BGE 84 IV 56 | |||
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19. Arrêt de la Cour de cassation du 28 février 1958 dans la cause Ministère public du canton de Neuchâtel contre Gacond. | |
Regeste |
Art. 27 Abs. 1, 25 Abs. 1 MFG. |
Pflichten des Vortrittsberechtigten gegenüber den Fahrzeugen, die von links kommen. | |
Sachverhalt | |
A.- A l'intérieur du village des Bayards, la route qui vient de la gare, au sud, débouche sur la perpendiculaire des Verrières (côté ouest) à La Brévine (côté est) par deux branches incurvées, qui enclosent un triangle herbeux formant une très légère bosse et planté d'un arbre. Lorsqu'on suit la branche de gauche, la vue est gênée vers la droite (La Brévine) par la verdure, vers la gauche (Les Verrières) par un hangar, qui forme écran jusqu'à 7 m du débouché.
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Le 3 juillet 1957, à 9 heures du matin, Gacond, qui conduisait un tracteur routier dont le volant est à droite, venant de la gare, prit l'embranchement de gauche pour se diriger du côté des Verrières. Il roulait à 20 km/h environ; à sa droite, l'arbre planté sur le triangle herbeux projetait son ombre sur la route qu'il suivait. Il s'était essentiellement attaché à regarder vers la droite lorsqu'il vit, à quatre ou cinq mètres à gauche de son véhicule, un "scooter" monté par dlle Pipoz, qui roulait à 40 ou 50 km/h. Il freina et s'arrêta sur un ou deux mètres au maximum, mais ne put éviter la collision qui se produisit sur le côté droit de la route par rapport à la direction du "scooter", à 40 cm environ de la ligne médiane continue, tracée à cet endroit. Le choc fut mortel pour dlle Pipoz.
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B.- Le 7 octobre 1957, le Tribunal du district du Val-de-Travers, vu ces faits, condamna Gacond à 100 fr. d'amende avec radiation de l'inscription au casier judiciaire après un délai d'épreuve de deux ans. Le Tribunal estima que le prévenu, bien qu'au bénéfice de la priorité de passage, aurait dû regarder à gauche aussitôt après avoir dépassé le hangar qui lui masquait la vue de ce côté, que s'il l'avait fait, il aurait aperçu le scooter 14 m déjà avant le point de choc et aurait pu arrêter son véhicule assez tôt pour éviter la collision, que, ne l'ayant pas fait, il a violé l'art. 25 al. 1 LA et que sa faute est dans un rapport de causalité adéquate avec le décès de dlle Pipoz, de sorte que l'art. 117 CP s'applique.
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C.- Sur pourvoi de Gacond, la Cour de cassation pénale du canton de Neuchâtel a cassé, le 20 novembre 1957, le jugement du Tribunal du district du Val-de-Travers du 7 octobre 1957, considérant que, bien que son droit ne soit pas absolu, "le prioritaire de l'art. 27 LA doit pouvoir compter que son droit sera respecté", que Gacond, roulant à une allure normale, devait surtout observer ce qui venait de droite, que la visibilité était mauvaise dans cette direction, qu'en raison de la vitesse excessive de dlle Pipoz, "il ne pouvait plus prendre aucune mesure pour éviter la collision", de sorte qu'il n'a pas violé l'art. 25 LA.
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D.- Le Ministère public du canton de Neuchâtel s'est pourvu en nullité. Il conclut à l'annulation de l'arrêt du 20 novembre 1957, la cause étant renvoyée à l'autorité cantonale pour nouveau jugement. Comme le premier juge, il estime que Gacond a violé l'art. 25 al. 1 LA en n'observant pas à temps ce qui venait de gauche.
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E.- Gacond conclut au rejet du pourvoi.
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Extrait des motifs: | |
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2. Cependant, le Tribunal fédéral a jugé que ce droit n'est pas absolu: le titulaire doit respecter les obligations que lui impose l'art. 25 al. 1 LA. En particulier, il doit porter son attention non seulement sur la droite, mais aussi sur la gauche. S'il est visible pour lui que les conducteurs venant de gauche ne veulent ou ne peuvent pas lui céder le passage, en raison d'une vitesse excessive par exemple, il doit faire tout ce qui est en son pouvoir et même s'arrêter pour parer au danger créé par l'autre conducteur (RO 77 IV 221, consid. 2; 79 II 216, consid. 3; 81 IV 137 s.; 83 IV 171 s.).
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Une application absolue de ces principes entraînerait, pour le bénéficiaire de la priorité de passage, l'obligation de n'aborder la croisée ou la bifurcation qu'à une vitesse lui permettant de céder le pas au besoin non seulement aux véhicules qui viennent de droite, mais aussi à ceux qui viennent de gauche. Par rapport à ceux-ci, il ne jouirait donc plus d'aucun avantage. Tel n'est cependant pas le sens de la jurisprudence exposée plus haut. Sans doute, le bénéficiaire de la priorité doit-il observer les règles générales de prudence que lui dicte l'art. 25 al. 1 LA, mais elles sont nécessairement tempérées pour lui par les obligations particulières que l'art. 27 al. 1 LA lui impose lorsqu'il est en même temps tenu d'accorder la priorité à d'autres véhicules. Il doit donc observer avec la plus grande attention ce qui vient de droite pour se mettre en mesure de céder le passage de ce côté. Il doit également régler sa vitesse de façon à pouvoir en tout cas se conformer à cette obligation. Sans doute lui faut-il, en même temps et de par l'art. 25 al. 1 LA, rester maître de son véhicule et prendre toutes mesures utiles pour prévenir les accidents. Néanmoins, il n'a pas les mêmes devoirs envers les conducteurs qui viennent de gauche qu'à l'égard de ceux qui viennent de droite. Devant céder le passage à droite, c'est de ce côté-là qu'il portera en premier lieu toute son attention de par la prescription spéciale de l'art. 27 al. 1 LA. Pour satisfaire en outre aux exigences de l'art. 25 al. 1 LA, dans ce cas particulier, il lui suffit, en principe, sauf circonstances spéciales, de jeter un rapide coup d'oeil à gauche avant de s'engager sur le carrefour ou la bifurcation. S'il peut alors apercevoir, venant de ce côté, un véhicule roulant à une vitesse qui ne permettra vraisemblablement plus de céder le passage, il doit faire tous ses efforts pour éviter la collision, notamment ralentir et au besoin s'arrêter, renonçant ainsi à sa priorité de passage. Mais il n'est pas nécessaire qu'il fixe sa vitesse en vue de cette éventualité. Il suffit qu'il la règle de façon à pouvoir en tout cas d'une part céder le passage aux véhicules venant de droite et, d'autre part, permettre aux véhicules venant de gauche de le lui céder. Cela fait, s'il a regardé à gauche à temps et avec une attention suffisante, s'il a pris aussitôt en cas de besoin, les mesures nécessaires pour prévenir un accident, il a rempli ses obligations légales et aucune faute ne peut être retenue contre lui.
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