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Informationen zum Dokument  BGE 144 III 407  Materielle Begründung
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Regeste
Sachverhalt
Extrait des considérants:
Erwägung 4
Erwägung 4.2
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49. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A. contre Banque B. et Office des poursuites et faillites du district de Sierre (recours en matière civile)
 
 
5A_926/2017 du 6 juin 2018
 
 
Regeste
 
Art. 2 Abs. 2 ZGB; Art. 92 Abs. 1 Ziff. 9a SchKG; Unpfändbarkeit der AHV-Renten; Rechtsmissbrauch.  
 
Sachverhalt
 
BGE 144 III, 407 (407)A. A. (1947) est la femme de B. (1943); les conjoints sont séparés de biens. L'épouse perçoit une rente AVS de 1'727 fr. par mois; son mari bénéficie mensuellement d'une rente AVS de 1'638 fr., ainsi que d'une rente LPP de 6'406 fr. 85.
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B. En janvier 2017, la Banque B. a requis une poursuite à l'encontre de A., en paiement de la somme de 57'609 fr. 20. Cette poursuite a abouti à la délivrance d'un acte de défaut de biens pour la somme de 58'324 fr. 95 (...); cet acte - procès-verbal de saisie au sens de BGE 144 III, 407 (408)l'art. 115 al. 1 LP - mentionne que la poursuivie n'a pour unique revenu que sa rente AVS, qui est insaisissable, et ne possède pas d'autres biens saisissables.
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Le 10 juillet 2017, la poursuivante a porté plainte contre l'acte de défaut de biens précité, concluant à ce que la rente AVS de la poursuivie soit saisie (au minimum) à concurrence de 950 fr. 05 par mois. Statuant le 12 septembre 2017, le Tribunal du district de Sierre a admis la plainte et invité l'Office des poursuites à déclarer saisissable la rente AVS de l'intéressée. Par décision du 8 novembre 2017, l'Autorité supérieure en matière de plainte LP du Tribunal cantonal valaisan a rejeté le recours de la poursuivie. (...)
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Le Tribunal fédéral a admis le recours en matière civile formé par la poursuivie et déclaré insaisissable sa rente AVS.
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(extrait)
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Extrait des considérants:
 
 
Erwägung 4
 
4.1 Après avoir admis que l'insaisissabilité absolue des prestations du premier pilier (art. 92 al. 1 ch. 9a LP) peut se heurter à l'interdiction de l'abus de droit, le magistrat cantonal a constaté que la débitrice et son époux réalisent des revenus mensuels totaux de 9'771 fr. 85, à savoir 117'262 fr. 20 par année. Ils jouissent d'un usufruit gratuit et viager sur une unité d'étage leur permettant de disposer d'un "triplex" (avec cave et place de parc dans un garage); le mari est encore propriétaire d'une voiture. Ces éléments sont des indices d'un "train de vie élevé", notion qui ne doit pas recevoir une interprétation trop stricte compte tenu du but de l'insaisissabilité de la rente AVS, à savoir de permettre à son bénéficiaire de "couvrir ses besoins vitaux", et non de lui "permettre de vivre dans l'aisance". Les charges du couple s'élèvent à 7'656 fr. 75 par mois, de sorte qu'il subsiste un disponible mensuel de 2'115 fr. 10 ; dès le mois de mars 2019, lorsque le mari aura réglé ses arriérés d'impôts, ce disponible sera même de 3'365 fr. 10. Comme les époux disposent d'un solde "très confortable", après paiement de leurs charges, il faut admettre que le "train de vie est élevé", la débitrice profitant des hauts revenus de son époux, lesquels représentent la plus grande partie des ressources du couple. C'est dès lors à juste titre que le premier juge a estimé que l'invocation de l'insaisissabilité absolue relevait de l'abus de droit et que, par conséquent, l'Office devait déclarer saisissable la rente litigieuse.
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BGE 144 III, 407 (409)Erwägung 4.2
 
4.2.1 Conformément à l'art. 92 al. 1 ch. 9a LP, sont insaisissables, en particulier, les rentes au sens de l'art. 20 LAVS. Cette norme déroge au principe selon lequel des prestations destinées à remplacer un revenu sont relativement insaisissables en vertu de l'art. 93 LP; le législateur a en effet estimé que, aussi longtemps que les prestations du premier pilier n'atteindraient pas leur but, c'est-à-dire couvrir les besoins vitaux dans une mesure appropriée, elles devaient être déclarées absolument insaisissables (ATF 135 III 20 consid. 4.1 et les citations). En principe, cette solution est aussi valable en cas de dépassement du minimum vital par suite du cumul de plusieurs prestations différentes absolument insaisissables, voire d'une seule prestation de cette nature; de telles prestations échappent ainsi à la mainmise des créanciers, quand bien même elles excéderaient le minimum vital du débiteur et de sa famille (ATF 143 III 385 consid. 4.2; ATF 135 III 20 consid. 5.1; 78 III 113 [pour les allocations familiales; art. 92 al. 1 ch. 9a in fine LP]).
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4.2.2 Dans son Message du 8 mai 1991 relatif à la révision de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, le Conseil fédéral a évoqué la situation où le débiteur invoque l'insaisissabilité absolue du premier pilier qui représente son unique source de revenu "accessible" ("du fait, par exemple, (...) que l'ayant droit n'est associé qu'en fait au niveau de vie élevé de son conjoint"); en pareil cas, le créancier peut se prévaloir de l'interdiction de l'abus de droit au sens de l'art. 2 al. 2 CC, car "les règles de l'insaisissabilité absolue sont également soumises au principe de la bonne foi" (FF 1991 III 89). La jurisprudence s'est ralliée expressément à cet avis (ATF 135 III 20 consid. 5.1; arrêts 5A_14/2007 du 14 mai 2007 consid. 3.1; 7B.208/2005 du 5 janvier 2006 consid. 3; dans ce sens: OCHSNER, in Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 161 ad art. 92 LP). On ne peut dès lors suivre la recourante lorsqu'elle conteste - en se référant à une opinion minoritaire (VONDER MÜHLL, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, vol. I, 2 e éd. 2010, n° 37 ad art. 92 LP) - le principe même d'un abus de droit dans la présente configuration.
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4.2.3 Le moyen pris de l'abus de droit ne vise pas à écarter de façon générale l'application de normes juridiques à certaines situations, mais invite le juge à tenir compte des particularités de l'espèce lorsque, en raison des circonstances, l'application ordinaire de la loi ne se concilie pas avec les règles de la bonne foi (ATF 134 III 52 BGE 144 III, 407 (410)consid. 2.1 et 390 consid. 4.3.3, avec les références citées dans ces arrêts). De surcroît, l'abus de droit n'est réprouvé que s'il est "manifeste", de sorte qu'il doit être admis restrictivement (ATF 143 III 666 consid. 4.2, avec les arrêts cités). Le Tribunal fédéral ne dit pas autre chose lorsqu'il conclut à un comportement abusif du débiteur qui mène un "grand train de vie" grâce aux revenus ou à la fortune de son conjoint, alors qu'il n'est lui-même au bénéfice que de ressources totalement insaisissables sous l'angle de l'art. 92 al. 1 ch. 9a LP (arrêt 5A_14/2007 précité).
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Le cumul des prestations absolument insaisissables, en application de l'art. 92 al. 1 ch. 9a LP, perçues par les deux époux n'aboutit pas à un détournement "abusif" du bénéfice de l'insaisissabilité; ces allocations totalisent en effet la somme de 3'365 fr. par mois, répartie de manière à peu près équivalente entre eux ( 1'727 fr. /épouse - 1'638 fr. /mari). S'il profitait à un même débiteur, un tel cumul ne serait pas prohibé - ce que reconnaît, par ailleurs, la jurisprudence (cf. supra, consid. 4.2.1) -, "même s'il aboutit à laisser au débiteur bien plus que le minimum vital" (MARVILLE, Exécution forcée, responsabilité patrimoniale et protection de la personnalité, 1992, p. 214, avec les références en n. 125); il n'en va pas autrement lorsqu'il s'applique au débiteur et à son conjoint, car ces deux rentes poursuivent le même but, à savoir couvrir les besoins essentiels de chacun des bénéficiaires (cf. supra, consid. 4.2.1).
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En plus de comprendre des prestations insaisissables - totalement et partiellement -, le disponible de 2'115 fr. 10 par mois dont bénéficie le couple n'apparaît nullement "très confortable", au point de permettre à celui-ci de mener un "train de vie élevé". Certes, lors de la fixation du minimum vital du droit des poursuites - contrairement à ce qui est le cas pour l'aide sociale -, "c'est l'intérêt du créancier à recouvrer son dû qui prime l'intérêt du débiteur" (OCHSNER, Le minimum vital, SJ 2012 II p. 122, qui se réfère à un avis du Conseil BGE 144 III, 407 (411)fédéral du 20 mai 2009), de sorte qu'on peut souscrire à l'avis du magistrat précédent selon lequel la notion d'"aisance" ne doit pas être interprétée extensivement et ne correspond pas, en particulier, à l'acception qu'elle recouvre à l'art. 328 al. 1 CC (cf. KOLLER, in Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch, vol. I [Art.1-456], 5e éd. 2014, nos 15 ss ad art. 328/329 CC, avec les citations). Néanmoins, la décision attaquée consacre une vision exagérément large de l'abus de droit. Il ressort des faits constatés par la juridiction cantonale (art. 105 al. 1 LTF) que la recourante ne possède aucun bien saisissable et que son époux ne dispose, en plus des rentes énumérées précédemment, que d'une "voiture", dont on ne saurait sérieusement prétendre qu'elle participerait du "train de vie élevé" de la recourante. Si les intéressés occupent un "triplex", dont les caractéristiques ne ressortent d'ailleurs pas de l'arrêt attaqué, ils s'acquittent d'un montant de 1'448 fr. 20 pour leurs "frais de logement" (charges hypothécaires, charges de la PPE et frais de chauffage), ce qui correspond au loyer qui leur eût incombé en tant que locataires et qui n'apparaît pas excessif.
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En définitive, à la lumière de la jurisprudence (cf. supra, consid. 4.2.3), on ne peut dire que la recourante, grâce aux revenus de son conjoint, mène un "grand train de vie", au point que l'insaisissabilité absolue de sa rente AVS contrevient manifestement aux règles de la bonne foi au sens de l'art. 2 al. 2 CC.
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