BGE 145 III 20 | |||
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4. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A. contre B. (recours en matière civile) |
5A_1017/2017 du 12 septembre 2018 | |
Regeste |
Art. 82 SchKG; provisorische Rechtsöffnung und Kaufvertrag. | |
Sachverhalt | |
A. B. et A. ont signé, le 4 octobre 2014, une convention ayant pour objet la remise à B. du portefeuille clientèle acquis par A. dans le cadre de son activité avec la société C. Sàrl. Il était notamment prévu, d'une part, que B. verserait un montant de 600'000 fr. dont 200'000 fr. devaient être payés au plus tard le 31 janvier 2015 et le solde pour le 20 juin 2016 au plus tard et, d'autre part, qu'une nouvelle société (par ex. D. Sàrl) serait créée ou, éventuellement, la société C. rachetée.
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La société D. Sàrl a été inscrite au Registre du commerce du canton de Vaud le 24 novembre 2014. B. en était l'associé gérant avec signature individuelle.
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La première tranche de 200'000 fr. a fait l'objet de plusieurs versements au printemps 2016.
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B. Le 15 mars 2017, sur requête de A., l'Office des poursuites du district d'Aigle a notifié à B. un commandement de payer (poursuite n° x) la somme de 400'000 fr., plus intérêts à 5 % l'an dès le 30 juin 2016. Etait invoqué comme titre de la créance ou cause de l'obligation: "Convention du 4 octobre 2014. Codébiteur solidaire avec D. Sàrl".
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Le poursuivi a formé opposition totale.
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Le 10 août 2017, le Juge de paix du district d'Aigle a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition à concurrence de 400'000 fr., plus intérêts à 5 % dès le 1er juillet 2016.
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Par arrêt du 13 novembre 2017, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud, statuant en sa qualité d'autorité de recours en matière sommaire de poursuites, a admis le recours interjeté le 24 août 2017 par le poursuivi et maintenu l'opposition formée par ce dernier au commandement de payer.
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C. Le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours de A. qui tendait principalement à la confirmation du jugement de première instance.
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(résumé)
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Extrait des considérants: | |
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4. Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir refusé la mainlevée provisoire, motif pris qu'il n'avait pas suffisamment établi la preuve de l'exécution de sa prestation. Se plaignant d'une constatation arbitraire (art. 9 Cst.) des faits et d'une violation de l'art. 82 LP, il soutient en substance que, dans le cadre de la procédure de mainlevée provisoire, le créancier poursuivant n'a pas d'autre preuve à fournir qu'une reconnaissance de dette, le débiteur poursuivi étant quant à lui tenu de rendre vraisemblable par titre que celui-là ne s'est "pas correctement acquitté de sa prestation". Il affirme qu'en l'espèce, l'intimé n'a pas fourni cette preuve dès lors qu'il résulte de la "lecture" de la convention que la remise du portefeuille "était prestée dès la signature" de ce document, respectivement dès sa collaboration dans la nouvelle société, et que la première tranche du prix de vente a été versée, "signe" que la clientèle - "essence même de la création de la nouvelle société" - avait été transmise.
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Erwägung 4.1 | |
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Constitue une reconnaissance de dette au sens de cette disposition, en particulier, l'acte sous seing privé, signé par le poursuivi - ou son représentant (ATF 132 III 140 consid. 4.1.1 et les arrêts cités) -, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et exigible (ATF 139 III 297 consid. 2.3.1 et la jurisprudence mentionnée).
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Un contrat écrit justifie en principe la mainlevée provisoire de l'opposition pour la somme d'argent incombant au poursuivi lorsque les conditions d'exigibilité de la dette sont établies (arrêt 5A_465/2014 du 20 août 2014 consid. 7.2.1.2) et, en particulier dans les contrats bilatéraux, lorsque le poursuivant prouve avoir exécuté les prestations dont dépend l'exigibilité (arrêt 5A_367/2007 du 15 octobre 2007 consid. 3.1 et les références). Un contrat bilatéral ne vaut ainsi reconnaissance de dette que si le poursuivant a rempli ou garanti les obligations légales ou contractuelles exigibles avant le paiement dont il requiert le recouvrement, ou au moment de ce paiement (GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, vol. I, 1999, n° 45 ad art. 82 LP), c'est-à-dire s'il a exécuté ou offert d'exécuter sa propre prestation en rapport d'échange (cf. ATF 116 III 72; cf. arrêt 5A_326/2011 du 6 septembre 2011 consid. 3.3 [prêt]). Plus particulièrement, un contrat de vente ordinaire constitue un titre de mainlevée provisoire pour le montant du prix échu pour autant que la chose vendue ait été livrée ou consignée lorsque le prix était payable d'avance ou au comptant (cf. arrêts 5A_630/2010 du 1er septembre 2011 consid. 2.1; 5P.247/2004 du 14 octobre 2004 consid. 2; GILLIÉRON, op. cit., n° 46 ad art. 82 LP).
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4.1.2 Conformément à l'art. 82 al. 2 LP, le poursuivi peut faire échec à la mainlevée en rendant immédiatement vraisemblable sa libération. Il peut se prévaloir de tous les moyens de droit civil - exceptions ou objections - qui infirment la reconnaissance de dette (ATF 142 III 720 précité). Il n'a pas à apporter la preuve absolue (ou stricte) de ses moyens libératoires, mais seulement à les rendre vraisemblables, en principe par titre (art. 254 al. 1 CPC; ATF 142 III 720 consid. 4.1 et les arrêts cités).
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4.3.1 Plusieurs pratiques se sont développées en la matière. La pratique bâloise (Basler Rechtsöffnungspraxis) - la plus couramment suivie par les tribunaux cantonaux - admet qu'un contrat bilatéral justifie la mainlevée provisoire lorsque le poursuivi ne prétend pas que la contre-prestation n'a pas été exécutée ou n'a pas été correctement exécutée, quand il prétend que la contre-prestation n'a pas été exécutée ou n'a pas été correctement exécutée, mais que cette contestation apparaît manifestement sans consistance ou que le créancier prouve qu'il a accompli ce qui lui incombait et, enfin, lorsque le poursuivi doit s'exécuter le premier en vertu du contrat (STAEHELIN, in Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, vol. I, 2e éd. 2010, n° 99 ad art. 82 LP, qui se réfère à une preuve par titre; VEUILLET, in La mainlevée de l'opposition, 2017, n° 145 ad art. 82 LP, pour laquelle la preuve doit être "immédiate"). D'autres exigent du poursuivi qu'il rende vraisemblable seulement l'exécution qualitativement défectueuse, voire tant cette dernière que l'inexécution (pour un résumé de ces tendances: cf. arrêts 5P.69/2004 du 14 avril 2004 consid. 3 et l'auteur cité; 5P.314/2002 du 21 janvier 2003 consid. 2.2, in Pra 2003 n. 92 p. 161; P.739/1986 du 13 octobre 1986 consid. 3 et les références, résumé in Rep 1987 p. 149 ss; VOCK, in SchKG, Kurzkommentar, vol. 2, 2014, n° 19 ad art. 82 LP; MÜLLER/VOCK, Behauptungs-, Bestreitungs- und Substantiierungslast im Rechtsöffnungsverfahren, ZZZ 38/2016 p. 130 ss, spéc. p. 135 in fine et ss; MUSTER, La reconnaissance de dette abstraite, Art. 17 CO et 82 ss LP: Etude historique et de droit actuel, 2004, p. 214 avec la note 1127; RtiD 2015 II n. 60c p. 901 ss et RtiD 2012 I n. 52c p. 981 qui semblent toutefois augurer une nouvelle pratique dans le canton du Tessin).
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Sous l'empire de l'ancienne loi fédérale d'organisation judiciaire (OJ), le Tribunal fédéral, qui était alors saisi sur recours de droit public et statuait sous l'angle de l'arbitraire, n'a jamais tranché cette controverse (pour un rappel de cette jurisprudence: arrêt 5A_1008/2014 du 1er juin 2014 consid. 3.4.1, in BlSchK 2016 p. 91). Il a plus particulièrement laissé ouverte la question de savoir si le débiteur poursuivi doit rendre vraisemblable l'exception d'inexécution (arrêts 5P.314/2002 du 21 janvier 2003 consid. 2.2, in Pra 2003 n. 92 p. 161; P.739/1986 du 13 octobre 1986 consid. 3 et les références, résumé in Rep 1987 p. 149 ss) et n'a pas taxé d'arbitraire la pratique consistant à différencier le cas où le débiteur poursuivi invoque les droits à la garantie ["Gewährleistungsrechte"] de celui où il se fonde sur le droit de refuser la prestation au sens de l'art. 82 CO ["Leistungsverweigerungsrecht"] (arrêt 5P.69/2004 du 14 avril 2004 consid. 3).
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Depuis l'entrée en vigueur de la loi sur le Tribunal fédéral (LTF), il a jugé que la mainlevée provisoire fondée sur un contrat synallagmatique doit être prononcée si le débiteur qui fait valoir un défaut soumis à un avis ne rend pas vraisemblable qu'il a donné cet avis dans le délai (arrêts 5A_630/2010 et 5A_631/2010 du 1er septembre 2011 consid. 2.2, in Pra 2012 n. 32 p. 223 [vente]; 5A_19/2016 du 6 septembre 2016 consid. 2.6 [contrat d'entreprise]). Dans un arrêt plus récent, s'abstenant de prendre position sur les autres exceptions, il s'est limité à considérer que l'autorité cantonale, qui s'était fondée sur la pratique bâloise, ne s'était pas distancée de cette dernière jurisprudence en considérant que le seul fait de se prévaloir d'une exécution défectueuse ne suffisait pas (arrêt 5A_1008/2014 précité consid. 3.4.3, in BlSchk 2016 p. 91). Enfin, dans un cas où la mainlevée était fondée sur un contrat de prêt, il a posé que le débiteur poursuivi n'avait pas à rendre vraisemblable le versement et qu'en cas de contestation, il allait de soi que le créancier devait apporter la preuve stricte du versement (arrêt 5A_326/2011 du 6 septembre 2011 consid. 3.3 et ATF 136 III 627 consid. 3.4 cité).
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4.3.3 Vu ce qui précède, c'est à juste titre que la Cour des poursuites et faillites a considéré qu'il appartenait au recourant, créancier poursuivant, de prouver la remise du portefeuille clientèle. Or, ce dernier, partant du principe que cette preuve incombait au débiteur poursuivi, s'est contenté de produire la convention du 4 octobre 2014. Lorsque, s'en prenant aux considérations de l'autorité cantonale, il soutient que la remise du portefeuille clientèle résultait pourtant de la simple lecture de ce document, que le paiement de 200'000 fr. au 31 janvier 2015 ne pouvait qu'attester ce transfert et que l'on pouvait déduire des pièces 104 à 106 que le fichier avait été reçu par l'intimé, il s'en prend de façon appellatoire à l'appréciation des preuves (cf. consid. 2.2 non publié). Il en va de même lorsqu'il affirme péremptoirement que le Tribunal cantonal ne pouvait, d'un côté, tenir pour probantes les déclarations de l'employée de l'intimé selon lesquelles le fichier client n'aurait pas été remis et, d'un autre côté, les écarter en tant qu'elles portaient sur la violation de ses obligations contractuelles.
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Force est de relever en outre que le but du procès en mainlevée provisoire de l'opposition n'est pas de constater la réalité d'une créance, mais l'existence d'un titre exécutoire; le juge de la mainlevée provisoire examine uniquement la force probante du titre produit par le créancier poursuivant, sa nature formelle, et non pas la validité de la prétention déduite en poursuite (ATF 132 III 140 consid. 4.1.1 et la jurisprudence citée; arrêt 5A_450/2012 du 23 janvier 2013 consid. 3.2, in SJ 2013 I p. 345). Or, en l'espèce, lorsque le recourant soutient notamment que la remise de la clientèle devait se faire au fur et à mesure de la collaboration, il se fonde essentiellement sur des éléments extrinsèques à l'acte et requiert une interprétation de la volonté des intéressés qui excède la cognition du juge de la mainlevée; cas échéant, il appartiendra au juge du procès en reconnaissance de dette d'en connaître, au terme d'une procédure probatoire complète (art. 79 LP; ATF 133 III 645 consid. 5.3).
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