BGE 134 III 159 | |||
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29. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause Coopérative X. contre A. (recours en matière civile) |
4A_421/2007 du 28 janvier 2008 | |
Regeste |
Wohngenossenschaft; Mietvertrag; Anfechtung des Anfangsmietzinses. | |
Sachverhalt | |
A. Coopérative X. (ci-après: la Coopérative ou la bailleresse) est une société coopérative, au sens des art. 828 ss CO, qui a pour but de procurer à ses membres des logements à un prix raisonnable. A cet effet, elle a construit une série d'immeubles d'habitation sur des parcelles que l'Etat de Genève, propriétaire, a mises à sa disposition en constituant en sa faveur des servitudes personnelles de superficie. Les travaux ont été achevés au mois d'octobre 2005. Les logements ne sont pas subventionnés et leurs loyers ne sont pas soumis au contrôle de l'autorité administrative. Seul un rendement maximum a été imposé par l'Etat dans l'acte de superficie.
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Par contrat du 7 novembre 2005, la Coopérative a remis à bail à A. un appartement de quatre pièces sis au premier étage de l'un de ces immeubles. Le loyer annuel initial a été fixé à 22'200 fr., sans les charges. Lors de la conclusion du bail, la locataire a reçu un avis ad hoc, communiqué au moyen de la formule officielle, dans lequel figure la mention suivante: "Art. 269a lettre c) Le loyer actuel se situe, lorsqu'il s'agit de constructions récentes, dans les limites du rendement brut permettant de couvrir les frais".
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La locataire a souscrit des parts sociales de la Coopérative, à raison de 6'000 fr. chacune, pour un total de 24'000 fr.
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B. Le 13 janvier 2006, A. a saisi la Commission de conciliation d'une requête en contestation du loyer initial, qui visait à faire ramener ce loyer à 12'180 fr. par an, montant augmenté par la suite à 12'744 fr. La bailleresse a conclu au rejet de la requête. La tentative de conciliation a échoué.
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Saisi de l'affaire, le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève a rendu son jugement le 24 janvier 2007. Il a fixé le loyer annuel de l'appartement en cause à 13'800 fr., charges non comprises, et condamné la bailleresse à rembourser à la locataire le trop-perçu de loyer.
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La bailleresse a recouru contre ledit jugement. Par arrêt du 14 septembre 2007, la Chambre d'appel en matière de baux et loyers, après avoir annulé le prononcé de première instance, a fixé le loyer en question à 17'760 fr. par an, charges non comprises, dès le 16 novembre 2005, et ordonné, elle aussi, le remboursement des loyers perçus en trop. A l'instar des juges précédents, l'autorité d'appel a procédé à un calcul pour déterminer si le loyer litigieux se situait dans les limites du rendement brut permettant de couvrir les frais. Elle a estimé, comme eux, que tel n'était pas le cas, mais dans une moindre mesure.
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C. Agissant par la voie du recours en matière civile, la Coopérative invite le Tribunal fédéral à annuler l'arrêt cantonal, à dire que le loyer initial contesté s'élève à 22'200 fr. par an, charges non comprises, dès le 16 novembre 2005, et, partant, à débouter la locataire de toutes ses conclusions.
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Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
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Extrait des considérants: | |
3. La recourante ne critique pas les modalités du calcul de rendement effectué par la cour cantonale. En revanche, elle conteste l'applicabilité même des dispositions sur la protection contre les loyers abusifs (art. 269 ss CO) aux baux conclus par une société coopérative avec ses membres (coopérateurs-locataires). Il y a lieu d'examiner les arguments qu'elle fait valoir à l'appui de cette thèse. Le rejet de celle-ci scellerait le sort du recours, car le Tribunal fédéral ne reverrait pas le calcul opéré par les juges précédents pour fixer le loyer en cause, faute de tout grief à ce sujet.
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Erwägung 5 | |
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Qui plus est, permettre à certains associés d'invoquer ces dispositions, alors que d'autres se sont soumis à la décision de l'assemblée générale reviendrait, selon la recourante, à instaurer une inégalité de traitement entre les membres de la société coopérative et à violer, par là même, le principe cardinal ancré à l'art. 854 CO.
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La recourante rappelle, en outre, que le Tribunal fédéral a déjà jugé, à propos de la résiliation du bail d'un coopérateur-locataire, que les dispositions légales concernant la société coopérative l'emportaient sur les dispositions protectrices des art. 271 ss CO. Elle fait également sienne l'ancienne jurisprudence genevoise en la matière, qui appliquait le même principe à la fixation des loyers des coopérateurs-locataires.
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5.2 Avant d'examiner la pertinence des arguments ainsi résumés, il convient de relever d'emblée que la recourante n'est guère conséquente avec la thèse qu'elle défend, puisqu'elle a communiqué à l'intimée un avis de fixation du loyer initial établi sur la formule officielle prévue par l'art. 270 al. 2 CO, disposition dont elle soutient pourtant qu'elle serait inapplicable en l'espèce.
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Que le droit de la société coopérative offre au coopérateur-locataire une protection suffisante rendant superflu le recours aux dispositions protectrices des art. 269 ss CO est pour le moins discutable. D'une part, à supposer que la compétence de fixer les loyers ait été laissée à l'assemblée générale, le coopérateur-locataire, qui n'y a droit qu'à une seule voix (art. 885 CO), ne pourra guère influer sur la décision à prendre ni infléchir celle-ci dans un sens qui lui soit favorable. Concrètement, il n'aura pas la possibilité d'obtenir la réduction d'un loyer par hypothèse abusif, mais qu'une majorité d'associés ne considéreraient pas comme tel. D'autre part, le renvoyer à agir par la voie d'une action ordinaire en annulation de la décision prise par l'assemblée générale (art. 891 CO) reviendrait à le priver des avantages procéduraux dont le législateur a voulu faire bénéficier le locataire qui entend contester la fixation initiale ou subséquente de son loyer, qu'il s'agisse de la tentative de conciliation préalable obligatoire et gratuite (art. 274a al. 1 let. b et 274d al. 2 CO), de la durée du procès (art. 274d al. 1 CO) ou du principe de l'instruction d'office (art. 274d al. 3 CO).
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5.2.2 Le fait que certains coopérateurs-locataires contestent la fixation de leurs loyers respectifs tandis que d'autres s'en accommodent peut certes conduire à des situations inégalitaires, en ce sens que, pour la mise à disposition de deux appartements présentant les mêmes caractéristiques, un associé devra payer davantage qu'un autre. Toutefois, outre qu'elle repose sur une circonstance objective - l'inaction d'une partie -, une telle inégalité, d'ailleurs inhérente au système légal de la contestation du loyer, n'implique pas une violation du principe d'égalité de traitement des membres d'une société coopérative (art. 854 CO) parce qu'elle ne résulte pas d'une décision prise par les organes de la société, mais du comportement adopté par certains associés (URS ENGLER, Die Wohngenossenschaft im Mietrecht, Zurich 1996, n. 99). Partant, cet état de choses ne constitue pas un motif suffisant pour exclure la coopérative d'habitation du champ d'application des art. 269 ss CO. Le recours à ces dispositions est, en particulier, le seul que l'on puisse envisager dans l'hypothèse où la coopérative, tout en traitant ses membres sur un pied d'égalité et en respectant formellement ses statuts, leur impose à tous le paiement de loyers qui lui procurent un rendement excessif de la chose louée.
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A l'inverse, on peut imaginer qu'une coopérative d'habitation fixe des loyers non abusifs, et donc valables au regard des art. 269 ss CO, mais en n'assurant pas un traitement égal à ses membres. Dans ce cas de figure, les mécanismes légaux ou statutaires permettant de contester semblable décision, incompatible avec l'art. 854 CO, pourraient être mis en oeuvre par les associés victimes de l'inégalité de traitement (sur cette question, cf. ENGLER, op. cit., n. 100 et note 143 avec d'autres références).
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La coexistence de deux rapports de droit autonomes peut cependant générer des interférences. Il en va ainsi en cas de résiliation du bail
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par la coopérative d'habitation. En effet, la rupture unilatérale du lien contractuel, qui entraîne la suppression du droit d'usage du coopérateur-locataire contre la volonté de ce dernier, équivaut pratiquement à l'exclusion de la société coopérative. Il se justifie, dès lors, de soumettre ces deux actes juridiques à des conditions identiques, car la possibilité de résilier librement le bail serait incompatible avec le système de la coopérative d'habitation. Aussi le congé donné à un coopérateur-locataire n'est-il en principe admissible que pour des motifs statutaires ou de justes motifs (ATF 118 II 168 consid. 3b/aa et les références).
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Il n'y a, en revanche, pas de raison de priver le coopérateur-locataire de la protection contre les loyers abusifs, sauf à admettre que la spécificité de sa situation juridique, liée au rapport corporatif, serait un argument suffisant pour le contraindre à accepter de payer un loyer excessif. Que cette spécificité puisse jouer un rôle dans la fixation du loyer, du fait notamment du but assigné à une coopérative d'habitation et de l'exigence de l'égalité de traitement des associés, n'est certes pas contestable (cf.Ruedin, op. cit., p. 14 s., n. 3.3;Engler, op. cit., p. 49 ss; DAVID LACHAT, Le bail à loyer, p. 60, n. 3.6). Qu'elle puisse laisser le coopérateur-locataire démuni face à des pratiques abusives de la bailleresse n'est, toutefois, pas admissible.
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En fondant son argumentation sur l'arrêt précité du 24 avril 1995, la recourante ne tient pas compte de cette évolution de la jurisprudence genevoise dans le domaine considéré. De toute façon, s'il fallait interpréter la jurisprudence actuelle des autorités judiciaires genevoises
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5.2.6 On relèvera, pour terminer, que la solution donnée ici au problème litigieux correspond à celle que préconisent quasi unanimement les auteurs qui se sont penchés sur la question (Lachat, op. cit., p. 60, note 87; le même , Le nouveau droit du bail à loyer - La protection contre les loyers abusifs et les autres prétentions abusives du bailleur, in 6e Séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 1990, p. 7, n. 2.2.4; David Lachat/Daniel Stoll/Andreas Brunner, Das Mietrecht für die Praxis, 4e éd., p. 31, note 96;Peter Higi, Commentaire zurichois, n. 31, 39 et 90 des Remarques préliminaires aux art. 269-270e CO;Ruedin, op. cit., p. 14, n. 3.3 et note 62;Engler, op. cit., n. 129; Marie-Claire Jeanprêtre, in Droit du bail 1992 n° 28, p. 26, n. 5 et 1997 n° 11, p. 16 s., n. 6;Susy B. Moser, Wohnbaugenossenschaften, thèse Zurich 1978, p. 70, n. 4 et note 108;Sébastien Fetter, La contestation du loyer initial, thèse Berne 2005, p. 53 s., n. 114 et note 273; d'un autre avis, mais sans être catégorique:Richard Barbey, L'arrêté fédéral instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif, p. 18, note 42a; le même , Pratique récente en matière d'AMSL, in 5e Séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 1988, p. 4, n. 3 [voir aussi mp 1988 p. 131 ss, 132, n. 3]). Certains auteurssoulignent, d'ailleurs, que l'art. 13 al. 3 OBLF (RS 221.213.11), qui permet au bailleur calculant exclusivement et durablement le loyer en fonction des coûts effectifs de répercuter sur le loyer l'augmentation de ses charges financières relatives à l'ensemble du capital investi, a étéconçu au premierchef pour les coopératives d'habitation(Lachat, Le bail à loyer, p. 60, note 87, et p. 310, n. 3.2.6;Engler, op. cit., n. 108 s.; JEANPRÊTRE, ibid.).
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5.3 Il suit de là que les juges genevois n'ont pas violé le droit fédéral en examinant la validité du loyer initial contesté au regard des dispositions légales visant à protéger le locataire contre les loyers abusifs. Cette constatation suffit à justifier le rejet du recours, étant donné que la manière dont lesdites dispositions ont été appliquées par la cour cantonale n'est pas remise en cause par la recourante.
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