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66. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause X. contre neuf banques et consorts (recours en réforme) |
4C.380/2004 du 31 mai 2005 |
Art. 116, 126 und 196 IPRG; anwendbares Recht. |
Art. 33 Abs. 3 OR; Art. 3 ZGB; Missbrauch der Vertretungsmacht; guter Glaube Dritter. |
Bankgarantien; Unterscheidung zwischen selbständiger und akzessorischer Garantie; Rechtsmissbrauch. |
Art. 44 Abs. 1 OR; Ermässigung der Ersatzpflicht. | |
Sachverhalt | |
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Par décret du 27 mai 1983, le Président de X. a conféré à A. le rang d'Ambassadeur en mission spéciale.
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Selon délégation particulière du 22 mai 1986, le Ministre des finances de X. a indiqué qu'en sa qualité d'Ambassadeur en mission spéciale, A. avait été chargé d'effectuer toutes démarches pouvant contribuer à l'accélération du processus de développement économique du pays et qu'ainsi, il était le représentant autorisé du gouvernement de X. disposant du pouvoir de signer des documents liés à l'exécution des programmes et des projets de développement du pays d'intérêt national.
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D'après une résolution de 10 octobre 1986, le Ministre des finances, confirmant la délégation particulière du 22 mai 1986, a ![]() | 4 |
En 1986 C. SA, une société de droit X. a conclu avec une société italienne un contrat portant sur la construction, dans l'État X. d'une usine de conserves de fruits pour un prix de 25 millions US$, qui a été augmenté par la suite. En 1987, E. SA, une autre société de droit X., a aussi conclu un contrat avec une entreprise italienne en vue de la construction d'une usine de produits pharmaceutiques pour un prix initial de 50 millions DM, qui a lui aussi été augmenté.
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Il était prévu que C. SA et E. SA paieraient le prix par versements effectués au moyen d'un emprunt bancaire dont le financement serait organisé par la banque N., une société anonyme de droit suisse. Hormis la garantie octroyée par Y., un organisme étatique italien assurant les risques à l'exportation, les contrats stipulaient que X. garantirait tous les paiements dus par C. SA et par E. SA.
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Selon deux contrats du 31 mai 1986 et du 23 mars 1987 dénommés "Notes Financing Agreements" (ci-après: NFA), soumis au droit suisse, la banque N. s'est engagée respectivement envers C. SA et E. SA à organiser un emprunt par le biais d'effets de change, qui s'élevait à 40 millions CHF pour la première et à 42 millions DM pour la seconde société. Par avenants du 4 décembre 1986 et du 12 février 1988, des crédits supplémentaires se montant à 6,7 millions CHF et à 12,8 millions DM ont été octroyés, aux mêmes conditions à C. SA et à E. SA.
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Les 5 juin 1986 et 1er septembre 1987, A. a signé deux documents intitulés "Garantie de X." selon lesquels il agissait en qualité de représentant de X., dûment habilité par décret présidentiel et délégation particulière du Ministre des finances en vue de garantir, au nom de l'État X., les crédits consentis à C. SA et à E. SA par un groupe de banques détenant les billets à ordre ou bénéficiaires de ceux-ci et ayant pour agent la banque N. Ces documents prévoyaient que la garantie accordée était régie par le droit suisse, que X. acceptait irrévocablement la compétence des tribunaux suisses et renonçait à son immunité de juridiction. A teneur de ces documents, A. a notamment déclaré :
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(...)
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En conséquence du présent engagement, le Garant s'oblige à verser aux Banques ou Détenteurs de Billets à Ordre, à première demande exprimée par l'Agent, qu'il s'agisse d'une échéance normale ou anticipée, tous montants dus par C. SA/E. SA et impayés par lui."
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La garantie du 1er septembre 1987 contenait en plus la clause suivante:
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"Cette garantie doit être considérée et interprétée comme un (sic) garantie bancaire et le Garant ne peut soulever aucune exception ou objection de quelque nature ou à quelque titre que cela soit."
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Ces documents ont été complétés par des avenants, signés par A. et destinés à augmenter les montants garantis. Il était précisé que le signataire agissait en qualité du représentant de X. en vertu du décret présidentiel du 27 mai 1983 et de la résolution du Ministre des finances du 10 octobre 1986.
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Il a été retenu que A. a remis ces garanties à la banque N., qui a également reçu une communication du décret présidentiel du 27 mai 1983, de la délégation particulière du Ministre des finances du 22 mai 1986 et de sa confirmation du 10 octobre 1986.
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Le 14 juin 1988, C. SA a émis un billet à ordre en vue du paiement de diverses livraisons destinées à l'usine de conserves et un autre pour les intérêts. Ces documents portaient un tampon de l'Ambassade de X. en Suisse et contenaient un aval signé par A., indiquant que X. garantissait le paiement à l'échéance.
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La banque N. a organisé le financement des crédits par le biais de plusieurs banques, qui ont versé les montants prévus. En revanche E. SA et C. SA n'ont pas procédé au remboursement des prêts aux échéances prévues et X. a contesté la validité de son engagement.
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Le 30 décembre 1987, A. a été condamné, par la Cour suprême de X., à sept ans de prison pour usage de faux et utilisation abusive de ses fonctions officielles. Il ressort de cette procédure que A. était le président de E. SA et de C. SA et possédait, avec son épouse, la quasi-totalité des actions de ces entreprises. En élaborant des documents falsifiés, A. cherchait à bénéficier des crédits accordés à des entreprises qu'il contrôlait grâce à des garanties de X. établies de manière frauduleuse pour tromper les banques dispensatrices de crédit. Selon la Cour suprême, X. n'avait ![]() | 18 |
Les banques prêteuses ont déposé une demande auprès des autorités judiciaires genevoises. Statuant sur incidents, la Cour de céans a, dans un arrêt du 20 août 1998 publié partiellement aux ATF 124 III 382, considéré notamment que X. ne pouvait opposer son immunité de juridiction et que la prorogation de for signée par le Consul dans les actes de garantie liait X.
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Le Tribunal de première instance a débouté les banques de l'intégralité de leurs conclusions, alors que la Cour de justice, admettant l'appel des banques, a condamné X. à leur verser les sommes correspondant aux montants remis en prêt.
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Contre l'arrêt de la Cour de justice, X. interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral.
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Extrait des considérants: | |
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2.1 Cette question suppose tout d'abord de qualifier les actes juridiques litigieux à l'origine des prétentions invoquées par les demanderesses, à savoir les garanties émises par le Consul au nom de la défenderesse entre juin 1986 et mars 1988, avant d'examiner la validité de la clause les soumettant au droit suisse. Cette qualification doit se faire en fonction du droit suisse, en tant que lex fori (ATF 129 III 738 consid. 3.4; ATF 128 III 295 consid. 2a p. 398). Les garanties émises en l'espèce correspondent à des garanties bancaires, comme l'indique du reste expressément la garantie du 1er septembre 1987. Selon le droit suisse, les garanties bancaires sont considérées comme des contrats innommés (TERCIER, Les contrats spéciaux, 3e éd., Zurich 2003, n. 6309; THÉVENOZ, Commentaire romand, n. 36 ad art. 111 CO). La nature contractuelle de ces actes rend donc en ![]() | 23 |
Comme les garanties émises au nom de la défenderesse sont antérieures à l'entrée en vigueur de la LDIP, le 1er janvier 1989, encore faudrait-il se demander si, en vertu de l'art. 196 al. 2 LDIP, la validité de l'élection de droit doit être envisagée sous l'angle de l'ancien droit (LRDC; RO 1890-92 p. 337) ou de la LDIP. La question n'a cependant pas à être tranchée, faute d'intérêt pratique, dès lors que le droit international privé suisse n'a pas été modifié quant à la possibilité de conclure une élection de droit et aux effets de celle-ci. Ainsi, une élection de droit valablement conclue sous l'ancien droit le demeure en regard de la LDIP (JAMETTI GREINER/GEISER, Commentaire bâlois, n. 43 ad art. 196 LDIP).
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En l'espèce, il n'est pas douteux que le garant a proposé expressément de soumettre les garanties litigieuses au droit suisse. Reste à déterminer si cette clause a été acceptée. A nouveau, il n'y a pas lieu de déterminer si le silence des demanderesses doit être envisagé sous l'ancien ou le nouveau droit, dès lors que, sous l'empire de la LRDC, le droit suisse admettait déjà qu'une manifestation de volonté puisse être tacite (cf. art. 1 al. 2 CO). Il se trouve que les demanderesses ont reçu ces garanties sans protester et les ont fait valoir dès que les conditions en étaient remplies, acceptant ainsi tacitement ces engagements. L'élection de droit a donc été valablement conclue, de sorte que les garanties litigieuses sont régies par le droit suisse (cf. art. 116 al. 1 LDIP; pour l'ancien droit, ATF 79 II 295 consid. 1).
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Il n'est pas certain qu'un consulat à Genève puisse être assimilé à un établissement au sens de l'art. 126 al. 2 LDIP (cf. sur cette notion, WATTER, Commentaire bâlois, n. 36 ad art. 126 LDIP). Peu ![]() | 27 |
La solution ne serait du reste pas différente si l'on appliquait l'ancien droit en admettant que le moment déterminant est celui où les pouvoirs ont été exercés et que ceux-ci ont fini de déployer leurs effets au 1er janvier 1989 (cf. art. 196 al. 1 LDIP). En effet, sous l'empire de la LRDC, la jurisprudence admettait que les effets externes de la représentation étaient régis par la loi du pays dans lequel le représentant a exercé son pouvoir (ATF 100 II 200 consid. 4 p. 207).
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Par conséquent, c'est à juste titre que la cour cantonale a appliqué le droit suisse à la présente cause.
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En l'occurrence, la défenderesse ne conteste pas, à juste titre, qu'une telle communication a bien eu lieu. Les pouvoirs attribués à A. résultaient de plusieurs actes, à savoir d'un décret du Président de X. du 27 mai 1983 lui conférant le rang d'Ambassadeur en mission spéciale, d'une délégation particulière du Ministre des finances du 22 mai 1986 le chargeant, en sa qualité d'Ambassadeur en mission spéciale, d'effectuer toutes démarches pouvant contribuer à l'accélération du processus de développement économique du pays et le désignant comme représentant autorisé du gouvernement de X. disposant du pouvoir de signer des documents liés à l'exécution des programmes et des projets de développement du pays d'intérêt national. Cette délégation particulière a été confirmée, par une résolution du 10 octobre 1986 du Ministre des finances chargeant le Consul de signer, pour le Ministre ou le gouvernement de X., les ![]() | 35 |
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Selon la jurisprudence rendue en matière commerciale, en cas de simple dépassement des pouvoirs de représentation, seuls des doutes sérieux sur les réels pouvoirs du représentant peuvent conduire à nier la bonne foi du tiers contractant; en cas d'abus, des doutes d'une intensité relativement faible suffisent. Ainsi, lorsque le représentant abuse de ses pouvoirs, l'art. 3 al. 2 CC doit s'appliquer sans restriction. Les exigences quant à l'attention requise du tiers s'en trouvent ainsi augmentées; une négligence même légère peut déjà faire perdre le droit d'invoquer la bonne foi, en particulier lorsque le tiers conclut l'affaire en ne prêtant pas attention à des indices objectifs d'abus, laissant entrevoir que le représentant agit contre les intérêts du représenté (ATF 119 II 23 consid. 3c/aa p. 27 et les ![]() | 37 |
Pour apprécier l'attention requise de l'agent des demanderesses, il convient en premier lieu de se référer aux considérations émises par la Cour de céans lorsqu'elle s'est prononcée, le 20 août 1998, sur la compétence ratione loci des autorités judiciaires suisses (cf. ATF 124 III 382). Dans ce contexte, elle a examiné les pouvoirs de représentation de A., afin de déterminer si celui-ci avait pu valablement engager la défenderesse en signant les contrats de garantie contenant une clause de prorogation de for en faveur des tribunaux suisses. Rappelant la portée et la signification des relations consulaires du point de vue du droit international public (cf. ATF 124 III 382 consid. 4c), le Tribunal fédéral a considéré que les opérateurs économiques qui avaient été en relation d'affaires avec A. pouvaient légitimement partir de l'idée qu'en sa qualité de Consul de X. à Genève, celui-ci était dûment habilité à traiter avec eux, de sorte que la défenderesse devait assumer les pouvoirs, à tout le moins apparents, créés en faveur de celui dont il affirmait à présent qu'il était un falsus procurator (ATF 124 III 382 consid. 4c/cc p. 391 s.). Lorsqu'elle a statué sur le fond, la cour cantonale a réexaminé la question et a confirmé cette appréciation, soulignant qu'il n'existait aucun fait dont la connaissance aurait été acquise après l'arrêt du Tribunal fédéral du 20 août 1998 qui démontrerait que les opérateurs économiques en contact avec A. auraient légitimement dû éprouver des doutes quant à ses pouvoirs. Au contraire, le décret présidentiel et les résolutions du Ministre des finances portant sur les pouvoirs du Consul de X. à Genève avaient été remis au directeur de la banque N., qui ne pouvait être que conforté sur la capacité de A. d'engager la défenderesse. Cette dernière n'avait en ![]() | 38 |
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S'agissant de la mauvaise foi proprement dite, il ne ressort pas des constatations cantonales - qui lient le Tribunal fédéral (art. 63 al. 2 OJ) - que la banque N. connaissait l'infidélité du représentant ou les liens de celui-ci avec les sociétés C. SA et E. SA, ni même qu'elle ait reçu la moindre information dont elle devait nécessairement inférer que le Consul poursuivait des intérêts personnels ou s'écartait des instructions reçues. Dès lors, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en s'en tenant à la présomption de l'art. 3 al. 1 CC et en constatant que la mauvaise foi n'était pas établie.
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Il faut ensuite se demander si la banque N. est déchue du droit d'invoquer sa bonne foi, parce que celle-ci est incompatible avec l'attention que les circonstances permettaient d'exiger d'elle (art. 3 al. 2 CC; HONSELL, Commentaire bâlois, n. 33 s. ad art. 3 CC). Pour dire si la banque N. a manqué à l'attention commandée par les circonstances, on peut prendre en considération, même si elle n'est pas directement applicable, la convention de diligence des banques suisses, dans la mesure où il peut être admis que ce texte reflète les règles usuelles dans la branche. Cette convention, qui relève du droit privé et ne lie que les établissements bancaires qui y ont adhéré (cf. ATF 109 lb 146 consid. 3a p.153), a été conclue initialement en 1977, avant d'être reconduite cinq fois depuis lors, ![]() | 41 |
Il n'est toutefois pas nécessaire d'approfondir cette question. En effet, il ne ressort pas de l'arrêt cantonal que la banque N. (ou les banques demanderesses) ait omis une vérification usuelle dans la branche et encore moins que cette vérification lui aurait permis de constater que les sociétés C. SA et E. SA, comme le soutient la défenderesse, étaient en définitive sous la maîtrise économique du Consul. Ainsi, l'argument selon lequel la banque N. (ou les banques demanderesses) aurait manqué à l'attention commandée par les circonstances (au sens de l'art. 3 al. 2 CC) ne trouve aucune assise dans les faits constatés souverainement par la cour cantonale.
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Au demeurant, c'est au représenté (et non au cocontractant) qu'il incombe en première ligne, dans son propre intérêt, de bien choisir et surveiller son représentant, en s'interrogeant, le cas échéant, sur ses liens et intérêts économiques.
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Par conséquent, rien dans les faits ne permet d'admettre que la banque N. et, par voie de conséquence, les demanderesses auraient été de mauvaise foi ou que la défenderesse serait parvenue à établir que la banque N. ou les demanderesses auraient agi de manière négligente.
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En retenant que la défenderesse était liée par les garanties du 5 juin 1986, du 1er septembre 1987 et par leurs avenants, établis en son nom par le Consul, ainsi que par l'aval apposé sur les billets à ordre émis le 14 juin 1988, la cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral.
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Quant aux relations avec les donneurs d'ordre, il est vrai qu'en matière de garanties bancaires, il existe en général un contrat de mandat entre ceux-ci et la banque (arrêt du Tribunal fédéral 4C.81/ 1996 du 7 novembre 1996, publié in SJ 1997 p. 245, consid. 4b; TEVINI DU PASQUIER, op. cit., n. 35 ad art. 111 CO). Toutefois, le litige n'oppose en l'espèce pas les deux sociétés donneuses d'ordre à la défenderesse, mais concerne les engagements émis par cette dernière à l'égard des bénéficiaires. Selon le principe de l'autonomie de la ![]() | 49 |
4.2 Les garanties bancaires peuvent se définir, de manière générale comme la promesse unilatérale de la banque d'assurer la disponibilité d'une certaine somme d'argent pour le cas où le bénéficiaire en ferait la demande selon sa convention avec le donneur d'ordre (TEVINI DU PASQUIER, op. cit., n. 36 ad art. 111 CO). Il faut distinguer principalement entre deux types de garanties, la garantie indépendante ou principale et la garantie dite accessoire (GUGGENHEIM, Les contrats de la pratique bancaire [ci-après: Les contrats], 4e éd., Genève 2000, p. 340; THÉVENOZ, Les garanties indépendantes devant les tribunaux suisses, in Journée 1994 de droit bancaire et financier, Berne 1994, p. 167 ss, 169). Dans le premier cas, la banque assure la prestation promise au créancier comme telle, indépendamment du contenu et de la validité de l'obligation découlant du rapport de base entre le bénéficiaire et le donneur d'ordre (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4C.19/1988 du 25 juillet 1988, publié in SJ 1988 p. 550, consid. 1a), alors que, lorsque la garantie est accessoire, la banque lie son obligation de paiement éventuelle à l'inexécution du contrat de base entre le donneur d'ordre et le bénéficiaire (GUGGENHEIM, Les contrats, p. 332; ZOBL, Die Bankgarantie im schweizerischen Recht, in Personalsicherheiten, Berne 1997, p. 23 ss, 33). En présence d'une garantie indépendante, le garant ne pourra soulever les exceptions ou objections pouvant résulter de la relation juridique entre le bénéficiaire de la garantie et son débiteur (contrat de base). Le bénéficiaire pourra rechercher le garant dès que les conditions posées par le texte de la garantie seront remplies (GUGGENHEIM, Les contrats, p. 341; ZOBL, op. cit., p. 26) et il pourra obtenir la prestation également dans l'hypothèse où la dette ![]() | 50 |
4.3 La distinction entre garantie principale et accessoire est délicate (GUGGENHEIM, Les contrats, p. 347; DOHM, op. cit., p. 58 n. 74). Si la réelle et commune intention des parties ne peut être établie, il convient d'interpréter l'engagement du garant conformément au principe de la confiance (art. 18 al. 1 CO), en se fondant en premier lieu sur le texte de la garantie (cf. ATF 113 II 434 consid. 2c p. 437 s.; ATF 111 II 284 consid. 2). La jurisprudence a mis en évidence certains critères permettant de différencier ces deux catégories de garantie, précisant qu'il faut toujours apprécier l'engagement dans son ensemble (ATF 117 III 76 consid. 6b p. 78 s.). Ainsi, le fait que la garantie ait été émise par une banque constitue un indice en faveur d'un engagement autonome (ATF 113 II 434 consid. 2c p. 438); il en va de même lorsque l'engagement se rapporte à un contrat international (arrêt 4C.19/1998 précité, publié in SJ 1988 p. 550, consid. 1b in fine); la référence au contrat de base ne permet pas à elle seule de conclure à l'existence d'un engagement accessoire (DOHM, op. cit., p. 60 n. 77), car la garantie indépendante n'est jamais totalement séparée du contrat de base, puisque, même dans ce cas, le bénéficiaire doit au moins alléguer l'inexécution (GUGGENHEIM, Les contrats, p. 347); quant à l'expression selon laquelle le garant s'est engagé "irrévocablement", elle n'est pas non plus à elle seule déterminante, dès lors qu'il s'agit d'une formule usuelle de la pratique bancaire et qu'elle ne saurait toujours être comprise dans le sens d'une renonciation à opposer les exceptions ou objections découlant du rapport de base (ATF 117 III 76 consid. 6b p. 78); le fait que le garant se soit engagé à payer "à première demande" (cf. sur cette notion ATF 119 II 132 consid. 5a/aa) constitue un indice en faveur de l'existence d'une garantie indépendante (ATF 117 III 76 ![]() | 51 |
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Si l'on cumule ces différents indices, ajouté au fait que ces garanties ont été émises dans le cadre de contrats internationaux, tout porte à admettre l'existence de garanties indépendantes. Cette appréciation est encore corroborée par la clause figurant dans la garantie du 1er septembre 1987 qui stipule qu'elle doit être considérée et interprétée comme une garantie bancaire, le garant n'étant pas en droit de soulever d'exception ou d'objection de quelque nature que ce soit. Examinant la nature des actes émis par la défenderesse, la Cour de céans, dans son arrêt du 20 août 1998, avait du reste déjà relevé qu'ils étaient similaires à ceux régulièrement assumés par des établissements bancaires ou par d'autres particuliers (ATF 124 III 382 consid. 4b p. 390).
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Par conséquent, en qualifiant ces engagements, sur la base des principes posés en matière bancaire, de garanties indépendantes à première demande, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral.
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4.5 Dès lors qu'il n'est pas contesté que les demanderesses n'ont pas reçu le remboursement des sommes mises à disposition dans le cadre de l'emprunt en faveur de C. SA et de E. SA et que la banque N. en a informé la défenderesse, cette dernière est tenue, ![]() | 55 |
Compte tenu de leur caractère autonome, ces garanties lient la défenderesse indépendamment de la validité des contrats de base, soit en l'occurrence des engagements financiers conclus entre C. SA et E. SA avec la banque N., en tant qu'agent des banques demanderesses. La défenderesse ne peut donc se prévaloir du fait que ces contrats seraient nuls, car ils auraient été signés par des personnes non habilitées à engager C. SA et E. SA.
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En l'espèce, l'arrêt attaqué ne contient pas d'élément concret permettant d'en conclure que l'appel à la garantie de la part des demanderesses serait abusif. La défenderesse n'invoque du reste pas expressément un abus de droit. Elle indique seulement que la banque N. aurait été de mauvaise foi, mais elle se fonde à ce sujet sur des faits qui n'ont pas été constatés par la cour cantonale, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'en tenir compte. Quant aux développements concernant le caractère manifestement faussé de tout le processus d'appel de fonds présentés dans le recours, ils ne méritent pas davantage que la Cour de céans s'y arrête, dès lors qu'il s'agit de critiques purement appellatoires dans lesquelles la défenderesse présente sa propre version des événements, en faisant abstraction de la décision entreprise, ce qui n'est pas admissible.
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5. En dernier lieu et à titre subsidiaire, la défenderesse reproche à la cour cantonale de n'avoir pas examiné la réduction des prétentions des demanderesses en application de l'art. 44 al. 1 CO, comme elle l'avait requis dans le cadre de la procédure d'appel. Elle estime à cet égard que les demanderesses n'auraient pas accompli tout ![]() | 59 |
L'art. 44 al. 1 CO permet au juge de réduire les dommages-intérêts, ou même n'en point allouer, notamment lorsque la victime n'a pas pris toutes les mesures commandées par les circonstances pour diminuer son dommage (WERRO, Commentaire romand, n. 26 ad art. 44 CO). Il ressort toutefois très clairement du texte de l'art. 44 CO que cette disposition ne s'applique qu'en cas de versement de dommages-intérêts, qu'ils soient délictuels ou contractuels (art. 99 al. 3 CO).
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Or, comme l'ont relevé pertinemment les demanderesses, lorsque le garant paie la garantie indépendante, il exécute sa propre obligation et ne verse pas des dommages-intérêts (DOHM, op. cit., p. 56 s. n. 70; LOMBARDINI, op. cit., p. 289 n. 3). Dans ces circonstances, l'art. 44 al. 1 CO ne peut entrer en considération, de sorte que le grief est dépourvu de tout fondement.
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