BGE 115 V 22 | |||
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5. Arrêt du 6 mars 1989 dans la cause Office fédéral des assurances sociales contre P. et Tribunal des assurances du canton de Vaud | |
Regeste |
Art. 48 Abs. 2 IVG, Art. 48ter AHVG: Nachzahlung von Leistungen und Übergang der Ansprüche. | |
Sachverhalt | |
A.- Antonio P., né en 1942, carreleur de profession, était membre de la société en nom collectif P. et M., spécialisée dans les travaux de carrelage et de fumisterie. Le 29 août 1982, il a été victime d'un accident de la circulation au cours duquel il a subi de multiples fractures. Il a été totalement incapable de travailler jusqu'au 19 juin 1983; il a ensuite repris son activité professionnelle à raison de 50%.
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L'accident a laissé subsister des séquelles sous la forme d'un syndrome vertébral dorsal post-traumatique, avec des dorsalgies, et d'importantes douleurs intercostales. La société en nom collectif P. et M. ayant été dissoute avec effet au 31 juillet 1985, Antonio P. a poursuivi à son propre compte une activité de carreleur.
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B.- L'accident a été causé par la faute d'un tiers assuré en responsabilité civile auprès d'une compagnie d'assurance, laquelle a versé diverses indemnités à Antonio P. Le 18 février 1985, ce dernier a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité. Par décision du 22 janvier 1987, la Caisse cantonale vaudoise de compensation lui a alloué une demi-rente dès le 1er février 1984, soit à partir du douzième mois ayant précédé le dépôt de la demande.
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C.- Antonio P. a recouru contre cette décision en concluant au versement d'une rente entière.
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Par jugement du 10 décembre 1987, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a renvoyé la cause à l'administration en invitant celle-ci à procéder à une nouvelle comparaison des revenus, après instruction complémentaire, cela afin de déterminer si l'assuré pouvait éventuellement prétendre une rente entière. Il a d'autre part considéré que la rente devait être allouée dès le 1er août 1983 (et non le 1er février 1984).
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D.- L'Office fédéral des assurances sociales interjette un recours de droit administratif dans lequel il conclut à l'annulation du jugement cantonal, dans la mesure où celui-ci fixe au 1er août 1983 le point de départ du droit de l'assuré à une rente.
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Antonio P. conclut au rejet du recours.
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La juridiction cantonale s'est également exprimée sur le recours.
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Considérant en droit: | |
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Selon l'art. 48 al. 2 LAI, si l'assuré présente sa demande plus de douze mois après la naissance du droit, les prestations ne sont allouées que pour les douze mois précédant le dépôt de la demande. Elles sont allouées pour une période antérieure si l'assuré ne pouvait pas connaître les faits ouvrant droit à prestations et qu'il présente sa demande dans les douze mois dès le moment où il en a eu connaissance.
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Cette disposition légale institue un délai de péremption (ATF 102 V 113 consid. 1a; MAURER, Schweizerisches Sozialversicherungsrecht, vol. I, p. 308), qui ne saurait être ni interrompu ni suspendu: le droit à des prestations s'éteint s'il n'est pas exercé dans les douze mois dès sa naissance; demeure réservé l'art. 48 al. 2, deuxième phrase, LAI, dont l'application - soumise à de strictes exigences (voir p.ex. RCC 1984 p. 419) - n'entre à l'évidence pas en considération en l'espèce.
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b) L'intimé a été victime d'un accident le 29 août 1982 et il a subi, de ce fait, une incapacité de travail, tout d'abord totale, puis de 50% dès le 20 juin 1983. Conformément à l'art. 29 al. 1 LAI, son droit à la rente a pris naissance, au plus tôt, le 1er août 1983 (cf. également art. 29 al. 2 LAI; ancien art. 29 al. 1, deuxième phrase, LAI).
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L'assuré s'est toutefois annoncé à l'assurance-invalidité le 18 février 1985 seulement. Il ne pouvait donc, eu égard à la tardiveté de sa demande, prétendre le versement d'une rente qu'à partir du 1er février 1984, comme l'a retenu à bon droit l'administration.
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b) L'art. 48 al. 2 LAI est parfaitement clair et ne nécessite, sur le point ici en discussion, aucune interprétation. Admettre une prolongation du délai de douze mois, dans d'autres hypothèses que celle envisagée par l'art. 48 al. 2, deuxième phrase, LAI, impliquerait la reconnaissance d'une authentique lacune de la loi, qu'il appartiendrait au juge de combler selon la règle générale exprimée par l'art. 1er al. 2 CC. Mais, à l'évidence, on ne saurait en l'espèce parler d'une telle lacune. En effet, la juridiction cantonale perd de vue que l'assurance-invalidité n'est subrogée dans les droits de l'assuré que jusqu'à concurrence des prestations effectivement fournies par elle. Le Conseil fédéral s'est du reste clairement exprimé à ce sujet, dans son message concernant la neuvième révision de l'assurance-vieillesse et survivants, en indiquant que "le lésé conservera le surplus de sa créance pouvant atteindre, le cas échéant, la différence séparant les prestations AVS/AI du dommage global déterminant la réparation due par le tiers" (FF 1976 III 36; cf. également art. 48quater al. 3, première phrase, LAVS). Autrement dit, si l'intéressé est déchu d'une partie de ses droits vis-à-vis de l'assurance-invalidité, en raison de l'art. 48 al. 2 LAI, l'étendue du droit de recours de l'assurance sociale sera réduite d'autant et la créance du lésé envers le tiers responsable augmentée dans la même mesure (STOESSEL, Das Regressrecht der AHV/IV gegen den Haftpflichtigen, thèse Zurich 1982, p. 55; STEIN, Probleme des Regressrechts der AHV/IV gegenüber dem Haftpflichtigen und die Stellung des Geschädigten, Festschrift ASSISTA, Genève 1979, p. 330, note 33; VALTERIO: Commentaire de la loi sur l'assurance-vieillesse et survivants, tome II, p. 244 ss; Droit et pratique de l'assurance-invalidité, p. 331; voir aussi ATF 112 II 91 consid. 2 et JAAC 1988 [52], no 2).
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c) Dans ses observations sur le recours, la juridiction cantonale relève que la subrogation de l'assureur social engendre des incertitudes quant aux droits du lésé. Selon elle, l'application des règles de la LAVS en cette matière nécessiterait certains "aménagements", cela pour tenir compte des dispositions spéciales de la LAI, notamment de l'art. 48 al. 2 LAI. En outre, il n'y aurait aucune raison d'appliquer strictement cette disposition en cas de responsabilité civile d'un tiers, du moment que l'assurance-invalidité a de toute manière la possibilité d'exercer un droit de recours contre ce dernier.
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Il est exact que le système de subrogation institué par le législateur peut poser certains problèmes d'ordre pratique. Le montant de la créance cédée à l'assureur social n'est pas déterminable d'emblée. Avant que l'assurance-invalidité ne statue définitivement, le lésé n'est donc pas en mesure, la plupart du temps, d'envisager une liquidation avec le tiers responsable. Des difficultés - d'ordre pratique et juridique - peuvent également survenir en cas de renonciation, expresse ou tacite, aux prestations de l'assurance sociale, notamment lorsque le lésé préfère ne demander la réparation de son dommage qu'à ce seul tiers, plutôt que de recevoir une rente d'invalidité qui diminuera d'autant sa prétention directe envers le responsable (SCHAER, Grundzüge des Zusammenwirkens von Schadenausgleichsystemen, p. 269 ss; STOESSEL, op.cit., p. 28 ss; STEIN, loc.cit., p. 331; RUSCONI, Responsabilité et assurances sociales, SZS 1983 p. 131). Mais ces inconvénients sont inhérents au mécanisme même de la subrogation, laquelle n'est du reste pas propre au domaine de l'AVS/AI (voir notamment l'ancien art. 100 LAMA et l'art. 41 LAA, ainsi que l'art. 49 LAM et l'art. 14 de l'ordonnance concernant la Caisse fédérale d'assurance, du 2 mars 1987).
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Quoi qu'il en soit, ce n'est pas le problème de la subrogation qui est ici en cause, mais celui de l'application de l'art. 48 al. 2 LAI. Or, dans ce contexte, on ne saurait suivre la juridiction cantonale lorsqu'elle préconise de déroger à cette norme dans les cas où l'assurance-invalidité acquiert une cession des droits de l'assuré: cela reviendrait à allouer des prestations indues, au mépris des principes de la légalité et de l'égalité de traitement entre les assurés. Pour le surplus, on ne voit guère que la solution adoptée par les premiers juges permette de remédier, d'une quelconque manière, aux inconvénients évoqués ci-dessus. Bien au contraire, le délai de douze mois fixé par l'art. 48 al. 2 LAI oblige l'intéressé à s'annoncer dans un délai raisonnable à l'assurance-invalidité. Si cette norme n'était pas applicable en cas de responsabilité civile d'un tiers, cela ne ferait que retarder le prononcé des décisions de l'assurance-invalidité et, par conséquent, de prolonger la situation d'incertitude dans laquelle se trouve le lésé.
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