BGE 111 V 201 | |||
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39. Extrait de l'arrêt du 23 octobre 1985 dans la cause Caisse de compensation du canton du Jura contre Courtet et Tribunal cantonal jurassien | |
Regeste |
Art. 7 IVG; Art. 32 Ziff. 1 lit. e des Übereinkommens Nr. 128 der Internationalen Arbeitsorganisation über Leistungen bei Invalidität und Alter und an Hinterbliebene; Art. 68 lit. f der Europäischen Ordnung der Sozialen Sicherheit: Kürzung der Geldleistungen wegen Grobfahrlässigkeit. |
Sie stehen der Kürzung einer Invalidenrente wegen Grobfahrlässigkeit (ohne Vorsatz) nicht entgegen. | |
Extrait des considérants: | |
2. a) Aux termes de l'art. 32 ch. 1 let. e Convention OIT No 128 concernant les prestations d'invalidité, de vieillesse et de survivants du 29 juin 1967, en vigueur pour la Suisse depuis le 13 septembre 1978 (RO 1978 1493) et de l'art. 68 let. f Code européen de sécurité sociale (CESS) du 16 avril 1964, en vigueur pour notre pays depuis le 17 septembre 1978 (RO 1978 1518), les prestations d'assurances sociales auxquelles une personne aurait droit peuvent être "suspendues", c'est-à-dire refusées, réduites ou retirées, lorsque l'éventualité a été provoquée "par une faute grave et intentionnelle" selon la convention No 128, ou "par une faute intentionnelle de l'intéressé" selon le CESS. Il s'ensuit que les prestations ne peuvent être "suspendues" en cas de faute non intentionnelle de l'intéressé. En revanche, en vertu de l'art. 7 al. 1 LAI, il est possible de refuser, réduire ou retirer, temporairement ou définitivement, les prestations en espèces de l'assurance-invalidité à l'assuré qui a, notamment, causé ou aggravé son invalidité intentionnellement, c'est-à-dire avec conscience et volonté (MAURER, Schweizerisches Sozialversicherungsrecht, vol. I, p. 326), mais aussi qui a commis une faute grave non intentionnelle. Il existe ainsi une divergence entre les dispositions conventionnelles précitées et le droit interne. Dans un tel cas, le Tribunal fédéral des assurances examine d'office si et dans quelle mesure les dispositions de droit international et de droit national qui paraissent applicables dans un cas d'espèce correspondent, et laquelle de ces dispositions doit prévaloir lorsqu'elles divergent. Il procède de la même manière en présence de deux normes de droit interne apparemment contradictoires.
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b) Selon la jurisprudence et la doctrine dominante, le droit international conventionnel prime le droit interne. Un Etat qui s'engage par traité doit en respecter les clauses sans considération de la teneur de son droit interne (ATF ATF 109 Ib 173 consid. 7b; v. aussi JAAC 49/1985 No 36 II p. 254; cf. dans la littérature récente: JACOT-GUILLARMOD, Fondements juridiques internationaux de la primauté du droit international dans l'ordre juridique suisse, RJB 120/1984, p. 227 s. et, du même auteur, La primauté du droit international face à quelques principes directeurs de l'Etat fédéral suisse, RDS/1985 I p. 383 s.). Ainsi que le Tribunal fédéral des assurances l'a admis dans une jurisprudence constante, ce principe s'applique également dans le domaine des conventions internationales en matière de sécurité sociale (ATF 110 V 76 consid. 2b et les arrêts cités). Une minorité de la doctrine soutient l'opinion inverse et considère que, dans certains domaines, c'est le droit interne qui prime le droit international (SIEGENTHALER, Völkerrecht und Landesrecht nach Schweizerischer Rechtsordnung. Das Problem des Staatsvertragsrechts im Landesrecht, RJB 120/1984 p. 201 s.).
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Les clauses des traités internationaux dites "self-executing" s'appliquent directement dans chaque Etat contractant, sans adoption préalable de dispositions internes, ce qui implique qu'elles soient suffisamment précises pour servir de base à la solution du cas d'espèce (ATF 106 Ib 187). Inversement, les traités "executory" ne sont applicables dans les Etats contractants qu'après l'adoption de dispositions internes. Faute de contenir des clauses immédiatement obligatoires, ils ne lient les autorités d'exécution et les administrés que par l'intermédiaire de la législation nationale (GRISEL, Traité de droit administratif, p. 91; IMBODEN/RHINOW, Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, 5e éd., vol. I, p. 80).
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Si, comme on l'a vu, la jurisprudence s'est prononcée pour la primauté du droit international sur le droit national, le Tribunal fédéral a cependant réservé l'hypothèse ou le législateur fédéral refuse de respecter les obligations internationales de la Suisse et vote en connaissance de cause des dispositions internes qui les violent. Dans ce cas, le Tribunal fédéral applique les normes édictées par l'Assemblée fédérale (ATF 99 Ib 44 s.). Critiquée par plusieurs auteurs (voir notamment les deux articles susmentionnés de JACOT-GUILLARMOD, ainsi que WILDHABER, Bemerkungen zum Fall Schubert betreffend das Verhältnis von Völkerrecht und Landesrecht, ASDI [Annuaire suisse de droit international] 30/1974 p. 195 s., et HANS HUBER, RJB 110/1974 p. 493), cette jurisprudence est en revanche approuvée par GRISEL qui estime qu'elle ne paraît pas dépourvue de justification, attendu que si le Parlement fédéral méconnaît, le sachant et le voulant, les devoirs de son pays envers d'autres Etats, il tranche le problème de la priorité entre le droit international et le droit national en faveur du second, de manière à lier le Tribunal fédéral (op.cit., p. 92).
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c) En ce qui concerne les dispositions conventionnelles en cause dans la présente affaire, plusieurs auteurs se sont prononcés pour que leur soit reconnu le caractère de clauses "self-executing" (VILLARS, Le Code européen de sécurité sociale et le Protocole additionnel, 1979 p. 16; BERENSTEIN, La Suisse et le développement international de la sécurité sociale, SZS 1981 p. 186; GREBER, Droit suisse de la sécurité sociale, 1982 p. 228), alors que d'autres auteurs se bornent à qualifier de "délicat" le problème de la réduction des prestations d'assurance sociale en vertu des dispositions de droit interne ou des normes de droit international (GHELEW/CLERC, L'assurance-accidents, FJS No 346, p. 10 s.). Cette question a aussi été évoquée dans le "Rapport sur une partie générale du droit suisse des assurances sociales et Projet de loi" (Berne 1984), publié par la Société suisse de droit des assurances, dont l'auteur estime que c'est à la jurisprudence qu'il appartient de dire s'il existe, sur ce point, une contradiction entre les normes de droit interne et les conventions internationales ratifiées par la Suisse (op.cit., p. 45).
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Dans son préavis complémentaire, l'Office fédéral des assurances sociales conteste le caractère "self-executing" des normes conventionnelles en cause et il allègue notamment que les deux traités ne sont que des instruments normatifs qui ne comportent, pour les Etats signataires, que l'engagement de maintenir leur législation à un niveau prescrit ou leur recommandent de les élever à ce niveau.
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Il n'est pas possible de déduire des travaux préparatoires qui ont précédé l'approbation, par l'Assemblée fédérale, de la Convention OIT No 128 et du CESS, une volonté délibérée du législateur fédéral de donner la prééminence au droit national sur le point ici en discussion, c'est-à-dire les conditions de la réduction ou du refus de certaines prestations d'assurance sociale en cas de faute grave commise par l'assuré. Ce problème n'a, en effet, pas été abordé par le Conseil fédéral dans son message du 17 novembre 1976 relatif à ces conventions (FF 1976 III 1345 ss), ni lors des débats aux Chambres (BO 1977 CN 895 ss et CE 2-3). Par contre, il est avéré que le Conseil national, en particulier, a considéré, en se fondant sur le rapport de sa commission, que ces conventions internationales ne comportaient pour la Suisse aucune charge nouvelle, financière ou administrative, c'est-à-dire notamment aucune obligation d'adapter ou de modifier sa législation de sécurité sociale, et qu'aucun droit individuel ne pouvait en dériver (BO CN, loc.cit.).
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Il faut par ailleurs relever que postérieurement à l'entrée en vigueur des traités internationaux en question, le législateur a maintenu dans la nouvelle loi sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 la réduction des prestations en espèces, lorsque l'assuré a provoqué l'accident "par une négligence grave", comme cela était déjà le cas sous l'empire du droit antérieur (comp. art. 37 al. 2 LAA et 98 al. 3 LAMA). Quant à l'art. 7 al. 1 LAI qui est plus particulièrement en cause ici, il n'est pas prévu de le modifier dans le cadre de la deuxième révision de l'assurance-invalidité actuellement en cours (FF 1985 I 21 ss).
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Dans ces conditions, on doit admettre qu'en approuvant la Convention OIT No 128 et le CESS, l'Assemblée fédérale n'a pas entendu modifier par ce biais la règle formulée à l'art. 7 al. 1 LAI selon laquelle même une faute grave commise par négligence peut conduire à refuser, réduire ou retirer à un assuré des prestations en espèces. Aussi, contrairement à l'opinion exprimée par certains auteurs (consid. 2c ci-dessus) et par la juridiction cantonale, il faut dénier tout caractère "self-executing" aux normes conventionnelles mentionnées au début du présent considérant. S'il existe, sur ce point, une divergence entre la norme de droit interne et les dispositions correspondantes de traités internationaux ratifiés par la Suisse, c'est au législateur qu'il incombe d'en tirer les conclusions et cela d'autant plus qu'il s'agit en l'occurrence de l'un des principes fondamentaux du droit fédéral des assurances sociales.
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