BGE 107 IV 163 | |||
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47. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 2 décembre 1981 dans la cause A. contre Ministère public du canton de Vaud (pourvoi en nullité) | |
Regeste |
Art. 129 StGB. Lebensgefährdung. |
2. Wer im Verlaufe eines Handgemenges eine geladene und entsicherte Schusswaffe zieht, weiss, dass sich unerwartet ein Schuss lösen und einen Beteiligten verwunden oder töten kann. | |
Extrait des considérants: | |
2. ... Lors d'une arrestation mouvementée à la gare de Lausanne, l'intimé fut sommairement fouillé et délesté d'un pistolet, puis conduit par deux policiers qui lui avaient fait chacun une clé à un bras vers le poste de gendarmerie de la gare. Alors qu'ils montaient les escaliers, les inspecteurs ont été gênés par l'étroitesse des lieux. L'un des policiers a lâché l'intimé, libérant ainsi sa main gauche. Faisant une brusque volte-face, l'intimé a entraîné l'autre agent avec une grande force et en le faisant pivoter sur lui-même. Simultanément, il a saisi de sa main gauche un pistolet qu'il portait encore à sa ceinture, chargé et désassuré. Il a crié quelque chose que les policiers n'ont pas compris, selon lui "Tirez", et a brandi le pistolet au bout de son bras gauche tout d'abord en direction du plafond. Ce pistolet s'est retrouvé ensuite pointé en direction du ventre du premier policier à 50 cm environ de celui-ci. Un coup de feu tiré par l'intimé est parti sans toucher personne, la balle ayant passé entre le bras droit alors levé(?) et le flanc du policier menacé. Pour les policiers, l'intimé a visé volontairement le ventre de l'un d'eux et le coup n'a été dévié que par l'intervention de l'autre.
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Quant à l'intimé, il a déclaré n'avoir jamais eu l'intention de tirer sur les policiers, mais que ne voulant plus faire de la prison, il pensait que s'il exhibait une arme, les inspecteurs lui tireraient dessus.
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Autrement dit, il s'agissait, selon lui, d'un suicide par policiers interposés. Ce serait l'un des policiers qui, en baissant son bras alors dirigé vers le plafond, l'aurait amené à menacer de son arme le ventre de l'autre agent et même à faire feu involontairement, son doigt étant appuyé sur la détente.
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Selon la jurisprudence, l'absence de scrupules caractérise toute mise en danger dont les motifs doivent être moralement désapprouvés. Plus le danger connu de l'auteur est grand et moins ses mobiles méritent attention, plus l'absence de scrupules apparaît comme évidente (NOLL, RPS 1954 p. 20, 28 ss., GERMANN, Verbrechen p. 247, ATF 94 IV 65). Agir sans scrupule est autre chose qu'agir avec une imprévoyance coupable (LOGOZ, ad art. 129 p. 71). Il s'agit également de savoir si les motifs de l'acte peuvent être approuvés ou même considérés comme compréhensibles, l'ampleur du danger créé étant également déterminante pour apprécier l'absence de scrupules (ATF 100 IV 218). Ainsi, dans l'arrêt précité, le Tribunal fédéral a posé que celui qui sort un pistolet de sa poche en le saisissant à pleine crosse et en engageant le doigt dans la détente, sans se préoccuper de savoir s'il est prêt à faire feu, alors même qu'il l'a chargé et désassuré à peine quelques instants auparavant, et qui agit avec l'intention de menacer une personne expose la vie d'autrui - celle de la personne visée plus particulièrement - à un très grave danger.
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En l'occurrence, l'autorité cantonale n'a pas précisé que l'arme, chargée et désassurée, était destinée à menacer une personne, mais l'intimé s'en est saisi au moment où l'étroitesse des lieux lui a permis de se dégager. Il a alors brandi le pistolet au bout de son bras gauche, tout d'abord en direction du plafond avant de le braquer, involontairement ou non, en direction du ventre d'un policier, à une distance d'environ 50 cm, juste avant que le coup ne parte involontairement. Ces circonstances suffisent à établir que deux des conditions d'application de l'art. 129 al. 1 CP sont réalisées: Celui qui est aux prises avec un ou des adversaires et qui au cours de la lutte sort un pistolet prêt à tirer s'expose à lâcher inopinément un coup de feu, il ne peut l'ignorer. Or chacun sait qu'un coup de feu partant au hasard au milieu de combattants est de nature à blesser, par conséquent à tuer l'un d'eux. C'est erronément que l'autorité cantonale a considéré que la conscience de la mise en danger de mort implique la volonté de mettre en danger, en se référant à l'arrêt publié aux ATF 94 IV 60. Ce précédent, en effet, que par ailleurs l'autorité cantonale cite à bon escient, conduit à une autre conclusion, celle qu'il n'est justement pas nécessaire que l'auteur ait voulu, même à titre éventuel, la réalisation du danger, sans quoi il devrait être poursuivi pour l'infraction intentionnelle correspondante, soit in casu pour tentative d'homicide. Or, en l'espèce, peu importe que l'intimé n'ait pas voulu tirer, ni même tuer, il suffit qu'il en ait pris consciemment le risque en sortant une arme prête à tirer au moment de se colleter avec les agents de la force publique. Les faits retenus par l'autorité cantonale permettent aussi de conclure que l'intimé a consciemment exposé les deux agents de police à un danger de mort imminent.
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La seule question qui mérite examen est dès lors celle de savoir si l'intimé a fait preuve d'absence de scrupules, autrement dit celle de savoir si, comme il est dit dans l'arrêt précité, le degré de possibilité de mort était tel qu'en n'en tenant pas compte, l'intimé a révélé son absence de scrupules. L'autorité cantonale l'a nié.
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D'abord elle a considéré que l'acte de mise en danger n'est révélateur de l'absence de scrupules que s'il entraîne une réprobation plus grande que celle qui s'attache ordinairement au fait de mettre consciemment autrui en danger. Ensuite elle a estimé que le fait de porter une arme désassurée et chargée n'emportait pas une telle réprobation, d'où elle a déduit que l'intimé n'avait pas démontré qu'il était dénué de scrupules. Un tel raisonnement repose toutefois sur une prémisse fausse: ce qui constitue le danger n'est évidemment pas de porter une arme, mais de la brandir mal à propos lors d'une bagarre. Quant à savoir si l'intimé a agi sans scrupules, la réponse ne fait pas de doute, car le risque de mort dans de telles circonstances est tel que celui qui le prend sera rarement à l'abri de l'application de l'art. 129, sauf si ses actes sont en concours avec une autre infraction plus grave ou s'il peut exciper de l'une des circonstances énumérées dans la partie générale du Code et qui ont pour effet d'exclure ou d'atténuer la punissabilité ou l'illicéité de l'acte. Or, non seulement il n'existe rien de tel en l'espèce, mais l'intimé est connu comme un récidiviste spécial particulièrement redoutable, utilisant couramment des armes à feu à des fins délictuelles. L'absence de scrupules doit ainsi être admise même si, par ailleurs, l'autorité cantonale n'exclut pas que l'intimé ait eu en réalité l'intention de se suicider "par policiers interposés". En effet, supposé que tel ait été le cas, cela ne l'autorisait pas plus à mettre en danger la vie d'autrui pour accomplir son dessein que s'il avait simplement voulu favoriser sa fuite, laquelle n'aurait pas en soi été blâmable.
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