité compétente. Il en résulterait une violation des art. 6 par. 1 et 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH, RS 0.101), 4 Cst. et 52 EIMP.
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c) Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 4 al. 1 Cst., permet à tout justiciable de prendre connaissance du dossier de la cause, de ![]() | 42 |
d) Lors de son audition par le Juge d'instruction de Neuchâtel, le 31 octobre 1996, le recourant a confirmé son identité. Il a exprimé son voeu d'être assisté de Me Y., cette dernière n'acceptant d'assister à l'audition qu'à condition d'être nommée d'office. Lors de l'audition du 14 novembre 1996 (à laquelle l'avocate du recourant avait été convoquée, mais refusa de s'y rendre en l'absence d'une nomination d'office), le magistrat avait l'intention de donner lecture des documents annexés à la demande, d'informer le recourant de la possibilité d'un transfèrement sans formalité (art. 54 EIMP par analogie), et de l'interroger sur ses motifs d'opposition. Le recourant a déclaré ne pas vouloir répondre hors de la présence d'un avocat d'office. L'absence d'avocat lors de ces deux auditions ne constitue toutefois pas une violation du droit d'être entendu. En effet, ce qui est déterminant pour le respect de ce droit, c'est que le recourant ait pu effectivement bénéficier de l'assistance d'un avocat, prendre connaissance du dossier de la procédure et faire valoir ses moyens d'opposition avant le prononcé de la décision rendue à son encontre. Nommée d'office par l'OFP le 20 novembre 1996, l'avocate du recourant a pris connaissance de l'ensemble du dossier; le recourant a pu apprendre par son entremise - s'il l'ignorait auparavant - l'ensemble des faits qui lui sont reprochés, et prendre ![]() | 43 |
e) Le recourant invoque en vain l'art. 6 CEDH. Il perd en effet de vue que, selon une jurisprudence constante, cette disposition est inapplicable en tant que telle à une procédure administrative d'entraide internationale, qu'il s'agisse d'extradition (voir à ce propos la jurisprudence de Strasbourg citée par FROWEIN/PEUKERT, EMRK-Kommentar 2ème éd., Kehl, 1996, p. 190 note 199), d'entraide judiciaire (cf. ATF 120 Ib 112 consid. 4 p. 119 et ATF 115 Ib 517 consid. 10a p. 551), ou, comme ici, du transfèrement à une juridiction internationale. En effet, un tel transfèrement ne constitue pas, en lui-même, une décision portant sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale au sens de l'art. 6 par. 1 CEDH. Par ailleurs, le recourant omet d'indiquer dans quelle mesure cette disposition lui conférerait des droits allant au-delà des garanties offertes par l'art. 4 Cst. et par le droit fédéral applicable. On cherche également en vain en quoi la procédure suivie jusqu'ici pourrait, comme il semble le soutenir, constituer un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'art. 3 CEDH.
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a) Lorsqu'elle accorde l'extradition ou l'entraide judiciaire, la Suisse doit s'assurer que les procédures pour les besoins desquelles elle offre sa collaboration garantissent aux personnes poursuivies un standard minimum correspondant à celui offert par le droit des Etats démocratiques, défini en particulier par la Convention européenne des droits de l'homme ou le Pacte international du 16 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques (Pacte ONU II, RS 0.103.2). Cette obligation est consacrée à l'art. 2 let. a EIMP, dans sa nouvelle teneur en vigueur dès le 1er février 1997, qui déclare irrecevables les demandes de coopération lorsque la procédure à l'étranger n'est pas conforme aux garanties de procédure fixées par ces instruments ![]() | 46 |
b) Développés dans le cadre de l'entraide internationale avec des Etats tiers, ces principes ne sauraient être transposés sans autre au cas spécial de l'entraide à accorder à des tribunaux pénaux internationaux dont la Suisse a, expressément et sans réserve, reconnu la juridiction. En effet, en décidant d'appliquer à titre autonome les Résolutions 827(1993) et 955(1994), le Conseil fédéral, puis le législateur suisse, sont partis de la considération que ces tribunaux internationaux, émanations de la communauté des Etats, offraient des garanties suffisantes quant à un déroulement correct des procédures (FF 1995 IV p. 1072). Le législateur a ainsi délibérément exclu l'application des règles de l'EIMP relatives à la procédure menée à l'étranger (en particulier l'art. 2 EIMP, art. 3 al. 2 de l'arrêté; FF 1995 IV p. 1075), et aux conditions dont peut être assortie la décision de transfèrement (art. 37 EIMP, art. 10 al. 3 de l'arrêté). Contrairement à ce que soutient le recourant, on ne saurait voir à cet égard une lacune de la loi, susceptible d'être comblée par le juge (art. 1er al. 2 CC). Il n'y a donc pas lieu d'examiner, comme le voudrait le recourant, si la procédure devant le TPIR est conforme aux standards minimaux posés par la CEDH et le Pacte ONU II, cette conformité devant être présumée. De toute façon, un tel examen ne permettrait pas de refuser la collaboration requise, comme cela est démontré ci-dessous.
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aa) La présomption dont bénéficie la juridiction requérante, en raison de sa nature même, se trouve renforcée par la teneur de son Statut. En effet, son art. 20, cité plus haut, accorde aux prévenus l'ensemble des droits de procédure reconnus par la CEDH et le Pacte ONU II. Le règlement de procédure et de preuve du TPIR, adopté le 5 juillet 1996, prévoit en outre, en son art. 44, la commission d'un conseil d'office pour un accusé indigent. Les critères de ![]() | 48 |
L'avocate du recourant a d'ailleurs été elle-même nommée d'office par le TPIR, le 12 décembre 1996, pour la défense du recourant devant cette juridiction. A cette occasion, le greffier lui a remis les trois actes déjà annexés à la demande de transfèrement, le Statut du Tribunal et un règlement provisoire sur la détention préventive.
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bb) Dans sa Résolution 50/213 C du 7 juin 1996, l'Assemblée générale des Nations Unies a prié le Bureau des services de contrôle interne d'effectuer une inspection auprès du TPIR; celle-ci a eu lieu du 30 septembre au mois de novembre 1996. Le rapport de ce Bureau, soumis le 6 février 1997 à l'Assemblée générale, fait état d'une gestion déficiente du TPIR, de nombreux dysfonctionnements et de différents internes entre ses organes (Président du tribunal, Greffe, Bureau du Procureur), qui ont conduit au remplacement d'un certain nombre de fonctionnaires. La juridiction n'aurait pas atteint ses objectifs et n'y parviendrait pas sans l'appui nécessaire. Certains changements seraient en cours, mais de nombreux autres apparaîtraient nécessaires. Le Bureau formulait de nombreuses recommandations, portant en particulier sur le rôle du Greffe et son organisation. Un nouvel examen, limité, devait avoir lieu au cours du deuxième trimestre de 1997. Dans sa note du 6 février 1997, accompagnant ce rapport, le Secrétaire général fait siennes ces conclusions. Il s'est engagé à combler les lacunes relevées et à prendre toutes les mesures nécessaires pour rationaliser et renforcer l'appui que le Secrétariat apporte au Tribunal. A titre de "suivi immédiat" des recommandations évoquées ci-dessus, une assistance supplémentaire est actuellement fournie sur place au Tribunal, et des modalités d'appui plus systématiques sont mises au point pour répondre à ses besoins.
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cc) Il convient de relever que les critiques relatives à l'efficacité du Tribunal, dont il est fait état ci-dessus (sur cette question, voir également ALAIN RIBAUX, Folie meurtrière au pays des mille collines, Carnet de notes d'un enquêteur suisse au Rwanda, Recueil de jurisprudence neuchâteloise 1996, p. 11-30, spéc. p. 26-29), ne visent que ses problèmes de gestion et d'organisation; aucune crainte n'est en revanche expressément émise quant au respect des droits des prévenus. Par ailleurs, les dysfonctionnements évoqués ont été pris au ![]() | 51 |
Les allégations du recourant portant sur la mauvaise organisation et le manque de moyens du TPIR n'empêchent donc pas de présumer que la procédure pénale satisfera dans son ensemble, conformément à son Statut, aux exigences minimales posées par les instruments relatifs aux droits de l'homme. Dans le cadre d'une mesure d'entraide accordée sur la base de la confiance légitimement inspirée par la juridiction requérante, il n'y a pas lieu de poser des conditions au transfèrement, ni d'interpeller cette juridiction sur les modalités de la défense d'office des prévenus.
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c) Le recourant voudrait aussi que le Conseil fédéral soit interpellé et s'engage à admettre l'exécution en Suisse d'une éventuelle peine privative de liberté prononcée contre lui, et à manifester cette volonté auprès du TPIR. Selon l'art. 103 du règlement TPIR, "la peine de prison est exécutée au Rwanda ou dans un Etat désigné par le Tribunal sur une liste d'Etats ayant indiqué leur volonté d'accueillir les personnes condamnées pour l'exécution de leur peine... [al. 1]. Le transfert du condamné vers cet Etat est effectué aussitôt que possible après expiration du délai d'appel." [al. 2]. Invoquant son statut de demandeur d'asile en Suisse, le recourant redoute une incarcération au Rwanda, compte tenu des conditions de détention déplorables qui y règnent et des autres violations des droits de l'homme commises actuellement dans cet Etat.
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Cette requête n'a pas non plus sa place dans le cadre de la présente procédure. En effet, la remise du recourant au TPIR n'est en rien comparable à une extradition pure et simple au Rwanda; le recourant sera, avant le procès, détenu en Tanzanie. Par ailleurs, rien n'indique qu'en cas de condamnation, la peine sera exécutée au Rwanda s'il existe des motifs de croire que le recourant y serait exposé, notamment, à des traitements contraires à l'art. 3 CEDH ou 7 du Pacte ONU II. L'art. 26 du Statut et l'art. 104 du Règlement prévoient que toutes les peines de détention sont exécutées sous le contrôle du Tribunal ou d'un organe désigné par lui, ce qui est de nature à dissiper les craintes du recourant.
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L'art. 29 al. 1 de l'arrêté permet l'exécution en Suisse des décisions exécutoires d'un tribunal international, si le condamné ![]() | 55 |
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a) S'agissant de la détention aux fins de transfèrement, le recourant reproche à l'OFP de ne pas avoir émis de mandat d'arrêt à réception de la demande du TPIR. Le titre de détention serait actuellement fondé sur la procédure nationale. Le recourant conteste l'existence des charges retenues contre lui; il met en doute la crédibilité des témoignages le mettant en cause. Compte tenu des mesures d'instruction selon lui nécessaires, la procédure pourrait encore durer, ce qui justifierait son élargissement. Le recourant conteste l'existence d'un risque de fuite.
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Invité à se déterminer sur la demande de mise en liberté, l'OFP conclut à son irrecevabilité. Le recourant serait actuellement en détention préventive, récemment prolongée jusqu'au 24 mars 1997 par le Président du Tribunal de division I, et une telle demande devrait être adressée à la justice militaire. Vu l'existence de ce titre de détention, le prononcé d'un mandat d'arrêt aux fins de transfèrement ne se justifierait pas.
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b) Selon l'art. 12 de l'arrêté, l'OFP, saisi d'une demande de transfèrement, décerne un mandat d'arrêt à cette fin. L'art. 47 al. 1 EIMP n'est pas applicable, ce qui signifie que l'arrestation doit être prononcée même s'il apparaît que la personne poursuivie ne se soustraira pas au transfèrement, ou qu'elle peut fournir un alibi sans délai. La détention en vue d'un transfèrement à une juridiction internationale est ainsi soumise au respect de conditions purement formelles ![]() | 59 |
aa) Saisie d'un recours de droit administratif formé contre une décision accordant l'extradition, la cour de céans est en principe également compétente pour connaître des griefs relatifs à la détention (ATF 117 IV 359 consid. 1a p. 360-361); il en va de même, par analogie, s'agissant de griefs relatifs à la détention, venant se greffer sur une procédure de transfèrement à une juridiction internationale.
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En l'espèce, la détention a été ordonnée, puis régulièrement prolongée, par les autorités militaires, formellement compétentes jusqu'au prononcé du présent arrêt, en application des art. 56, 59 al. 2 et 167 let. c de la loi fédérale sur la procédure pénale militaire (PPM; RS 322.1). Jusqu'à ce moment, le titre juridique de la détention du recourant résidait dans l'application de l'art. 56 PPM (détention préventive), mesure de sûreté qui eût permis à la justice militaire suisse de reprendre son cours en cas d'absence de transfèrement du recourant au TPIR. A défaut d'un mandat d'arrêt décerné par l'OFP aux fins du transfèrement (sur ce point, voir ci-dessous bb), il incombait en principe au recourant de continuer de faire contrôler la légalité de sa détention (en application des dispositions précitées, et, plus généralement, des art. 5 par. 1 let. c et 5 par. 3 CEDH, en liaison avec l'art. 5 par. 4 CEDH) par les juridictions militaires. Formée devant le Tribunal fédéral, la demande de mise en liberté provisoire du 28 février 1997 apparaît donc, en principe, irrecevable. Il incombe néanmoins au Tribunal fédéral d'émettre, en l'espèce, les considérations suivantes sur le fond de cette demande de libération. En effet, dans sa décision de prolongation de la détention du 24 février 1997, le Président I du Tribunal militaire de division I a estimé qu'en raison du recours pendant devant le Tribunal fédéral contre la décision de l'OFP du 30 décembre 1996, il ne lui était toujours pas possible, "dans ces conditions", d'envisager une libération conditionnelle.
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bb) A vrai dire, même si le mandat d'arrêt aux fins de transfèrement ne déploie pas d'effet - "n'est pas exécutoire", selon l'art. 49 al. 2 nouvelle teneur EIMP - tant que la personne poursuivie est détenue pour une autre cause (besoins d'une instruction ou exécution d'un jugement), il eût été opportun que, comme le prévoit l'art. 12 de l'arrêté, l'OFP décernât un mandat d'arrêt dès réception de la demande du TPIR ou, à tout le moins, simultanément à sa décision de transfèrement (art. 14 al. 1 de l'arrêté). Cette manière de ![]() | 62 |
cc) En ce qui concerne la justification matérielle de la détention, l'essentiel est de constater qu'en définitive, le recourant a bénéficié devant les juridictions militaires suisses, jusqu'au prononcé de l'arrêt de ce jour, des garanties de l'art. 5 par. 4 CEDH (en liaison avec les art. 5 par. 1 let. c et 5 par. 3 CEDH), en application des art. 56, 59 al. 2 et 167 let. c PPM.
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Pour sa part, le Tribunal fédéral constate, en application directe de l'art. 5 par. 4 CEDH et de l'art. 9 par. 4 Pacte ONU II (en liaison avec l'art 5 par. 1 let. f CEDH applicable par analogie), que les motifs invoqués par le recourant à l'appui de sa demande de mise en liberté doivent être écartés. En effet, vu la gravité des infractions sur lesquelles le TPIR doit se prononcer, le législateur a supprimé la possibilité, fondée sur l'art. 47 al. 1 let. a et b EIMP, de renoncer à la détention de la personne à transférer (FF 1995 IV p. 1079). L'incarcération est par conséquent la règle et l'intéressé n'est admis à arguer ni de l'inexistence des charges, ni de l'absence du risque de fuite. De toute façon, compte tenu de la gravité des soupçons qui pèsent sur le recourant et du risque manifeste qu'il se soustraie à la justice internationale en cas de libération, une prolongation de sa détention est indispensable jusqu'au moment de son transfèrement effectif au TPIR.
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Le présent arrêt, qui a pour effet de dessaisir définitivement les autorités suisses, n'a donc pas comme conséquence la mise en liberté du recourant; il vaut, dès son prononcé, titre juridique de détention du recourant, jusqu'au moment de sa remise effective au TPIR.
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