BGE 121 III 495 | |||
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95. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 20 décembre 1995 dans la cause société G. contre X. AG et Tribunal arbitral (recours de droit public) | |
Regeste |
Internationale Schiedsgerichtsbarkeit: Zuständigkeit des Schiedsgerichts; Konflikt zwischen einer Schiedsklausel und einer Gerichtsstandsvereinbarung (Art. 190 Abs. 2 lit. b und Abs. 3 IPRG). |
Es ist Sache des angerufenen Gerichts, d.h. des staatlichen oder des Schiedsgerichts, über seine Zuständigkeit zu befinden. Das Schiedsgericht hat Einwände gegen die Gültigkeit einer Gerichtsstandsvereinbarung, mit welcher die seine Entscheidbefugnis begründende Schiedsklausel widerrufen worden ist, ohne jede Einschränkung zu prüfen, wenn es einen Zwischenentscheid im Sinne von Art. 186 Abs. 3 IPRG fällt, und zwar auch dann, wenn es dabei zugleich die Frage der Gültigkeit des ursprünglichen, die Schiedsklausel enthaltenden Vertrages beantworten muss (E. 6). | |
Extrait des considérants: | |
1 | |
Le point de savoir si la clause d'élection de for déroge aux conventions d'arbitrage est une question d'interprétation du contrat (ATF 116 Ia 56).
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Le Tribunal arbitral y a répondu par la négative. La conclusion à laquelle il a abouti ne procède pas de la constatation d'une volonté concordante des parties à ce sujet, mais d'une interprétation normative des stipulations de l'Accord, autrement dit de la recherche du sens objectif à attribuer à celles-ci en conformité avec le principe de la confiance. Les arbitres ont tranché, ce faisant, une question de droit à l'égard de laquelle le Tribunal fédéral, comme on l'a déjà indiqué, jouit d'un plein pouvoir d'examen (cf. l' ATF 119 II 449 consid. 3a).
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a) Il sied d'envisager, au premier chef, la relation existant entre l'Accord et les contrats de vente. Certes, dans le doute, les clauses attributives de compétence, qu'il s'agisse de conventions d'arbitrage ou de conventions d'élection de for, doivent être considérées comme des stipulations autonomes, en ce sens qu'elles embrassent également les contestations ayant trait à la validité du contrat principal ou celles qui surgissent lors de l'extinction et de la liquidation de celui-ci. Toutefois, la liberté contractuelle permet aux parties de stipuler le contraire (ATF 116 Ia 56; cf. l'art. 8 al. 4 du Règlement de conciliation et d'arbitrage de la CCI).
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Lorsque les parties passent une transaction au sujet de prétentions issues d'un contrat comportant une clause arbitrale, il n'en résulte pas, en règle générale, l'annulation de la convention d'arbitrage; au contraire, les contestations se rapportant à la transaction tombent aussi sous le coup de la clause arbitrale, à moins que la volonté des parties, qui peut ressortir d'actes concluants, ait été d'annuler également la clause arbitrale (SCHWAB/WALTER, Schiedsgerichtsbarkeit, 5e éd., p. 72). Une telle volonté peut être admise, en principe, dans l'hypothèse où un contrat assorti d'une clause attributive de compétence est remplacé par un autre contrat contenant lui-même une clause similaire, auquel cas la conclusion s'impose, dans le doute, que l'annulation du premier contrat entraîne aussi celle de ses dispositions de procédure et leur remplacement par les clauses de même nature qui ont été insérées dans le contrat subséquent. En d'autres termes, l'adoption de nouvelles règles de compétence pour un rapport de droit reposant sur la même cause matérielle implique d'ordinaire l'annulation des règles établies antérieurement. Sans doute ne s'agit-il pas là d'une présomption légale (cf. l'art. 116 al. 1 CO; sur ce point, voir AEPLI, Commentaire zurichois, n. 30 ss ad art. 116 CO), mais bien d'une conséquence de l'application du principe de la confiance, lequel veut que, à défaut d'une volonté concordante des parties allant en sens inverse, la règle la plus récente se substitue à celle qui l'a précédée dans le temps, selon la volonté présumée des parties, lorsqu'il est impossible de les appliquer simultanément (ius posterior derogat priori; au sujet de la portée uniforme de cette règle de conflit pour l'interprétation des lois et des contrats, cf. ZELLER, Auslegung von Gesetz und Vertrag, p. 332 ss).
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b) L'Accord visait à régler les différends issus des rapports de droit complexes et inextricables liant ses signataires. La liquidation de ces différends s'est faite pour solde de compte, moyennant des concessions et décharges mutuelles. On est donc en présence d'une transaction extrajudiciaire (ATF 111 II 349 consid. 1, ATF 105 II 273 consid. 3a). Selon les constatations du Tribunal arbitral, les prétentions découlant des contrats de vente invoqués dans la présente procédure ont également été liquidées par le biais de cette transaction. Il faut en conclure, conformément au principe de la confiance, qu'elles ont été annulées et remplacées par des créances pour solde de compte. Le point de savoir si la transaction a sorti, par là même, un effet novatoire peut rester indécis, puisque, en tout état de cause, les parties ne pouvaient plus faire valoir que les seules créances ayant pris naissance dans cette transaction, laquelle constituait une source d'obligations nouvelle et autonome (sur cette question, cf. l' ATF 105 II 273 consid. 3a; SCHLUEP, Schweizerisches Privatrecht, VII/2, p. 947; GAUCH, Der aussergerichtliche Vergleich, in: Innominatverträge, Festgabe für W. Schluep, 1988, p. 3 ss, 14 s.; AEPLI, op.cit., n. 23 ad art. 116 CO).
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Il reste à examiner si la transaction extrajudiciaire a eu une incidence sur les clauses d'arbitrage insérées dans les contrats de vente. En vertu de l'art. 8 al. 4 du Règlement de conciliation et d'arbitrage de la CCI, auquel les parties se sont soumises - disposition qui est en accord avec la théorie dominante de l'autonomie de la convention d'arbitrage -, sauf stipulation contraire, la clause arbitrale survit au contrat principal, si bien que les arbitres demeurent compétents pour trancher également les litiges concernant la fin du contrat (CRAIG/PARK/PAULSSON, International Chamber of Commerce Arbitration, 2e éd., p. 65 ss; RÜEDE/HADENFELDT, Schweizerisches Schiedsgerichtsrecht, 2e éd., p. 77). Tel est le cas même si une prétention couverte par la clause arbitrale a été novée ou a fait l'objet d'une transaction (SCHWAB/WALTER, ibid.; CRAIG/PARK/PAULSSON, op.cit., p. 70, note de pied 24; VAN DEN BERG, The New York Arbitration Convention of 1958, p. 158 s., ad art. II al. 3). Il en va, toutefois, autrement lorsque, en annulant le contrat principal, les parties ont également mis à néant la clause arbitrale, expressément ou par acte concluant (cf. l'art. 7 al. 1 let. b LDIP [RS 291]; LALIVE/POUDRET/REYMOND, Le droit de l'arbitrage interne et international en Suisse, n. 5 ad art. 7 LDIP, p. 287; VOLKEN, in: IPRG-Kommentar, n. 20 ad art. 7; VAN DEN BERG, op.cit., p. 158). Comme on l'a précisé plus haut, cette dernière hypothèse se vérifie, à défaut de preuve d'une volonté contraire des parties, lorsque le contrat subséquent contient une clause attributive de compétence (cf. let. a ci-dessus).
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c) Les parties sont convenues de soumettre aux tribunaux d'Istanbul les différends pouvant découler de l'Accord ou des contrats s'y rapportant (ch. 7 de l'Accord). La nature transactionnelle de l'Accord a pour conséquence que les prétentions litigieuses issues des contrats de vente qui y ont été liquidées ont trouvé un nouveau fondement juridique dans cette transaction extrajudiciaire et sont ainsi tombées dans le champ d'application de la clause attributive de juridiction figurant dans l'Accord. Peu importe, à cet égard, que les dix contrats de vente ne soient pas mentionnés expressément dans celui-ci. Ce qui est décisif, c'est que les prétentions auxquelles ils ont donné naissance ont été annulées en tant que telles et liquidées par voie de transaction, si bien que leur unique cause réside désormais dans l'Accord, supposé ici avoir été valablement conclu. Il suit de là que les clauses d'arbitrage stipulées dans les contrats de vente sont devenues caduques et ont été remplacées par la clause d'élection de for insérée dans l'Accord.
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Selon une opinion bien établie en Suisse, la clause de prorogation de for - à l'instar de la convention d'arbitrage - constitue normalement une convention de procédure distincte et indépendante de l'ensemble du contrat qui l'inclut; elle s'applique donc même si l'une ou l'autre des parties n'est pas liée par le contrat principal, car une telle convention est aussi conclue, en règle générale, en vue de vider les litiges relatifs à la validité du contrat principal (ATF 93 I 323 consid. 4 et les références; GULDENER, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd., p. 263 s.; VOGEL, Grundriss des Zivilprozessrechts, 4e éd., p. 223, n. 45; LEUCH/MARBACH/KELLERHALS, Die Zivilprozessordnung für den Kanton Bern, n. 2d ad art. 27 CPC bern.; STRÄULI/MESSMER, Kommentar zur Zürcherischen Zivilprozessordnung, n. 18 ad § 11 CPC zur.; GABRIELLE KAUFMANN-KOHLER, La clause d'élection de for dans les contrats internationaux, p. 36 ss et 65 s.; CHRISTIAN FISCHER, Les conventions de prorogation de for inter- et intracantonales en droit fédéral et en procédure civile vaudoise, thèse Lausanne 1969, p. 152 ss). En l'occurrence, la sentence attaquée ne contient aucune constatation de fait dont on pourrait inférer que les parties ont restreint la portée de la convention d'élection de for qu'elles ont incluse dans l'Accord; l'interprétation objective de ce dernier ne révèle pas non plus l'existence de pareille restriction. Quoi qu'en pense le Tribunal arbitral, celle-ci ne découle pas déjà du simple fait que la question de la validité de la transaction n'a pas été expressément spécifiée dans la convention de procédure, quand bien même les clauses arbitrales insérées dans les contrats de vente seraient plus explicites sur ce point. La clause d'élection de for litigieuse doit être considérée bien plutôt à la lumière du principe voulant que, dans le doute, on n'interprète pas de manière restrictive une convention de procédure, mais que l'on y voie l'expression de la volonté des parties d'attribuer au tribunal élu une compétence générale (ATF 116 Ia 56 consid. 3b par analogie).
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d) Pour toutes ces raisons, le Tribunal fédéral ne peut pas entériner la motivation principale de la sentence incidente, selon laquelle les prétentions déduites des contrats de vente ne tomberaient pas sous le coup de la clause d'élection de for incluse dans l'Accord. Le Tribunal arbitral s'est ainsi déclaré à tort compétent sur la base de cette motivation.
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a) Selon la jurisprudence et la doctrine, le principe de l'autonomie de la clause arbitrale n'est pas applicable lorsque la cause de nullité du contrat principal affecte également la clause compromissoire qui y est contenue; il en va notamment ainsi dans le cas où la volonté de contracter de l'une des parties était entachée d'un vice du consentement, tel que la crainte fondée (ATF 119 II 380 consid. 4a et les références). De ce point de vue, la convention d'élection de for ne se distingue pas de la clause arbitrale. Demeure cependant intact le problème de la compétence pour décider de la validité de la convention de procédure. Il faut, en effet, se demander si la décision relative au caractère obligatoire de la clause attributive de juridiction est du ressort du tribunal élu, du tribunal qui serait compétent en l'absence d'une telle clause ou des deux tribunaux, avec application, dans cette dernière hypothèse, de l'exception de litispendance.
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b) Le Tribunal arbitral relève que sa compétence ne ferait défaut que si celle des tribunaux étatiques turcs lui avait été valablement substituée. Aussi s'estime-il compétent pour en juger, c'est-à-dire pour examiner si la convention d'élection de for stipulée dans l'Accord lie les parties. Appliquant la théorie dite des faits de double pertinence, il considère, à cet égard, que, dans la mesure où l'intimée allègue les mêmes faits pour soutenir que tant la convention de procédure que le contrat principal ne l'obligent pas, sa propre compétence peut déjà être admise sur le vu des affirmations concluantes de l'intéressée et la question de l'existence du vice de la volonté invoqué n'être examinée qu'après l'entrée en matière sur le fond.
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La recourante ne conteste pas au Tribunal arbitral le droit de traiter du problème de la crainte fondée lorsqu'il statue sur sa compétence; elle soutient, cependant, que, si les arbitres rendent une décision incidente au sujet de leur compétence, ils sont tenus de procéder d'emblée à un examen complet de ce problème et ne sauraient donc se réserver de le traiter ultérieurement avec le fond, après avoir admis leur compétence sans se soucier de l'existence du vice de volonté allégué.
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De son côté, l'intimée estime que la décision concernant la crainte fondée alléguée par elle est de la compétence exclusive du Tribunal arbitral, faute de quoi l'auteur des menaces serait privilégié car il pourrait faire vérifier la réalité de celles-ci par le tribunal dont il a contraint la partie menacée à accepter la juridiction. Pour le reste, l'examen prima facie du vice de la volonté par le Tribunal arbitral, dans le cadre de sa décision sur sa compétence, n'apparaît pas critiquable à l'intimée, pour qui cette manière de procéder n'a de toute façon porté aucun préjudice à la recourante.
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c) En vertu d'un principe fondamental du droit de procédure, il appartient à tout tribunal saisi de se prononcer sur sa compétence, qu'il s'agisse de l'admettre ou de la nier (GULDENER, op.cit., p. 80). C'est ainsi que l'art. 186 LDIP prescrit au tribunal arbitral de statuer sur sa propre compétence (al. 1) et de le faire, en général, par une décision incidente (al. 3). En rendant une telle décision, le tribunal arbitral doit examiner, en particulier, la question de l'existence et de la validité de la convention d'arbitrage; dans ce cadre-là, il peut devoir rechercher, le cas échéant, sur la demande de la partie assignée, si une convention d'arbitrage valable n'a pas été révoquée ultérieurement d'entente entre les parties qu'elle lie (LALIVE/POUDRET/REYMOND, op.cit., n. 1.3 ad art. 4 CIA et n. 3 ad art. 186 LDIP; HEINI, in: IPRG-Kommentar, n. 6 ad art. 186; au sujet des anciennes réglementations cantonales qui attribuaient aux tribunaux étatiques la compétence exclusive pour décider de la validité d'une convention d'arbitrage, cf. GULDENER, op.cit., p. 610, ad note de pied 87). Semblable compétence inclut aussi, en bonne logique, celle de se prononcer sur l'objection selon laquelle l'accord que les parties ont passé en vue de révoquer la convention d'arbitrage n'a pas été conclu valablement, de sorte que ladite convention est restée en vigueur. Le Tribunal arbitral jouit donc, dans cette mesure également, de "la compétence de la compétence" (Kompetenz-Kompetenz), mais sa décision sur ce point peut faire l'objet d'un contrôle judiciaire subséquent, à l'instar de toute décision relative à la compétence des arbitres (art. 190 al. 2 let. b LDIP).
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Cependant, la compétence du tribunal arbitral pour trancher la question de l'existence ou de la validité d'une convention d'arbitrage n'est pas exclusive. En effet, conformément au principe général susmentionné, il pourra incomber, selon les circonstances, à une autre autorité saisie de régler cette question: ce sera le cas, par exemple, du tribunal suisse confronté à une exception d'arbitrage (art. 7 LDIP) ou - avec un pouvoir d'examen restreint - du juge appelé à nommer un arbitre (art. 179 al. 3 LDIP), ou encore d'un autre tribunal arbitral, dans l'hypothèse d'une pluralité de conventions d'arbitrage. Les conflits que peut engendrer ce concours de compétences doivent être résolus par application des règles régissant la litispendance (cf., par ex., l'art. 9 LDIP), l'autorité de la chose jugée ou la reconnaissance et l'exécution des décisions étrangères (art. 25 ss LDIP). La présente procédure ne soulève toutefois pas ce genre de problèmes.
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d) Sur le vu de ce qui précède, le Tribunal arbitral était donc compétent pour statuer sur sa propre compétence. Il a rendu à ce sujet une décision incidente, se conformant ainsi à la règle générale posée à l'art. 186 al. 3 LDIP, mais il n'a pas examiné de manière approfondie, à cette occasion, la question de la validité de la convention d'élection de for, qu'il s'est réservé de traiter ultérieurement avec le problème de fond, à savoir la validité de l'Accord incluant cette convention, s'agissant de questions connexes. La recourante lui reproche à juste titre d'avoir violé le droit fédéral en procédant de la sorte.
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En général, le tribunal arbitral statue sur sa compétence par une décision incidente (art. 186 al. 3 LDIP). Une telle décision peut être attaquée directement (art. 190 al. 3 LDIP); en réalité, elle doit l'être sous peine de forclusion (ATF 118 II 353 consid. 2; HEINI, op.cit., n. 65 ad art. 190; LALIVE/POUDRET/REYMOND, op.cit., n. 5b ad art. 190 LDIP). Cela suppose toutefois nécessairement que le tribunal arbitral, avant de rendre une décision incidente au sujet de sa compétence, examine sans aucune réserve les objections relatives à l'existence et à la validité d'une convention de procédure dont dépend sa compétence, quand bien même ces objections et celles dirigées contre le contrat principal se recouvriraient. Il est certes exact que, ce faisant, les arbitres sont amenés à trancher simultanément la question de la validité du contrat principal, mais il s'agit là d'une conséquence inéluctable à laquelle ils ne pourraient se soustraire qu'en renonçant à rendre une décision incidente, s'ils estimaient que l'exception d'incompétence est trop liée aux faits de la cause pour être jugée séparément du fond (HEINI, op.cit., n. 14 ad art. 186; LALIVE/POUDRET/REYMOND, op.cit., n. 13 ad art. 186 LDIP). Ainsi, lorsque la validité de la convention d'arbitrage dépend de l'existence et de la validité du contrat principal, le tribunal arbitral ne peut admettre sa compétence que s'il conclut à l'efficacité du contrat principal, raison pour laquelle il doit déjà examiner à fond cette dernière question lorsqu'il statue sur sa compétence (SCHLOSSER, Das Recht der internationalen privaten Schiedsgerichtsbarkeit, 2e éd., n. 546).
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La théorie des faits de double pertinence, que le Tribunal arbitral a appliquée en l'espèce, n'y change rien. Selon cette théorie, il suffit, suivant les circonstances, pour admettre la compétence d'un tribunal, que les faits allégués avec une certaine vraisemblance à l'appui d'une action constituent à la fois la condition de cette compétence et le fondement nécessaire de la prétention déduite en justice (STEIN-JONAS, Zivilprozessordnung, 21e éd., n. 19 ss ad § 1 CPC all.). Toutefois, outre qu'elle revêt un caractère exceptionnel (STEIN-JONAS, op.cit., n. 20g ss ad § 1 CPC all.), cette théorie ne saurait entrer en ligne de compte lorsque la compétence d'un tribunal arbitral est contestée, car il est exclu de contraindre une partie à souffrir qu'un tel tribunal se prononce sur des droits et obligations litigieux, s'ils ne sont pas couverts par une convention d'arbitrage valable. Pour cette raison déjà, l'objection de l'intimée, selon laquelle le fait de reporter l'examen de la validité de la convention d'élection de for contenue dans l'Accord ne porterait pas préjudice à la recourante, tombe à faux. De surcroît, en matière d'arbitrage international, le Tribunal fédéral n'examine que sous l'angle de la violation de l'ordre public la sentence au fond (art. 190 al. 2 let. e LDIP) - abstraction étant faite ici des autres motifs de recours spécifiques -, tandis qu'il revoit librement les motifs juridiques sur lesquels repose la décision incidente relative à la compétence du tribunal arbitral. Cette limitation du pouvoir d'examen de l'autorité de recours constitue à n'en pas douter une lésion - virtuelle - supplémentaire des droits de la recourante.
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e) Force est dès lors, au terme de cet examen, d'annuler la décision incidente attaquée. Il appartiendra au Tribunal arbitral d'examiner, avant de rendre sa nouvelle sentence, si l'intimée soutient à bon droit que la convention d'élection de for ayant révoqué les clauses compromissoires incluses dans les contrats de vente ne la lie pas, puis, en fonction du résultat de cet examen, d'admettre ou de décliner sa compétence pour statuer sur les conclusions condamnatoires que lui ont soumises les deux parties.
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