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31. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. SA contre Y. BV (recours en matière civile) |
4A_582/2009 du 13 avril 2010 | |
Regeste |
Art. 183 IPRG; internationale Schiedsgerichtsbarkeit; vorsorgliche Massnahmen. | |
Sachverhalt | |
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A.a Y. BV (ci-après: Y.), société de droit néerlandais, est titulaire des droits d'exploitation exclusifs de la marque A. (ci-après: la marque) pour des vêtements. En novembre 2005, X. SA (ci-après: X.), société de droit suisse, a repris d'un tiers l'exploitation de magasins à l'enseigne A., ainsi que la fabrication et la distribution des vêtements portant la marque. Elle a sollicité de Y. la conclusion d'un nouveau contrat de licence d'exploitation de la marque à compter du 1er janvier 2006. Les deux sociétés ont alors entamé des discussions qui se sont avérées difficiles.
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A.b Dès la fin juillet 2008, des problèmes d'exécution du contrat de licence ont divisé les parties, qui ont tenté de les régler.
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Par lettre recommandée du 26 janvier 2009, Y. a notifié à X. la résiliation du contrat pour violation grave des obligations en découlant. Contestant toute violation du contrat, la société suisse a cependant décidé d'accepter la résiliation de celui-ci avec effet au 31 janvier 2009, mais en formulant des réserves expresses quant à l'indemnisation du préjudice que la situation engendrait pour elle.
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La mise en oeuvre de la procédure prévue à l'art. 16 du contrat pour la liquidation des rapports entre les parties a donné lieu à des difficultés. Y. reprochait à X. de chercher à écouler son stock en dehors du réseau de distribution sélectif, tandis que celle-ci faisait grief à celle-là de l'empêcher de vendre son stock.
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Y. a fait part à X. de sa volonté de reprendre la totalité du stock d'articles A. restant en sa possession. Par lettre du 31 juillet 2009, elle a formulé une offre amiable chiffrée se montant à 1'080'005,45 euros en ajoutant qu'elle se remettait d'avance au dire d'un expert si cette offre n'était pas acceptée. X. lui a répondu, le 1er septembre 2009, qu'elle ne pouvait pas y donner suite car elle avait la possibilité de négocier le stock à un prix se situant entre 3'163'474,93 euros et 4'519'249,90 euros.
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B.
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B.a En date du 3 août 2009, X. a adressé au Centre d'arbitrage et de médiation de l'OMPI (ci-après: le Centre) une demande de dommages-intérêts pour inexécution et rupture abusive du contrat de licence ainsi qu'une requête de mesures provisoires. Sur le fond, elle a conclu, en substance, à la constatation de la nullité de la résiliation du contrat de licence, à la condamnation de Y. au paiement de dommages-intérêts arrêtés à 4'679'588,30 euros et d'une indemnité pour tort moral, de même qu'à la compensation avec les créances de son adverse partie. Quant aux conclusions relatives aux mesures provisoires, elles tendaient, d'une part, à ce qu'interdiction fût faite à Y. d'entraver, par quelque moyen que ce fût, les démarches entreprises par X. pour vendre le stock en sa possession et, d'autre part, à ce que la requérante fût autorisée à écouler son stock, dans son état au 28 juillet 2009, par tous canaux et moyens de vente au-delà du 31 juillet 2009.
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Par lettre du 19 août 2009, le Centre a notifié aux parties la désignation de Me T., avocat, comme arbitre unique.
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Le 20 août 2009, Y. a adressé au Centre une réponse à la requête de X. ainsi qu'une demande reconventionnelle en dommages-intérêts non chiffrée, pour inexécution du contrat de licence, accompagnée d'une demande de mesures provisoires. Par ces dernières, la requérante entendait obtenir, entre autres choses, la cession ou la consignation du stock de produits A. jusqu'au prononcé de la sentence arbitrale.
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B.b L'arbitre unique a tenu, le 18 septembre 2009 à Genève, une audience consacrée aux requêtes de mesures provisoires formulées par les parties. Après quoi, le 7 octobre 2009, il a rendu une "sentence préliminaire" dans le dispositif de laquelle il a, notamment, enjoint à X. de céder à Y. le stock de produits A. en sa possession, fixé les modalités des opérations de cession et ordonné à Y. de payer à X. la somme provisoire de 1'080'005,45 euros.
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C. Le 20 novembre 2009, X. a formé un recours en matière civile. Reprochant à l'arbitre unique d'avoir statué extra petita (art. 190 al. 2 let. c LDIP), d'avoir violé son droit d'être entendue en procédure contradictoire (art. 190 al. 2 let. d LDIP) et d'avoir rendu une ![]() | 14 |
Dans sa réponse du 11 janvier 2010, Y. a conclu principalement à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement, au rejet de celui-ci.
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Le Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable.
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(résumé)
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Extrait des considérants: | |
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Le cas des décisions sur mesures provisionnelles, visées par l'art. 183 LDIP, n'a pas encore été examiné par le Tribunal fédéral à ce jour. Il est cependant unanimement admis dans la doctrine - à juste titre -que le recours en matière civile n'est pas recevable contre de telles décisions, car elles ne constituent ni des sentences finales, ni des sentences partielles, ni des sentences préjudicielles ou incidentes(BERGER/KELLERHALS, Internationale und interne Schiedsgerichtsbarkeit in der Schweiz, 2006, nos 1157 et 1539; KAUFMANN-KOHLER/RIGOZZI, Arbitrage international, 2006, n° 721; BERNARD DUTOIT, Droit international privé suisse, Commentaire de la loi fédérale du 18 décembre 1987, 4e éd. 2005, n° 2 i.f. ad art. 183 LDIP; POUDRET/BESSON, Comparative Law of International Arbitration, 2e éd. 2007, n° 622 p. 533; RÜEDE/HADENFELDT, Schweizerisches Schiedsgerichtsrecht, ![]() | 21 |
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Les mesures provisionnelles ou provisoires (vorsorgliche Massnahmen ou einstweilige Verfügungen) sont les mesures qu'une partie peut requérir pour la protection provisoire de son droit pendant la durée du procès au fond et, dans certains cas, avant même l'ouverture de celui-ci (FABIENNE HOHL, Procédure civile, vol. II, 2002, n° 2776). Encore qu'il existe un grand nombre de distinctions et de classifications, en raison de la nature même de cette institution juridique (BESSON, op. cit., n° 38 p. 39), la doctrine classe généralement les mesures provisionnelles en trois catégories, en fonction de leur but: les mesures conservatoires (Sicherungsmassnahmen), qui visent à maintenir l'objet du litige dans l'état où il se trouve pendant toute la durée du procès; les mesures de réglementation (Regelungsmassnahmen), qui règlent un rapport de droit durable entre les parties pour la durée du procès; les mesures d'exécution anticipée provisoires (Leistungsmassnahmen) - elles peuvent avoir pour objet soit des prestations en argent, soit d'autres obligations de faire ou des obligations de s'abstenir -, qui tendent à obtenir à titre provisoire, en tout ou en partie, l'exécution de la prétention au fond litigieuse (cf., parmi d'autres, HOHL, op. cit., n° 2777).
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La dernière de ces trois catégories de mesures provisoires trouve son fondement dans la constatation qu'une modification du droit ![]() | 24 |
2.3.3 Pour juger de la recevabilité du recours, ce qui est déterminant n'est pas la dénomination du prononcé entrepris, mais le contenu de celui-ci (arrêt 4A_600/2008 du 20 février 2009 consid. 2.3). La qualité de sentence ne dépend donc pas de la terminologie utilisée par l'arbitre, si bien qu'il ne suffit pas de baptiser de sentence une ordonnance de mesures provisoires pour en faire un objet de recours au sens de l'art. 190 LDIP (cf. BESSON, op. cit., n° 483; FRANÇOIS KNOEPFLER, Les mesures provisoires peuvent-elles être rendues sous forme de sentence arbitrale?, in Mélanges en l'honneur de Henri-Robert Schüpbach, 2000, p. 287; JEAN-FRANÇOIS POUDRET, Les mesures provisionnelles et l'arbitrage: aperçu comparatif des pouvoirs respectifs de l'arbitre et du juge, in Mélanges en l'honneur de François Knoepfler, 2005, p. 235 ss, 248). La solution consistant à qualifier de sentence une décision sur mesures provisoires est, au demeurant, dangereuse, car elle crée une situation pleine d'insécurité (pour plus de détails, cf. KNOEPFLER, op. cit., p. 286). Il en va notamment ainsi de la qualification de sentence partielle qui est propre à donner l'impression, erronée, que le tribunal arbitral a tranché définitivement une partie ![]() | 25 |
Erwägung 2.3.4 | |
2.3.4.1 La recourante fait grand cas de la lettre que l'arbitre unique a adressée aux parties, le 2 octobre 2009, pour les informer de la clôture des débats concernant les demandes de mesures provisoires. Elle cite, en particulier, le passage suivant de cette missive: "La sentence arbitrale partielle concernant celles-ci vous sera notifiée dans les tout prochains jours" (terme mis en évidence par la Cour de céans). Cependant, pareille qualification n'est nullement déterminante pour décider de la nature de la décision entreprise, comme on l'a indiqué plus haut, pas plus que ne l'est celle de "sentence préliminaire" figurant sur la première page de la décision motivée que le Centre a notifiée aux parties.
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2.3.4.2 Pour conclure à l'existence d'une sentence partielle, la recourante fait valoir, en outre, que les ordres donnés aux parties par l'arbitre dans la décision litigieuse n'ont pas un caractère conservatoire ou provisoire, puisqu'ils l'obligent à transférer à l'intimée, de manière définitive et irréversible, le stock de vêtements en sa possession, c'est-à-dire à opérer un transfert de propriété de ces choses mobilières. Critiquant, de surcroît, les modalités de cette cession forcée, l'intéressée en déduit que la décision en cause ne tend ni à la conservation ni à la préservation de la situation jusqu'à droit connu sur l'issue de la procédure arbitrale, mais vide définitivement une partie du litige au fond, si bien qu'elle doit être qualifiée de sentence partielle. Plaiderait enfin pour cette thèse, toujours selon la recourante, le fait qu'il serait impensable qu'elle attende la fin du procès arbitral pour recourir contre l'ordre de cession du stock.
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Cette argumentation n'est pas pertinente. Elle restreint, en effet, l'objet des mesures provisionnelles à l'une des trois catégories susmentionnées, ignorant l'existence des deux autres. Or, c'est bien dans la catégorie des mesures d'exécution anticipée provisoires ou dans celle des mesures de réglementation, voire dans les deux, qu'il convient de ranger l'ordre donné à la recourante de céder le stock de vêtements à l'intimée.
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Pour le surplus, le texte même de la décision querellée fait ressortir clairement la volonté de l'arbitre unique de ne trancher définitivement aucune des prétentions des parties. Sous ch. 17 et 18, l'arbitre unique rappelle les limites de sa mission, à savoir le traitement des ![]() | 29 |
Au demeurant, la recourante ne démontre pas, quoi qu'elle en dise, que la question de la propriété du stock, sinon celle de la valeur de celui-ci, ait formé l'un des objets du litige au fond. Rien de tel ne peut, en tout cas, être déduit des conclusions ad hoc prises par elle dans ses écritures des 3 août et 14 septembre 2009 (cf. let. B.a ci-dessus).
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2.3.5 Dirigé, non pas contre une sentence, mais contre une décision de mesures provisionnelles au sens de l'art. 183 LDIP, le présent recours est, dès lors, irrecevable. Aussi n'est-il pas possible d'entrer en matière sur ses conclusions, qu'elles tendent à l'annulation de ladite décision ou à la constatation de sa nullité.
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