BGE 122 IV 133 | |||
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18. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 20 mars 1996 dans la cause R. c L. et Procureur général du canton de Genève (pourvoi en nullité) | |
Regeste |
Art. 18 Abs. 3 und Art. 125 StGB; Art. 26 Abs. 1, 27 Abs. 1, 36 Abs. 2 und 47 Abs. 2 SVG; Art. 14, 15 Abs. 3 und 17 Abs. 1 VRV; fahrlässige Körperverletzung; Sorgfaltspflicht des Vortrittsbelasteten. | |
Sachverhalt | |
Le 9 juin 1995 vers 11 heures, un accident de la circulation s'est produit au boulevard St-Georges, à Genève, à la hauteur de la rue des Jardins. L., au volant de sa voiture, s'est arrêtée au stop situé à l'extrémité de la rue des Jardins, au débouché de cette rue sur le boulevard St-Georges qui lui est perpendiculaire. Comme la circulation était dense, elle a attendu. A un certain moment, le conducteur d'un fourgon s'est arrêté en lui laissant la place nécessaire pour sortir. L., qui avait l'intention d'obliquer à gauche pour s'engager dans le boulevard Saint-Georges, dans la direction de la plaine de Plainpalais, s'est avancée très lentement. Arrivée à la hauteur du fourgon, qui lui masquait par sa masse la visibilité, elle s'est arrêtée à nouveau et elle a avancé très lentement, avec beaucoup de prudence. C'est alors qu'un choc s'est produit avec une moto, pilotée par R., lequel circulait au boulevard Saint-Georges en direction de la rue des Deux-Ponts, à une vitesse d'environ 50 km/h, et dépassait la file de véhicules arrêtée derrière le fourgon. Le conducteur de ce véhicule, qui a aperçu dans son rétroviseur la moto qui arrivait assez vite en dépassant la file de véhicules, a fait un signe de la main au motocycliste, afin de le mettre en garde, mais en vain. Les deux témoins de l'accident, le conducteur du fourgon et une piétonne qui se trouvait sur le trottoir, ont affirmé que L. s'était arrêtée à la hauteur du fourgon et s'était ensuite avancée très lentement, sans qu'aucun élément de preuve ne vienne le contredire.
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Au moment de l'accident, le temps était beau, la chaussée sèche et la visibilité bonne.
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L'accident a causé à R. de multiples fractures à la jambe droite.
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Le 28 août 1995, R. a déposé plainte contre L. pour lésions corporelles par négligence et s'est constitué partie civile.
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Par ordonnance du 5 septembre 1995, le Procureur général a classé la procédure pénale, considérant, vu l'enquête effectuée par la police, qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à L.
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Statuant sur recours du plaignant, la Chambre d'accusation genevoise a confirmé le classement par ordonnance du 24 novembre 1995.
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Contre cette décision, R. s'est pourvu en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral. Soutenant que L., qui était débitrice de la priorité, aurait dû, en raison du manque de visibilité, renoncer à sa manoeuvre ou se faire aider d'un tiers, il en déduit que le classement viole le droit fédéral et conclut à l'annulation de la décision attaquée.
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Considérant en droit: | |
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Cette disposition prévoit, à son alinéa 1, que "celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement ou de l'amende". L'art. 125 al. 2 CP précise que la poursuite a lieu d'office si la lésion corporelle est grave (sur cette notion: ATF 105 IV 179, ATF 101 IV 381 consid. 1b).
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L'art. 18 al. 3 CP donne une définition de la négligence: "celui-là commet un crime ou un délit par négligence qui, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable quand l'auteur de l'acte n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle".
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La négligence suppose que l'auteur ait violé les devoirs de la prudence. Un comportement viole le devoir de prudence lorsque l'auteur, au moment des faits, aurait pu, compte tenu des circonstances et de ses capacités, se rendre compte de la mise en danger et qu'il a simultanément dépassé les limites du risque admissible (ATF 121 IV 207 consid. 2a, ATF 118 IV 130 consid. 3, ATF 116 IV 306 consid. 1a, ATF 114 IV 173 consid. 2a).
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Pour déterminer concrètement quels sont les devoirs de la prudence, on peut se référer à des normes édictées en vue d'assurer la sécurité et d'éviter des accidents (ATF 121 IV 207 consid. 2a, 249 consid. 3a/aa, ATF 118 IV 130 consid. 3a, ATF 116 IV 306 consid. 1a, ATF 114 IV 173 consid. 2a, ATF 106 IV 80). Dans le domaine du trafic routier, on se référera donc aux règles de la circulation routière.
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Il n'est pas douteux en l'espèce que la conductrice, qui sortait d'un "stop", était débitrice de la priorité (art. 27 al. 1, 36 al. 2 in fine LCR [RS 741.01], art. 36 al. 1 OSR [RS 742.21]). Il ressort des constatations de fait cantonales - qui lient la Cour de cassation (art. 277bis al. 1 PPF) - que la conductrice s'est arrêtée à la ligne d'arrêt du "stop" (cf. art. 75 al. 1 OSR) et qu'elle ne s'est avancée très prudemment que lorsque le bénéficiaire de la priorité, le conducteur du fourgon, lui a permis de le faire. A ce stade, on ne discerne aucune violation des règles de la priorité (art. 14 al. 1 OCR; RS 741.11).
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La conductrice devait céder la priorité sur toute la largeur de l'axe prioritaire, que les véhicules viennent de sa gauche ou de sa droite (ATF 117 IV 498 consid. 3, 116 IV 157; BUSSY/RUSCONI, Code suisse de la circulation routière, Lausanne 1984, art. 36 LCR no 3.2.6 et les arrêts cités; cf. également art. 14 al. 3 OCR). S'étant avancée devant le fourgon qui lui laissait le passage, la conductrice s'est arrêtée, puis, sa visibilité sur la gauche étant très restreinte en raison de la présence du fourgon, elle s'est avancée très lentement et en faisant très attention. Ce sont là des constatations de fait qui lient la Cour de cassation (art. 277bis al. 1 PPF).
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Contrairement à ce que soutient le recourant, aucune règle de la circulation n'oblige le débiteur de la priorité, en cas de visibilité très restreinte, à renoncer à une manoeuvre que la signalisation n'interdit pas. Le devoir de faire appel à l'aide d'un tiers n'est prévu que dans le cas des art. 15 al. 3 et 17 al. 1 OCR, qui ne sont manifestement pas applicables en l'espèce. La jurisprudence exige seulement du débiteur de la priorité, en cas d'absence de visibilité, qu'il s'avance très lentement et très prudemment, "en tâtonnant" (ATF 105 IV 339; BUSSY/RUSCONI, op.cit., art. 36 LCR no 3.4.7 et les arrêts cités). Or, il a précisément été constaté en fait - d'une manière qui lie la Cour de cassation (art. 277bis al. 1 PPF) - que la conductrice s'était comportée de cette manière, de sorte qu'elle n'a pas violé les devoirs de la prudence.
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D'ailleurs, dès lors que la conductrice se conformait aux devoirs d'un débiteur de la priorité, elle n'avait pas à compter, selon le principe de la confiance (ATF 120 IV 252, ATF 118 IV 277 consid. 4a; sur cette notion, voir également BUSSY/RUSCONI, op.cit., art. 26 LCR no 4.1), avec la survenance d'une moto, difficilement visible en raison de sa position et de sa faible largeur, qui, à une vitesse soutenue, dépassait par la gauche la colonne de voitures arrêtée derrière le fourgon, violant ainsi de manière flagrante l'art. 47 al. 2 LCR.
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En admettant en pareilles circonstances que la conductrice n'a pas commis de négligence et ne s'est donc pas rendue coupable de lésions corporelles par négligence au sens de l'art. 125 CP, l'autorité cantonale n'a pas violé le droit fédéral. Le pourvoi doit donc être rejeté.
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