BGE 129 IV 179 | |||
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26. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale dans la cause X. contre A. et Ministère public du canton du Valais (pourvoi en nullité) |
6S.30/2003 du 16 avril 2003 | |
Regeste |
Art. 268 Ziff. 1 und Art. 270 lit. e Ziff. 2 BStP, Art. 10c OHG; Zwischenentscheid. |
Art. 10c OHG; Beschränkung der Einvernahme des kindlichen Opfers. |
Art. 10c OHG ist auch anwendbar auf Verfahren, die vor seinem Inkrafttreten eröffnet worden sind (E. 2.2). |
Art. 10c OHG gilt auch für die Einvernahme eines Kindes im Rahmen der richterlich angeordneten Begutachtung seiner Glaubwürdigkeit (E. 2.4). |
Notwendigkeit der Einvernahme des Kindes zur Begutachtung der Glaubwürdigkeit und Beschränkung seiner Einvernahme gemäss Art. 10c OHG, Vereinbarkeit (E. 2.5). |
Verletzung von Art. 10c OHG im konkreten Fall bejaht (E. 2.6). | |
Sachverhalt | |
A.- Le 15 juin 2002, le juge d'instruction du Valais central a été avisé de l'existence d'une suspicion d'abus sexuels au préjudice de l'enfant X., né en mai 1998. Le voisin A. était mis en cause. Il a été prévu que la direction des entretiens serait confiée à une psychologue et que ceux-ci seraient enregistrés sur support vidéo.
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Le 16 juin 2002, X. a été entendu par une psychologue et une agente de police. Fortuitement, l'enregistrement vidéo a été effacé. Le lendemain, la mère de l'enfant a remis à la police un enregistrement, dans lequel l'enfant, dialoguant avec ses parents, mettait en cause A. Une autre audition de l'enfant par la psychologue et l'agente de police s'est tenue le 20 juin 2002, à la demande des parents. Elle a été enregistrée sur bande vidéo et transcrite par écrit. Le 9 juillet 2002, la psychologue, dans un document intitulé "Commentaires et analyse de crédibilité" visé par son chef de service, lui-même psychologue-psychothérapeute, a indiqué que l'ensemble des éléments apportés par cette audition ne permettait pas de conclure avec certitude que les faits relatés par l'enfant étaient exacts ni de déclarer ces faits peu probables.
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Le 31 juillet 2002, la représentante du ministère public a observé qu'il manquait au dossier une expertise de crédibilité répondant aux critères minima dégagés au cours de ces dernières années, l'analyse de la psychologue devant nécessairement être complétée par le point de vue d'un expert neutre qui n'ait pas assisté l'enquêteur dans son audition.
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Le 18 septembre 2002, le juge d'instruction a confié l'expertise à R. Il lui a demandé de lui faire connaître la méthodologie dont elle entendait faire usage et lui a annoncé qu'il lui préciserait sous peu les exigences posées par le Tribunal fédéral et la doctrine spécialisée en matière d'audition d'enfants. Le 1er octobre 2002, le juge a communiqué aux parties la méthodologie établie par l'experte. Dès le 10 octobre 2002, les parents X. sont intervenus à plusieurs reprises auprès du juge afin qu'il définisse clairement le statut et la mission exacte de l'experte. Le 13 novembre 2002, après que les parents X., le prévenu et le ministère public eurent chacun déposé leur liste de questions à l'experte, le nouveau juge d'instruction en charge du dossier a confirmé le mandat confié à celle-ci et lui a adressé son propre questionnaire.
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A la suite de discussions préalables avec l'experte, les parents X. ont mis en cause "les méthodes et a priori" qu'elle manifestait en tant que praticienne de la psychanalyse. Le 15 novembre 2002, ils ont fait savoir au juge qu'ils n'entendaient absolument plus confier leur enfant à cette thérapeute et ont requis que le dossier d'expertise soit transféré en mains d'un véritable pédopsychiatre. Par courrier du 27 novembre 2002, ils ont indiqué au juge que l'expertise litigieuse ne correspondait pas aux réquisits d'une véritable expertise de crédibilité et qu'il pouvait interpréter leur requête comme une demande de récusation. Le ministère public et le prévenu s'y sont opposés.
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B.- Le 3 décembre 2002, le juge d'instruction a rejeté la requête tendant à la récusation de l'experte.
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X. et ses parents ont recouru contre cette décision. Ils ont invoqué notamment l'incompatibilité du mandat confié à l'experte avec les nouvelles dispositions de la LAVI (RS 312.5).
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Par décision du 14 janvier 2003, la Chambre pénale du Tribunal cantonal valaisan a rejeté le recours.
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C.- Agissant par ses parents, X. se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral contre cette décision. Il conclut à son annulation.
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Extrait des considérants: | |
Erwägung 1 | |
1.1 La décision attaquée ne met pas fin à l'action pénale mais tranche une question de procédure soulevée par le recourant; il s'agit donc d'une décision incidente. En application de l'art. 268 PPF, la recevabilité d'un pourvoi en nullité contre une décision préjudicielle ou incidente, émanant d'une autorité cantonale de dernière instance, présuppose que cette dernière se soit prononcée définitivement sur un point de droit fédéral (ATF 128 IV 34 consid. 1a p. 35/36; ATF 119 IV 168 consid. 2a p. 170). Cela est le cas en l'espèce. En effet, la décision attaquée tranche définitivement, sur le plan cantonal, la question de savoir si l'expertise de crédibilité ordonnée judiciairement est compatible avec les exigences limitatives de l'art. 10c LAVI quant au nombre d'auditions de l'enfant victime. Cette disposition est une norme de droit fédéral au sens de l'art. 269 al. 1 PPF (cf. ATF 119 IV 168 consid. 3 p. 171). La décision attaquée est donc susceptible d'un pourvoi en nullité, malgré son caractère incident (ATF 119 IV 168 consid. 2b p. 170/171).
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Aux termes de l'art. 270 let. e ch. 2 PPF, la victime peut faire valoir une violation des droits que lui accorde la LAVI. Cette disposition est une codification de la jurisprudence, laquelle a admis que la victime ou les personnes assimilées peuvent se pourvoir en nullité indépendamment de toute autre condition lorsqu'elles invoquent la violation d'un droit qui leur est garanti par la LAVI dans la procédure pénale, afin d'éviter qu'une violation de ces garanties du droit fédéral échappe à la connaissance du Tribunal fédéral (ATF 122 IV 79 consid. 1a p. 81, 71 consid. 2 p. 75, 37 consid. 1a p. 39/40). Le recourant est donc habilité à soulever une violation d'un droit procédural découlant de la LAVI, en l'espèce à propos de l'interprétation et de l'application de l'art. 10c LAVI. Savoir si la norme de la LAVI invoquée a été violée ou non est une question de fond, non de recevabilité.
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2.1 Le 23 mars 2001, les Chambres fédérales ont adopté une modification de la LAVI, entrée en vigueur le 1er octobre 2002 (RO 2002 p. 2997). Y figure l'art. 10c, selon lequel l'enfant ne doit en principe pas être soumis à plus de deux auditions sur l'ensemble de la procédure (al. 1). La première audition doit intervenir dès que possible. Elle est conduite par un enquêteur formé à cet effet, en présence d'un spécialiste. Les parties exercent leurs droits par l'intermédiaire de la personne chargée de l'interrogatoire. L'audition a lieu dans un endroit approprié. Elle fait l'objet d'un enregistrement vidéo. L'enquêteur et le spécialiste consignent leurs observations particulières dans un rapport (al. 2). Une seconde audition est organisée si, lors de la première, les parties n'ont pas pu exercer leurs droits, ou si cela est indispensable au bon déroulement de l'enquête ou à la sauvegarde de l'intérêt de l'enfant. Dans la mesure du possible, elle doit être menée par la personne qui a procédé à la première audition. Pour le reste, les dispositions de l'al. 2 sont applicables (al. 3).
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2.4 Selon l'art. 10c al. 1 LAVI, les interrogatoires visés par la nouvelle réglementation sont ceux menés dans le cadre de l'ensemble de la procédure, par quoi il faut bien sûr comprendre de la procédure pénale. Cela exclut donc une audition de l'enfant hors d'une telle procédure, par exemple celle menée dans le cadre d'une procédure civile (divorce des parents notamment) ou encore les questions posées à l'enfant par des particuliers avant la procédure pénale, comme ses parents, dans l'optique d'éclaircir des soupçons d'abus (cf. EVA WEISHAUPT, Besonderer Schutz minderjähriger Opfer im Strafverfahren, in RPS 120/2002 p. 231 ss, 239).
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En l'espèce, le juge d'instruction a ordonné une expertise de crédibilité des déclarations du recourant, âgé de quatre ans. Ce type d'expertise s'impose surtout lorsqu'il s'agit des déclarations d'un petit enfant qui sont fragmentaires ou difficilement interprétables, lorsqu'il existe des indices sérieux de troubles psychiques, ou lorsque des éléments concrets font penser que la personne interrogée a été influencée par un tiers (cf. ATF 128 I 81 consid. 2 p. 84 ss; ATF 118 Ia 28 consid. 1c p. 31/32; arrêt 1P.8/2002 du 5 mars 2002, consid. 4.3.1; cf. aussi PHILIPP MAIER/ARNULF MÖLLER, Begutachtungen der Glaubhaftigkeit in der Strafrechtspraxis, in PJA 2002 p. 682 ss, 685/686). La question à résoudre ici est de déterminer si la limitation des auditions prévues à l'art. 10c LAVI touche également une expertise de crédibilité ordonnée par les autorités de poursuite pénale.
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Il ressort du message du Conseil fédéral qu'à l'occasion du deuxième interrogatoire - celui prévu par l'art. 10c al. 3 LAVI - les parties présentes au procès (autorités chargées de l'enquête, parquet, défense, expert chargé de vérifier la crédibilité des affirmations, représentants de la victime) disposent du droit de poser des questions (FF 2000 p. 3517); aussi, un deuxième interrogatoire de l'enfant selon l'art. 10c al. 3 LAVI peut-il en particulier répondre aux besoins d'une expertise de crédibilité. Dans le même sens, WEISHAUPT (op. cit., p. 240) mentionne qu'une deuxième audition selon l'art. 10c al. 3 LAVI peut être nécessaire en raison d'une expertise de crédibilité. Le message pas plus que la doctrine, même s'ils n'abordent pas directement cette question, ne laissent donc entendre qu'une expertise échapperait à l'art. 10c LAVI. Le but même de la nouvelle réglementation, qui se soucie d'éviter les traumatismes supplémentaires provoqués par la répétition d'interrogatoires, ne saurait être battu en brèche par un traitement différencié réservé à l'expertise. Que l'expert dispose d'une formation en règle générale à même d'éviter une victimisation secondaire (cf. MARKUS HUG, Glaubhaftigkeitsgutachten bei Sexualdelikten gegenüber Kindern, in RPS 118/2000 p. 19 ss, 40) n'y change rien. En effet, conformément à l'art. 10c al. 2 LAVI, l'enquêteur de la police qui procède à la première audition est lui-même formé à cet effet et doit en plus être accompagné d'un spécialiste. Déjà à ce stade, tout est mis en oeuvre pour éviter une victimisation secondaire. Rien ne justifie véritablement une plus grande souplesse à l'égard de l'expert par rapport aux personnes spécialement formées qui interviennent au début de l'enquête. Il faut donc conclure qu'une expertise de crédibilité est soumise à l'art. 10c LAVI. Cette solution vaut lorsque l'expert est mandaté par le juge dans le cadre de la procédure et qu'il apparaît de la sorte comme un auxiliaire de la justice.
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Outre le respect des droits de la défense, l'art. 10c al. 3 LAVI institue la possibilité de tenir une deuxième audition si cela est indispensable au bon déroulement de l'enquête ou à la sauvegarde de l'intérêt de l'enfant. Cette extension a été introduite lors des débats parlementaires (cf. BO 2000 CN p. 1173 ss). L'art. 10c al. 1 LAVI limite en principe le nombre d'auditions à deux durant la procédure. Selon la teneur même de cette disposition, des exceptions restent donc possibles, étant précisé qu'il ne s'agit pas de les systématiser. Par analogie avec le texte de l'art. 10c al. 3 LAVI, le bon déroulement de l'enquête ou l'intérêt de l'enfant peuvent constituer des critères justifiant plus de deux auditions (cf. WEISHAUPT, op. cit., p. 241). S'agissant d'une expertise de crédibilité, une telle justification pourrait résulter de la nécessité scientifique, et à travers elle du bon déroulement de l'enquête pénale, ou de la protection de l'enfant, si un fractionnement de l'audition apparaissait préférable pour lui. C'est au cas par cas, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, que l'admissibilité de plus de deux auditions doit être examinée. Il incombe au juge, autant que faire se peut, de prendre les mesures nécessaires propres à harmoniser tant les droits des deux parties (accusé et victime) que les intérêts de la poursuite pénale. A noter que l'abandon d'une expertise de crédibilité pour éviter d'entendre encore l'enfant pourrait conduire à ce qu'il faille en dernier ressort libérer l'accusé au bénéfice du doute.
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Le recourant et l'intimé ne contestent pas la pertinence d'une expertise de crédibilité. Selon la décision attaquée, le juge d'instruction a communiqué aux parties le 1er octobre 2002 la méthodologie établie par l'experte. Au moins implicitement, la décision attaquée renvoie donc au contenu de ce document. Il en ressort que l'experte souhaite voir le recourant 2 fois par semaine (1/2 heure?) pendant une période dont [elle ne peut] fixer le terme mais qu'[elle] espère courte (1 mois?). Dès le 10 octobre 2002, les parents du recourant ont plusieurs fois demandé au juge d'instruction de préciser le statut et la mission exacte de l'experte. Le 13 novembre 2002, le juge a confirmé le mandat confié à l'experte. Le 15 novembre 2002, les parents du recourant ont fait savoir qu'ils n'entendaient pas confier leur enfant à cette experte et qu'ils souhaitaient l'intervention d'un véritable pédopsychiatre.
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Contrairement à ce que laisse entendre la décision attaquée, il n'apparaît pas que le recourant (par l'entremise de ses parents) aurait tardé à soulever son opposition. L'art. 10c LAVI est entré en vigueur le 1er octobre 2002, soit le jour où la méthodologie de l'experte a été communiquée. Le recourant a ensuite demandé des précisions sur le déroulement de l'expertise avant de s'opposer à sa mise en oeuvre telle qu'elle était prévue par l'experte. Dans ces conditions, on ne voit pas que le recourant aurait agi de manière contraire à la bonne foi, au point de pouvoir lui dénier le bénéfice des droits procéduraux accordés par l'art. 10c LAVI. D'ailleurs, on ne saurait guère concevoir une renonciation aux droits précités, du moins de la part d'un jeune enfant supposé victime d'un acte d'ordre sexuel (cf. WEISHAUPT, op. cit., p. 244/245).
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L'experte envisage plusieurs auditions. La manière dont elle les a annoncées fait penser à un nombre soutenu et indéterminé. Leur compatibilité avec l'art. 10c LAVI apparaît fortement suspecte. Le juge d'instruction devait veiller au respect de cette disposition, notamment en s'enquérant auprès de l'experte de l'éventuelle nécessité d'auditions répétées dans le cas concret et en lui rappelant les exigences légales restrictives en ce domaine. Le cas échéant, il lui incombait d'inviter l'experte à employer une méthode d'investigation mieux conciliable avec l'art. 10c LAVI et bien sûr respectueuse des standards scientifiques reconnus (ATF 128 I 81 consid. 2 p. 84 ss). L'analyse de la procédure cantonale ne permet pas de conclure à une véritable prise en compte du nouvel art. 10c LAVI. La méconnaissance de cette norme est attestée par la motivation de la décision attaquée, la Chambre pénale s'étant contentée de signaler qu'une violation de la LAVI pourrait éventuellement donner lieu à un complément d'expertise voire à une nouvelle expertise. Le pourvoi doit donc être admis, la décision attaquée annulée et la cause renvoyée à l'autorité cantonale, qui veillera à la poursuite de l'instruction dans le respect des exigences de l'art. 10c LAVI.
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