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Informationen zum Dokument  BGE 138 II 134  Materielle Begründung
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Regeste
Sachverhalt
Extrait des considérants:
4. Nature juridique des rapports entre l'OIC et la recourante ...
5. Existence d'une norme de délégation de la pu ...
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12. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause Cremo SA Fribourg contre Organisme intercantonal de certification, Commission de recours de l'Organisme intercantonal de certification et Office fédéral de l'agriculture (recours en matière de droit public)
 
 
2C_11/2010 du 25 novembre 2011
 
 
Regeste
 
Art. 16 Abs. 2 lit d, Art. 166 Abs. 1 und Art. 180 LwG; Art. 16 Abs. 1 und 3 und Art. 18 ff. GUB/GGA-Verordnung; Art. 1 ff. der Verordnung über die Kontrolle der GUB und GGA; Rechtsnatur (Privatrecht/öffentliches Recht) der Beziehungen zwischen der Interkantonalen Zertifizierungsstelle (IZS) und den von ihr kontrollierten Produzenten von "Gruyère AOC"; Rechtswege gegen eine Sanktion der IZS wegen Verletzung des Pflichtenhefts; Delegationsnorm für hoheitliche Befugnisse.  
- die Kriterien der Interessentheorie (E. 4.2), der Funktionstheorie (E. 4.3) und der Subordinationstheorie (E. 4.4) erscheinen nicht entscheidend, insbesondere - soweit die beiden letzteren Kriterien betroffen sind - mit Blick auf die Natur der Tätigkeit (Zertifizierung) und auf das in der Schweiz eingeführte Akkreditierungssystem, welches aus sich selbst heraus keine Kompetenzübertragung der hoheitlichen Befugnisse aufgrund von Art. 35 AkkBV enthält (E. 4.6);  
- ist der Käse nicht zertifiziert, darf die Beschwerdeführerin ihn nicht unter der Bezeichnung "Gruyère" verkaufen. Sie würde somit eine sehr starke Beschränkung ihres Marktzugangs erleiden, wenn ihr die IZS (später) die Genehmigung aufgrund der fraglichen Streitpunkte entziehen würde. Weil eine solche Einschränkung auf dem öffentlichen Recht basiert, gilt das Gleiche für die ausgesprochene Sanktion (Anwendung der modalen Theorie; E. 4.5 und 4.6).  
Art. 180 LwG stellt eine genügende formell-gesetzliche Grundlage dar, um der IZS die Aufgabe zu übertragen, die Produzenten zu kontrollieren, deren Produkte zu zertifizieren und zu diesem Zweck die notwendigen Entscheidungen zu treffen, namentlich die beschwerdefähigen Sanktionen gemäss Art. 166 Abs. 1 LwG (E. 5).  
 
Sachverhalt
 
BGE 138 II, 134 (136)La désignation "Gruyère" est enregistrée depuis le 6 juillet 2001 comme appellation d'origine contrôlée (AOC) au sens de l'art. 13 de l'ordonnance du 28 mai 1997 concernant la protection des appellations d'origine et des indications géographiques des produits agricoles et des produits agricoles transformés (ordonnance sur les AOP et les IGP; RS 910.12; ci-après: ord. AOP).
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Cremo SA, à Fribourg (ci-après: la Société), exploite une fromagerie qui bénéficie d'une certification délivrée par l'Organisme intercantonal de certification (OIC) pour produire du "Gruyère AOC". A la suite d'un contrôle de sa fromagerie, la Société a été sanctionnée par l'OIC, le 6 février 2008, de deux points de pénalité en raison d'une "non-conformité majeure" au cahier des charges de l'appellation "Gruyère AOC"; elle était en outre tenue de remédier immédiatement à la situation sous peine de retrait du certificat d'agrément.
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BGE 138 II, 134 (137)La Société a recouru contre cette sanction. Après différentes péripéties de procédure, l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG) a déclaré le recours irrecevable le 15 décembre 2008.
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Par arrêt du 11 novembre 2009, le Tribunal administratif fédéral a rejeté dans la mesure de sa recevabilité le recours déposé par la Société contre la décision précitée de l'OFAG. En substance, les juges ont considéré que la sanction de l'OIC n'était pas une décision attaquable prise par une organisation ou une entreprise au sens des art. 166 al. 1 et 180 de la loi fédérale du 29 avril 1998 sur l'agriculture (loi sur l'agriculture, LAgr; RS 910.1), mais qu'elle relevait uniquement de relations contractuelles fondées sur le droit privé et qu'elle devait, comme telle, être contestée devant les juridictions civiles ordinaires.
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La Société a interjeté un recours en matière de droit public contre l'arrêt précité du 11 novembre 2009. Après en avoir délibéré en séance publique le 25 novembre 2011, le Tribunal fédéral a admis le recours, annulé la décision attaquée et renvoyé le dossier à l'OFAG pour examen de la cause au fond.
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(résumé)
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Extrait des considérants:
 
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4.1 Le Tribunal fédéral s'appuie sur plusieurs critères pour déterminer si une contestation relève du droit public ou du droit privé: le critère des intérêts, qui qualifie les normes juridiques ainsi que les rapports de droit dont elles sont le fondement de droit public ou de droit privé selon qu'elles sauvegardent exclusivement ou principalement l'intérêt public ou les intérêts privés; le critère dit fonctionnel, qui qualifie les normes juridiques de droit public lorsqu'elles réglementent la réalisation de tâches publiques ou l'exercice d'une activité publique; le critère du sujet ou de la subordination, qui soumet au droit public les rapports dans lesquels une partie est supérieure à l'autre en fait ou en droit et au droit privé ceux où les parties traitent d'égal à égal à tous points de vue; et enfin le critère modal (ou critère de la sanction) qui attribue une norme à l'un ou l'autre droit selon que sa violation entraîne une sanction relevant du droit privé (par exemple, nullité d'un acte juridique) ou une sanction relevant du droit public (par exemple, révocation d'une autorisation). Aucune de BGE 138 II, 134 (138) ces théories ne l'emporte a priori sur les autres (ATF 132 V 303 consid. 4.42 p. 307; arrêt 2C_58/2009 du 4 février 2010 consid. 1.2 et les références citées). Il convient bien plutôt d'examiner dans chaque cas particulier quel critère de distinction est le plus approprié aux circonstances concrètes. Il faut en effet garder à l'esprit que la délimitation entre droit privé et droit public répond à des fonctions totalement différentes suivant les nécessités de la réglementation en cause et, notamment, selon les conséquences juridiques pouvant en découler dans chaque affaire; ces exigences ne peuvent pas être théoriquement réunies en un seul critère distinctif qui ferait définitivement autorité, mais requièrent au contraire une approche modulée et pragmatique (cf. ATF 137 II 399 consid. 1.1 p. 401; ATF 132 V 303 consid. 4.4.2 p. 307; ATF 128 III 250 consid. 2a p. 253; ATF 126 III 431 consid. 3c/bb p. 436; ATF 120 II 412 consid. 1b p. 414 et les références citées).
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C'est à l'aune de ces considérations qu'il faut examiner si, comme l'a jugé le Tribunal administratif fédéral, la relation entre l'OIC et la recourante relève du droit privé et de la compétence des tribunaux civils ou si, comme le soutient la recourante, elle est fondée sur le droit public et ressortit à la compétence des autorités (juridictionnelles) administratives.
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4.2.1 Le fond du litige porte sur les deux points de pénalité infligés à la recourante par l'OIC en sa qualité d'organisme de certification chargé du contrôle des entreprises utilisant la désignation "Gruyère AOC". Le contrôle est un élément central du dispositif mis en place pour protéger les AOC et les IGP. Son rôle est en effet d'assurer que les produits agricoles portant une dénomination protégée répondent aux exigences du cahier des charges. Il vise à garantir la crédibilité du système dans son ensemble (cf. Message du Conseil fédéral du 27 juin 1995 concernant le paquet agricole 95, FF 1995 IV 621 ss, 651). Autrement dit, la question de savoir si l'activité de contrôle exercée par l'OIC tend davantage à sauvegarder l'intérêt public ou l'intérêt privé revient à s'interroger sur les finalités mêmes du système de protection des AOP et des IGP tel qu'il est prévu dans la loi.
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4.2.2 La réglementation concernant la désignation des produits agricoles (art. 14 à 16b LAgr) s'inscrit dans les conditions-cadre que la Confédération doit mettre en place pour favoriser la production et BGE 138 II, 134 (139)l'écoulement des produits agricoles (cf. art. 2 al. 1 let. a LAgr), plus précisément dans les mesures de nature économique qu'elle peut prendre à ce titre (cf. le libellé du titre 2, chapitre 1 de la LAgr). Afin de garantir la crédibilité des désignations et promouvoir la qualité et l'écoulement des produits agricoles et des produits agricoles transformés, le législateur a ainsi donné mandat au Conseil fédéral d'édicter des dispositions sur la désignation des produits se distinguant, comme les AOP et les IGP, par leur désignation (cf. art. 14 al. 1 let. d LAgr). Ce mandat impliquait pour le Conseil fédéral d'établir, comme il l'a fait, "un registre des appellations d'origine et des indications d'origine" (cf. art. 16 al. 1 LAgr) et d'édicter des dispositions d'exécution réglant notamment les conditions d'enregistrement (en particulier les exigences du cahier des charges) et la procédure d'enregistrement (art. 16 al. 2 let. a et b LAgr), ainsi que le "contrôle" du système de protection ainsi mis en place (cf. art. 16 al. 2 let. d LAgr).
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Selon une interprétation littérale et systématique de la loi, il apparaît ainsi que le système de protection des AOP et des IGP s'apparente, dans ses fondements, à une mesure de politique économique destinée à soutenir l'agriculture suisse. Dans son Message du 27 juin 1995 concernant le Paquet agricole 95, le Conseil fédéral a précisé que cette nouvelle réglementation visait à favoriser l'écoulement des produits agricoles au vu des nouveaux défis auxquels le secteur agricole se trouvait confronté (saturation des marchés agricoles; tourisme alimentaire; ouverture progressive des frontières). Elle devait également permettre de réduire peu à peu le soutien de la Confédération aux prix des produits agricoles et des produits agricoles transformés, le but étant que le revenu des paysans soit davantage assuré, à l'avenir, par la vente de leur production et par l'octroi de paiements directs complémentaires. Le système de protection des AOP et des IGP contribuait à ces objectifs dans la mesure où il donnait à la filière agricole suisse un moyen de conserver des parts de marché et de valoriser ses produits (Message précité, FF 1995 IV 624, 633 s., 648). Enfin, il s'agissait encore, indirectement, de répondre aux nouvelles attentes des consommateurs, qui voulaient être mieux renseignés sur les produits agricoles, notamment quant à leur mode de production et leur provenance (origine géographique), et obtenir des produits de qualité (cf. Message précité, FF 1995 IV 635, 642, 648 et 659).
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BGE 138 II, 134 (140)4.2.3 Dans la mesure où le système de protection des AOP et des IGP vise à soutenir l'agriculture suisse en lui donnant un nouvel outil pour accroître sa compétitivité, l'intervention du législateur s'apparente certes à une mesure de politique économique qui poursuit un objectif d'intérêt public. Cependant, toute mesure économique prise par l'Etat en vue de favoriser la production et l'écoulement des produits agricoles profite également plus ou moins directement aux acteurs mêmes de cette filière. On ne saurait dès lors dire que, s'agissant du but économique visé par la loi, l'intérêt public l'emporte sur l'intérêt privé. En réalité, parmi les objectifs poursuivis par le système de protection des AOP et des IGP, seul celui tendant à améliorer l'information des consommateurs revêt clairement un intérêt public prépondérant. Du reste, comme on le verra (cf. infra consid. 4.5.2), le droit de vendre un produit AOP ou IGP est soumis à l'obtention préalable, par le producteur, d'une certification de conformité; or, selon la réglementation applicable, l'organisme de certification doit être accrédité par l'Etat et est placé sous sa surveillance; cette obligation de recourir à un organisme accrédité confirme l'existence d'un intérêt public de protection des consommateurs (cf. ISABELLE PASCHE, La déclaration volontaire des produits agricoles, in Communications du droit agraire, 2001, p. 149 ss, p. 152; MURIEL VAUTIER EIGENMANN, La responsabilité civile pour la certification de produits et d'entreprises en droit suisse, 2004, n° 341).
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4.3.1 Sous l'angle du critère fonctionnel, il s'agit d'examiner si l'activité de contrôle et de certification déployée par l'OIC pour garantir la protection des AOP et des IGP s'apparente à une tâche publique. Les tâches publiques sont déterminées par la Constitution et les lois et procèdent d'un choix politique (cf. BLAISE KNAPP, L'exécution des tâches publiques fédérales par des tiers, in SBVR vol. I, 1996, nos 3 ss). Le cas échéant, il appartient au législateur de déterminer si la tâche publique incombe aux organes étatiques ou si elle est déléguée à des privés. En d'autres termes, c'est l'interprétation de la loi qui détermine ce qui est une tâche publique, qui assume cette tâche et comment elle doit être menée à bien (cf. arrêt 2C_887 2010 du 28 avril 2011 consid. 6).
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BGE 138 II, 134 (141)4.3.2 La clé de voûte du système de protection des AOP et des IGP est le registre fédéral que le Conseil fédéral a été chargé d'établir en vertu de l'art. 16 al. 1 LAgr, puisque seules les désignations qui y sont inscrites sont protégées (cf. art. 16 al. 3, 5 et 7 LAgr; art. 1er al. 1, 16 al. 1 et 16a al. 1 ord. AOP; LORENZ HIRT, Der Schutz schweizerischer Herkunftsangaben, 2003, p. 126; SIMON HOLZER, Geschützte Ursprungsbezeichnungen [GUB] und geschützte geographische Angaben [GGA] landwirtschaftlicher Erzeugnisse, 2005, p. 315 ss). La création de ce registre a comblé, selon le législateur, une importante lacune de la législation antérieure et constitue une notable différence d'avec les indications de provenance qui ne peuvent pas être enregistrées (cf. art. 47 ss de la loi fédérale du 28 août 1992 sur la protection des marques et des indications de provenance [loi sur la protection des marques, LPM; RS 232.11]; Message Paquet agricole 95, FF 1995 IV 642 et 655).
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Il est certain que la création du registre fédéral des AOP et des IGP et sa gestion sont conçues comme de véritables tâches publiques (de manière générale, sur la tenue des registres publics, cf. TOBIAS JAAG, Hoheitliche und nicht-hoheitliche staatliche Tätigkeiten, in L'homme et l'Etat, Mélanges Thomas Fleiner, p. 619 ss, 636); la procédure d'enregistrement d'une dénomination protégée relève en effet clairement du droit administratif: demande d'enregistrement de la dénomination, décision de l'OFAG, éventuelle opposition et décision sur opposition, puis encore procédure de recours devant la juridiction administrative (cf. art. 5 ss ord. AOP et art. 166 al. 2 LAgr; cf. HIRT, op. cit., p. 146 s.; HOLZER, op. cit., p. 287 ss). C'est seulement à l'issue de cette procédure, en cas d'admission de la demande, que la dénomination est finalement inscrite au "registre des appellations" avec publication à la Feuille officielle suisse du commerce (art. 12 ord. AOP). L'OFAG tient ce registre, qui contient notamment la dénomination et le cahier des charges (art. 13 al. 2 let. a et c ord. AOP).
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Le cahier des charges comprend le nom de la désignation protégée et détaille les conditions à respecter pour avoir le droit d'utiliser celle-ci (délimitation de l'aire géographique; description du produit; etc.; cf. art. 7 al. 1 let. a à d ord. AOP); il désigne également le ou les organismes de certification chargés du contrôle et fixe les exigences minimales relatives au contrôle (cf. art. 7 al. 1 let. e ord. AOP). Le cahier des charges constitue le coeur de l'inscription (cf. HIRT, op. cit., p. 137; HOLZER, op. cit., p. 315) et sa modification est BGE 138 II, 134 (142)soumise à la même procédure que celle prévue pour l'enregistrement de la dénomination (art. 14 al. 1 ord. AOP). Dans cette mesure, il faut admettre que son contenu revêt un caractère de droit public. Dans un autre contexte, le Tribunal fédéral a d'ailleurs jugé que le cahier des charges de la désignation "Gruyère AOC" s'apparente à une réglementation générale et abstraite qui doit être concrétisée dans une décision individuelle (cf. ATF 134 II 272 consid. 3.2 p. 280).
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4.3.3 Plus délicate est en revanche la qualification juridique (droit public ou droit privé) des dispositions, au centre de la présente contestation, qui règlent le contrôle de la dénomination "Gruyère". Sous l'angle du critère fonctionnel, procéder à cette qualification revient à se demander si, à l'instar de la tenue du registre fédéral des AOP et des IGP, l'activité de certification de l'OIC doit être qualifiée de tâche publique. Cette question implique d'examiner le cadre légal et réglementaire dans lequel s'inscrit cette activité de contrôle (statut et fonction de l'OIC; rôle de l'OFAG), mais aussi la manière dont les parties elles-mêmes (OIC; Interprofession du Gruyère; entreprises concernées) ont aménagé, à l'intérieur de ce cadre, leurs relations juridiques.
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4.3.4 L'organisme de certification constitue l'acteur central du contrôle des AOP et des IGP. Celui qui utilise une AOC ou une IGP doit en effet confier à un organisme de certification défini dans le cahier des charges le contrôle de la production, de la transformation ou de l'élaboration du produit (art. 18 al. 1 ord. AOP). En vertu de l'art. 19 al. 1 ord. AOP, ces organismes de certification doivent être accrédités conformément à l'ordonnance du 17 juin 1996 sur le système suisse d'accréditation et la désignation de laboratoires d'essais et d'organismes d'évaluation de la conformité, d'enregistrement et d'homologation (ordonnance sur l'accréditation et la désignation, OAccD; RS 946.512). Cette dernière ordonnance a été édictée en exécution de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce (LETC; RS 946.51). L'accréditation tire en effet sa raison d'être de l'objectif de réduire les entraves techniques au commerce (cf. art. 1 al. 1 LETC), notamment au plan des échanges internationaux, où elle constitue un instrument essentiel pour harmoniser les normes techniques entre les Etats (cf. LILIANE SUBILIA-ROUGE, Aspects juridiques de l'audit environnemental, 2000, p. 144 s.). L'accréditation vise également, plus largement, à susciter la confiance du public dans les produits bénéficiant d'une certification délivrée par un BGE 138 II, 134 (143)organisme reconnu (accrédité) par l'Etat (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., n° 238 et les références citées).
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L'art. 1 al. 1 let. a OAccD règle l'accréditation des organismes qui procèdent à des essais ou à des évaluations de la conformité de produits dans le but de reconnaître formellement leur compétence de procéder à de tels essais ou évaluations conformément aux critères internationaux pertinents (art. 2 OAccD). L'art. 5 OAccD confie la tâche d'accréditation au Service d'accréditation suisse (SAS). Celui- ci doit répondre aux critères internationaux définis à l'annexe I de l'ordonnance et est placé sous la surveillance de l'Office fédéral de Métrologie et d'Accréditation (metas) (cf.VAUTIER EIGENMANN, op. cit., n° 248). L'art. 7 al. 1 OAccD prévoit que seuls peuvent être accrédités par le SAS les organismes répondant aux critères internationaux mentionnés à l'annexe 2. Les annexes 1 et 2 de l'OAccD renvoient à des normes de droit privé édictées par des organismes internationaux de normalisation, notamment les normes internationales ISO et les normes européennes de la série EN 45000; les secondes sont appelées à être remplacées par les premières dont elles émanent et auxquelles elles sont sur certains points déjà identiques (cf. document du SECO disponible sur son site internet et intitulé "Interprétation donnée par le SAS à diverses exigences particulières des normes de la série EN 45000 et ISO/CEI 17000 pour l'accréditation d'organismes de certification", éd. novembre 2010, p. 3); ces normes internationales établissent notamment les qualités que doivent présenter les organismes d'accréditation (soit le SAS) et les organismes de certification (comme l'OIC) en termes d'indépendance, d'impartialité et de compétence (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., no s 226 et 248 ad note bas de page 523; HANS CHRISTIAN RÖHL, Akkreditierung und Zertifierung im Produktsicherheitsrecht, Zur Entwicklung einer neuen Europäischen Verwaltungsstruktur, 2000, p. 83 ss). L'art. 7 al. 2 OAccD précise que le requérant désirant être accrédité comme organisme de certification pour une procédure réglementée par des dispositions du droit public devra également être en mesure d'appliquer les prescriptions pertinentes et, le cas échéant, répondre aux exigences supplémentaires qu'elles contiennent. Pour le surplus, l'accréditation comme telle fait l'objet d'une procédure administrative (demande; examen; décision; cf. art. 8 ss OAccD; sur les possibilités de recours, cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 263 ss). Elle peut être assortie de charges ou de conditions et est octroyée pour une durée limitée (art. 14 al. 3 et 4 OAccD) pendant laquelle les organismes BGE 138 II, 134 (144)de certification font l'objet de contrôles réguliers du SAS destinés à vérifier qu'ils respectent les conditions d'accréditation, sous peine de suspension ou de révocation de leur accréditation (cf. art. 19 ss OAccD).
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La Suisse a donc opté pour un système d'accréditation étatique sous la forme d'un monopole de droit confié au SAS (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 248 et 335; SUBILIA-ROUGE, op. cit., p. 149 s.). Les relations qu'entretient le SAS, comme organe d'accréditation, avec les organismes de certification, ressortit donc clairement au droit public. Le premier assure en effet, à l'égard des seconds, les rôles respectivement d'autorité compétente pour l'octroi de l'accréditation et d'autorité de surveillance de leur activité de certificateur (cf. Message du 15 février 1995 concernant la loi fédérale sur les entraves techniques au commerce [ci-après: Message LETC], FF 1995 II 489,558; cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 335 s.).
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4.3.5 En confiant la certification des AOP et des IGP à un organisme accrédité, le législateur suisse s'est largement inspiré du droit européen applicable en la matière (cf. HIRT, op. cit., p. 112). Son but était en effet d'adapter le droit suisse à cette réglementation pour permettre à notre pays d'être reconnu comme "pays tiers" de l'UE (sur cette notion, cf. HOLZER, op. cit., p. 146 ss; ANDREA E. FLURY, Grundprobleme des Rechts der geographischen Herkunftsbezeichnungen, 2003, p. 50) et de pouvoir, à ce titre, bénéficier à terme du système de protection des AOP et des IGP mis en place au sein de l'Union (cf. Message Paquet agricole 95, FF 1995 IV 638 ss, 646). A cette fin, il a élaboré un système équivalent à celui de l'UE concernant l'enregistrement des désignations - ce qui supposait l'établissement d'un registre fédéral - mais aussi leur contrôle (Message précité, FF 1995 IV 650 et 660). L'incorporation, expressément voulue par le législateur (cf. Message précité, FF 1995 IV 651 et 653), des normes européennes EN 45011 au droit interne (art. 7 al. 1 OAccD en lien avec l'annexe 2 let. f OAccD), traduit cette volonté d'établir un système suisse d'accréditation et de certification compatible avec la réglementation européenne. Outre, comme on l'a vu (cf. supra consid. 4.3.4), les qualités que doivent remplir les organismes de certification pour être accrédités en termes d'indépendance, d'impartialité et de compétence, ces normes (privées) européennes règlent également certains aspects de la relation entre les organismes de certification et les entreprises soumises à leur contrôle, comme la BGE 138 II, 134 (145)prohibition de toute forme de discrimination, l'obligation d'exercer une surveillance permanente sur les produits certifiés ou encore les modalités relatives à la suspension ou au retrait du certificat de conformité (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 226 s. et 852; RÖHL, op. cit., p. 83 ss); à cet égard, elles prévoient notamment qu'en cas de refus de délivrer une certification, la décision doit être motivée de manière détaillée et que des procédures internes de recours doivent être aménagées (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 303 et 308).
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La réglementation européenne ne définit pas la nature juridique des relations entre les organismes de certification et les entreprises soumises à leur contrôle; cette question relève de la législation interne des Etats membres (cf., s'agissant de l'Allemagne, RÖHL, op. cit., p. 23 ss). La réglementation européenne prévoit seulement que les organismes de certification accrédités conformément aux normes de la série EN 45000 sont présumés répondre aux exigences découlant des directives dites "nouvelle approche" en matièred'harmonisation technique et d'évaluation (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., n° 235; RÖHL, op. cit., p. 4 ss). Adoptée en 1985 par les Etats membres, la "nouvelle approche" limite le rôle du législateur européen à ne prévoir dans ses règlements que des "exigences essentielles" de sécurité (appelées "règles techniques" ou "prescriptions techniques") qui sont détaillées dans des normes privées harmonisées (appelées "normes techniques") élaborées sur mandat par des organismes européens de normalisation. Les entreprises désirant mettre un produit sur le marché doivent établir sa conformité aux "exigences essentielles" de sécurité; cette condition, assortie de la présomption que les produits fabriqués conformément aux "normes techniques" répondent aux "exigences essentielles", a pour effet de rendre ces normes obligatoires en dépit de leur caractère privé (cf. SUBILIA-ROUGE, op. cit., p. 146; VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 192 ss, 195, 235, 240 ss). La "nouvelle approche" a été complétée en 1989 par "l'approche globale" en matière d'évaluation de la conformité qui, dans le souci d'éviter que la non-reconnaissance des certifications entre Etats membres ne crée de nouvelles entraves techniques au commerce, a mis en place des procédures uniformes pour évaluer la conformité des produits avec les directives "nouvelle approche". En vertu de ces procédures, la preuve de la conformité doit être établie, selon le type de produit concerné, par le producteur lui-même (évaluation première partie) ou, le plus souvent, par des organismes tiers (évaluation tierce partie) dont les compétences, l'indépendance et BGE 138 II, 134 (146)l'impartialité ont été reconnues par les Etats membres au terme d'une procédure d'accréditation (cf. SUBILIA-ROUGE, op. cit., p. 146 s.). Ces organismes accrédités - ou "organismes notifiés" ("benannten Stellen") selon la terminologie européenne - peuvent être publics, privés, ou mixtes et sont placés sous la surveillance de l'Etat (cf. Message LETC, 542 et 558; VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 221 s. et 261; de manière générale sur ces questions, cf. la brochure intitulée "Guide relatif à la mise en application des directives élaborées sur la base des dispositions de la nouvelle approche et de l'approche globale", publiée par la Commission européenne, Bruxelles 2000, p. 38 [disponible sur le site internet de l'Union européenne, www.europa.eu]).
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4.3.6 La LETC a repris l'essentiel de ces principes et concepts du droit européen harmonisé. Il en va notamment ainsi de la distinction entre "prescriptions techniques" et "normes techniques" (cf. art. 3 let. b et c LETC) ou de la définition donnée aux notions "d'évaluation" et "d'attestation de la conformité" (art. 3 let. h et i LETC), de "surveillance du marché" (art. 3 let. p LETC) ou "d'exigences essentielles" (art. 4 al. 5 let. a LETC), ou encore de la présomption voulant qu'un produit fabriqué conformément aux "normes désignées" (soit les normes internationales harmonisées) satisfait aux "exigences essentielles" (art. 4 al. 5 let. c LETC) (cf. Message LETC, FF 1995 II 532 ss, 542, 559). La LETC s'applique à tous les domaines où la Confédération édicte des "prescriptions techniques", soit des règles de droit fixant des exigences - concernant notamment l'évaluation de la conformité d'un produit - dont la réalisation constitue une condition de l'offre, de la mise sur le marché, de l'utilisation, de la mise en service ou de l'élimination du produit en question (cf. art. 2 al. 1 en relation avec l'art. 3 let. b ch. 3 LETC). Selon le Message du Conseil fédéral du 25 juin 2008 concernant la révision partielle de la loi fédérale sur les entraves techniques au commerce (FF 2008 6643, 6650 s.), la réglementation relative aux AOP et aux IGP ne contiendrait pas de "prescription technique" au sens de la LETC. Pourtant, l'art. 16 al. 1 et 3 ord. AOP prévoit que les mentions AOC et IGP ne peuvent être utilisées que pour les produits dont la dénomination a été enregistrée et certifiée conformément à la présente ordonnance. Certes est-il vrai que l'obligation de faire certifier un produit n'est pas indispensable pour sa mise sur le marché; à défaut, il ne peut toutefois pas être commercialisé sous la BGE 138 II, 134 (147)dénomination protégée. En ce sens, l'art. 16 al. 3 ord. AOP constitue donc bien une exigence pour pouvoir utiliser - et vendre - un produit sous une appellation protégée, si bien qu'on ne saurait d'emblée exclure que la LETC soit applicable. Quoi qu'il en soit, cette question peut rester ouverte. Seul compte en effet pour l'issue du présent litige que l'OIC ait été accrédité conformément à l'OAccD en vertu du renvoi de l'art. 19 al. 1 ord. AOP et qu'il doive appliquer les dispositions sectorielles prévues par le droit public en matière de protection des AOP et des IGP (cf. art. 7 al. 2 OAccD).
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4.3.7 L'OIC est le seul organisme de certification mentionné à l'art. 49 al. 1 du cahier des charges pour contrôler la production, la transformation et l'élaboration du Gruyère. Son statut juridique, son fonctionnement, ses attributions et son financement sont définis dans la Convention concernant la création et l'exploitation d'un organisme intercantonal de certification, entrée en vigueur le 1er juillet 1998 (ci-après: la Convention OIC). Selon l'art. premier de ce texte, l'OIC est assimilable à une société simple au sens des art. 530 ss CO qui relève du droit public. Il a été créé par les cantons de Berne, Fribourg Tessin, Vaud, Valais, Neuchâtel, Genève et Jura afin d'exploiter en commun un organisme intercantonal de certification accrédité au sens des art. 8 ss OAccD. L'OIC est dirigé par un Comité de certification (art. 4 de la Convention OIC) qui a notamment pour tâches, selon l'art. 5 de la convention précitée, d'adopter les principes réglant son fonctionnement (Manuel de qualité), d'attribuer ou de retirer des autorisations d'utilisation des dénominations certifiées, de procéder à un examen préalable des recours, d'octroyer des mandats pour des contrôles et des expertises et de dénoncer auprès des autorités compétentes les fraudes sur les produits et les dénominations couverts par la certification OIC. Ses décisions d'octroi ou de retrait (de certification) sont susceptibles d'un recours dans un délai de 20 jours devant une commission indépendante de 5 membres constituée à cet effet par le comité de l'OIC. La procédure de recours est réglée par le Manuel de qualité (art. 8 de la Convention OIC) qui comprend un Règlement de la Commission de recours du 12 décembre 2005. Les coûts de fonctionnement de l'OIC sont assurés à raison de deux tiers par les cantons parties à l'accord et à raison d'un tiers par les émoluments prélevés selon un barème défini dans le Manuel de qualité (cf. art. 10 de la Convention de l'OIC).
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4.3.8 Au titre du "contrôle", l'ordonnance sur la protection des AOP et des IGP (ord. AOP) prévoit que l'organisme de certification BGE 138 II, 134 (148)accrédité est placé sous la surveillance de l'OFAG et du SAS (art. 21 al. 4 ord. AOP) et qu'il doit signaler à l'OFAG, aux chimistes cantonaux et aux groupements les irrégularités constatées lors des contrôles (art. 20 ord. AOP). L'art. 21 al. 3 ord. AOP précise que les organes cantonaux de contrôle des denrées alimentaires signalent à l'OFAG, aux organismes de certification et aux groupements les irrégularités qu'ils constatent de leur côté. En revanche, l'ordonnance sur la protection des AOP et des IGP ne contient aucune disposition spécifique précisant le contenu et le déroulement du contrôle que doit faire l'OIC, mais délègue au Département fédéral de l'économie (DFE) le soin d'en fixer "les exigences minimales", ce que ce dernier a fait dans une ordonnance du 11 juin 1999 sur le contrôle des AOP et des IGP (RS 910.124; ci-après: ord. DFE). Il y est notamment prévu que l'organisme de certification doit s'assurer, au moins tous les deux ans, que les conditions liées au processus de production sont respectées (art. 1 let. d en lien avec l'art. 2 al. 1 ord. DFE) et, au minimum une fois par année, procéder à un test du produit final dans l'entreprise (art. 1 let. e en lien avec l'art. 2 al. 3 ord. DFE). En cas de constat d'une irrégularité, l'entreprise doit être "recontrôlée systématiquement" (art. 2 al. 3 en lien avec l'art. 5 ord. DFE). A l'instar de l'ordonnance sur la protection des AOP et des IGP (ord. AOP), l'ordonnance sur le contrôle (ord. DFE) ne prévoit aucune sanction en cas d'irrégularité. Elle se contente d'enjoindre à l'OIC d'établir annuellement un rapport à l'intention de l'OFAG mentionnant la liste des entreprises contrôlées, la quantité de produits commercialisés sous la dénomination protégée, ainsi que le nombre et le type des actions coercitives entreprises et des retraits de certification prononcés pour la dénomination protégée (art. 6 let. a, b et c ord. DFE). Il appartient à l'organisme de certification, en collaboration avec le groupement professionnel ayant fait enregistrer l'AOC, de "concrétiser" les procédures de contrôle dans un "Manuel de contrôle"; ce document fait "partie intégrante" du système d'assurance de qualité de l'organisme de certification dont une version actualisée est déposée à l'OFAG (art. 8 al. 1, 2 et 3 ord. DFE) (sur la notion d'assurance de qualité, cf. infra consid. 4.3.9 premier paragraphe in fine).
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En l'espèce, le Manuel de contrôle, dans sa version du 23 juin 2003 (version 3) a été approuvé le 23 juin 2006 par le Service d'accréditation suisse (SAS), le 23 août 2006 par l'interprofession du Gruyère (IPG) et le 8 septembre 2006 par le Comité de l'OIC. Le chiffre 1.1, première phrase, du Manuel de contrôle dispose que celui-ci "régit BGE 138 II, 134 (149)l'ensemble des actes de contrôles auxquels sont soumis les producteurs, les fromagers et les affineurs qui consacrent tout ou partie de leur production au Gruyère"; la deuxième phrase du chiffre 1.1 précise que "chaque atelier de production est une unité autonome de fabrication et signe un contrat de contrôle et de certification avec l'OIC par le biais du contrat d'achat". Les contrôles dans les fromageries font l'objet du chiffre 4 du Manuel de contrôle; il y est notamment prévu que "chaque fromager conjointement avec l'acheteur de fromage doit signer un contrat avec l'IPG (l'interprofession du Gruyère) contresigné par l'OIC". La nature des contrôles (inspection des processus et des installations; traçabilité et contrôle des flux; analyses; etc.) et leur contenu (points contrôlés; entreprises concernées; fréquences; exécution; etc.) sont détaillés aux chiffres 4.2 à 4.6 du Manuel de contrôle, tandis que l'art. 8 énumère les sanctions en cas "de non-conformité" (avertissement, points de pénalité, retrait d'agrément ou de certificat de produit).
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- aussi bien l'accréditation de l'OIC que ses rapports avec le SAS relèvent clairement du droit public;
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- l'OIC est placé sous la double surveillance du SAS et de l'OFAG auxquels il est tenu de démontrer qu'il remplit les exigences de l'accréditation et/ou qu'il accomplit les tâches qui lui reviennent conformément aux normes applicables; à ce titre, il doit notamment tenir l'OFAG et d'autres autorités compétentes informés des irrégularités constatées lors des contrôles et des sanctions prises pour y remédier;
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- le cadre et les exigences minimales du contrôle (type et nombre de contrôles) sont réglés par voie d'ordonnances;
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- bien que le "Manuel de contrôle" qui concrétise ces exigences soit établi par l'OIC en collaboration et fait, selon l'art. 8 de l'ordonnance de contrôle, "partie intégrante" du système d'assurance de qualité de l'OIC; par cette intégration, ses dispositions revêtent dès lors également un caractère de droit public, le système d'assurance de la qualité formant les prescriptions que l'OIC doit respecter comme organisme de certification accrédité par l'Etat (cf. Message LETC, FF 1995 II 502; VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 129 ss).
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BGE 138 II, 134 (150)Pour autant, ces éléments ne suffisent pas à conclure que l'activité de certification de l'OIC est assimilable à une tâche publique. En effet, selon l'art. 35 OAccD, édicté en vertu de l'art. 10 al. 2 let. c LETC, l'accréditation n'emporte le transfert d'aucune compétence relevant de la puissance publique aux organismes accrédités qui assument la responsabilité de leurs activités, du résultat d'essais auxquels ils ont procédé et des certificats de conformité qu'ils ont établis. Cette règle résulte de la claire volonté du législateur qui a motivé son choix de la manière suivante (Message LETC FF 1995 II 557 s.):
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"Lors de la future réglementation qui sera élaborée sur la base de la LETC et qui réglera la situation juridique des organismes accrédités et les effets de leur activité, les principes suivants guideront les travaux d'élaboration.
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De par l'accréditation, l'Etat ne transfère pas de compétences étatiques aux organismes concernés. L'accréditation sert plutôt à reconnaître, à l'instar d'un certificat de maîtrise, une certaine capacité. Les organismes pourront se prévaloir du droit, dont l'exercice est soumis à certaines conditions, d'avoir été qualifiés par l'Etat et de pouvoir offrir les services pour lesquels ils ont été accrédités, à savoir procéder à des essais ou à des certifications, dans un marché par ailleurs libre (...). Le droit public ne régit que la relation entre, d'une part, l'organisme d'essai ou de certification et, d'autre part, l'organe d'accréditation ou l'autorité compétente pour le domaine de produits concerné. Ceci vaut en particulier pour les moyens de recours. Par contre, la relation juridique entre le fabricant ou la personne qui met le produit sur le marché, d'une part, et l'organisme accrédité, d'autre part, fait l'objet d'un contrat de droit privé. Si l'organisme prend une décision qui ne convient pas au destinataire contractuel, celui-ci peut faire valoir un droit à la réparation du dommage éventuel selon les règles contractuelles. Il peut, en outre, dénoncer à l'autorité de surveillance compétente une prétendue violation par l'organisme accrédité des prescriptions publiques, notamment de celles prévues par l'ordonnance sur l'accréditation."
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Il apparaît ainsi que, tandis que l'ensemble des rapports juridiques entre l'organisme d'accréditation (SAS) et les entreprises accréditées reposent sur le droit public, la certification est principalement conçue en Suisse comme une activité de droit privé (cf. Message LETC, FF 1995 II 551, qui parle à ce sujet de "service privé") soumise aux règles du mandat voire du contrat d'entreprise (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., n° 223; SUBILIA-ROUGE, op. cit., p. 142; EVELYNE CLERC, Management et assurance de la qualité dans la construction, in Journées du droit de la construction, 1995, vol. II, p. 39 ss, 56 s.). Dans cette conception, les relations entre l'organisme de certification et les entreprises contrôlées sont pour l'essentiel réglées de BGE 138 II, 134 (151)manière contractuelle et les litiges survenant lors de la procédure de certification doivent être tranchés selon les règles du droit des obligations devant les tribunaux civils. Les entreprises contrôlées ne peuvent s'adresser aux pouvoirs publics que par la voie de la plainte à l'autorité de surveillance en lui demandant de prendre des sanctions contre un organisme d'accréditation qui ne respecterait pas les conditions d'accréditation (SUBILIA-ROUGE, loc. cit.).
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Qu'un organisme de certification ne reçoive, du seul fait de l'accréditation, aucune compétence relevant de la puissance publique, n'exclut pas qu'une législation sectorielle puisse lui déléguer une tâche publique. Une telle délégation doit toutefois pouvoir se déduire de la législation sectorielle en cause. On ne saurait en effet la tirer des caractéristiques du système d'accréditation mis en place, comme l'existence de rapports de droit public entre l'organisme accrédité et le SAS ou le fait que le premier soit placé sous la surveillance du second. A défaut, cela reviendrait, en contradiction avec la volonté du législateur, à soumettre de manière quasiment systématique au droit public les rapports entre un organisme de certification et les entreprises contrôlées. Cela étant, dans son Message concernant le Paquet agricole 95, le Conseil fédéral a évoqué la tâche de contrôle dévolue aux organismes de certification des AOC et des IGP dans des termes qui manifestent plutôt une volonté, dans la ligne de l'art. 35 OAccD, de confier cette tâche, sous la surveillance de l'Etat, à des acteurs privés et sur une base de droit privé. Il relève notamment, en se référant expressément aux normes européennes de la série EN 45000, l'importance de confier le contrôle de la conformité des produits à des organisations privées accréditées par l'Etat, présentant des garanties d'indépendance vis-à-vis des groupements professionnels et bénéficiant de connaissances spécifiques suffisantes pour mener à bien leur tâche. Il rappelle également que, d'une manière générale, la dénomination des produits agricoles "doit rester l'affaire des producteurs" et qu'il incombe au secteur privé de supporter les coûts du contrôle (cf. Message Paquet agricole 95, FF 1995 648 s., 651 et 653).
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Par conséquent, l'interprétation de la loi ne permet pas, sous l'angle du critère fonctionnel, de qualifier de tâche publique l'activité de contrôle que la réglementation confie à l'OIC. Il faut élargir l'analyse aux autres critères reconnus pour déterminer la nature juridique des rapports entre l'OIC et les entreprises contrôlées.
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BGE 138 II, 134 (152)4.4 Critères du sujet ou de la subordination.
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4.4.1 Selon le critère de la subordination, les rapports juridiques qui confèrent à l'Etat-ou à un acteur privé en cas de délégation d'une tâche publique - une position supérieure à l'autre en fait ou en droit relèvent du droit public, tandis que les rapports juridiques où les parties traitent d'égal à égal relèvent du droit privé. La prérogative de rendre des décisions pour régler des rapports juridiques, et d'en obtenir l'exécution forcée sans avoir à passer par le juge, est la manifestation principale de l'existence d'un rapport de subordination propre au droit public (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., n° 368). A l'inverse, l'égalité entre les parties, comme marque du droit privé, se concrétise classiquement par le recours au contrat, puis au juge en cas d'inexécution de celui-ci; comme émanation de l'autonomie de la volonté, le contrat suppose que les parties puissent, dans les limites de la loi, librement décider de sa conclusion, de son contenu et de ses modalités, et librement choisir leur cocontractant (cf., parmi de nombreuses références, PIERRE ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd. 1997, p. 97).
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D'une part, les entreprises désirant utiliser une AOP sont obligées de conclure, puisque la réglementation leur impose de faire certifier leurs produits par un tiers accrédité par l'Etat; bien plus, elles ne disposent pas de la liberté de choisir leur cocontractant, mais sont forcées de se tourner vers l'OIC qui est, comme on l'a vu, le seul organisme désigné par le cahier des charges pouvant effectuer des certifications pour l'appellation "Gruyère"; à cette fin, elles doivent "signer un contrat de contrôle et de certification" avec l'OIC (ch. 1.1 et 4.1 du Manuel de contrôle) aux termes duquel elles s'engagent notamment à "accepter tout contrôle de l'Interprofession du Gruyère et de l'OIC et de leurs mandataires liés à la vérification de la conformité du Gruyère à son cahier des charges" (cf., dans le cas d'espèce, le contrat d'achat de la production de Gruyère pour l'année 2006/2007 signé par la recourante). De son côté, l'OIC n'est pas non plus libre de choisir ses partenaires. Il est en effet tenu de contracter avec toutes les entreprises qui s'adressent à lui pour faire certifier leur production. Ce devoir découle de l'obligation de non-discrimination que doivent respecter les organismes de certification en vertu du BGE 138 II, 134 (153)renvoi de l'art. 7 al. 1 OAccD aux normes européennes de la série EN 45011 (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 227, 344 et 430).
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D'autre part et surtout, l'autonomie des parties est également restreinte par la réglementation applicable en ce qui concerne le contenu même de leurs relations "contractuelles". L'ordonnance sur le contrôle édictée par le DFE fixe en effet des "exigences minimales" contraignantes concernant le type de contrôle à effectuer et leur fréquence (un contrôle des conditions structurelles lors de l'agrément initial; au minimum tous les deux ans, un contrôle des conditions liées au processus; au minimum une fois par année, un test du produit final) (cf. art. 1 à 5 de l'ord. DFE; ch. 4 du Manuel de contrôle). Par ailleurs, comme on l'a vu, l'OIC doit respecter le Manuel de contrôle déposé auprès de l'OFAG qui fait partie intégrante de son système d'assurance de qualité (cf. supra consid. 4.3.9); or, ce document contient de nombreuses prescriptions qui détaillent la procédure de contrôle et de certification et limitent d'autant la liberté contractuelle des parties.
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D'une part, afin de mener à bien sa tâche et de garantir le respect continu des conditions de certification, la réglementation octroie à l'OIC d'importantes prérogatives qui sont en principe réservées à l'Etat. VAUTIER EIGENMANN parle à ce sujet de "pouvoirs exorbitants du droit privé" (op. cit., n° 370). Ainsi, l'art. 7 ord. DFE prévoit que l'OIC doit s'assurer qu'il a accès en tout temps aux entreprises (let. a) et qu'il peut consulter tous les documents utiles à la certification (let. b); le chiffre 4 du cahier des charges, qui précise la manière dont les contrôles sont concrètement effectués dans les fromageries, désigne les documents que celles-ci sont tenues de fournir à l'OIC et autorise ce dernier à effectuer des prélèvements d'échantillons dans les entreprises; en outre, le chiffre 1.4 du Manuel de contrôle dispose qu'en plus des contrôles prévus par la réglementation et le cahier des charges, l'OIC peut, en cas de doute, "faire des contrôles inopinés en opérant de manière indépendante"; enfin, selon le ch. 8.2 du Manuel de contrôle, la plupart des non-conformités donnent lieu à une "réinspection" ou à la mise en place d'une "inspection régulière" et toute "entrave au contrôle" est sanctionnée d'une pénalité d'un point. Certes, le simple fait que la loi impose une BGE 138 II, 134 (154)répartition des droits et des devoirs entre des parties contractuelles n'a, en soi, rien d'exceptionnel. Toutefois, lorsque le législateur s'écarte du postulat d'inspiration libérale qui est à la base du droit privé, soit l'égalité formelle entre les parties, il cherche en principe à protéger la partie la plus faible, par exemple le locataire en droit du bail ou le travailleur dans le contrat de travail (cf. INGEBORG SCHWENZER, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 5e éd. 2009, n° 25.04 ss). Or, en l'espèce, bien qu'il n'apparaisse nullement comme la partie faible, la réglementation accorde à l'OIC des prérogatives qui ont pour effet de placer les entreprises contrôlées dans un certain rapport de subordination vis-à-vis de lui, ce qui constitue un indice de la présence d'une délégation de la tâche publique en sa faveur (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., n° 431).
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D'autre part, le rapport de subordination est attesté par le système de sanctions à disposition de l'OIC si les entreprises ne se conforment pas à leurs obligations découlant du cahier des charges et du Manuel de contrôle. Ce dernier prévoit en effet que chaque "non-conformité" donne lieu, en fonction de sa gravité, à une pénalité de un à quatre points comptabilisés pendant une période de trois ans et que si l'entreprise atteint ou dépasse la limite de quatre points pendant cette période, "l'OIC peut prononcer une décision de retrait d'agrément ou de certificat de produit". Un tel système de sanctions unilatérales est davantage le propre du droit public que du droit privé, même si des acteurs privés peuvent également y recourir, par exemple dans le monde associatif, pour garantir l'intérêt général des membres de l'association.
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4.4.4 Enfin, en troisième lieu, la réglementation elle-même prévoit une procédure et des garanties propres au droit administratif pour régler les contentieux entre l'OIC et les entreprises soumises à son contrôle. En particulier, les refus ou les retraits de certification doivent, en vertu du renvoi de l'art. 7 al. 1 OAccD aux critères internationaux applicables aux organismes de certification (annexe 2 OAccD), faire l'objet d'une décision motivée, respectant le droit d'être entendu du destinataire (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., no 307; SUBILIA-ROUGE, op. cit., p. 137; RÖHL, op. cit., p. 93), et susceptible d'un recours interne devant une commission indépendante (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., no 303); il s'agit là typiquement d'obligations de droit public (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., no 344). Et c'est bien la procédure qui a été suivie en l'espèce par l'OIC et sa BGE 138 II, 134 (155)commission indépendante de recours pour infliger les deux points de pénalité litigieux à la recourante.
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4.4.5 Au vu de ces éléments, le critère du sujet incline plutôt à retenir l'existence d'un rapport de droit public. Toutefois, cette conclusion se fonde, pour une grande part, sur des considérations qui tiennent à la nature de l'activité de certification. Celle-ci implique en effet l'établissement d'un certain rapport de subordination entre les organismes de certification et les entreprises soumises au contrôle. En particulier, les obligations imposées aux premiers de contracter avec les secondes, de respecter leur droit d'être entendues ou d'exercer à leur endroit une surveillance permanente, résultent du renvoi de l'art. 7 al. 1 OAccD aux normes européennes de la série EN 45000 (cf. supra consid. 4.3.5 premier paragraphe). Dans la mesure où, d'après l'art. 35 OAccD, l'accréditation n'emporte le transfert d'aucune compétence de la puissance publique, on ne saurait dès lors, comme pour le critère fonctionnel (supra consid. 4.3.9 avant-dernier paragraphe), accorder un poids décisif au critère du sujet, lorsque, comme en l'espèce, les indices d'un rapport de subordination résultent moins des spécificités propres à la réglementation sectorielle, que de la nature de l'activité de certification.
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4.5.2 A l'origine, l'art. 16 ord. AOP, libellé "utilisation de la mention AOP ou IGP", disposait que "seule une appellation d'origine enregistrée pouvait être assortie de la mention appellation d'origine (AO), appellation d'origine protégée (AOP) ou appellation d'origine contrôlée (AOC)" (al. 1); son alinéa 2 prévoyait la même règle pour les indications géographiques (RO 1997 1198, 1202). Depuis une novelle du 14 novembre 2007, entrée en vigueur le 1er janvier 2008 (soit postérieurement à la décision litigieuse), l'art. 16 ord. AOP prévoit BGE 138 II, 134 (156)désormais, sous le titre "interdiction d'utiliser les mentions AOC, AOP et IGP ou les mentions similaires", non seulement que ces mentions ne peuvent pas être utilisées pour des produits dont la dénomination n'a pas été enregistrée (al. 1 et 2), mais également pour des produits dont la dénomination a été "enregistrée, mais pas certifiée en vertu de l'art. 18 de la présente ordonnance" (al. 3). Autrement dit, avant le 1er janvier 2008, celui qui utilisait une dénomination protégée devait certes, comme aujourd'hui, faire contrôler par un organisme de certification défini dans le cahier des charges la production, la transformation ou l'élaboration de ses produits (art. 18 al. 1 ord. AOP), mais n'avait pas formellement l'interdiction d'utiliser ceux-ci avant de les avoir fait certifier; seule était interdite l'utilisation commerciale d'une dénomination protégée pour un produit comparable qui n'était pas conforme au cahier des charges (cf. art. 17 al. 1 let. a ord. AOP) ou pour un produit non comparable exploitant la réputation de la dénomination protégée (cf. art. 17 al. 1 let. b ord. AOP). Sous réserve de respecter le cahier des charges, tout un chacun pouvait donc commercialiser ses produits sous la dénomination protégée (cf. HIRT, op. cit., p. 161). Depuis le changement intervenu en 2008, la certification est une condition légale préalable à la commercialisation d'un produit sous une dénomination protégée. En cas de violation de cette obligation, le producteur s'expose dorénavant à une sanction pénale pour utilisation illicite d'une appellation d'origine (cf. art. 172 LAgr), même s'il peut établir que ses produits ont été fabriqués conformément au cahier des charges. Ce changement manifeste de la part du Conseil fédéral qu'il considère la protection des AOP et des IGP comme un domaine sensible, à l'instar d'autres domaines réglementés qui mettent en jeu la sécurité ou la santé publiques, l'environnement ou la protection des consommateurs (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 58 et 60). Dans la mesure où un éventuel retrait de certification a pour conséquence d'interdire à la recourante de commercialiser ses produits sous la dénomination "Gruyère", il faut dès lors admettre que le litige ressortit au droit public. En effet, une telle interdiction n'a pas son fondement dans une clause contractuelle mais découle directement de l'art. 16 al. 3 ord. AOP.
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4.5.3 Certes, comme on l'a vu, il n'est pas certain que l'obligation de certification prévue à l'art. 16 al. 3 ord. AOP puisse être assimilée à une "prescription technique" au sens étroit du terme, en ce sens que les produits peuvent être mis sur le marché sans avoir été BGE 138 II, 134 (157)certifiés, pour autant qu'ils ne soient pas utilisés sous la dénomination protégée (supra consid. 4.3.6). On peut toutefois se demander, dans cette dernière hypothèse, s'il agit encore du même produit. Au vu de sa notoriété, la dénomination "Gruyère" ne représente en effet pas un simple avantage comparatif comme peuvent en procurer certains labels privés, mais participe de l'identité même du produit; son utilisation a donc un impact direct et important sur le succès commercial des fromages et leur prix de vente. Même si elle n'est, légalement, pas absolument obligatoire pour mettre ses produits sur le marché, la certification constitue donc à tout le moins une exigence commerciale difficilement contournable pour la recourante qui se trouverait alors dans l'impossibilité de vendre ses fromages sous l'appellation "Gruyère". Il en va en effet, sinon de sa survie, du moins de la rentabilité de son activité. En d'autres termes, bien qu'elle soit formellement facultative et procède d'une démarche volontaire, la certification représente de facto une obligation pour la recourante (cf. VAUTIER EIGENMANN, op. cit., nos 63 et 169; SUBILIA-ROUGE, op. cit., p. 241).
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Il s'ensuit que, sous l'angle du critère modal, le litige doit être rangé dans la catégorie du droit public, car un retrait de la certification litigieuse constitue une importante restriction d'accès au marché en vertu de l'interdiction (de droit public) prévue à l'art. 16 al. 3 ord. AOP.
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4.6 En conclusion, l'analyse des différents critères montre, en l'espèce, que celui de l'intérêt penche légèrement en faveur du droit public (information et protection des consommateurs; supra consid. 4.2), tandis que ceux de la fonction et de la subordination (supra consid. 4.3 et 4.4) n'apparaissent, en eux-mêmes, pas déterminants pour qualifier les rapports juridiques entre l'OIC et la recourante en raison de la nature de l'activité de certification, qui implique un rapport de subordination, et du système particulier d'accréditation mis en place en Suisse, qui n'emporte en principe pas la délégation de la puissance publique (cf. art. 35 OAccD). Au final, le critère modal (supra consid. 4.5) est le plus approprié pour déterminer la nature juridique de tels rapports, en ce sens que, lorsque la certification se présente comme une obligation pour commercialiser un produit, elle doit être considérée comme relevant du droit public dès lors que le fondement légal de cette obligation réside, comme en l'espèce, dans une norme de droit public (en ce sens, s'agissant du droit allemand, BGE 138 II, 134 (158)cf. PETER M. HUBER, in Grundlagen des Verwaltungsrechts, Hoffmann-Riem/Schmidt-Assmann/Vosskuhle [éd.], München 2009,vol. III, nos 173 s.). A cet égard, il importe peu que l'obligation découle d'un impératif légal incontournable (une "prescription technique" au sens de l'art. 3 let. b LETC) ou, comme en l'espèce, d'un impératif commercial; seul compte que cet impératif ait son siège, à l'instar du système de protection des AOP et des IGP, dans une matière réglementée par le droit public. Il s'ensuit que la relation entre l'OIC et la recourante est soumise au droit public.
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1 La Confédération et les cantons peuvent associer des entreprises ou des organisations à l'exécution de la loi ou créer des organisations appropriées à cet effet.
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2 La coopération de ces entreprises et de ces organisations est surveillée par les pouvoirs publics. L'autorité compétente doit définir leurs tâches et leurs attributions. Leur gestion et leurs comptes sont soumis à cette autorité. Le contrôle parlementaire de la Confédération et des cantons est réservé.
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3 Le Conseil fédéral et les cantons peuvent autoriser ces entreprises et ces organisations à percevoir des émoluments appropriés afin de couvrir les frais de leur activité. Le tarif de ces émoluments doit être approuvé par le département.
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L'art. 166 al. 1 LAgr prévoit qu'un recours peut être formé auprès de l'office compétent contre les décisions des organisations et des entreprises mentionnées à l'art. 180. Sont considérées comme des décisions, au sens de l'art. 5 PA, les mesures prises par les autorités dans des cas d'espèce, fondées sur le droit public fédéral et ayant pour objet de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a) ou de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de tels droits ou obligations (let. b).
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Selon la jurisprudence, la compétence de rendre des décisions au sens de l'art. 5 PA, soit de pouvoir définir concrètement un régime juridique touchant les droits et les obligations de tiers de manière unilatérale, est un privilège - et un monopole - de souveraineté de la puissance publique. Pour que des personnes juridiques extérieures à l'administration soient habilitées à le faire, une base légale formelle est nécessaire (cf. arrêts 2C_715/2008 du 15 avril 2009 BGE 138 II, 134 (159)consid. 3.2; 2A.167/2005 du 8 mai 2006 consid. 10.2 et les références citées à la doctrine). La jurisprudence a toutefois précisé que la délégation de tâches publiques à un organisme extérieur à l'administration peut implicitement comprendre le pouvoir décisionnel nécessaire à leur accomplissement, pour autant qu'une loi spéciale ne l'exclue pas et que l'exercice d'un tel pouvoir de décision soit indispensable à l'organisme concerné pour réaliser lesdites tâches. Le plus souvent, la question de savoir si la délégation d'une tâche publiqueenglobe celle d'un pouvoir décisionnel ne trouve pas de réponse évidente dans le texte légal et il faut déterminer par voie d'interprétation l'existence et, le cas échéant, l'étendue et le champ d'application précis d'un tel pouvoir (cf. ATF 137 II 409 consid. 6.2 p. 412 et les références citées, en particulier à l'arrêt 2C_715/2008 du 15 avril 2009 consid. 3.2). Dans tous les cas, que la compétence de rendre des décisions soit explicitement ou implicitement comprise dans la délégation de la tâche publique à un organisme extérieur à l'administration, il faut que cette délégation repose sur une base légale formelle (eod. loc. consid. 6.3).
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5.2 En l'espèce, l'art. 180 LAgr constitue sans conteste une base légale formelle qui donne de manière générale à la Confédération la compétence de déléguer l'exécution de la loi sur l'agriculture à un organisme extérieur à l'administration. Par ailleurs, il ressort clairement des dispositions prises par le Conseil fédéral pour réglementer la question du contrôle des AOP et des IGP (selon la délégation de compétence prévue l'art. 16 al. 2 let. d LAgr), que cette tâche a été confiée, selon le voeu du législateur (cf. supra consid. 4.3.9 avant-dernier paragraphe), à des organismes indépendants accrédités placés sous la surveillance de l'OFAG et du SAS (cf. art. 18 al. 1 et 21 al. 4 ord. AOP). Ces organismes doivent agir dans le respect des exigences minimales précisées dans l'ordonnance sur le contrôle édictée par le DFE (art. 18 al. 2 ord. AOP) et il leur appartient notamment, à ce titre, de faire les différents contrôles détaillés aux art. 1 à 5 ord. DFE afin de pouvoir certifier la conformité des produits au cahier des charges (cf. art. 16 al. 3 en lien avec l'art. 18 al. 1 ord. AOP). Ils doivent également signaler à différentes autorités les irrégularités constatées lors des contrôles (art. 20 ord. AOP) et fournir à l'OFAG un rapport annuel détaillant notamment "le nombre et le type des actions coercitives (entreprises) et des retraits de certification (prononcés)" (art. 6 let. c ord. DFE). Certes, aucune disposition légale ou réglementaire ne confère formellement à l'OIC le BGE 138 II, 134 (160)pouvoir de rendre des décisions à l'encontre des entreprises soumises à son contrôle, encore moins de leur infliger des sanctions en présence d'une irrégularité. On peut toutefois déduire un tel pouvoir décisionnel du renvoi de l'art. 7 al. 1 OAccD aux normes européennes de la série EN 45000 (cf. supra consid. 4.3.5 premier paragraphe). De plus, le Manuel de contrôle, qui fait partie intégrante de l'assurance qualité de l'OIC, prévoit expressément que ce dernier peut prendre les sanctions litigieuses s'il constate des irrégularités. En tout état de cause, de telles sanctions se laissent implicitement déduire de la réglementation (cf. en particulier l'art. 6 let. c ord. DFE précité) et elles apparaissent indispensables pour que l'OIC puisse utilement mener à bien ses activités de contrôle et de certification et obtenir des entreprises, le cas échéant par des mesures coercitives, qu'elles respectent leurs obligations. Il faut donc admettre que les compétences déléguées à l'OIC incluent le pouvoir de rendre des décisions administratives, singulièrement des sanctions.
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5.3 Partant, l'OIC doit être considéré comme délégataire d'une tâche publique et investi du pouvoir de rendre des décisions administratives sujettes à recours auprès de l'OFAG (art. 180 LAgr) à l'encontre des entreprises soumises à son contrôle. Dans la mesure où une voie de recours interne est prévue (cf. supra consid. 4.3.7 in fine), on peut se demander s'il ne serait pas préférable que la décision de la Commission de recours puisse être portée directement devant le Tribunal administratif fédéral. Il n'appartient toutefois pas au Tribunal fédéral d'en décider, mais au législateur, car l'art. 166 LAgr ne souffre pas d'exception sur la possibilité de recourir contre les décisions prises par un organisme délégataire d'une tâche prévue dans la loi sur l'agriculture.
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