BGE 118 IV 10 | |||
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3. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 14 février 1992 dans la cause X. c. Ministère public du canton de Vaud (pourvoi en nullité) | |
Regeste |
Art. 42 Ziff. 5 StGB; vorzeitige Aufhebung der Verwahrung. | |
Sachverhalt | |
A.- Le 9 mars 1978, le Tribunal correctionnel du district de Lausanne a condamné X. - né en 1944 - à une peine de 4 ans et demi de réclusion (sous déduction de 506 jours de détention préventive) notamment pour crime de souteneur et vols qualifiés. Le tribunal a remplacé l'exécution de cette peine par un internement en application de l'art. 42 CP relatif aux délinquants d'habitude.
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Le 27 septembre 1979, le condamné a obtenu sa libération conditionnelle.
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A la suite de nouvelles infractions, la réintégration de X. a été ordonnée pour une durée indéterminée (arrêt du Tribunal fédéral rendu le 7 décembre 1981).
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Le 3 juillet 1982, X. n'a pas regagné l'établissement pénitentiaire dont il avait obtenu un congé. Il s'est établi à Thonon-les-Bains, en France. Son extradition a été refusée par les autorités françaises, lesquelles considéraient que l'internement en droit suisse équivalait à un internement administratif.
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B.- Le 14 novembre 1990, le Service pénitentiaire du canton de Vaud - autorité compétente au sens de l'art. 42 ch. 5 CP - a refusé de proposer au juge de mettre fin à l'internement, considérant toujours le requérant comme un évadé. Un recours de droit public a été formé par X. contre cette décision. La procédure a été suspendue.
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C.- Le 3 mai 1991, le Président du Tribunal du district de Lausanne a rejeté la requête de X. tendant à la levée de la mesure d'internement; cette autorité a considéré que les conditions du cas exceptionnel prévu à l'art. 42 ch. 5 CP n'étaient pas réunies.
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Par un arrêt du 11 juillet 1991, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours de X. contre le prononcé du 3 mai 1991.
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D.- X. a saisi le Tribunal fédéral d'un recours de droit public; il a précisé qu'il alléguait une violation directe de la CEDH mais que, dans la mesure où le Tribunal fédéral estimerait que le pourvoi en nullité est recevable, le recourant faisait en sorte de respecter les exigences de cette voie de droit. Il s'est référé aux ATF 114 IV 26 consid. 4 où est admise la recevabilité, dans le cadre d'un pourvoi en nullité, des moyens tirés d'une interprétation d'un article du CP, laquelle serait contraire à la CEDH. Il fait grief à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 5 par. 1 et 4 ainsi que l'art. 8 CEDH et demande, sous suite de frais et dépens, l'annulation de l'arrêt du 11 juillet 1991.
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Considérant en droit: | |
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Compte tenu du caractère subsidiaire du recours de droit public prévu à l'art. 84 al. 2 OJ, il se justifie de considérer l'acte de l'interné comme un pourvoi en nullité. En effet, les conditions de recevabilité régissant cette voie de droit paraissent réunies; en particulier, les délais relatifs à la déclaration et au dépôt du mémoire, prévus à l'art. 272 al. 1 et 2 PPF, ont été observés.
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Quant à l'absence de proposition de la part de l'autorité compétente, sa portée n'a pas fait l'objet de griefs du recourant, qui n'est pas lésé à cet égard. Il n'est dès lors pas nécessaire d'examiner ce point. Au demeurant, il paraît clair à ce sujet que le législateur avait en vue uniquement les cas où l'autorité compétente pouvait suivre de très près l'évolution de l'interné (ATF 106 IV 187 consid. 3 et 4).
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Nul ne conteste que le recourant n'a pas subi la durée minimum de l'internement, qui est, en règle générale, de cinq ans au moins, en cas de réintégration (art. 42 ch. 4 al. 3 CP; voir ATF 106 IV 335 consid. 5 et ATF 101 Ib 32 consid. 2b). Il est également admis que cependant plus des deux tiers des peines ont été purgés. D'après le décompte approximatif de l'autorité cantonale, le délinquant aurait subi 1749 jours de détention sur un total de 2085 jours, auxquels il avait été condamné.
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Ainsi, il demeure à examiner si le cas du recourant peut être considéré comme l'une des exceptions qui permettraient de justifier un abandon anticipé de l'internement.
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Aux termes de l'arrêt - non publié - du 7 décembre 1981 concernant le recourant, l'internement constitue une mesure dont la durée dépend non pas de la gravité de l'infraction et de la culpabilité de l'auteur mais bien, au premier chef, du temps nécessaire pour amender le détenu. Afin d'éviter des abus, le législateur a pris soin d'instituer une réglementation obligeant l'autorité à réexaminer le cas, en vue de mettre fin à la mesure aussitôt qu'elle n'apparaît plus nécessaire; les art. 42 ch. 4 al. 2, 43 ch. 4 al. 1, 44 ch. 3 et 4 et 45 ch. 1 al. 2 CP sont cités (arrêt du 7 décembre 1981, X. c. Département de la justice, de la police et des affaires militaires du canton de Vaud, consid. 3 p. 5/6). Cet aspect d'abandon de la mesure dès qu'elle ne se justifie plus est essentiel; l'autorité doit examiner d'office si l'internement ne paraît plus nécessaire (ATF 98 Ib 194).
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Le cas exceptionnel prévu à l'art. 42 ch. 5 CP doit être interprété à la lumière de ces règles. Il en va notamment ainsi de la vraisemblance confinant à la certitude que l'interné ne récidivera pas, exigée par la jurisprudence (ATF 106 IV 187).
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b) En l'espèce, nul ne conteste qu'après avoir quitté prématurément le pénitencier, en 1982, le recourant se soit bien conduit. Son penchant à la délinquance a disparu. Il est au service de la même entreprise depuis 1982. Il a notamment été caissier. Son employeur le dit travailleur et fiable. Sur le plan personnel, il vit maritalement depuis la fin de l'année 1982 avec la même femme.
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Dans ces circonstances, force est d'admettre qu'aujourd'hui l'internement ne se justifie plus. Le recourant n'est plus un délinquant d'habitude incorrigible menaçant la société. Son amendement paraît suffisamment vraisemblable et durable pour que son cas puisse être considéré comme exceptionnel au sens de l'art. 42 ch. 5 CP. Il serait contraire aux règles précitées et au but de l'internement de le soumettre - ne fût-ce que quelques semaines - à une mesure dite de sûreté, laquelle (on l'a vu) doit prendre fin aussitôt qu'elle n'apparaît plus nécessaire.
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c) Certes, il n'a pas échappé aux instances cantonales que cette manière de raisonner donne l'impression d'un traitement plus favorable pour celui qui s'évade qu'à l'égard de l'interné qui se soumet à la mesure. Est toutefois décisif le fait que l'internement ne se justifie plus lorsque l'amendement du condamné est aussi complet et sûr que celui dont a fait preuve le recourant. On peut ajouter que celui-ci, malgré son départ prématuré du pénitencier, a enduré certains désagréments découlant de la mesure. En effet, il ne pouvait revenir en Suisse sans risquer d'être interné à nouveau. Selon lui, cette situation l'a entravé dans sa carrière professionnelle au service d'une entreprise franco-suisse. On peut dès lors se demander si, tout compte fait, il a été nettement privilégié. Enfin, l'écoulement du temps joue aussi un rôle. Le délai de dix ans prévu à l'art. 45 ch. 6 seconde phrase CP est presque écoulé.
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d) Ainsi, faute d'avoir admis l'existence d'un cas exceptionnel permettant de mettre fin à l'internement, l'autorité cantonale a violé le droit fédéral, ce qui entraîne l'annulation de l'arrêt attaqué. La cause est renvoyée à la cour de cassation cantonale afin que soit levée la mesure d'internement prononcée contre le recourant et qu'il soit renoncé à l'exécution du solde des peines, qui n'ont pas été subies.
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