BGE 147 III 517 | |||
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53. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause Société des Produits Nestlé SA et Nestlé Nespresso SA contre A. et B. (recours en matière civile) |
4A_61/2021 du 7 septembre 2021 | |
Regeste |
Markenrecht; technisch notwendige Form (Art. 2 lit. b MSchG). |
Im Schweizer Recht ist gemäss Rechtsprechung abzuklären, ob die Konkurrenten über alternative Lösungen verfügen; diese Prüfung kann sich gegebenfalls auf mit einem bestimmten System kompatible Formen beschränken (vorliegend eine Kaffeekapsel, die dazu bestimmt ist, in eine "Nespresso"-Maschine mit einem bestimmten Kaffee-Extraktionsverfahren eingesetzt zu werden) (E. 6.5). | |
Sachverhalt | |
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Elle a fait breveter celle-ci en décembre 1976. Les deux figures suivantes illustraient l'invention - la seconde représentant la capsule lors de son utilisation:
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Ce brevet a été radié en décembre 1996 à l'issue de la durée maximale de protection.
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Nestlé SA est devenue le plus important distributeur de café en portions individuelles en Suisse. Ses capsules, qui connaissent un vif succès, se présentent ainsi:
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A.b Nestlé SA a obtenu de l'Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle (IPI) qu'il enregistre la forme de capsule suivante sous le numéro 486 889 avec la mention "marque imposée", pour la classe 30 relative aux cafés, extraits de café et préparations à base de café:
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La protection a pris effet le 29 juin 2000; elle a été régulièrement renouvelée, la dernière fois le 22 mai 2020.
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La marque tridimensionnelle a en outre été enregistrée auprès de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI). Divers Etats ont refusé d'accorder la protection à cette marque, provisoirement ou définitivement.
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A.c Les sociétés Ethical Coffee Company SA et Ethical Coffee Company (Suisse) SA (ci-après: les sociétés Ethical Coffee) ont élaboré une capsule de café biodégradable compatible avec le système Nespresso, à base de fibres végétales et d'amidon. Elles les ont commercialisées en Suisse dès la fin septembre 2011 dans les magasins de la chaîne Media Markt:
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Le 30 septembre 2011, Nestlé SA et Nestlé Nespresso SA (ci-après: les sociétés Nestlé, la seconde détenant sous licence l'usage des droits de propriété intellectuelle pour les capsules et machines à café Nespresso) ont saisi le Tribunal cantonal vaudois d'une requête de mesures provisionnelles visant à faire interdire aux sociétés Ethical Coffee de commercialiser leurs capsules.
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Celles-ci ont produit une étude de faisabilité concluant que toute capsule qui se veut compatible avec le système Nespresso doit répliquer la forme intérieure du compartiment de la machine (chambre conique avec fond conique), à l'instar de la capsule Nespresso.
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Dans un premier temps, le Tribunal cantonal a fait droit à la requête provisionnelle et interdit la commercialisation des capsules Ethical Coffee (ordonnance du 11 novembre 2011). Puis, après avoir procédé à une expertise technique sommaire prescrite par la Cour de céans (arrêt 4A_36/2012 du 26 juin 2012 consid. 2.4), il a finalement refusé les mesures provisionnelles le 15 septembre 2014 au motif que la forme de la capsule Nespresso était techniquement nécessaire.
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A.d Peu auparavant, l'Office allemand des brevets et des marques (Deutsches Patent- und Markenamt) avait révoqué la protection de la marque de forme internationale sur le territoire allemand pour les produits de la classe 30. Il agissait sur requête d'Ethical Coffee Company SA (cf. au surplus consid. 6.4 infra).
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B. Le 29 février 2012, les sociétés Nestlé ont déposé une demande principale devant le Tribunal cantonal vaudois visant à faire interdire la vente des capsules Ethical Coffee. Les demanderesses fondaient leurs prétentions sur le droit des marques et le droit de la concurrence déloyale.
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Les sociétés Ethical Coffee ont conclu reconventionnellement au constat de la nullité de la marque suisse n° 486 889 (let. A.b supra).
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Une expertise sur la notoriété de la marque et une expertise technique ont été mises en oeuvre.
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Après la faillite des sociétés Ethical Coffee, le procès a repris entre les demanderesses et deux cessionnaires des droits de la masse en faillite.
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Par jugement du 8 décembre 2020, le Tribunal cantonal a constaté la nullité de la marque suisse enregistrée sous numéro 486 889 et ordonné sa radiation: la forme de la capsule, présumée appartenir au domaine public, ne s'était pas imposée comme marque dans le commerce (art. 2 let. a LPM [loi fédérale du 28 août 1992 sur la protec tion des marques et des indications de provenance; RS 232.11]).
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Aucune violation de la LCD (loi fédérale du 19 décembre 1986 contre la concurrence déloyale; RS 241) ne pouvait par ailleurs être retenue, que ce fût sous l'angle de l'art. 3 al. 1 let. d LCD ou de l'art. 3 al. 1 let. e LCD.
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C. Agissant par la voie du recours en matière civile, les sociétés Nestlé ont invité le Tribunal fédéral à accueillir leur demande principale et à rejeter la demande reconventionnelle.
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L'autorité de céans a confirmé l'arrêt attaqué par substitution de motifs: la marque enregistrée est nulle dès lors que la forme est techniquement nécessaire (art. 2 let. b LPM).
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(résumé)
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Extrait des considérants: | |
Erwägung 6 | |
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Avant de se prononcer sur la "nécessité technique" de la capsule Nespresso (consid. 6.6 ss non publiés), il faut préciser les contours de cette notion, en effectuant un tour d'horizon en Suisse (consid. 6.2), à l'échelon européen (consid. 6.3) ainsi qu'en Allemagne (consid. 6.4).
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Erwägung 6.2 | |
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La notion de nécessité technique existait déjà dans la jurisprudence relative au droit de la concurrence déloyale. Selon celle-ci, une imitation même servile de la présentation d'un produit ( Ausstattung ) est admissible lorsque la présentation est rendue nécessaire par la tech-nique ( technisch notwendig ). L'acte est en revanche déloyal si le choix d'une autre forme est possible sans modifier la construction technique et si l'on peut raisonnablement exiger du concurrent qu'il l'adopte, parce que cette solution n'est pas moins pratique, ni moins solide, ni plus coûteuse que la solution copiée ( ATF 116 II 365 consid. 3b p. 369; ATF 93 II 272 consid. 6 p. 281). Les expressions "technisch notwendig" et "technisch bedingt" s'entendaient le plus souvent comme des synonymes (cf. ATF 88 IV 79 consid. 2 p. 82), sous réserve d'arrêts isolés (cf. ATF 129 III 514 consid. 3.2.1, qui cite les ATF 92 II 202 consid. 5a p. 205 et ATF 113 II 77 consid. 3c p. 81).
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A l'initiative du Parlement, les expressions "technisch bedingt" et "imposées par la technique" ont été remplacées respectivement par "technisch notwendig" et "techniquement nécessaires". Seule la version italienne est restée telle quelle ("imposte dalla tecnica"). Ce changement a été motivé notamment par la nécessité de clarifier une jurisprudence peu claire et de s'aligner sur le droit européen (cf. ATF 129 III 514 consid. 3.2.2).
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Le Tribunal fédéral a précisé qu'une forme est techniquement nécessaire au sens de l'art. 2 let. b LPM lorsque le concurrent ne dispose techniquement d'aucune forme alternative pour un produit du même genre, ou lorsque celle-ci ne peut raisonnablement être exigée de lui dans l'intérêt d'une concurrence fonctionnelle. Cette dernière hypothèse est vérifiée lorsque la solution alternative serait moins pratique (moins commode), moins solide (moins résistante) ou assortie de coûts de production plus élevés (plus onéreuse) ("eine weniger praktische, eine weniger solide oder eine mit grösseren Herstellungskosten verbundene Ausführung"): on ne peut en effet attendre des concurrents qu'ils renoncent à la solution la plus évidente et adéquate ( ATF 131 III 121 consid. 3.1 p. 124; ATF 129 III 514 consid. 2.4.2 et 3.2.4). A titre d'exemples, la Cour de céans a évoqué la forme d'un tournevis en croix ou celle d'une clé à quatre crans destinée à s'insérer dans une tête de vis.
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6.2.2 Dans une affaire relative à la brique de jeu Lego, la cause a été renvoyée à l'instance cantonale pour qu'elle examine si l'on pouvait raisonnablement exiger des concurrents qu'ils utilisent des formes alternatives (en soi possibles) pour empiler des briques de jeu. L'autorité de céans a ensuite été amenée à préciser que ces formes alternatives ne devaient pas nécessairement être compatibles avec les briques Lego (arrêt 4C.86/2004 du 7 juillet 2004 consid. 2.1.2 et consid. 3). Après une minutieuse instruction, il s'est avéré qu'une solution alternative ne pouvait pas être imposée aux concurrents. Le juge doit en effet appliquer un standard strict lorsqu'il tranche cette question. Le monopole illimité dont jouit le titulaire de la marque de forme n'est admissible que s'il n'en découle aucun désavantage pour les concurrents parce qu'il existe des formes alternatives équivalentes. On ne saurait attendre d'eux qu'ils assument des coûts de production supplémentaires, même si la différence est faible. Dans l'optique de l'égalité de traitement au sein d'une concurrence fonctionnelle, les concurrents doivent pouvoir partir sur une base équivalente (arrêt 4A_20/2012 du 3 juillet 2012 consid. 3.2).Le Tribunal fédéral a été confronté une première fois à la question de savoir si les formes alternatives à la capsule Nespresso devaient être compatibles avec les machines à café Nespresso. Le Tribunal de commerce saint-gallois avait répondu par l'affirmative, et cette analyse développée dans une procédure provisionnelle a été jugée exempte d'arbitraire (cf. art. 98 LTF). La Cour de céans a concédé que jusqu'ici, elle s'était refusée à limiter le champ des solutions alternatives aux seules formes compatibles avec un système préexistant (arrêt 4A_178/2011 du 28 juin 2011 consid. 2.2, non publié à l' ATF 137 III 324 ). En revanche, le tribunal saint-gallois ne pouvait trancher lui-même cette question technique; aussi la cause lui a-t-elle été retournée pour qu'il mette en oeuvre une brève expertise ( ATF 137 III 324 consid. 3.2.2) - ce qui fut fait.
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Statuant à nouveau, toujours à l'aune de la vraisemblance, le Tribunal saint-gallois a jugé que la partie inférieure de la capsule Nespresso ne pouvait être protégée par le droit des marques. La collerette était techniquement nécessaire et la forme en tronc de cône, qui était celle d'un trapèze en trois dimensions, était géométriquement banale. Nombre de capsules - notamment celles destinées au système Delizio [différent du système Nespresso, réd.] - revêtaient d'ailleurs la forme du tronc de cône avec une collerette. Il fallait ainsi examiner si le chapeau de la capsule concurrente (Denner) se distinguait suffisamment de celui de la capsule Nespresso pour ne pas créer un risque de confusion. Or, les traits distinctifs paraissaient suffisants (cf. arrêt du 21 mai 2013, in sic! 2013 p. 759 ss; cf. aussi le résumé proposé par DIRK SPACEK, Produktkompatibilität - Systemschutz durch Immaterialgüterrechte?, in Recht und Wandel, Festschrift für Rolf Weber, 2016, p. 200 s.).
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Les sociétés Nestlé n'ont pas recouru contre cette décision. Denner a décidé de développer une nouvelle capsule.
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6.2.3 Le présent litige a été précédé d'une procédure provisionnelle. Les sociétés Ethical Coffee ont recouru au Tribunal fédéral contre l'ordonnance du 11 novembre 2011 leur interdisant de commercialiser leurs capsules (let. A.c supra). Elles ont plaidé que la forme de la capsule Nespresso était dictée par la machine Nespresso dans laquelle elle devait être utilisée, ce qui a inspiré à la Cour de céans les réflexions suivantes (arrêt précité 4A_36/2012 consid. 2.3):
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- Cette objection devait être examinée avec d'autant plus d'attention que Nestlé SA avait tout d'abord considéré la capsule Nespresso comme une invention. Or, la protection des brevets était limitée à vingt ans. L'inventeur ne pouvait éluder la volonté du législateur en faisant ensuite inscrire son objet comme une marque de forme en trois dimensions, avec cette conséquence que la protection d'une marque pouvait se renouveler indéfiniment de dix ans en dix ans (art. 10 LPM).
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- S'il n'était pas possible de fabriquer une capsule de forme différente pour la même utilisation (absence de forme alternative), ou si une autre forme devait présenter des inconvénients empêchant une concurrence efficace, il faudrait en déduire que la protection de la capsule Nespresso comme marque était exclue par l'art. 2 let. b LPM.
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- Il ne fallait pas seulement rechercher s'il était possible de produire une capsule différente qui soit utilisable de la même manière (donc dans les mêmes machines) et avec la même efficacité. Il convenait aussi de se demander si la ou les autres formes se distingueraient suffisamment, dans l'esprit du public acheteur, de la capsule Nespresso pour éviter d'entrer dans sa sphère de protection (cf. art. 3 LPM).
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D'aucuns soutiennent que la notion de nécessité technique ne devrait pas s'interpréter à l'aune du droit de la concurrence; la thématique de la compatibilité devrait être traitée sous l'angle de l'abus de droit et du droit des cartels (MARK SCHWEIZER, Formmarkenschutz und Kompatibilitätsinteresse, sic! 2019 p. 591-593). D'ailleurs, lorsque la forme du produit est simplement conditionnée par la technique et que des alternatives sont possibles, le producteur doit démontrer que cette forme est reconnue par les consommateurs comme une marque distinctive, ce qui constitue déjà une protection contre les risques de monopolisation (ADRIAN WYSS, Die Verkehrsdurchsetzung im schweizerischen Markenrecht, 2013, p. 153 et 154).
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Cependant, un courant apparemment majoritaire admet que la compatibilité d'un produit peut fonder une nécessité technique au sens de l'art. 2 let. b LPM (cf. la synthèse présentée par ESCHMANN, op. cit., p. 1646 s. et par SCHWEIZER, op. cit., p. 591 et sous-note 43); selon les circonstances, l'examen des formes alternatives devrait ainsi se limiter aux formes compatibles avec un certain système. L'art. 2 let. b LPM veut éviter de conférer via le droit des marques un monopole illimité pour des solutions techniques qui ne sont pas (ou plus) protégées par les droits de propriété intellectuelle (ESCHMANN, op. cit., p. 1647). Le même but sous-tend la jurisprudence développée en droit de la concurrence déloyale sur la présentation du produit ( Ausstattung ). La pesée d'intérêts pratiquée en ce domaine devrait donc aussi être effectuée dans l'application de l'art. 2 let. b LPM. Outre l'intérêt des concurrents, il faut surtout tenir compte des consommateurs. Leur intérêt devrait l'emporter notamment lorsque le producteur original ne peut pas assurer des livraisons rapides ou lorsqu'il pratique un mauvais rapport qualité-prix, y compris lorsqu'il retire son gain moins de la vente du produit principal (par exemple une machine) que du produit accessoire dont le prix apparaît élevé (ESCHMANN, op. cit., p. 1648). Cette pesée d'intérêts devrait intervenir lors de l'examen des formes alternatives exigibles (ESCHMANN, op. cit., p. 1649, approuvée par SPACEK, op. cit., p. 200, et par IVO ZUBERBÜHLER, Immaterialgüterrecht in kommentierten Leitentscheiden, 2015, p. 140 s. n. 17.21).
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D'autres leviers peuvent conduire à limiter la question de la nécessité technique aux seuls produits compatibles (SPACEK, op. cit., p. 204-206): la manière plus ou moins large dont on définit la notion de "nécessité technique" au sens de l'art. 2 let. b LPM; le faible pouvoir distinctif reconnu à la forme influencée par la technique, qui permettra aux concurrents de se démarquer suffisamment en apportant des modifications mineures (cf., dans cet ordre d'idées, l'arrêt rendu par le tribunal saint-gallois, cité supra consid. 6.2.2); ou encore, le recours à l'abus de droit (art. 2 al. 2 CC).
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Erwägung 6.3 | |
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"Sont refusés à l'enregistrement ou sont susceptibles d'être déclarés nuls s'ils sont enregistrés (...) les signes constitués exclusivement (...) par la forme ou une autre caractéristique du produit qui est nécessaire à l'obtention d'un résultat technique".
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Le Règlement sur la marque de l'Union européenne contient une disposition quasi identique (art. 7 ch. 1 let. e/ii du Règlement 2017/1001 du 14 juin 2017, JO L 154/8 du 16 juin 2017).
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Si les caractéristiques essentielles de la forme d'un produit répondent toutes à la fonction technique, l'enregistrement de la marque doit être refusé, indépendamment du point de savoir si d'autres formes permettraient d'obtenir le même résultat technique (arrêts Lego , § 53 et 83; Philips , § 81-84). Pour juger de la fonctionnalité technique d'une forme, on peut notamment tenir compte de la documentation relative aux brevets antérieurs qui décrivent les éléments fonctionnels de la forme concernée (arrêt Lego , § 85).
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En application de ces principes, la Cour de justice est arrivée à la conclusion que la solution incorporée dans la brique Lego était techniquement préférable pour la catégorie de produits concernée (arrêt Lego , § 60). Aussi ladite brique ne pouvait-elle être enregistrée comme marque.
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L'Allemagne avait reconnu à la capsule Nespresso la protection de la marque tridimensionnelle enregistrée auprès de l'OMPI. L'Office allemand des brevets et des marques avait ensuite retiré cette protection le 10 juillet 2014, à la requête d'Ethical Coffee Company SA (let. A.d supra). Cette décision a été confirmée par le Tribunal fédéral des brevets à Munich le 17 novembre 2017, comme le révèle le site Internet de cette autorité (Bundespatentgericht, arrêt 25 W [pat] 112/14, accessible à l'adresse www.bundespatentgericht.de).
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A l'aune des principes développés par la jurisprudence européenne, le Tribunal des brevets a jugé que la caspule Nespresso se heurtait au motif de refus absolu énoncé ci-dessus. Elle disposait de deux traits caractéristiques, soit d'une part la forme d'un double cône (deux cônes empilés l'un sur l'autre), d'autre part une collerette semblable à un bord de chapeau, entourant le bas du cône le plus large. Or, au regard du brevet allemand de 1976, tous ces éléments distinctifs avaient une fonction technique. La forme de double cône offrait une meilleure résistance à l'écrasement, en particulier au système de perforation inventé, tout en facilitant l'éjection de la capsule. La collerette en forme de bord de chapeau assurait la stabilité et la fermeté de la capsule et la maintenait en place, permettant de fixer le filtre par lequel l'eau devait ressortir. Le Tribunal des brevets n'a pas procédé à une expertise technique, considérant que la fonctionnalité technique de la capsule découlait des brevets.
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La Cour de céans a souligné les préoccupations d'égalité de traitement visant à assurer une concurrence fonctionnelle lorsqu'on examine la possibilité de formes alternatives. Il faut admettre que la thématique de la compatibilité des produits s'inscrit dans le même champ. Le droit des marques contribue au bon fonctionnement de la concurence, de sorte qu'il se justifie de prendre en compte des considérations de concurrence pour élucider la question de la nécessité technique. Cette solution permet en outre de porter une appréciation au cas par cas, en fonction des circonstances concrètes.
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Les cas dans lesquels existent des solutions alternatives présentant des avantages équivalents, tout en se distinguant suffisamment d'une forme dont des traits importants sont liés à la technique, ne devraient pas être légion. Les divergences d'interprétation aux niveaux suisse et européen n'auront pas nécessairement une portée pratique aussi importante qu'on pourrait le croire de prime abord. Un commentateur a souligné à juste titre l'ironie de l'histoire, dans la mesure où le Parlement suisse avait jugé préférable d'utiliser l'expression "technisch notwendig" plutôt que "technisch bedingt" en mentionnant le modèle du droit européen, qui n'est finalement pas interprété aussi strictement que sa lettre le permettrait (FRANZ HACKER, in Markengesetz, 12 e éd. 2018, p. 115, n. 129 et sous-note 328 ad § 3 MarkenG).
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Il importe en définitive d'apprécier chaque situation en fonction des circonstances concrètes, en tenant compte de la ratio legis qui est la même en droit suisse qu'en droit européen: les formes incorporant une solution technique doivent rester à la libre disposition du public. Il faut éviter d'octroyer, via le droit des marques, un monopole perpétuel alors que le législateur a voulu conférer à l'inventeur un avantage limité dans le temps pour lui permettre de recouvrer son investissement, avant d'autoriser une libre concurrence à l'expiration de cette protection.
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