BGE 145 IV 470 | |||
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53. Extrait de l'arrêt de la Cour de droit pénal dans la cause A. contre Ministère public de la Confédération et B. et Ministère public de la Confédération contre A. et consorts (recours en matière pénale) |
6B_383/2019 / 6B_394/2019 du 8 novembre 2019 | |
Regeste |
Art. 260ter StGB; kriminelle Organisation; Terrorismus; Legalitätsprinzip. |
Grundsätze und historische Auslegung von Art. 260ter StGB. Die "Liberation Tigers of Tamil Eelam"-Bewegung gilt als Urheber diverser terroristischer Anschläge. Die Bewegung wurde in der Schweiz jedoch nie als terroristische Organisation eingestuft; dieser nahe stehende Gruppierungen konnten hier während Jahren Propaganda betreiben und finanzielle Mittel akquirieren (E. 4.7). |
Für Personen, die zugunsten der Bewegung Gelder und Güter/Hilfsmittel sammelten, war unter dem Blickwinkel des Legalitätsprinzips nicht vorhersehbar, dass sie sich nach Art. 260ter StGB strafbar machen könnten (E. 4.8). | |
Sachverhalt | |
1 | |
- libéré A. des chefs de prévention d'organisation criminelle, de faux d ans les titres et de blanchiment d'argent et l'a condamné, pour esc roquerie par métier, à une peine privative de liberté de 21 mois, avec sursis durant deux ans;
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- classé la procédure dirigée contre C. concernant le chef de prévention d'escroquerie subsidiaire à celui d'extorsion et chantage, acquitté le prénommé des chefs de prévention d'organisation criminelle, d'extorsion et chantage, de faux dans les titres et de blanchim ent d'argent et l'a condamné, pour escroquerie par métier, à une p eine privative de liberté de 24 mois, avec sursis durant deux ans;
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- libéré D. des chefs de prévention d'organisation criminelle, d'extorsion et chantage, de faux dans les titres et de blanchiment d'argent et l'a condamné, pour escroquerie par métier, à une peine privative de liberté de 20 mois, avec sursis durant deux ans;
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- libéré E. de tous les chefs de prévention le concernant;
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- libéré F. des chefs de prévention d'organisation criminelle et de faux dans les titres concernant une partie des faits et l'a condamné, pour escroquerie par métier et faux dans les titres, à une peine privative de liberté de 24 mois, avec sursis durant deux ans;
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- libéré G. des chefs de prévention d'organisation criminelle et de faux dans les titres concernant une partie des faits et l'a condamné, pour escroquerie par métier et faux dans les titres, à une peine privative de liberté de 11 mois, avec sursis durant deux ans;
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- libéré H. du chef de prévention d'organisation criminelle;
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- classé la procédure dirigée contre I. s'agissant du chef de préve notion de blanchiment d'argent et a libéré le prénommé des autres chefs de prévention le concernant;
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- libéré J. du chef de prévention d'organisation criminelle;
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- libéré K. de tous les chefs de prévention le concernant;
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- classé la procédure dirigée contre L. s'agissant du chef de prévention d'escroquerie subsidiaire à celui d'extorsion et chantage et a libéré le prénommé de tous les autres chefs de prévention le concernant;
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- classé la procédure dirigée contre N. s'agissant du chef de prévention de gestion déloyale subsidiaire à celui d'escroquerie et a libéré le prénommé de tous les autres chefs de prévention le concernant.
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La Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral a en outre admis - dans leur principe - les prétentions civiles de B. SA contre A., C., D., F. et G., et a renvoyé cette société à agir par la voie civile.
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B. A. (ci-après: le recourant 1) forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 14 juin 2018 (6B_383/2019), en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens qu'il est acquitté et que les prétentions civiles de B. SA ne sont pas admises dans leur principe le concernant. Subsidiairement, il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.
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Le Ministère public de la Confédération (ci-après: le recourant 2) forme également un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 14 juin 2018 (6B_394/2019), en concluant, avec suite de frais, principalement à sa réforme en ce sens que:
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- A. est condamné pour participation à une organisation criminelle, faux dans les titres, escroquerie par métier et blanchiment d'argent aggravé;
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- C. est condamné pour extorsion et chantage, subsidiairement escroquerie, participation à une organisation criminelle, faux dans les titres, escroquerie par métier et blanchiment d'argent aggravé;
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- D. est condamné pour participation à une organisation criminelle, extorsion et chantage, faux dans les titres, escroquerie par métier et blanchiment d'argent aggravé;
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- E. est condamné pour participation à une organisation criminelle, escroquerie par métier, faux dans les titres et blanchiment d'argent aggravé;
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- F. est condamné pour participation à une organisation criminelle, faux dans les titres et escroquerie par métier;
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- G. est condamné pour participation à une organisation criminelle, faux dans les titres et escroquerie par métier;
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- H. est condamné pour participation à une organisation criminelle;
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- J. est condamné pour participation à une organisation criminelle;
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- K. est condamné pour participation à une organisation criminelle, escroquerie par métier et blanchiment d'argent aggravé;
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- L. est condamné pour participation à une organisation criminelle, extorsion et chantage, subsidiairement escroquerie, faux dans les titres, escroquerie par métier et blanchiment d'argent aggravé;
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- M. est condamné pour participation à une organisation criminelle, escroquerie par métier, faux dans les titres et blanchiment d'argent aggravé;
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- N. est condamné pour escroquerie par métier, respectivement com plicité s'agissant de cette infraction, subsidiairement pour gestion déloyale.
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Subsidiairement, il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision.
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C. Invités à se déterminer sur le recours de A., le Tribunal pénal fé déral a renoncé à présenter des observations, tand is que le Ministère public de la Confédération a conclu à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours. B. SA ne s'est quant à elle pas déterminée dans le délai qui lui avait été imparti pour ce faire. A. a encore présenté des observations concernant les déterminations du Ministère public de la Confédération.
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Invités à se déterminer sur le recours du Ministère public de la Confédération concernant le cas de I. relativement au chef de prévention de faux dans les titres, le Tribunal pénal fédéral a présenté des observations, tandis que le prénommé a conclu au rejet du recours tout en sollicitant le bénéfice de l'assistance judiciaire.
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Extrait des considérants: | |
Organisation criminelle
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4.1 Aux termes de l'art. 260ter ch. 1 CP, celui qui aura participé à une organisation qui tient sa structure et son effectif secrets et qui poursuit le but de commettre des actes de violence criminels ou de se procurer des revenus par des moyens criminels, celui qui aura soutenu une telle organisation dans son activité criminelle, sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
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La jurisprudence assimile à de telles organisations, à côté des syndicats du crime et autres corporations à caractère mafieux, les groupements ou associations terroristes (ATF 142 IV 175 consid. 5.4 p. 188; ATF 133 IV 58 consid. 5.3.1 p. 70), tels que le groupement islamiste extrémiste des "Martyrs pour le Maroc", le mouvement extrémiste kosovo-albanais "ANA", qui a succédé à l'UCK, les Brigades rouges italiennes, l'ETA basque ou encore le réseau international "Al-Qaïda" (ATF 142 IV 175 consid. 5.8 p. 191 s.; ATF 132 IV 132 consid. 4.1.2 p. 134). Ne comptent en revanche pas parmi les organisations criminelles les partis extrémistes, les groupes politiques d'opposition ou les organisations qui luttent avec des moyens proportionnés - et non criminels - pour le pouvoir politique dans leur pays ou qui mènent un combat pour la liberté contre des régimes dictatoriaux (ATF 142 IV 175 consid. 5.4 p. 188 s.; ATF 133 IV 58 consid. 5.3.1 p. 70 et les références citées).
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L'art. 260ter CP ne mentionne ni ne définit le terrorisme. Selon l'art. 260quinquies al. 1 CP [Financement du terrorisme], celui-ci se conçoit comme un acte de violence criminelle visant à intimider une population ou à contraindre un Etat ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque (cf. aussi les éléments évoqués aux ATF 131 II 235 consid. 3.5 p. 247).
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4.2 L'autorité précédente a exposé qu'après l'indépendance du pays en 1948, le Sri Lanka (ou Ceylan jusqu'en 1972) avait amorcé un virage favorable à la majorité ethnique des Cinghalais. La politique pratiquée avait été caractérisée par l'exclusion - parfois violente - des Tamouls. Elle avait provoqué chez le peuple tamoul du ressentiment ainsi qu'un désir de séparation. Dès 1972, des groupes tamouls radicaux avaient vu le jour. Fondé en 1976, le mouvement "Liberation Tigers of Tamil Eelam" (ci-après: LTTE) s'était imposé au Sri Lanka dans la lutte du peuple tamoul pour ses droits, ensuite de l'échec de l'action politique des défenseurs de la cause tamoule. Le mouvement LTTE était animé par une idéologie politique et sociale. Dès 1976, il avait revendiqué l'instauration d'un Etat socialiste, au besoin par la force. Ce mouve ment - de type essentiellement militaire - était organisé et hiérarchisé. Il avait la capacité de recruter des combattants et de les former. Ses moyens humains et logistiques étaient importants. Son armée comprenait des forces terrestres, aériennes et navales. Durant plusieurs années, le mouvement LTTE avait contrôlé des portions du Sri Lanka. Il y avait mis en place des structures de type étatique. Il disposait ainsi d'une administration - notamment dans les domaines de la justice et des finances -, prélevait des impôts, avait construit des hôpitaux ou des écoles. Grâce à son armée et son organisation, le mouvement LTTE avait la capacité de conduire des opérations militaires, de définir une stratégie et de parler d'une seule voix. Il s'était trouvé en conflit armé avec les forces sri lankaises à partir de 1983, selon des lignes de partage ethniques. Des affrontements avaient déchiré le pays jusqu'en 2002, époque à laquelle un accord de cessez-le-feu avait été conclu . Le conflit armé s'était achevé en mai 2009, sans la mise en place d'un processus de réconciliation.
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A partir des années 1980, les populations tamoules avaient commencé à fuir le Sri Lanka. En 2014, la Suisse comptait 40'000 individus d'origine tamoule. Pour assurer sa représentation à l'étranger ainsi que son financement, le mouvement LTTE avait développé un réseau international. Dans de nombreux pays, des instances centrales de coordination avaient été mises sur pied, chapeautées par le secrétariat international. A partir des années 1990 et jusqu'en 2000, le mouvement LTTE avait disposé à Londres d'un quartier général où siégeait son secrétariat international, lequel cherchait des financements et assurait des tâches de propagande et de lobbying. A l'époque de l'accord de cessez-le-feu de 2002, ce secrétariat avait été transféré au Sri Lanka. Des liens existaient entre le mouvement LTTE et ses branches internationales. Celles-ci étaient, en tout cas à partir de 2003, soumises à des règles d'organisation émanant du mouvement LTTE et de son état-major au Sri Lanka. Le mouvement encourageait l'activité politique et associative de la communauté tamoule réfugiée dans des pays d'ac cueil pour faire entendre ses revendications. Il cherchait à diffuser sa doctrine au sein de la communauté tamoule et voulait favoriser les dons. Des collectes étaient organisées, de même que des activités de propagande. Le mouvement LTTE souhaitait aussi promouvoir la transmission de la culture tamoule et maintenir le lien culturel et communautaire parmi ses membres. Pour ce faire, il apportait aide et soutien aux nouveaux arrivants et les accompagnait dans leur installation.
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Le O. était une association fondée à Coire en 1994. Son but était d'entretenir, de préserver et d'élargir les liens culturels, philosophiques, sociaux et religieux, les coutumes et croyances de la population tamoule résidant en Suisse et de contribuer à son accueil, à son assistance et à son soutien, ainsi que de créer des sous-groupes, des clubs et d'autres centres culturels et sportifs. Le O. était une émanation du mouvement LTTE, où gravitaient des individus en lien avec celui-ci. Il assurait la collecte de dons, lesquels étaient contrôlés et souvent réclamés avec insistance. Les fonds obtenus étaient ensuite centralisés avant d'être transmis au Sri Lanka.
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Selon l'autorité précédente, plus de 32 Etats avaient inscrit le mouvement LTTE sur leur liste d'organisations terroristes, dont les Etats-Unis d'Amérique en 1996 puis en 2003, la Malaisie, l'Inde, le Royaume-Uni en 2001 et le Canada. Le Conseil de l'Union européenne s'était appuyé sur l'inscription effectuée par le Royaume-Uni lors de l'adjonction du mouvement sur sa propre liste. Depuis 2006, celui-ci avait ainsi été inscrit sur la liste de l'Union européenne concernant le gel des fonds des organisations terroristes. En Suisse, le Conseil fédéral avait interdit au mouvement LTTE de procéder à des récoltes de fonds et à toute propagande à l'occasion de la fête du "Heroes's Day" organisée le 2 décembre 2001 dans le canton de Fribourg. De manière plus générale, depuis 1999, la Suisse s'était intéressée à "l'extrémisme violent tamoul".
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S'agissant des éléments constitutifs de l'infraction à l'art. 260ter CP, l'autorité précédente a considéré que le mouvement LTTE constituait une organisation et pouvait même, de fait, être assimilé à un Etat. En Suisse, celui-ci manifestait ouvertement et rassemblait ses membres sans se cacher. Il distribuait du matériel de propagande sans dissimuler qu'il en était l'auteur, ou collectait des fonds en faveur de la lutte menée au Sri Lanka. Quant au O., sa structure, ses effectifs, le rôle de ses cadres et leurs activités étaient en règle générale connus au sein de la communauté tamoule et, dans une certaine mesure, à l'extérieur. Les portes des locaux du O. étaient ouvertes et les Tamouls pouvaient s'y rendre librement. Il n'y régnait aucune clandestinité ni loi du silence. Certains aspects de l'activité du O. restaient discrets - ainsi les relations bancaires, la comptabilité ou les achats d'armes - mais pas d'une manière différente de celle prévalant dans n'importe quel autre organisme. Le O. n'était pas assujetti au mouvement LTTE, même s'il existait une parenté idéologique entre les deux entités. Il s'agissait d'organismes distincts et souverains dont les activités différaient. Le mouvement LTTE réunissait des personnes dans une organisation hiérarchisée et armée, tandis que les cellules à l'étranger permettaient de financer son combat armé. Le O. n'agissait pas de manière concertée avec ce mouvement, encore moins pour commettre des crimes.
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A propos du caractère criminel de l'organisation, l'autorité précédente a considéré que le mouvement LTTE s'était incontestablement engagé dans des hostilités armées contre le gouvernement du Sri Lanka. Il n'était en revanche pas prouvé qu'il fût impliqué dans les actes de violence à caractère terroriste qui lui étaient imputés. Ainsi, le mouvement LTTE représentait bien une organisation structurée, secrète dans son pays d'origine, mais dont le but n'était pas de commettre des actes criminels de violence au sens de l'art. 260ter CP. Par ailleurs, il n'avait pas été établi que ledit mouvement entendait obtenir des revenus par des moyens criminels.
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Concernant enfin l'aspect subjectif de l'infraction, l'autorité précédente a estimé que même si le mouvement LTTE dût être qualifié d'organisation criminelle au sens de l'art. 260ter CP, son caractère terroriste ne s'imposait nullement à la raison. Il n'avait pas été démontré que les intimés concernés - s'ils avaient eu connaissance des accusations de terrorisme qui pesaient sur le mouvement et avaient su que les fonds récoltés en Suisse servaient à acheter des armes - eussent souhaité s'associer à une activité terroriste qui n'était nullement prédominante.
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4.4 Le principal point litigieux consiste, en l'espèce, à déterminer si le mouvement LTTE devait être qualifié d'"organisation criminelle" au sens de l'art. 260ter CP. L'autorité précédente a en substance refusé de retenir le caractère criminel de l'organisation car il n'était pas démontré que les actes de violence contre des civils qui lui étaient attribués émanaient directement de celle-ci. Elle a également relevé que lesdits actes avaient pris place dans un contexte de conflit armé avec le gouvernement du Sri Lanka et qu'on ignorait s'ils pouvaient être considérés comme illicites au regard du droit international humanitaire. Le recourant 2 soutient quant à lui que le mouvement LTTE aurait perpétré de nombreuses exactions ou actes terroristes dirigés spécifiquement contre des civils, qu'il aurait en outre recouru à des méthodes - telles que l'utilisation de boucliers humains, le recrutement d'enfants soldats, les enlèvements ou encore les assassinats politiques - en tous les cas illicites, de sorte qu'il aurait dû être considéré comme un groupement terroriste.
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L'objet de la présente procédure ne consiste pas à qualifier l'action du mouvement LTTE du point de vue du droit de la guerre ou du droit humanitaire. Il s'agit uniquement de déterminer si et dans quelle mesure les intimés concernés ont pu commettre une infraction à l'art. 260ter CP. A cet égard, il apparaît d'emblée que la cause se distingue de celles dans lesquelles le Tribunal fédéral a eu l'occasion de considérer - par le biais d'un examen "prima facie" - cette disposition à propos de groupements ou associations terroristes dans le cadre de l'entraide internationale en matière pénale (cf. notamment ATF 142 IV 175; ATF 133 IV 58; ATF 131 II 235; ATF 128 II 355). Outre que la présente procédure implique la poursuite directe des intimés en question par les autorités pénales suisses, le mouvement LTTE a déployé, au Sri Lanka, durant des décennies, une activité dont l'ampleur dépasse de beaucoup celle d'organisations qui ont pu être qualifiées de terroristes au regard de l'art. 260ter CP. De surcroît, il ressort du jugement attaqué que le O. a fonctionné au vu et au su des autorités suisses durant la période considérée. On doit donc se demander si, sous l'angle du principe de la légalité, les intimés concernés pouvaient être poursuivis sur la base de l'art. 260ter CP en raison des agissements qui leur ont été reprochés.
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4.5 Une peine ou une mesure ne peut être prononcée qu'en raison d'un acte expressément réprimé par la loi (art. 1 CP). Le principe de la légalité (nulla poena sine lege) est aussi ancré expressément à l'art. 7 CEDH. Il se déduit également de l'art. 5 al. 1, 9 et 164 al. 1 let. c Cst. (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2 p. 251; ATF 143 II 297 consid. 9.5 p. 343; ATF 138 IV 13 consid. 4.1 p. 19 s.). Le principe est violé lorsque quelqu'un est poursuivi pénalement en raison d'un comportement qui n'est pas visé par la loi; lorsque l'application du droit pénal à un acte déterminé procède d'une interprétation de la norme pénale excédant ce qui est admissible au regard des principes généraux du droit pénal; ou si quelqu'un est poursuivi en application d'une norme pénale qui n'a pas de fondement juridique (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2 p. 251). Le principe s'applique à l'ensemble du droit pénal. Il n'exclut pas une interprétation extensive de la loi à la charge du prévenu (ATF 138 IV 13 consid. 4.1 p. 20). La loi doit être formulée de manière telle qu'elle permette au citoyen de s'y conformer et de prévoir les conséquences d'un comportement déterminé avec un certain degré de certitude dépendant des circonstances (ATF 141 IV 279 consid. 1.3.3 p. 282; ATF 138 IV 13 consid. 4.1 p. 20). L'exigence de précision de la base légale ne doit cependant pas être comprise d'une manière absolue. Le législateur ne peut pas renoncer à utiliser des définitions générales ou plus ou moins vagues, dont l'interprétation et l'application sont laissées à la pratique. Le degré de précision requis ne peut pas être déterminé de manière abstraite. Il dépend, entre autres, de la multiplicité des situations à régler, de la complexité ou de la prévisibilité de la décision à prendre dans le cas particulier, du destinataire de la norme, ou de la gravité de l'atteinte aux droits constitutionnels. Il dépend aussi de l'appréciation que l'on peut faire, objectivement, lorsque se présente un cas concret d'application (ATF 139 I 72 consid. 8.2.1 p. 86; ATF 138 IV 13 consid. 4.1 p. 20 et les références citées; arrêts 6B_1174/ 2017 du 7 mars 2018 consid. 3.2; 6B_395/2017 du 16 novembre 2017 consid. 3.1).
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Le dossier de la cause comprend plusieurs décisions de justice étrangères concernant des personnes ayant oeuvré - y compris au sein d'organisations nationales semblables au O. - au profit du mouvement LTTE. Dans un jugement du 23 novembre 2011, l'Oberlandesgericht de Düsseldorf a ainsi retenu que le mouvement LTTE avait conduit diverses attaques - entre mars 1991 et février 2009 - contre des installations civiles, causant la mort de 457 civils. Il a détaillé celles-ci, évoquant par exemple un attentat aux explosifs commis le 15 juin 2006 contre un autobus civil, lequel a provoqué la mort de 64 personnes à Anuradhapura. L'Oberlandesgericht n'a cependant pas examiné au fond si le mouvement LTTE constituait une organisation terroriste, mais a constaté que celui-ci figurait, à l'époque des faits en question, sur la liste des organisations concernées par le règlement (CE) n° 2580/ 2001 du 27 décembre 2001 en matière de lutte contre le terrorisme. Il a ainsi condamné les prévenus pour avoir mis des fonds à disposition du mouvement LTTE et violé l'embargo prononcé sur ce dernier. Dans un jugement du 23 novembre 2009, le Tribunal de Grande instance de Paris s'est lui aussi penché sur le mouvement LTTE. Il a notamment retenu que celui-ci se trouvait à l'origine de nombreux actes de terrorisme, qu'il avait poursuivi de telles attaques y compris après le cessez-le-feu signé en 2002 et qu'à compter d'avril 2006, les "services spécialisés" avaient signalé une recrudescence d'actions de ce type, lesquelles avaient en particulier causé la mort de 412 civils en 2007 en raison d'attentats ou d'assassinats. Le tribunal a en outre indiqué que les "méthodes employées" par le mouvement LTTE, "qu'il s'agisse de l'enrôlement forcé, du recours à la menace, de l'utilisation de la violence comme mode d'expression, de la population comme bouclier humain", ne laissaient "aucun doute" sur son caractère terroriste. Enfin, dans un jugement du 30 avril 2015, la Cour de La Haye a elle aussi retenu que le mouvement LTTE avait perpétré divers attentats contre des civils ou des cibles civiles au Sri Lanka - notamment contre des villages et des lieux publics -, causant la mort de milliers de personnes, ou encore qu'il avait procédé - au fil des années - à des extorsions ou des disparitions forcées.
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D'autres pièces au dossier révèlent les actes de nature terroriste auxquels s'est livré le mouvement LTTE à côté de son action militaire conventionnelle. Par exemple, dans un rapport daté du 31 mars 2011, un groupe d'experts nommés par le Secrétariat général de l'ONU a fait état des assassinats politiques, des attaques suicides ayant occasionné de nombreuses morts civiles, sur des cibles de nature économique ou religieuse, ou encore d'exactions ou de menaces destinées à contrôler la population. De même, dans un rapport du 16 septembre 2015, le Haut-Commissariat des droits de l'Homme de l'ONU attribue au mouvement LTTE, pour la période courant de 2002 à 2011, des assassinats, notamment de civils, ou des attaques suicides contre des cibles civiles. Dans son rapport d'avril 2017, l'expert judiciaire P., invité par l'autorité précédente à expliquer l'histoire du mouvement LTTE, a notamment relevé que celui-ci avait conduit des attaques contre des civils durant tout le conflit contre le gouvernement sri lankais, en fournissant divers exemples d'exécutions de civils ou d'attentats perpétrés contre des cibles civiles, à l'instar d'une banque centrale. Enfin, dans un rapport de 2014 établi sur mandat de l'Office fédéral de la migration (An Institutional History of the Liberation Tigers of Tamil Eelam [LTTE]), l'auteur, Q., a également attribué au mouvement LTTE des attaques suicides contre des cibles civiles ou encore des assassinats ciblés, lesquels ont été perpétrés des années 1980 aux années 2000. Ces éléments auraient dû conduire l'autorité précédente à retenir que le mouvement LTTE se trouvait bien à l'origine de divers actes à caractère terroriste, quand bien même l'accusation n'aurait pas démontré, dans le cadre de la procédure, qu'une attaque ou un attentat en particulier aurait été fomenté et commandité par celui-ci. L'application de l'art. 260ter CP ne suppose pas, en effet, que la nature criminelle de l'organisation soit démontrée, dans chaque cas, par la preuve d'un acte de violence criminel pouvant lui être attribué.
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4.7.1 La genèse de l'art. 260ter CP est à mettre en relation avec la volonté du législateur de lutter contre le "crime organisé", c'est-à-dire contre les organisations, dont le fonctionnement est proche de celui d'une entreprise internationale, qui pratiquent une division très poussée des tâches, disposent de structures hermétiquement cloisonnées - conçues de façon méthodique et durable - s'efforçant de réaliser des profits aussi élevés que possible en commettant des infractions et en participant à l'économie légale, en recourant à la violence, à l'intimidation et en cherchant à exercer son influence sur la politique et l'économie. En résumé, le "crime organisé" envisagé correspondait aux agissements des structures mafieuses (cf. Message du 30 juin 1993 concernant la modification du code pénal suisse et du code pénal militaire [Révision du droit de la confiscation, punissabilité de l'organisation criminelle, droit de communication du financier], FF 1993 III 273 [ci-après: Message modification CP/CPM]). Après l'adoption de dispositions - jugées plus urgentes - destinées à lutter contre le blanchiment d'argent, l'art. 260ter CP a été inclus dans le "second train de mesures contre le crime organisé". Celui-ci faisait également suite à diverses interventions parlementaires relatives au crime organisé, aux associations de malfaiteurs ou au trafic de stupéfiants (cf. Message modification CP/CPM, op. cit., FF 1993 III 277 s. ch. 121). L'art. 260ter CP a donc été conçu afin de répondre aux situations dans lesquelles il n'est plus possible de reconstituer la chaîne de causalité qui mène à l'infraction concrète, c'est-à-dire chaque fois que les véritables auteurs s'entourent d'un rempart qui empêche de prouver leur participation à un délit précis et, partant, de les confondre (cf. Message modification CP/CPM, op. cit., FF 1993 III 287 ch. 211; cf. arrêt 6B_1132/2016 du 7 mai 2017 consid. 1.1, non publié aux ATF 143 IV 145). On peut à cet égard préciser que des travaux visant à lutter contre les "associations de malfaiteurs" avaient déjà été menés puis abandonnés par le passé (cf. Message du 10 décembre 1979 concernant la modification du code pénal et du code pénal militaire [Actes de violence criminels], FF 1980 I 1216).
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Si l'art. 260ter CP a été rédigé avec des termes généraux et sans les détails qui risquaient de réduire son efficacité, les contours de l'"organisation criminelle" ont été tracés dans le Message du Conseil fédéral y relatif. Parmi d'autres caractéristiques attribuées à l'organisation criminelle, sa structure et son effectif doivent être tenus secrets. Sur ce point, la nécessité pour celle-ci de garder le secret sur ses structures ainsi que sur la composition de ses effectifs doit permettre de distinguer l'association légale - occasionnellement susceptible de commettre des délits dans son domaine d'activité - et l'organisation criminelle (cf. Message modification CP/CPM, op. cit., FF 1993 III 290). Fondamentalement, l'organisation criminelle doit poursuivre le but de commettre des crimes violents ou de se procurer des revenus par des moyens criminels. Ainsi, ses activités doivent "pour l'essentiel" concerner la commission de crimes et la poursuite dudit but doit ressortir nettement de ses mesures d'organisation, la répartition des rôles dans la perspective des infractions planifiées revêtant une importance particulière (cf. Message modification CP/CPM, op. cit., FF 1993 III 291 s.). On peut enfin relever que, dans les considérations du Conseil fédéral concernant l'art. 260ter CP, la nature terroriste d'une "organisation criminelle" visée n'était mentionnée que de manière marginale (cf. Message modification CP/CPM, op. cit., FF 1993 III 288 et 291).
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Le Conseil fédéral a par la suite estimé, à propos de l'objectif général de lutte contre le terrorisme, que l'art. 260ter CP convenait "parfaitement pour combattre les organisations terroristes", au regard du but visé à travers les actes de violence commis, "typique des organisations terroristes" (cf. Message du 26 juin 2002 relatif aux Conventions internationales pour la répression du financement du terrorisme et pour la répression des attentats terroristes à l'explosif ainsi qu'à la modification du code pénal et à l'adaptation d'autres lois fédérales [ci-après: Messagerépression], FF 2002 5055 ch. 4.2.1). Il a exposé les raisonspour lesquelles il était défavorable à la création d'une liste des organisations et groupements considérés comme terroristes dans un texte législatif, nonobstant l'avantage - qu'il reconnaissait à cette technique législative - de permettre à chacun de reconnaître si son comportement tombe sous le coup du droit pénal ou non. Le Conseil fédéral préférait ainsi privilégier une réglementation générale et abstraite du terrorisme en laissant le juge, dans chaque cas concret, appliquer la disposition pénale générale et décider du caractère pénalement répréhensible d'un comportement (cf. Message répression, op. cit., FF 2002 5059). Le Conseil fédéral a justifié l'applicabilité de l'art. 260ter CP aux organisations tant mafieuses que terroristes en indiquant que toutes deux poursuivaient le même objectif, soit la commission de crimes violents (cf. Message répression, op. cit., FF 2002 5061 ch. 4.5.4). Dans le cadre de la révision législative ayant suivi les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis d'Amérique, le Conseil fédéral n'a ainsi pas préconisé de modification du texte de l'art. 260ter CP, mais uniquement une altération du titre marginal qui aurait dû évoquer les "organisations criminelles et terroristes" (cf. Message répression, op. cit., FF 2002 5061 et 5080), ce qui n'a pas été retenu par le législateur.
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En 2006, à propos des moyens légaux à disposition des autorités pour combattre le terrorisme, le Conseil fédéral relevait que l'art. 260ter CP avait été conçu dans l'optique de la répression des organisations criminelles comme la mafia italienne, dont la motivation première est l'argent. Tout en rappelant qu'il n'existait pas de définition juridique internationalement reconnue du terrorisme, il admettait que la distinction entre le terrorisme et les luttes de libération ou le terrorisme d'Etat n'était "pas claire" (cf. Lutter plus efficacement contre le terrorisme et le crime organisé [Rapport du Conseil fédéral du 9 juin 2006 donnantsuite au postulat du 21 février 2005 de la Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats (05.3006)], FF 2006 5431 ch. 2.2.3).
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Enfin, on peut mentionner que le Conseil fédéral a récemment proposé aux Chambres fédérales de modifier l'art. 260ter CP. Le projet concernerait les "organisations criminelles et terroristes" et incriminerait expressément un comportement relatif à cet aspect, en punissant celui qui participerait à une organisation "qui poursuit le but de commettre des actes de violence criminels visant à intimider une population ou à contraindre un Etat ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque", de même que celui qui soutiendrait une telle organisation (cf. Projet d'arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme et de son Protocole additionnel et concernant le renforcement des normes pénales contre le terrorisme et le crime organisé, FF 2018 6561). Selon le Conseil fédéral, il conviendrait notamment de tenir compte, dans l'application de cette nouvelle norme, des décisions des comités internationaux et des listes actualisées d'organisations terroristes. Une intégration, dans la norme, d'une liste d'organisations criminelles ne serait en revanche pas souhaitable (cf. Message du 14 septembre 2018 relatif à l'arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme et de son Protocole additionnel et concernant le renforcement des normes pénales contre le terrorisme et le crime organisé, FF 2018 6514 ch. 4.1.2.6).
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Il ressort de ce qui précède que l'art. 260ter CP a, originellement, été conçu pour lutter contre le crime organisé de type mafieux et non directement contre les organisations terroristes. Au fil des ans, le Conseil fédéral a cependant affirmé que cette disposition convenait pour s'attaquer à des organisations de cette nature, dans la mesure où, comme les structures mafieuses, celles-ci avaient pour objectif la commission de crimes violents. Le soin était laissé au juge de déterminer juridiquement, de cas en cas, si la participation ou le soutien d'une organisation pouvait tomber sous le coup de l'art. 260ter CP. Ce n'est que récemment que le Conseil fédéral a proposé d'inclure expressément dans cette norme l'incrimination de la participation ou du soutien à une organisation terroriste, en y incluant même une définition de l'action terroriste et en proposant d'appliquer une telle disposition en se référant aux listes de groupes terroristes dressées par des comités internationaux ou des Etats.
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4.7.2 Depuis l'entrée en vigueur de l'art. 260ter CP, la reconnaissance de cette norme comme devant s'appliquer également aux organisations terroristes a donc été essentiellement le fait de la jurisprudence. A cet égard, le Tribunal fédéral a déjà relevé à quel point la tâche qui lui était confiée était délicate, dès lors qu'il s'agissait de distinguer entre des actes terroristes et des actions violentes "politiquement légitimes" (cf. ATF 142 IV 175 consid. 4.7 p. 181; ATF 131 II 235 consid. 3.3 p. 245; ATF 130 II 337 consid. 3.3 p. 344). En outre, la jurisprudence développée s'est essentiellement attachée à l'examen de l'art. 260ter CP sous l'angle de la double incrimination, selon lequel il convient de rechercher si l'organisation concernée pourrait "prima facie" justifier une application de cette disposition (cf. ATF 142 IV 175 consid. 5.9 p. 192), ou concernant les organisations Al-Qaïda ou Etat islamique (cf. arrêts 6B_1132/2016 précité consid. 1, non publié aux ATF 143 IV 145; 6B_645/2007 du 2 mai 2008 consid. 7), dont le caractère terroriste est notamment notoire en Suisse eu égard à leur interdiction par ordonnances dès 2001 pour la première et 2014 pour le second, ou à la loi fédérale du 12 décembre 2014 interdisant les groupes "Al-Qaïda" et "Etat islamique" et les organisations apparentées (RS 122).
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Il apparaît ainsi qu'en dehors des groupes Al-Qaïda et Etat islamique ou de ceux que le Tribunal fédéral a déjà qualifiés de terroristes dans sa jurisprudence concernant l'entraide internationale en matière pénale - et qui, partant, seraient susceptibles d'entraîner une application de l'art. 260ter CP -, il est malaisé de prévoir si une organisation ayant notamment commis des actes terroristes pourrait être considérée comme une organisation criminelle au sens de cette norme. Or, cette incertitude apparaît rédhibitoire - sous l'angle du principe de la légalité - concernant le mouvement LTTE, au vu de ce qui suit.
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En novembre 2001, un arrêté du Conseil fédéral a interdit au mouvement LTTE de procéder à des récoltes de fonds ou à des activités de propagande incitant à la violence lors de la fête du "Heroes's Day" organisée dans le canton de Fribourg. Cette mesure n'était cependant pas présentée comme visant à lutter contre le terrorisme ou empêcher le soutien à une organisation de cette nature, mais comme devant éviter que "des conflits armés à l'étranger soient soutenus depuis la Suisse sur le plan matériel ou idéologique" (cf. Message répression, op. cit., FF 2002 5039 ss).
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En 2002, le mouvement LTTE a été qualifié d'"organisation extrémiste tamoule" par le Conseil fédéral. Il était noté que celui-ci faisait régulièrement parler de lui par ses collectes de fonds et ses activités de propagande à l'occasion de rassemblements de la communauté tamoule (cf. Analyse du 26 juin 2002 de la situation et des menaces pour la Suisse à la suite des attentats terroristes du 11 septembre 2001 [Rapport du Conseil fédéral à l'intention du Parlement] [ci-après: Analyse], FF 2003 1701). Le Conseil fédéral précisait que les collectes organisées par le mouvement tamoul en Suisse "étaient fréquemment liées à des actes de violence psychique ou physique jusque vers fin 1998, où un changement s'est amorcé" et que le mouvement LTTE s'effor[çait] désormais de ne faire aucune entorse au droit dans le cadre de [ses] collectes" (cf. Analyse, op. cit., FF 2003 1703). Ainsi, de telles activités de collectes et de propagande - attribuées directement au mouvement LTTE - n'étaient aucunement décrites comme constitutives d'infractions pénales, puisque le Conseil fédéral pouvait notamment relever les efforts déployés pour demeurer dans le cadre de la légalité.
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On peut aussi signaler qu'en 2009, à l'occasion d'une question posée au Conseil national tendant à savoir pourquoi "l'organisation des LTTE [était] toujours légale en Suisse", la cheffe du Département fédéral des affaires étrangères, Madame la conseillère fédérale R.,a répondu que la Suisse ne tenait pas de liste des organisations terroristes, que - s'il n'existait pas d'infraction de terrorisme - "toutes les composantes d'un acte terroriste [étaient] toutefois punissables, par exemplemeurtre, menace à la bombe, financement d'actes criminels [...]". Selon elle, face au mouvement LTTE, "une politique de restriction et de vigilance [était] en vigueur". Les Tamouls vivant en Suissedevaient "pouvoir exercer pacifiquement leurs droits, y compris celui de manifester, mais les LTTE ne [devaient] pas exercer d'activitésillégales en Suisse ou à partir de leur territoire", tout acte répréhensible de leur part devant être poursuivi (cf. BO 2009 CN 954 s.). Il ne découle pas de ces explications que le soutien ou le financement du mouvement LTTE depuis la Suisse devait en tant que tel, en l'absence d'autre "acte répréhensible", entraîner une poursuite sur la base de l'art. 260ter CP.
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4.7.4 Les intimés concernés ont été mis en prévention pour infraction à l'art. 260ter CP pour avoir, en substance, entre 1999 et 2009, oeuvré à divers titres au sein du mouvement LTTE, respectivement du O., en particulier dans le but de récolter et transférer des fonds à cette organisation. Durant la période concernée, il apparaît que le mouvement a été actif en Suisse, y compris par le biais du O., au vu et au su des autorités, notamment à l'occasion de manifestations publiques visant à attirer l'attention de celles-ci ou de l'opinion publique. Les diverses prises de position des autorités fédérales évoquées précédemment révèlent que le mouvement LTTE n'a, à tout le moins durant la période concernée, pas été présenté comme une organisation de nature criminelle, dont les activités auraient dû être combattues et les membres systématiquement poursuivis. Ces éléments rendaient particulièrement douteuse une éventuelle qualification juridique d'"organisation criminelle" s'agissant du mouvement LTTE ou du O. Comme l'a de surcroît signalé l'autorité précédente, la Police judiciaire fédérale était elle-même empruntée pour considérer le mouvement LTTE. En 2006, elle exposait ainsi au Service d'analyse et de prévention, après avoir pris ses renseignements auprès d'un procureur du Ministère public de la Confédération, que la situation juridique - notamment au regard de l'art. 260ter CP - n'était pas claire, que le mouvement LTTE n'était pas classé en Suisse parmi les organisations terroristes et que les groupes affiliés pouvaient de manière presque illimitée s'adonner à la propagande et aux collectes de fonds.
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Cette imprévisibilité concernant la qualification découlait en outre de la formulation et de l'interprétation de l'art. 260ter CP. Il ne s'imposait ainsi nullement à l'esprit que le mouvement LTTE pût être considéré comme une organisation tenant sa structure et son effectif secrets et poursuivant le but de commettre des actes de violence criminels ou de se procurer des revenus par des moyens criminels. D'ailleurs, selon la doctrine, qui suit en cela les considérations du Conseil fédéral précitées (cf. Message modification CP/CPM, op.cit., FF 1993 III 291), l'art. 260ter CP s'applique aux organisations dont le but essentiel - sinon exclusif - est de commettre des actes de violence criminels ou de se procurer des revenus par des moyens criminels (cf. MARC ENGLER, in Basler Kommentar, Strafrecht, vol. II, 4 e éd. 2019, n° 9 ad art. 260ter CP; PAJAROLA/OEHEN/THOMMEN, in Kommentar Kriminelles Vermögen, Kriminelle Organisationen, vol. II, 2018, n° 366 ad art. 260ter CP; TRECHSEL/VEST, in Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, 3 e éd. 2018, n° 6 ad art. 260ter CP; ULRICH WEDER, in StGB, JStGB Kommentar, 20 e éd. 2018, n° 13 ad art. 260ter CP; DONATSCH/THOMMEN/WOHLERS, Delikte gegen die Allgemeinheit, 5 e éd. 2017, § 48 p. 207; BERNARD CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3 e éd. 2010, n° 5 ad art. 260ter CP; cf. aussi STRATENWERTH/BOMMER, Besonderes Teil, vol. II, 7 e éd. 2013, § 40 n. 23). Ainsi, il ne suffit pas qu'un ou plusieurs membres poursuivent un but criminel, tandis que l'organisation en soi, respectivement la majorité de ses membres, viserait un objectif licite (cf. PAJAROLA/OEHEN/ THOMMEN, op. cit., n° 347 ad art. 260ter CP). Dans le cas du mouvement LTTE, il n'apparaît pas que l'organisation aurait essentiellement cherché à commettre des actes de violence criminels. Les attentats perpétrés ou autres agissements de nature criminelle constituaient une activité secondaire à côté de la lutte politique et militaire - à caractère international compte tenu notamment de l'implication de l'Inde dans le conflit - conduite contre le gouvernement du Sri Lanka, de même qu'au regard de l'administration quasi-étatique assurée d'une portion du territoire national. De ce point de vue, les activités à caractère terroriste conduites par le mouvement LTTE n'étaient pas prépondérantes.
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La jurisprudence du Tribunal fédéral à propos de l'art. 260ter CP n'a pas non plus développé des critères qui auraient permis de prévoir que le mouvement LTTE dût être considéré comme une organisation criminelle. Celui-ci a par exemple considéré que l'Albanian National Army (ANA) pouvait être qualifiée d'organisation terroriste au sens de l'art. 260ter CP, en relevant qu'il s'agissait d'un groupement clandestin extrémiste, doté d'une structure paramilitaire, comptant quelques centaines de membres actifs, dont le but était de déstabiliser politiquement par la violence une région afin d'obtenir l'indépendance du Kosovo, cela au moyen d'attentats (cf. ATF 131 II 235 consid. 2.13 p. 242 s.). Par comparaison, le mouvement LTTE et le O. n'apparaissent pas comme des organisations clandestines dont l'objectif consisterait directement dans la déstabilisation d'une région.
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Le traitement dont a bénéficié le mouvement LTTE de la part des autorités fédérales se distingue nettement de celui qui pourrait être réservé à une pure organisation criminelle ou terroriste. On peut ainsi rappeler qu'une délégation du Parlement fédéral s'est rendue, en 2003, au Sri Lanka, y compris dans la zone contrôlée par le mouvement LTTE. En outre, comme l'a relevé l'autorité précédente, dans un communiqué de presse du 3 février 2004, le Département fédéral des affaires étrangères (ci-après: DFAE) relatait les entretiens tenus avec des représentants du mouvement LTTE reçus à AA. Le DFAE s'y "félicit[ait] deconstater que les LTTE demeurent prêts à négocier, et qu'ils ont préparé une proposition dans ce sens", et précisait que "les représentants du DFAE ont rappelé à cette occasion que les LTTE ont une large responsabilité en ce qui concerne le renforcement des droits de l'homme et l'instauration d'une société pluraliste dans le Nord et l'Est du Sri Lanka". On voit mal que de tels propos auraient pu être tenus à l'égard d'organisations déjà considérées comme criminelles au sens de l'art. 260ter CP, à l'instar d'Al-Qaïda ou de l'Etat islamique par exemple. Il ressort au contraire du communiqué de presse en question que le mouvement LTTE pouvait alors être considéré comme un interlocuteur valable concernant le conflit au Sri Lanka. Par ailleurs, le témoin S., qui a oeuvré au sein du DFAE en lien avec le Sri Lanka durant les années 2000, a expliqué que ce département s'était trouvé en contact avec des membres officiels du mouvement LTTE dans ce pays mais aussi en Suisse, "pour leur rappeler de ne pas se livrer à des activités criminelles telles que mettre des personnes sous pression dans le cadre de collectes de fonds en leur disant que cela allait contre leurs intérêts et que c'était contraire au droit suisse". De tels propos n'étaient pas de nature à permettre aux personnes agissant au sein ou pour le compte du mouvement LTTE en Suisse de percevoir que celui-ci pourrait être considéré comme une organisation criminelle au sens de l'art. 260ter CP. De même, le fait que le O. eût agi en Suisse durant des années sans dissimuler la cause défendue ni le but de ses actions de propagande et de collectes de fonds - soit principalement le support du mouvement LTTE au Sri Lanka - ne pouvait laisser prévoir à ses membres ou aux personnes qui le soutenaient que leur action pourrait être assimilée à celle pour le compte d'une organisation qui tient sa structure et son effectif secrets et qui poursuit le but de commettre des actes de violence criminels ou de se procurer des revenus par des moyens criminels. On peut derechef estimer que de tels agissements publics ne seraient pas restés sans conséquences s'ils avaient été le fait d'organisations reconnues comme criminelles à titre de l'art. 260ter CP, comme Al-Qaïda ou l'Etat islamique.
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Il convient encore de préciser que l'inscription, en 2006, du mouvement LTTE sur la liste des gels de fonds dressée par le Conseil de l'Union européenne dans le cadre de la lutte contre le terrorisme n'a quant à elle pas été justifiée par un acte particulier du mouvement ou une décision judiciaire. Celui-ci a été inscrit sur ladite liste en même temps que des dizaines d'autres personnes ou organisations, afin de concrétiser le règlement (CE) n° 2580/2001 (cf. décision du Conseil de l'Union européenne du 29 mai 2006 [2006/379/CE]). Par la suite, afin de justifier son maintien sur cette liste, le Conseil de l'Union européenne a uniquement évoqué des "actes terroristes" qu'il lui attribuait - commis entre 2005 et 2010 - et a mentionné des décisions du Royaume-Uni et d'Irlande du Nord datant de 2001 portant interdiction et gel des fonds du mouvement LTTE, ainsi qu'une décision adoptée au cours de l'année 1992 par les autorités indiennes, portant interdiction du mouvement LTTE (cf. à ce propos l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne [EU:C:2017:583] du 26 juillet 2017). On ne distingue donc pas, à cet égard, un événement quelconque qui aurait été, au moment de cette inscription, de nature à expliquer que le statut juridique du mouvement LTTE en Suisse aurait dû être modifié.
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4.8 En définitive, on doit admettre que l'art. 260ter CP n'a jamais été conçu comme une disposition applicable à un mouvement pouvant à la marge se livrer à des actes terroristes mais poursuivant par ailleurs d'autres objectifs directs, ainsi la conduite d'une lutte armée conventionnelle, la gestion quasi-étatique d'un territoire ainsi que la reconnaissance de l'indépendance d'une communauté ethnique, soit se distinguant nettement des agissements d'une organisation active dans le crime organisé ou d'un groupe terroriste tel que ceux reconnus comme tels par la jurisprudence. Les crimes violents auxquels le mouvement LTTE a pu se livrer, comme les attentats ou exactions contre des civils et des politiciens, correspondent certes aux actes évoqués par exemple à l'art. 260quinquies CP ou à ceux mentionnés dans le projet d'art. 260ter CP soumis au Parlement fédéral par le Conseil fédéral (cf. consid. 4.7.1 supra), ce qui n'est cependant pas déterminant en l'espèce. Il convient également de relever que l'art. 260ter CP n'apparaît pas adéquat pour sanctionner la participation ou le soutien d'une organisation telle que le mouvement LTTE. En effet, vu l'ampleur et la diversité des tâches non criminelles que celui-ci a exercées au Sri Lanka au fil des ans, on pouvait difficilement affirmer qu'une personne collectant des fonds et du matériel à son profit envisageait que son comportement servît directement un objectif criminel (cf. Message modification CP/CPM, op. cit., FF 1993 III 294; ATF 132 IV 132 consid. 4.1.4 p. 135), lequel n'était en l'occurrence que marginal. Ainsi, la poursuite des intimés concernés pour infraction à l'art. 260ter CP était contraire au principe de la légalité, les agissements reprochés aux intéressés n'étant pas visés par cette disposition.
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Il n'était pas prévisible, pour les intimés concernés, que leurs actions en faveur du O., respectivement du mouvement LTTE, pourraient être considérées comme constitutives d'infractions à l'art. 260ter CP, puisque, durant la période incriminée, diverses autorités fédérales se sont exprimées à propos dudit mouvement, sans jamais laisser comprendre qu'il pût être considéré comme une organisation criminelle. Il apparaît d'ailleurs qu'une incertitude concernant la nature juridique du mouvement LTTE habitait alors ces autorités, lesquelles ont à plusieurs reprises prié ses représentants de respecter les lois suisses dans leurs agissements sur le territoire. Contrairement aux pays de l'Union européenne - dans certains desquels des membres du mouvement LTTE ont été condamnés -, la Suisse a choisi de ne pas dresser une liste d'organisations terroristes. Cela ne l'empêche nullement de prohiber des organisations particulières - par exemple sur la base de l'art. 74 de la loi fédérale du 25 septembre 2015 sur le renseignement (LRens; RS 121) - et de sanctionner les individus s'y associant, comme elle l'a fait s'agissant d'Al-Qaïda ou de l'Etat islamique. Ce choix ne saurait cependant justifier une imprévisibilité complète de l'application de la loi pénale, conduisant des individus à faire l'objet de poursuites pénales en raison de leurs agissements au profit d'une organisation qui serait, après plusieurs années d'activité admise en Suisse, considérée comme terroriste.
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