BGE 125 III 91 | |||
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17. Extrait de l'arrêt de la Ie Cour civile du 11 février 1999 dans la cause Rytz et Cie SA contre Rytz Industriebau AG (recours en réforme) | |
Regeste |
Markenrecht; Namensrecht und Firma. | |
Sachverhalt | |
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S'étant aperçue que Rytz Industriebau AG utilisait le terme «RYTZ.CH» comme nom de domaine sur le réseau Internet, Rytz et Cie SA a intenté une action à Genève contre cette société, tendant en substance à l'empêcher de faire usage de quelque manière que ce soit de la marque «Rytz» sur le réseau Internet en Suisse. La Cour de justice genevoise ayant rejeté sa demande, Rytz et Cie SA recourt en réforme au Tribunal fédéral.
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Extrait des considérants: | |
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a) On pourrait se demander si le fait d'ouvrir un site Internet sous une désignation identique à une marque déposée tombe sous le coup des activités que le titulaire du droit à la marque a la possibilité d'interdire en vertu de l'art. 13 al. 2 LPM. Cette question n'a toutefois pas à être tranchée dans le cas d'espèce pour les motifs indiqués ci-après.
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b) Selon l'art. 6 LPM, le droit à la marque appartient à celui qui la dépose le premier. Ce droit confère au titulaire, en plus du droit subjectif d'utiliser la marque en exclusivité, le droit notamment d'interdire à des tiers l'usage de signes frappés d'un motif relatif d'exclusion de protection (art. 3 al. 1 et 13 LPM); ce droit exclusif souffre d'une exception en faveur du tiers qui utilisait un signe identique ou similaire avant le dépôt et qui pourra en poursuivre l'usage dans la même mesure que jusque là (art. 14 LPM; TROLLER, Manuel du droit suisse des biens immatériels, Tome I, 2e éd. Bâle 1996, p. 141). Si l'on se place, à l'instar de la demanderesse, sous l'angle de la LPM uniquement, celle-ci, en tant que seule titulaire de la marque '«Rytz'«, serait légitimée à se prévaloir des droits découlant de la LPM à l'encontre de la défenderesse et le bien-fondé de ses prétentions devraient alors être analysées au regard du droit des marques.
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Il ne faut toutefois pas perdre de vue que la marque enregistrée dans le cas d'espèce est une désignation patronymique qui figure également dans la raison de commerce des deux parties. La demanderesse l'a fait inscrire au registre du commerce depuis le 16 décembre 1987, alors que la défenderesse l'a enregistrée déjà le 15 mars 1983. Si l'on envisage le litige exclusivement à la lumière du droit des raisons de commerce, ce n'est pas la demanderesse, mais la défenderesse, soit la société la plus ancienne, qui pourrait se prévaloir de la protection conférée par l'art. 956 CO (cf. ATF 122 III 369 consid. 1).
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Il y a donc conflit entre le droit découlant de la marque et celui issu de la raison de commerce.
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c) Dans de telles hypothèses, le législateur n'a pas introduit de règle de prééminence lorsque des lois protégeant des signes de nature différente se chevauchent, car tous ces droits sont de même valeur (ROLF H. WEBER, Schutz von Domänennamen im Internet, RSJ 1996 p. 405 ss, 406; PATRICK TROLLER, Kollisionen zwischen Firmen, Handelsnamen und Marken, thèse Berne 1979 p. 212). Ce n'est donc pas parce que la demanderesse possède un droit d'exclusivité conféré par la LPM que celui-ci prime tous les autres droits de nature à entrer en conflit avec la marque déposée.
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Selon la jurisprudence, les collisions entre droit au nom (ou à la raison de commerce) d'une part et droit des marques et de la concurrence déloyale d'autre part ne peuvent être résolues de façon schématique au moyen de règles uniformes. Il est nécessaire, dans chaque cas particulier, de peser les intérêts en présence, afin de parvenir à la solution la plus équitable possible (ATF du 4 juin 1997 dans la cause 4C.516/1996 consid. 3b publié in sic - Revue du droit de la propriété intellectuelle, de l'information et de la concurrence - 1997/5 p. 493 ss; ATF 116 II 614 consid. 5d p. 619). Confirmant un arrêt antérieur, le Tribunal fédéral a précisé qu'il ne faut pas accorder de prééminence de principe au droit au nom; l'existence d'une marque célèbre antérieure justifie que l'on impose au nouveau concurrent des restrictions quant à l'utilisation d'un homonyme (ATF 116 II 614 consid. 5d p. 619 et l'arrêt cité).
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La marque «Rytz» détenue par la demanderesse ne peut être qualifiée de marque célèbre, ce qui n'a du reste jamais été invoqué. Quant à la défenderesse, elle n'apparaît pas comme un nouveau concurrent qui chercherait, par l'ouverture d'un site sur le réseau Internet, à profiter d'une marque antérieure. Au contraire, la défenderesse a utilisé la dénomination «Rytz» comme qualificatif bien avant la demanderesse. En effet, depuis le début de ses activités en 1974, elle a fait usage de ce patronyme, tout d'abord dans sa raison individuelle, puis dans sa raison de commerce à partir de 1983. Ce nom correspond d'ailleurs à celui de son fondateur et exploitant, l'ingénieur Kurt Rytz. La dénomination «RYTZ.CH» du site Internet de la défenderesse s'explique ainsi par le fait que ce patronyme a toujours été utilisé pour désigner la société. Il ne s'agit donc pas d'une qualification qui pourrait suggérer une volonté d'appropriation de la marque de la demanderesse, mais d'une dénomination fondée sur des raisons objectives, liées à l'existence d'une raison de commerce bien antérieure au dépôt de la marque de la demanderesse. Dans ces circonstances, il apparaît que l'intérêt de la défenderesse à utiliser le patronyme '«RYTZ.CH'« pour désigner son site Internet l'emporte sur l'intérêt de la demanderesse à se prévaloir de son droit à la marque.
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La cour cantonale n'a ainsi pas violé le droit fédéral en considérant que la demanderesse ne pouvait invoquer la LPM à son profit.
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d) L'application de la LPM étant écartée, il n'y a pas lieu d'examiner si la défenderesse pourrait se prévaloir de l'exception en faveur du tiers utilisant un signe identique ou similaire avant le dépôt de la marque (art. 14 LPM; cf. supra consid. 3b) ni de se demander si l'utilisation de la dénomination du site Internet était en relation avec des produits ou services identiques ou similaires à ceux du titulaire de la marque (cf. art. 3 et 13 LPM).
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