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34. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause Eole-Res SA et Conseil d'Etat de la République et Canton de Neuchâtel, chacun contre A. et consorts (recours de droit administratif et recours de droit public) |
1A.122/2005 / 1A.134/2005 / 1P.288/2005 du 31 août 2006 | |
Regeste |
Raumplanung, Schutzzone, Energiepolitik, kantonaler Nutzungsplan für Windkraftanlagen. |
Abwägung der Interessen zur Feststellung des öffentlichen Interesses und der Verhältnismässigkeit einer umstrittenen raumplanerischen Massnahme (Art. 36 Abs. 2 und 3 BV i.V.m. Art. 26 Abs. 1 BV); Gegenüberstellung der Wichtigkeit bzw. des Interesses an der Erhaltung eines Naturschutzgebietes einerseits und des Interesses an der Umsetzung der vom Bund und von den Kantonen entwickelten Politik zur Förderung erneuerbarer Energien andererseits (E. 4.3-4.5). | |
Sachverhalt | |
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Après l'étude préliminaire précitée, l'administration cantonale a élaboré, puis mis en consultation en juin 2001, une nouvelle fiche de coordination 9-0-04 du plan directeur cantonal. L'objet de cette fiche est ainsi décrit: "Planification cantonale pour l'implantation de deux parcs d'éoliennes en vue de la production d'énergie électrique; le premier parc est planifié sur le site du Crêt-Meuron; le deuxième parc doit encore être déterminé". Le 29 août 2001, le Conseil d'Etat a complété le plan directeur cantonal en y insérant la fiche 9-0-04. Cette adjonction a été approuvée par le Conseil fédéral le 4 décembre 2001.
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Le projet de plan d'affectation cantonal a été mis à l'enquête publique du 11 au 31 janvier 2002. Le dossier comprenait, outre le plan et le règlement, un document intitulé "rapport de conformité selon art. 47 OAT/notice d'impact sur l'environnement", établi par le bureau d'ingénieurs N., à Neuchâtel. Plusieurs particuliers, surtout des propriétaires de résidences secondaires dans les environs, ainsi que deux organisations de protection de la nature ont formé opposition. Le département cantonal a écarté ces oppositions par trois décisions motivées, rendues le 18 février 2003.
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Les opposants ont recouru auprès du Tribunal administratif cantonal contre les décisions du département cantonal. Les deux recours - l'un formé par les deux organisations, l'autre par les particuliers - ont été joints. Le Tribunal administratif a, par un arrêt rendu le ![]() | 5 |
Agissant par la voie du recours de droit public, la société Eole-Res a demandé au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif. Invoquant la garantie de la propriété (art. 26 al. 1 Cst.) ainsi que la liberté économique (art. 27 Cst.), elle qualifie cette décision d'arbitraire, notamment à cause d'une pesée incomplète des intérêts en jeu. Cette société a en outre formé un recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal administratif. Le Conseil d'Etat du canton a également formé un recours de droit administratif.
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Le Tribunal fédéral a déclaré irrecevables les deux recours de droit administratif. Il est entré en matière sur le recours de droit public formé par la société Eole-Res (conformément à la règle de l'art. 34 al. 3 LAT, la contestation portant sur un plan d'affectation), il l'a admis et il a annulé l'arrêt du Tribunal administratif.
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Extrait des considérants: | |
4. La recourante qualifie la décision attaquée d'arbitraire, parce qu'elle serait en contradiction évidente avec la situation de fait. Elle reproche au Tribunal administratif une appréciation insoutenable des intérêts en jeu, en particulier de l'intérêt public que représente ![]() | 8 |
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Le décret de 1966 définit, dans son périmètre, trois genres de zones: les zones de crêtes et de forêts, les zones de vignes et de grèves, les zones de constructions basses (art. 1er al. 2). Les zones de crêtes et de forêts sont, en vertu de l'art. 2 al. 1 du décret de 1966 - article révisé en 1988 -, "soumises aux dispositions applicables aux zones situées hors de la zone d'urbanisation telles qu'elles sont prévues par la loi cantonale sur l'aménagement du territoire (LCAT), du 24 juin 1986". L'art. 8 de ce décret prévoit en outre qu'il n'a pas pour effet, dans le périmètre général de ces zones, de "restreindre (...) l'édification de bâtiments servant à des fins d'utilité publique". Le décret de 1966, dans sa teneur actuelle, ne définit pas plus précisément le régime applicable au site du Crêt-Meuron. Avant la révision de 1988, l'art. 2 al. 1 du décret interdisait d'édifier, dans les zones de crêtes et de forêts, "des bâtiments servant à un but étranger à l'économie agricole, viticole ou forestière"; il contenait déjà la réserve de l'art. 8 al. 1 au sujet des bâtiments d'utilité publique (cf. ancien Recueil de la législation neuchâteloise, tome III, p. 696).
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Actuellement, depuis la révision de 1988 - qui avait pour but d'adapter ce plan cantonal aux exigences de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, comme cela est exposé dans l'arrêt attaqué (cf. également arrêt 1A.120/2001 du 18 janvier 2002, à ![]() | 11 |
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L'art. 21 al. 2 LAT dispose que lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées, les plans d'affectation feront l'objet des adaptations nécessaires. Le législateur fédéral a ainsi choisi une solution de compromis entre deux exigences contradictoires: d'une part, l'aménagement du territoire étant un processus continu, et la détermination des différentes affectations impliquant des pesées d'intérêts fondées sur des circonstances changeantes et des pronostics qui ne se confirment jamais entièrement, l'adaptation périodique des plans d'affectation est indispensable pour assurer, progressivement, leur conformité aux exigences légales; d'autre part, il faut tenir compte des intérêts privés et publics dont la protection nécessite une certaine sécurité juridique (cf. THIERRY TANQUEREL, Commentaire LAT, Zurich 1999, nos 11 ss ad art. 21 LAT). La jurisprudence souligne que, pour apprécier l'évolution des circonstances et la nécessité d'adapter un plan d'affectation, une pesée des intérêts ![]() | 13 |
La jurisprudence a eu l'occasion de préciser, à propos de l'élaboration d'un plan d'affectation spécial en vue de la réalisation d'une installation non susceptible d'obtenir une autorisation dérogatoire hors de la zone à bâtir, à cause de ses dimensions voire de ses incidences sur la planification locale ou sur l'environnement, que la révision partielle du plan d'affectation - par l'adoption d'un plan d'affectation spécial - ne devait pas être soumise à des exigences moins strictes que l'octroi d'une dérogation selon l'art. 24 LAT. Cela signifie que l'autorité qui établit le plan d'affectation doit vérifier que l'implantation des constructions ou installations à l'endroit retenu est imposée par leur destination (cf. art. 24 let. a LAT), et qu'elle doit examiner si aucun intérêt prépondérant ne s'oppose au projet (cf. art. 24 let. b LAT). En d'autres termes, l'autorité de planification doit procéder à une pesée générale des intérêts et, dans ce cadre, évaluer d'éventuels emplacements alternatifs (cf. ATF 124 II 391 consid. 2c p. 393; ATF 116 Ib 50 consid. 3b p. 55; ATF 115 Ib 508 consid. 6b p. 514; arrêt 1A.79/1996 du 9 août 1996, consid. 4d/cc, publié in ZBl 98/1997 p. 231; TANQUEREL, op. cit., n. 50/51 ad art. 21 LAT; PETER HÄNNI, Planungs-, Bau- und besonderes Umweltschutzrecht, 4e éd., Berne 2002, p. 532). Il n'en demeure pas moins que si, avec l'évolution des circonstances, une mise en oeuvre correcte des buts et principes de l'aménagement du territoire (art. 1 et 3 LAT) ainsi qu'une concrétisation des objectifs du plan directeur cantonal commandent de réviser un plan d'affectation, dans un périmètre restreint et en vue de la réalisation d'un projet particulier, l'autorité de planification doit pouvoir prendre les décisions nécessaires sans être limitée par une interprétation stricte des critères de l'art. 24 LAT. Cette autorité n'est en effet pas dans la même position que celle qui délivre des autorisations ou des dérogations en veillant à ne pas mettre en péril la réalisation du plan d'affectation en vigueur.
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Pour définir le cadre de la contestation, le Tribunal administratif a exposé que la question de la compatibilité entre le projet de parc éolien et les dispositions du décret de 1966 ne se posait pas en tant que telle; la force normative du plan d'affectation cantonal contenu dans le décret de 1966, adopté par le législateur et le peuple (référendum du 20 mars 1966), n'était formellement pas supérieure à celle du plan d'affectation cantonal spécial pour le parc éolien. Ces considérations sont correctes, au regard de la règle de l'art. 21 al. 2 LAT. On ne saurait en effet, sur la base du droit fédéral, poser comme principe l'intérêt à la stabilité du plan des sites naturels annexé au décret de 1966.
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4.3 Quand la contestation porte sur la modification d'un plan d'affectation, les parties admises à se prévaloir de la garantie de la propriété (art. 26 al. 1 Cst.) peuvent se plaindre du fait que les nouvelles restrictions qui leur sont imposées ne sont pas justifiées par un intérêt public (cf. art. 36 al. 2 Cst.) ni conformes au principe de la proportionnalité (cf. art. 36 al. 3 Cst.). Elles peuvent en d'autres termes critiquer sous cet angle l'application des règles d'aménagement ![]() | 17 |
Ces mêmes règles s'appliquent lorsqu'un projet de révision du plan est adopté par l'autorité de planification puis finalement annulé par l'autorité cantonale de recours. Les intéressés peuvent alors faire valoir devant le Tribunal fédéral que le maintien du régime d'affectation en vigueur - conséquence de l'annulation du nouveau plan - n'est plus justifié, vu l'évolution des circonstances (cf. art. 21 al. 2 LAT), et que le refus du nouveau plan porte atteinte à la garantie de la propriété, la révision envisagée permettant de lever des restrictions dépourvues d'intérêt public ou disproportionnées (cf. ATF 120 Ia 227 consid. 2c p. 233).
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4.4 Dans la pesée des intérêts qu'il a effectuée, en appliquant par analogie les critères de l'art. 24 LAT, le Tribunal administratif a en premier lieu considéré que l'implantation du projet du parc éolien sur le site du Crêt-Meuron était imposée par sa destination (cf. art. 24 let. a LAT). Il a notamment retenu à ce propos qu'il n'était pas nécessaire que l'emplacement proposé constituât l'unique possibilité car il suffisait de pouvoir se fonder sur des motifs importants et objectifs justifiant la réalisation de la construction à l'endroit prévu. Cette conclusion n'est pas contestée par la recourante; quant aux opposants intimés, ils ne discutent pas cet aspect. Il convient ![]() | 19 |
Avant l'adoption (par le département cantonal) du plan d'affectation cantonal litigieux, le Conseil d'Etat s'était déjà prononcé sur le choix du site du Crêt-Meuron, dans le cadre d'une adaptation du plan directeur cantonal (nouvelle fiche de coordination 9-0-04). Le Tribunal administratif a renoncé, dans l'arrêt attaqué, à examiner la validité de cette fiche. D'un point de vue formel, on ne voit cependant pas en quoi cette fiche serait critiquable: elle a été approuvée par le Conseil fédéral conformément à l'art. 11 LAT et elle contient des indications susceptibles de figurer dans le plan directeur cantonal, en vertu de l'art. 8 LAT (cf. également art. 5 de l'ordonnance sur l'aménagement du territoire [OAT; RS 700.1]). Cela étant, le Tribunal administratif ne s'est pas considéré comme lié par cette "planification cantonale pour l'implantation de deux parcs d'éoliennes" (selon le libellé de la fiche), de sorte qu'il n'y a pas lieu de contrôler, dans la présente procédure, le contenu du plan directeur cantonal (cf. ATF 113 Ib 299). L'arrêt attaqué rappelle toutefois certaines données, qui sont à la base de cette fiche de coordination: l'arc jurassien se prête bien à l'installation d'éoliennes et le canton de Neuchâtel présente des caractéristiques particulièrement favorables pour la production d'énergie éolienne, d'après des études effectuées sur le plan national. Il ressort par ailleurs des décisions du département cantonal du 18 février 2003 écartant les oppositions au projet de plan d'affectation que, dans ce canton, les secteurs favorables à l'installation d'éoliennes se trouvent en zone de crêtes et de forêts (à une altitude supérieure à 800 m), et que le site de Crêt-Meuron a en outre les qualités topographiques nécessaires (pente et surface notamment).
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4.5 C'est dans le cadre de la pesée générale des intérêts - ou de l'application par analogie de l'art. 24 let. b LAT - que le Tribunal administratif a accordé une importance prépondérante à la protection de l'environnement naturel ou, en d'autres termes, à la conservation des sites naturels et des territoires servant au délassement, conformément au principe énoncé à l'art. 3 al. 2 let. d LAT. Cette pesée des intérêts est critiquée par la recourante, qui fait valoir que l'adoption du plan d'affectation cantonal s'inscrit dans une politique publique (ensemble d'activités normatives et administratives) fédérale et cantonale en faveur du développement des énergies renouvelables. Elle reproche d'une part au Tribunal administratif une ![]() | 21 |
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En droit cantonal, l'art. 5 de la Constitution cantonale (Cst./NE; RS 131.233) énumère les tâches de l'Etat et des communes; cette liste mentionne l'approvisionnement en eau et en énergie, la gestion parcimonieuse des ressources non renouvelables, ainsi que ![]() | 23 |
L'arrêt attaqué, qui cite ces différentes normes, relève à juste titre que ni le constituant ni le législateur - au niveau fédéral ou cantonal - n'ont fixé de "hiérarchie des valeurs" parmi les tâches de l'Etat, dont font également partie la sauvegarde du paysage et la protection de l'environnement en général. Le Tribunal administratif retient également que si ces normes prônent une utilisation accrue des énergies renouvelables, aucune priorité n'est donnée à l'une ou l'autre des sources de production.
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L'arrêt attaqué mentionne un autre instrument de la politique énergétique en Suisse, le programme "SuisseEnergie", lancé en janvier 2001 à la suite d'un précédent programme "Energie 2000". Ce programme est un instrument de coordination pour l'administration fédérale et qui sert notamment à mettre en oeuvre la collaboration avec les cantons et d'autres organisations (cf. RICCARDO JAGMETTI, Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, tome VII, Energierecht, Bâle 2005, n° 1329 p. 44). Dans un document publié en 2001, l'Office fédéral de l'énergie a défini le cadre et les objectifs de "SuisseEnergie". Ces objectifs sont qualifiés de "valeurs indicatives politiques"; ils prévoient une augmentation de la part des "autres énergies renouvelables" (à distinguer de la production hydroélectrique) dans la production de courant électrique et de chaleur. "SuisseEnergie" préconise de soutenir les sources d'énergie renouvelables, les cantons étant chargés de développer et financer leurs propres programmes pour lesquels ils devraient recevoir des contributions globales fédérales (cf. art. 15 LEne). Le programme fédéral fixe encore des principes pour la collaboration avec des organisations privées (Agences), notamment l'Agence suisse des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique (ASER), qui regroupe différents réseaux existants, dont Suisse-Éole.
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Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif a apprécié l'intérêt à la réalisation du parc éolien du Crêt-Meuron en évaluant l'importance de la production d'électricité dans le marché global. Cette production nette serait de 14.35 GWh/an, soit 1,43 % de la consommation d'électricité du canton. Avec l'autre parc éolien mentionné dans la fiche de coordination du plan directeur cantonal, la production globale atteindrait 25 GWh/an, soit 2,5 % de la consommation ![]() | 28 |
Cette appréciation est critiquable. En Suisse, les nouvelles énergies renouvelables - l'énergie éolienne, l'énergie solaire, la géothermie, la chaleur ambiante et la biomasse - ont nécessairement un rôle secondaire, par rapport à l'énergie renouvelable actuellement la plus utilisée pour la production de courant électrique, à savoir la force hydraulique. Dans le domaine des énergies renouvelables, il est clair que la politique énergétique doit tendre non seulement à exploiter pleinement le potentiel hydraulique mais également à augmenter la part des nouvelles énergies renouvelables; celle-ci, en l'état, est destinée à demeurer proportionnellement faible, quelle que soit l'efficacité des mesures promotionnelles, à cause de l'importance prépondérante de la force hydraulique (à propos de l'importance respective des différentes sources d'énergie dans la consommation en Suisse, cf. JAGMETTI, op. cit., n° 7103 p. 850). Ce critère quantitatif retenu par le Tribunal administratif, en fonction du marché global de l'électricité dans le canton ou dans le pays, n'est pas déterminant.
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En outre, le Tribunal administratif est certes fondé à considérer que la non-réalisation du parc éolien litigieux ne compromettrait pas directement l'approvisionnement en électricité en Suisse ou dans le canton, et qu'il n'y a pas de nécessité de disposer dans un proche avenir de nombreuses nouvelles sources de courant. Néanmoins, les objectifs de la politique énergétique, dans le domaine des énergies renouvelables, ne consistent pas uniquement à garantir le maintien du statu quo, dans l'hypothèse - retenue par le Tribunal administratif - d'une offre de courant surabondante en Suisse et en Europe; ces objectifs tendent plutôt à favoriser les diverses sources d'énergies renouvelables, à plus long terme (voir notamment le document déjà cité de l'Office fédéral de l'énergie de 2001, sur le programme "SuisseEnergie"). Un récent message du Conseil fédéral relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en électricité, cité par la recourante (message du 3 décembre 2004, FF 2005 p. 1493), mentionne, comme motifs justifiant d'accorder une importance plus ![]() | 30 |
La recourante relève en outre qu'un marché existe pour l'énergie éolienne, en dépit de coûts de production actuellement plus élevés. Cela n'est pas contesté. Il ressort du "rapport de conformité/ notice d'impact" que les éoliennes projetées sont, de ce point de vue, plus compétitives que des éoliennes de la génération précédente (notamment à cause de la hauteur du rotor). La recourante relève encore que le projet litigieux constitue l'essentiel des possibilités de production de nouvelles énergies renouvelables à court terme (d'ici à 2010) dans le canton de Neuchâtel, ce qui n'est pas non plus contesté. La politique énergétique d'un canton peut au demeurant privilégier une ou plusieurs sources d'énergies renouvelables.
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En résumé, si l'on fait abstraction de la part proportionnellement faible de l'énergie éolienne dans la production et la consommation globales d'électricité, ce qui n'est pas un élément déterminant, on doit admettre que le projet litigieux a une importance certaine. Compte tenu des objectifs de la politique énergétique fédérale et cantonale, il existe un intérêt public certain à réaliser une installation de production d'énergie éolienne telle que celle pour laquelle le plan d'affectation cantonal a été élaboré. Au surplus, avant toute expérience de production d'énergie éolienne dans le canton de Neuchâtel, et compte tenu de l'existence actuellement d'un seul autre parc éolien aux caractéristiques comparables dans l'arc jurassien, il n'est pas soutenable de retenir d'emblée le caractère prétendument insignifiant de cette nouvelle énergie renouvelable dans le marché global ![]() | 32 |
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A ce propos, le Tribunal administratif a rappelé que les autorités cantonales, nonobstant quelques révisions du texte du décret de 1966, avaient conservé la volonté de maintenir la protection des crêtes. Les zones de crêtes et de forêts couvrent toutefois une part importante du territoire cantonal. Le site du Crêt-Meuron est du reste inclus dans un périmètre (teinté en jaune sur le plan annexé au décret de 1966) qui s'étend d'une extrémité du canton à l'autre (de la région de Chasseral à La Côte-aux-Fées), et la ville voisine de la Chaux-de-Fonds est elle-même entourée de zones de crêtes et de forêts. Tous les terrains classés dans ces zones n'ont évidemment pas les mêmes caractéristiques naturelles ou paysagères. La stabilité du régime d'affectation prévu par cet ancien acte législatif ne doit pas être garantie de la même manière dans chaque secteur des crêtes jurassiennes; l'évolution des circonstances depuis 1966, voire depuis 1988 (date de l'adaptation du décret aux exigences de la LAT), peut justifier l'adoption d'autres mesures de planification à certains endroits (art. 21 al. 2 LAT; cf. supra, consid. 4.2), sans mettre en péril la cohérence des mesures de protection décidées il y a quarante ans.
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Concrètement, le plan d'affectation cantonal litigieux n'implique pas la constructibilité de l'ensemble des terrains concernés. A l'extérieur des "périmètres d'évolution" délimités pour sept éoliennes et trois installations annexes, le régime de la zone de crêtes et de forêts demeure applicable (cf. supra, consid. 4.2 in fine). En d'autres termes, ce plan d'affectation cantonal n'a pas des effets comparables à ceux d'un classement en zone de constructions basses, au sens des art. 3 ss du décret de 1966, ou d'une affectation dans une zone ![]() | 35 |
Cela étant, le Tribunal administratif relève à juste titre certaines caractéristiques du projet litigieux, qui le distinguent d'autres projets d'urbanisation: la dimension des éoliennes (hauteur du moyeu à l'axe du rotor: 60 m; diamètre des pales: 66 m; hauteur totale: 93 m); l'infrastructure nécessaire (un mât de mesure de 60 m, des nouveaux chemins carrossables sur une longueur de 1,8 km); la probabilité que le parc éolien devienne une attraction touristique (il pourrait attirer 20'000 visiteurs par an). La dimension des éoliennes et du mât de mesure, à savoir leur impact visuel, est sans conteste l'élément le plus important. En effet, l'extension du réseau de voies d'accès ne représente pas une atteinte sensible au site du Crêt-Meuron, étant donné qu'il existe déjà de nombreux chemins, carrossables ou non, dans les pâturages et forêts de la région de Tête-de-Ran/La Vue-des-Alpes, où se trouvent plusieurs installations touristiques (remontées mécaniques pour skieurs, restaurants, notamment). En outre, les autorités conservent la possibilité d'empêcher la plupart des effets négatifs d'un afflux de touristes ou de promeneurs dans un site naturel déjà largement ouvert au public - le Tribunal administratif qualifie la région de Tête-de-Ran de "site particulièrement fréquenté en tant que zone de délassement" -, en réglementant l'accès en véhicule et le stationnement, en balisant les chemins de randonnée, en protégeant spécialement des biotopes, etc. Ainsi, c'est bien l'impact visuel des éoliennes qui représente l'atteinte la plus sensible au site, qui manifestement mérite d'être protégé. L'arrêt attaqué mentionne les endroits où cet impact visuel serait important. Il s'agit de lieux d'une part relativement proches du parc éolien (le sommet de ![]() | 36 |
4.5.4 En décidant d'annuler le plan d'affectation cantonal pour des motifs de protection du site, le Tribunal administratif n'a en réalité pas évalué concrètement les atteintes supplémentaires qui seraient causées au Crêt-Meuron et dans les environs par les éoliennes, compte tenu des atteintes déjà existantes. Comme cela est retenu ![]() | 37 |
4.5.5 Les griefs de la recourante à propos de la pesée des intérêts effectuée par le Tribunal administratif sont donc fondés. Comme cela a été exposé plus haut (consid. 4.3), le contrôle de la pesée des intérêts relève de l'examen de la légalité, et non pas de l'opportunité. Dans l'arrêt attaqué, l'annulation des décisions relatives à l'adoption du plan d'affectation cantonal n'est du reste pas justifiée par des motifs d'opportunité, mais elle est fondée sur l'application de normes du droit de l'aménagement du territoire. C'est l'application déficiente de ces règles de droit que le Tribunal fédéral doit sanctionner dans le présent arrêt, en admettant le recours de droit ![]() | 38 |
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