BGE 117 IV 130 | |||
| |||
Bearbeitung, zuletzt am 15.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch) | |||
27. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 27 mars 1991 dans la cause X. c. Ministère public du canton du Valais (pourvoi en nullité) | |
Regeste |
Art. 117 StGB; fahrlässige Tötung; unechtes Unterlassungsdelikt. |
Anwendung dieser Grundsätze und Prüfung des Kausalzusammenhangs zwischen mehreren Unterlassungen und einem tödlichen Unfall auf einer Baustelle (E. 2b, c und d). | |
Sachverhalt | |
A.- Le 5 avril 1989 vers 8 heures, A., employé de l'entreprise X., grutier de formation, manoeuvrait sur un chantier une pelle mécanique de marque Ruston Bucyrus 19 RB. Ayant soulevé avec son engin une benne remplie de béton, il ne put la maintenir en suspension et elle tomba, heurtant un ouvrier, qui fut tué.
| 1 |
L'entrepreneur X. avait décidé d'utiliser cet engin à la manière d'une grue, ce qui en constitue effectivement l'un des modes d'utilisation. Le grutier A. disposait de la formation nécessaire pour manoeuvrer cette machine de chantier. Il savait en particulier - bien qu'il ne l'ait pas appris de X. - que, si les bandes de freins étaient mouillées, il devait faire des manoeuvres de séchage, afin qu'elles fonctionnent normalement. Le jour de l'accident, alors qu'il avait plu, A. n'a pas effectué les manoeuvres de séchage, de sorte que les freins, utilisés pour faire descendre la charge, n'ont pas fonctionné normalement, ce qui a provoqué l'accident. D'autre part, il fut constaté l'absence du "mouflage" prévu pour ce type d'utilisation de la machine, étant précisé que les prescriptions d'exploitation du fabricant ne se trouvaient pas dans la cabine de l'engin. Il ne fut toutefois pas établi que cet élément ait joué un rôle causal dans la survenance de l'accident.
| 2 |
B.- L'autorité de première instance a reconnu A. et X. coupables d'homicide par négligence (art. 117 CP) et les a condamnés respectivement à 10 jours et 20 jours d'emprisonnement avec sursis.
| 3 |
Le Tribunal cantonal a partiellement admis l'appel de A. et a réduit sa peine à une amende; il a en revanche rejeté l'appel de X., lequel se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Soutenant qu'il n'a pas commis une violation de ses devoirs qui soit en relation de causalité adéquate avec l'accident, il demande à être exempté de toute peine, à ce que les prétentions civiles soient renvoyées au for civil, les frais étant mis à la charge du fisc.
| 4 |
Le Tribunal fédéral admet le recours.
| 5 |
Extrait des considérants: | |
6 | |
On admet toutefois qu'une infraction de résultat peut également être réalisée lorsque l'auteur omet par sa faute l'accomplissement d'un acte qu'il était juridiquement tenu d'accomplir et qui, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, aurait évité la survenance du dommage (délit d'omission improprement dit; LOGOZ, Commentaire du CPS, Partie générale, p. 62 et les références citées). Un délit d'omission improprement dit est réalisé lorsque la survenance du résultat par une action est expressément menacée d'une sanction pénale, que l'accusé par son action aurait effectivement pu éviter le résultat et qu'en raison de sa situation juridique particulière il y était à ce point obligé que son omission apparaît comparable au fait de provoquer le résultat par un comportement actif (ATF 113 IV 72 consid. 5a et les arrêts cités). La doctrine a développé quelles étaient les situations de garant qui obligent juridiquement à prendre des mesures de précaution (ATF 113 IV 73 consid. 5b et les références citées).
| 7 |
Pour déterminer si un délit d'omission improprement dit est réalisé, il y a tout d'abord lieu d'examiner si la personne à laquelle l'infraction est imputée se trouvait dans une situation de garant (ATF 108 IV 5 consid. 1a et b). Ce n'est que si tel était bien le cas que l'on peut établir l'étendue du devoir de diligence qui découle de cette position de garant (voir ATF 110 IV 70 consid. 2) et quels actes concrets l'intéressé était tenu d'accomplir en raison de ce devoir de diligence.
| 8 |
Dans les conditions fixées par la loi, l'employeur est responsable, sur le plan civil, des dommages causés par ses employés à ses cocontractants (art. 101 CO) ou à des tiers (art. 55 CO). Il a donc l'obligation juridique de veiller à ce que ses employés prennent les mesures de précaution nécessaires pour éviter la survenance d'un dommage; il assume en particulier la cura in eligendo, in instruendo et in custodiendo (OFTINGER/STARK, Schweizerisches Haftpflichtrecht, Bes. Teil, II/1, 4e éd., Zurich 1987 No 131 p. 335). Il se trouve ainsi dans une position de garant. Pour l'application de l'art. 117 CP dans un cas d'omission, il appartient à l'autorité cantonale d'indiquer, de manière précise et concrète, en quoi l'employeur a violé son devoir de diligence, c'est-à-dire quelle est la mesure qu'il aurait dû prendre; l'étendue de son devoir de diligence est une question de droit que la Cour de cassation examine librement.
| 9 |
Il ne suffit cependant pas d'établir une violation du devoir de diligence, il faut encore que cette violation soit en relation de causalité adéquate avec le résultat. Dans le cas d'un délit d'omission improprement dit, la question de la causalité ne se présente pas de la même manière que si l'infraction de résultat était réalisée par commission; il faut plutôt procéder par hypothèse et se demander si l'accomplissement de l'acte omis aurait, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, évité la survenance du résultat qui s'est produit; pour l'analyse des conséquences de l'acte supposé, il faut appliquer les concepts généraux de la causalité naturelle et de la causalité adéquate (ATF 116 IV 185 consid. 4, 310 consid. a et les références citées; STRATENWERTH, AT I § 14 No 34 et les références citées). L'autorité cantonale doit tout d'abord constater l'existence d'un rapport de causalité naturelle, ce qui constitue une question de fait, soustraite au contrôle de la Cour de cassation (ATF 115 IV 102 consid. 2a, 243 consid. 3 et les arrêts cités). Il y a toutefois violation de la loi si l'autorité cantonale méconnaît le concept même de la causalité naturelle (ATF 101 IV 152 consid. 2b) ou perd de vue que l'art. 117 CP exige la causalité. Il faut ensuite que l'autorité cantonale constate l'existence d'un rapport de causalité adéquate au sens de la jurisprudence (ATF 115 IV 102 consid. 2b et les arrêts cités); il s'agit là d'une question de droit que la Cour de cassation peut revoir librement (ATF 115 IV 243 consid. 3).
| 10 |
b) La cour cantonale a relevé que le recourant n'avait pas lui-même donné ou fait donner les instructions au grutier sur la manière d'utiliser l'engin. Elle retient cependant en fait que le grutier savait quelles étaient les manoeuvres de séchage qu'il devait entreprendre lorsque la machine était mouillée. On ne voit pas que l'employeur ait dû répéter des informations que l'ouvrier spécialisé connaissait déjà. De toute manière, une carence dans l'information n'est pas en relation de causalité avec l'accident, puisqu'il est établi en fait que l'accident est survenu uniquement parce que l'ouvrier a omis d'accomplir ce qu'il savait devoir faire.
| 11 |
c) La cour cantonale observe par ailleurs que le recourant n'a pas veillé à ce que les prescriptions d'utilisation se trouvent dans la cabine de l'engin. On ne voit cependant pas, sur la base des faits retenus, en quoi la présence des prescriptions d'utilisation aurait pu modifier le cours des événements. Sur ce point, l'autorité cantonale semble avoir perdu de vue l'exigence d'un rapport de causalité, découlant de l'art. 117 CP. Comme elle a admis que le grutier savait ce qu'il devait faire mais qu'il a renoncé à accomplir les manoeuvres requises, il ne s'agit plus d'une question de manque d'information. L'absence des prescriptions ne pouvait concerner que la question du mouflage, mais l'autorité cantonale a retenu en fait qu'il n'était pas établi que l'absence de mouflage ait été en relation de causalité naturelle avec la survenance de l'accident. Le fait que les prescriptions d'utilisation n'aient pas été dans la cabine de l'engin ne se trouve donc pas, selon les constatations de l'autorité cantonale, en relation de causalité avec la survenance du dommage.
| 12 |
d) La cour cantonale a surtout reproché au recourant de ne pas avoir surveillé le grutier. Il est cependant établi que celui-ci, en tant qu'ouvrier spécialisé, savait ce qu'il avait à faire. L'employeur ne peut pas être automatiquement rendu responsable sur le plan pénal à chaque fois qu'un ouvrier spécialisé ne respecte pas les mesures de précaution relevant de l'exercice de son activité. L'autorité cantonale n'indique pas de manière précise et concrète ce que l'employeur aurait dû faire en l'espèce. Il ne ressort pas de l'état de fait que des prescriptions de sécurité ou l'usage professionnel aurait exigé que le séchage des freins soit accompli par deux ouvriers spécialisés ou qu'une seconde personne compétente devait impérativement surveiller le grutier pendant cette opération. Le devoir de surveillance qui incombe à l'employeur ne comprend pas, d'une façon générale, l'obligation de faire accompagner chaque ouvrier spécialisé par une personne compétente chargée de le surveiller. Les faits retenus en l'espèce ne permettent pas de constater que le recourant aurait, sous cet angle, violé son devoir de diligence.
| 13 |
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR). |