BGE 146 II 359 | |||
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27. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause Association de l'Ecole Suédoise Internationale de Genève contre Administration fiscale cantonale du canton de Genève (recours en matière de droit public) |
2C_1050/2019 du 22 juillet 2020 | |
Regeste |
Art. 56 lit. g DBG; Steuerbefreiung einer Privatschule. | |
Sachverhalt | |
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A.a L'Ecole A., devenue l'Ecole internationale A. en novembre 2017, est une association dont l'activité principale consiste à diriger une école privée sise à B.; elle comprend une crèche, des classes enfantines et des classes primaires. Depuis cette même date, elle a pour but de dispenser et développer l'enseignement privé à Genève en fonction des valeurs de l'Agence nationale A. pour l'éducation et d'exploiter ladite école; pour accomplir ce but, l'association respecte le programme de l'Agence nationale A. pour l'éducation.
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Par décision du 18 juillet 2017, l'Administration fiscale cantonale de la République et canton de Genève (ci-après: l'Administration fiscale) a refusé la demande d'exonération fiscale présentée par l'Ecole A. Celle-ci réalisait des bénéfices grâce à l'écolage. Une exploitation sous la forme commerciale d'une école, même sans but lucratif, était considérée comme une activité à but économique et ne correspondait pas aux critères d'intérêt général et de désintérêt fixés pour l'obtention d'une exonération. Elle a confirmé ce refus par décision sur réclamation du 29 septembre 2017.
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A.b Le 13 août 2018, le Tribunal administratif de première instance de la République et canton de Genève (ci-après: Tribunal administratif de première instance) a partiellement admis le recours de l'Ecole A. Depuis l'adoption de ses nouveaux statuts, en novembre 2017, l'Ecole A. offrait des alternatives éducatives dans les domaines de la petite enfance et de l'enseignement primaire; l'enseignement n'étant plus réservé seulement aux enfants des membres de l'association, le cercle des destinataires des prestations était maintenant ouvert; l'activité revêtait dès lors un intérêt général. Néanmoins, l'Ecole A. adoptant en parallèle à son but d'utilité publique les principes de l'économie de marché, elle exerçait en partie une activité économique avec but lucratif. Ainsi, dans la mesure où elle oeuvrait en faveur de la formation mais exerçait en parallèle une activité commerciale, ledit tribunal a admis une exonération partielle à hauteur de 50 % à partir de 2018.
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B. Par arrêt du 5 novembre 2019, la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours de l'Ecole A. Celle-ci exerçait une activité lucrative prépondérante et le bénéfice qu'elle en tirait servait à concrétiser le but de service public et à faire fonctionner l'école; elle avait accumulé des bénéfices par le biais de l'école qui constituait l'unique source de financement; l'ampleur de cette activité lucrative ne pouvait être considérée comme subsidiaire à l'activité à but non lucratif: c'est à tort que l'instance précédente avait accordé une exone?ration partielle à l'intéressée; la reformatio in pejus étant interdite ladite cour ne pouvait que confirmer celle-ci.
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C. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, l'Ecole A. demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, de constater qu'elle a droit à une exonération complète pour l'impôt fédéral direct et les impôts cantonaux et communaux.
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L'Administration fiscale et l'Administration fédérale des contributions concluent au rejet du recours, sous suite de frais. La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de l'arrêt attaqué.
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Extrait des considérants: | |
I. Impôt fédéral direct
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Erwägung 5 | |
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L'exonération d'une personne morale sur la base de l'art. 56 let. g LIFD suppose la réalisation des trois conditions générales cumulatives suivantes: l'exclusivité de l'utilisation des fonds (l'activité exonérée s'exerce exclusivement au profit de l'utilité publique ou du bien commun), l'irrévocabilité de l'affectation des fonds (les fonds consacrés à la poursuite des buts justifiant l'exonération le sont pour toujours) et l'activité effective de l'institution conformément à ses statuts (pour plus de détails, cf. arrêt 2C_740/2018 du 18 juin 2019 et les références citées, dont la circulaire n° 12 du 8 juillet 1994 de l'Administration fédérale des contributions relative à l'exonération de l'impôt pour les personnes morales poursuivant des buts de service public ou de pure utilité publique ou des buts cultuels et à la déductibilité des versements bénévoles [Archives 63 p. 130 ss; ci-après: la Circulaire n° 12], qui ne lie pas le Tribunal fédéral, mais dont il s'inspire [cf. arrêts 2C_147/2019 du 20 août 2019 consid. 4.1; 2C_484/2015 du 10 décembre 2015 consid. 5.2, in RF 71/2016 p. 359]).
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Outre ces trois conditions générales, il faut, conformément au texte de l'art. 56 let. g LIFD, que la personne morale poursuive un but de service public ou de pure utilité publique. Des conditions spécifiques distinctes s'appliquent à l'exonération selon qu'elle est fondée sur la poursuite d'un but de pure utilité publique (cf. arrêt 2C_484/2015 du 10 décembre 2015 consid. 5.3, in RF 71/2016 p. 359) ou d'un but de service public (cf. arrêts 2C_147/2019 du 20 août 2019 consid. 4.2; 2C_383/2010 du 28 décembre 2010 consid. 2.2, in RDAF 2011 II p. 440). La recourante prétend poursuivre celui de service public.
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Selon la jurisprudence et la pratique fiscale, une exonération en raison de la poursuite d'un but de service public est en principe exclue lorsqu'une personne morale poursuit principalement des buts lucratifs ou d'assistance mutuelle, même si ceux-ci servent simultanément des buts d'intérêt public (cf. ATF 131 II 1 consid. 3.3 p. 6; ATF 127 II 113 consid. 6b p. 118; arrêts 2C_383/2010 du 28 décembre 2010 consid. 2.2, in RDAF 2011 II p. 440; 2A.42/2007 du 11 juin 2008 consid. 2.2; Circulaire n° 12, ch. II/4). Une exonération, totale ou partielle - étant précisé que l'exonération partielle demande une séparation claire du point de vue comptable (cf. arrêt 2C_383/2010 du 28 décembre 2010 consid. 2.2) -, demeure toutefois possible si la personne morale a été chargée d'une tâche de service public par un acte de droit public (p. ex. une loi, cf. ATF 131 II 1 consid. 3.3 p. 6 et les références citées) ou si la collectivité publique (p. ex. une commune) a manifesté expressément son intérêt pour cette personne morale (Circulaire n° 12, ch. II/4). Il faut en outre que la personne morale soit soumise à une certaine surveillance de la collectivité publique, pour s'assurer qu'elle réalise effectivement la tâche de service public, et que ses fonds propres soient affectés par ses statuts de manière exclusive et irrévocable à ses buts d'intérêt public (cf. ATF 131 II 1 consid. 3.3 p. 6 et les références citées; ATF 127 II 113 consid. 6b p. 118 s.; Circulaire n° 12, ch. II/4). Dans tous les cas, l'exonération ne peut être admise que si les buts lucratifs ou d'assistance mutuelle sont secondaires par rapport au but principal de service public de la personne morale (cf. arrêts 2C_740/2018 du 18 juin 2019 et les références citées; 2C_383/2010 du 28 décembre 2010 consid. 2.5, in RDAF 2011 II p. 440). Ainsi, une exonération, même partielle, est exclue lorsque la personne morale poursuit des buts lucratifs ou d'assistance mutuelle qui excèdent une certaine mesure (cf. ATF 131 II 1 consid. 3.3 et 3.4 p. 7 s.). Il s'agit en effet, en cas d'activité lucrative de la personne morale, de respecter le principe de neutralité concurrentielle. Celui-ci ne trouve toutefois à s'appliquer qu'entre personnes morales placées dans des situations comparables de concurrence (arrêt 2C_740/2018 du 18 juin 2019 et les références citées).
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En ce qui concerne les écoles privées, ces Informations pratiques relèvent que "les différentes organisations d'écoles privées se basent le plus souvent sur une philosophie (par ex. les écoles Rudolf Steiner), des aspects religieux (les écoles confessionnelles) ou des raisons commerciales (but lucratif des participants). L'obtention de l'exonération de l'impôt par une école privée doit être à chaque fois traitée de manière individuelle" (ch. 2.I p. 6). S'agissant du but de service public, ce document mentionne:
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"Le fait qu'une école privée soit subventionnée par les pouvoirs publics ne peut être considéré comme une raison suffisante à l'exonération de l'impôt. Il s'agit juste d'un indice prouvant l'existence d'une activité d'intérêt public, mais ne signifie pas que la société poursuive des buts de service public (ou d'utilité publique).
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Les écoles privées ne peuvent bénéficier d'une exonération de l'impôt que si la direction de l'école, la gestion professionnelle, l'organisation et les locaux d'enseignement sont semblables à une école publique et garantissent la formation sur une longue durée. De plus, les disciplines des écoles publiques doivent être enseignées.
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L'exonération est possible principalement pour les institutions qui proposent la formation scolaire depuis le degré primaire jusqu'à la fin de l'enseignement régulier, que ce soit dans le cadre de l'enseignement scolaire ordinaire ou d'une instruction spéciale. En dehors de ce cadre, le service public doit être prouvé d'une manière approfondie. Une des conditions fondamentales à une exonération éventuelle de l'impôt est régulièrement un plan d'enseignement reconnu officiellement par la direction cantonale de l'Instruction publique. Le plan d'enseignement décrit les domaines d'enseignement d'après le contenu et le nombre de lec?ons, les buts de formation et d'enseignement, ainsi que le temps d'enseignement hebdomadaire. Comme la direction de l'éducation décide quel est le matériel obligatoire d'enseignement et en recommande d'autres, il est également possible de trouver des indications supplémentaires pour les cas individuels en examinant le matériel d'enseignement. Le cas échéant, une prise de position peut être demandée à la direction de l'Instruction publique.
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Afin de décider si une école privée peut être exonérée de l'impôt, les aspects suivants peuvent être pris en consideration:
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- De quels milieux proviennent les élèves?
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- Combien y a-t-il d'élèves?
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- Comment est composée la direction de l'école?
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- Quel est le matériel technique à disposition, tels qu'appareils et autres moyens éducatifs?
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- Existe-t-il une bibliothèque à l'école?
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- Existe-t-il une aide pour les élèves ayant des difficultés scolaires pour des raisons de langue étrangère, maladie, déménagement, relations familiales ou des motifs analogues?
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- Comment sont formés les élèves ayant des troubles d'apprentissage ou de comportement, respectivement les élèves handicapés?" (ch. 2.III p. 6).
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En l'espèce, il est tout d'abord relevé que la recourante n'offre pas une formation scolaire complète, puisque le programme proposé ne va que jusqu'à la fin de l'école primaire; il ne comprend pas le degré secondaire I, appelé cycle d'orientation dans le canton de Genève, où il s'y déroule sur trois ans, destiné aux enfants de 12-15 ans. Or, l'exonération fiscale est en principe réservée aux écoles qui dispensent des programmes complets (cf. consid. 5.3). Un autre élément important à prendre en considération dans le cadre de l'exonération fiscale d'une école privée est le plan d'enseignement qui doit être reconnu par le Département de l'instruction publique. In casu, comme susmentionné, il ressort du rapport d'inspection que ce plan ne l'est que partiellement: si la recourante enseigne des disciplines imposées par le plan d'études romand, elle ne suit pas ce plan, puisqu'elle possède son propre programme qui est inspiré du programme suédois. Ainsi, un second élément posé pour la reconnaissance d'un but de service public fait défaut. De plus, le Tribunal fédéral relève qu'il ne ressort pas de l'arrêt attaqué, et la recourante ne le prétend pas, que l'école disposerait d'une aide particulière pour les enfants ayant des difficultés scolaires ou pour ceux en prise avec des troubles d'apprentissage ou du comportement.
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A cela, il faut ajouter le critère mentionné dans les Informations pratiques selon lequel l'école privée doit être ouverte à tous les milieux sociaux. Or, in casu, le montant de l'écolage est très élevé, puisqu'il se monte, au niveau primaire, à 22'280 fr. pour une année scolaire (11'140 fr. par semestre [art. 105 al. 2 LTF]). Cela a pour conséquence que seuls des enfants provenant de milieux sociaux privilégiés peuvent y accéder. Cette école est donc réservée à un spectre extrêmement étroit de la population enfantine. De plus, il ne ressort pas du dossier que l'école prévoirait un soutien pour les parents quin'auraient pas les moyens financiers d'acquitter les montants requis. Dans ce cadre, la Cour de justice a reproché à la recourante d'avoir accumulé des bénéfices, ce qui était constitutif d'une activité lucrative; l'intéressée réplique qu'une activité menée en la forme commerciale et rentable apparaît comme une condition sine qua non, afin de se voir reconnaître l'exercice d'un service public et que le fait de viser une rentabilité suffisante ne serait pas pertinent quant à l'exonération fiscale. S'il est certain que pour survivre une école privée doit viser une rentabilité minimale, la présence de bénéfices reportés est un élément à prendre en compte dans la pondération des critères établis pour déterminer l'octroi d'une exonération fiscale. En effet, une école privée gérée comme une entreprise commerciale dans le but de réaliser un bénéfice ne peut pas en bénéficier (RICHNER/ FREI/KAUFMANN/MEUTER, Handkommentar zum DBG, 3e éd. 2016, n° 80 ad art. 56 LIFD; DANIEL IMTHURN, Die Praxis der Steuerbefreiung bei privatrechtlich organisierten juristischen Personen mit öffentlichen Zwecken, RF 63/2008 p. 760 ss, n° 3.2). En conclusion, l'existence de bénéfices reportés va à l'encontre d'une exonération fiscale.
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Les éléments susmentionnés, pris dans leur ensemble, ne sauraient contrebalancer ceux qui plaident en faveur d'un but de service public, à savoir l'organisation de l'école en cause, sa direction, sa gestion et ses locaux qui, selon l'arrêt entrepris, sont semblables à ceux d'une école publique. L'exploitation de la crèche ne change rien à ce constat.
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6.3 Au regard de ce qui précède, l'activité en cause telle que déployée par la recourante ne peut être qualifiée de tâche de service public au sens de l'art. 56 let. g LIFD et le recours est rejeté en tant qu'il concerne l'impôt fédéral direct. Il n'y a pas lieu d'examiner si l'exonération fiscale de 50 % accordée par le Tribunal administratif de première instance était justifiée ou pas, cet élément ne faisant pas partie de l'objet du litige.
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