BGer 2C.2/1998 | |||
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BGer 2C.2/1998 vom 31.01.2000 | |
[AZA 0]
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2C.2/1998
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IIe COUR DE DROIT PUBLIC
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31 janvier 2000
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Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger, président, Hartmann, R. Müller, Yersin et Zappelli, suppléant.
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Greffier: M. Langone.
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Statuant sur l'action en responsabilité
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intentée par
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D.________, demandeur, représenté par Me Philippe Nordmann, avocat à Lausanne,
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contre
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l'Etatde Vaud, défendeur, représenté par Me Jean-Luc Tschumy, avocat à Lausanne;
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(art. 42 OJ; acte illicite; droit de mutation;
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hypothèque légale; solidarité)
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Vu les pièces du dossier d'où ressortent
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les faits suivants:
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A.- Par acte authentique du xx août 1989, D.________ a vendu à S.________ la parcelle no xx de la commune de R.________ pour le prix de 1'250'000 fr. L'acte précisait que l'acquéreur supporterait les droits de mutation. Le transfert de propriété a été opéré au registre foncier le xx septembre 1989.
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Avant cette date, l'immeuble était grevé de deux cédules hypothécaires au porteur en 1er et en 2ème rangs pour un montant total de 82'000 fr. Immédiatement après le transfert de propriété, ces cédules ont été augmentées à 1'250'000 fr. au total, puis, le 9 avril 1990, à 3'100'000 fr.
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B.- Le 3 novembre 1989, la Commission d'impôt et recette de district de Lausanne (ci-après: la Commission d'impôt) a adressé à S.________ un bordereau de 41'250 fr. au titre de droit de mutation dû en raison dudit transfert immobilier. Malgré un rappel, S.________ ne s'est pas acquitté de ce droit.
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Le 12 septembre 1990, une hypothèque légale (non privilégiée) en garantie de la créance de l'Etat de Vaud et de la commune de R.________ a été inscrite au registre foncier sur la parcelle no xx pour le montant de 41'250 fr. correspondant au droit de mutation non perçu.
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La faillite de S.________ a été prononcée le 22 avril 1993. L'état des charges de l'immeuble en question, faisant partie intégrante de l'état de collocation, indiquait que la créance fiscale de 41'250 fr. avait été colloquée au 3ème rang. Cet état de collocation n'a pas été attaqué. L'immeuble a été vendu aux enchères publiques le 9 novembre 1994. Le produit de la vente (2'369'993 fr. 90) a permis de désintéresser uniquement les créanciers hypothécaires légaux privilégiés et les créanciers hypothécaires en 1er rang. Un acte de défaut de biens après faillite a été délivré à la Commission d'impôt.
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C.- Par décision du 9 janvier 1997, la Commission d'impôt a réclamé le montant de 41'250 fr. à D.________, en invoquant la responsabilité solidaire de celui-ci pour le paiement du droit de mutation dû à la suite de la vente immobilière intervenue avec S.________.
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Après le rejet de sa réclamation le 15 mai 1998, D.________ a porté sa cause devant le Tribunal administratif du canton de Vaud, en déclarant compenser sa dette fiscale avec une créance en dommages-intérêts qu'il prétendait avoir à l'encontre de l'Etat de Vaud du chef de sa responsabilité pour actes illicites. Il faisait valoir en effet que la Commission d'impôt avait agi illicitement en ne prenant pas toutes les mesures nécessaires pour tenter d'obtenir le paiement du droit de mutation par l'acquéreur avant de s'en prendre à lui en vertu du principe de la solidarité.
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Par arrêt du 23 novembre 1998, le Tribunal administratif a rejeté le recours et confirmé la décision sur réclamation du 15 mai 1998, tout en soulignant qu'il n'était pas compétent pour connaître d'une éventuelle action en responsabilité contre l'Etat de Vaud et, partant, pour se prononcer sur la compensation invoquée par l'intéressé. N'ayant pas été attaqué, cet arrêt est passé en force de chose jugée.
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D.- Par demande adressée le 11 décembre 1998 au Tribunal fédéral, D.________ a ouvert action en dommages-intérêts contre l'Etat de Vaud en prenant les conclusions suivantes:
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"I.- Constater que, sauf le cas où l'Etat de Vaud déclarerait renoncer à encaisser auprès de D.________ le droit de mutation afférent à la vente de la parcelle N° xx du cadastre communal de R.________ de Fr. 41'250. -, l'Etat de Vaud doit à D.________ le montant de Fr. 41'250. - [...] plus intérêts à 5% l'an dès ce jour.
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II.- Constater que l'Etat de Vaud doit à D.________ le montant de Fr. 7'867, 50 [..] avec intérêts à 5% l'an dès ce jour (représentant les frais d'intervention de son avocat). "
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Il fait valoir en substance que l'Etat de Vaud a fait preuve d'une négligence grave, contraire aux règles de la bonne foi au sens de l'art. 2 CC, en n'ayant pas entrepris toutes les démarches nécessaires pour recouvrer sa créance en paiement du droit de mutation auprès de S.________. Plus particulièrement, il reproche à l'Etat de Vaud de ne pas lui avoir transmis les droits de gage auxquels il était subrogé de par la loi et, par là, d'avoir compromis son droit de recours contre S.________.
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Dans sa réponse, l'Etat de Vaud a conclu au rejet des conclusions de la demande.
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Dans leur réplique et duplique, le demandeur et le défendeur ont successivement confirmé leurs conclusions respectives.
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E.- Les parties ont renoncé à des débats publics avec plaidoiries. En lieu et place, elles ont déposé un mémoire final.
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Considérant en droit :
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1.-La recevabilité de l'action et de tous actes de procédure est examinée d'office (art. 3 al.1 PCF).
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a) Le Tribunal fédéral connaît en instance unique des contestations de droit civil entre un canton d'une part et un particulier d'autre part, lorsque l'une des parties le requiert en temps utile et que la valeur litigieuse est d'au moins 8'000 fr. (art. 42 al. 1 OJ). Sont des contestations de droit civil au sens de l'art. 42 al. 1 OJ, non seulement celles qui sont soumises au droit privé stricto sensu, mais également d'autres prétentions patrimoniales contre l'Etat, lorsque sa responsabilité légale, contractuelle ou quasi contractuelle est engagée en vertu du droit public. Cette notion large comprend notamment les actions en réparation du dommage causé par des actes de puissance publique, licites ou illicites, engageant la responsabilité légale du canton (ATF 118 II 206 consid. 2c; Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, Berne 1990, n. 2.1.1 ad art. 42).
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En l'espèce, la présente action remplit ces conditions.
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b) La contestation relative à la créance fiscale a fait l'objet d'un arrêt du Tribunal administratif du 23 novembre 1998, entré en force de chose jugée, si bien qu'il n'est plus possible de remettre en cause, dans une nouvelle procédure, ce qui a été définitivement jugé dans cet arrêt. Mais, en l'espèce, il n'y a pas de chose jugée sur la prétendue créance en dommages-intérêts que le demandeur fait valoir à l'encontre de l'Etat de Vaud. Considérant qu'il n'était pas compétent pour se prononcer sur le bien-fondé d'une action en responsabilité dirigée contre l'Etat de Vaud, le Tribunal administratif n'a en effet pas statué sur l'existence d'une telle créance que D.________ avait opposée en compensation à sa dette fiscale. Partant, il ne saurait y avoir identité d'objet entre la première procédure et le présent procès, lequel porte précisément sur la question de savoir si l'Etat de Vaud encourt une responsabilité du fait d'un comportement illicite.
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c) Dans son mémoire final, le défendeur fait valoir que les conclusions de la demande seraient irrecevables, dans la mesure où elles tendraient à faire constater l'existence d'une créance que le demandeur a l'intention d'opposer en compensation à sa dette fiscale. Or, ayant renoncé à invoquer une telle compensation dans le cadre du présent procès, le demandeur n'aurait, selon lui, aucun intérêt digne de protection à la constatation immédiate d'un tel droit. En conséquence, seule une action condamnatoire aurait été recevable.
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Les conclusions d'une partie doivent être interprétées objectivement, conformément aux principes généraux et selon les règles de la bonne foi (ATF 105 II 149 consid. 2a; 115 Ia 107 consid. 2b p. 109) et en relation avec les motifs qui les étayent; la teneur des conclusions prises par les parties n'est donc pas décisive (ATF 97 II 390 consid. 4p. 396).
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Or, à la lumière de ces règles d'interprétation, force est d'admettre qu'en l'espèce, on n'est pas en présence d'une action en constatation de droit, mais d'une action condamnatoire en ce sens que le demandeur conclut expressément à ce que l'Etat de Vaud soit reconnu débiteur envers lui d'un montant correspondant au préjudice qu'il prétend avoir subi du fait d'agissements illicites. Il importe peu de savoir si le demandeur a l'intention de compenser sa dette fiscale avec son hypothétique créance en dommages-intérêts ou éventuellement préférera faire valoir sa créance de manière autonome vis-à-vis de l'Etat de Vaud.
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Dans ces conditions, il y a lieu d'entrer en matière sur la demande.
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2.- Le défendeur a soulevé l'exception de prescription. Mais il est pour le moins douteux que l'action soit prescrite, eu égard à la date du prononcé de l'arrêt du Tribunal administratif fixant définitivement le montant du droit de mutation. Cette question peut toutefois demeurer indécise, du moment que l'action doit, comme on le verra ci-après, de toute manière être rejetée pour un autre motif.
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3.- a) En principe, les agents publics répondent de leurs actes illicites selon les règles ordinaires des art. 41 ss CO. Toutefois, la législation fédérale ou cantonale peut déroger à ces règles en ce qui concerne la responsabilité encourue par ces agents publics pour le dommage ou le tort moral qu'ils causent dans l'exercice de leur charge (art. 61 al. 1 CO). Lorsque de telles normes existent, la responsabilité des agents publics échappe au droit civil fédéral, ce qui découle aussi de l'art. 59 al. 1 CC (cf. ATF 122 III 101 consid. 2 et les arrêts cités).
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b) Dans le canton de Vaud, c'est la loi du 16 mai 1961 sur la responsabilité de l'Etat, des communes et de leurs agents qui règle la réparation du dommage que les agents de l'Etat causent à des tiers d'une manière illicite (art. 4). A la différence du droit privé qui subordonne la responsabilité aquilienne à une faute (art. 41 CO), le texte de l'art. 4 de cette loi n'exige, pour engager la responsabilité de l'Etat, qu'un acte objectivement illicite, un dommage et un lien de causalité entre l'un et l'autre (arrêt du 18 janvier 1980 en la cause X. c. canton de Vaud, consid. 2, reproduit in SJ 1981 p. 225, JdT 1982 II 142 et RDAF 1981 p. 124).
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c) La loi précitée ne définit pas l'illicéité. Mais, d'une manière générale, l'acte illicite se définit comme un acte ou une omission objectivement contraire à une règle du droit écrit ou non écrit et qui porte atteinte soit à un droit absolu du lésé, soit à son patrimoine. Dans ce dernier cas toutefois, il faut encore que la norme violée ait pour but de protéger le bien juridique lésé, soit les droits patrimoniaux, pour que l'illicéité soit réalisée (ATF 123 III 306 consid. 4a; 121 III 350 consid. 5b; 120 II 331 consid. 4; 119 II 127 consid. 3; 118 Ib 163 consid. 2, 473 consid. 2 et les arrêts cités).
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4.- a) Le demandeur fait valoir, en substance, que l'hypothèque légale - bien qu'ayant été inscrite au registre foncier le 12 septembre 1990 - prenait rang, selon le droit cantonal, avec la naissance de la créance de droit public qu'elle garantissait, c'est-à-dire avec le transfert de la propriété qui a eu lieu le xx septembre 1989. Aussi, l'Etat de Vaud aurait-il dû intenter une action en contestation de l'état de collocation dans le cadre de la faillite de S.________, parce que sa créance fiscale avait été colloquée au 3ème rang, alors que - à ses yeux - elle aurait dû l'être à un rang antérieur, sans toutefois préciser lequel. D'après lui, si l'Etat de Vaud avait intenté une telle action en justice, il aurait été entièrement désintéressé au lieu de se voir délivrer un acte de défaut de biens après faillite. Le demandeur voit notamment dans cette omission un comportement illicite de nature à engager la responsabilité de l'Etat de Vaud, car celui-ci a compromis les droits de gage auxquels il aurait dû être subrogé de par la loi et, partant, son droit de recours contre S.________, l'hypothèque légale grevant l'immeuble en question ayant été radiée au registre foncier à la suite de l'adjudication dudit immeuble.
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b) L'art. 4 de la loi vaudoise du 27 février 1963 concernant le droit de mutation sur les transferts immobiliers et l'impôt sur les successions et donations (ci-après:
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LMSD/VD) dispose:
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"Les parties à l'acte imposable sont solidairement responsables du paiement du droit de mutation. Sauf convention contraire, le droit de mutation est dû:
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a) par l'acquéreur de la propriété d'un immeuble ou d'une part d'immeuble;
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[...]
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Si les parties n'ont pas dérogé à la présomption de l'alinéa 2, lettre a), et que le vendeur, en raison de la responsabilité solidaire prévue à l'alinéa premier, ait cependant dû acquitter le droit, il est subrogé aux droits conférés à l'Etat et à la ou les communes par l'hypothèque légale (art. 62). "
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Quant à l'art. 62 LMSD/VD, il a la teneur suivante:
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"Le paiement du droit de mutation ou de l'impôt sur les successions et les donations, dans la mesure où ces contributions se rapportent à des immeubles, est garanti par une hypothèque légale, conformément aux articles 188 à 190 de la loi d'introduction du Code civil.
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L'hypothèque d'un montant supérieur à 1000 francs est inscrite au registre foncier sur la réquisition du Département des finances indiquant le nom du débiteur, les immeubles grevés et la durée de la garantie. La réquisition est accompagnée d'une copie du bordereau certifiée conforme à l'original, ainsi que, le cas échéant, des décisions prises par l'autorité de réclamation ou de recours. "
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c) En adoptant ces dispositions, le législateur vaudois a voulu permettre à la collectivité publique créancière du droit de mutation de garantir son paiement en recourant soit au système de la solidarité entre les parties à l'acte, soit à celui de l'hypothèque légale. La collectivité en question peut donc choisir, librement, la mesure qu'elle considère comme la plus efficace, voire utiliser, comme en l'espèce, successivement les deux voies. Elle n'est soumise à aucune condition: elle peut exiger, à son choix, de l'acquéreur ou de l'aliénateur la totalité du paiement du droit de mutation. Elle n'a pas non plus le devoir de tenir informé l'aliénateur de l'avancement de la procédure de recouvrement engagée contre l'acquéreur. De plus, la loi n'impose aucun délai dans lequel les autorités fiscales sont tenues de recouvrer leurs créances auprès des débiteurs solidaires, sous réserve du délai de prescription. Les autorités fiscales n'ont aucune obligation de requérir l'inscription (conservatoire) au registre foncier d'une hypothèque légale (cf. art. 62 LMSD/VD en relation avec l'art. 189 al. 2 de la loi vaudoise du 30 novembre 1910 d'introduction du Code civil suisse, prévoyant qu'une hypothèque légale doit être inscrite au registre foncier si elle est supérieure à 1'000 fr.; l'inscription doit être requise dans le délai d'un an dès la première décision fixant le montant de la créance de droit public, faute de quoi l'hypothèque s'éteint). Les autorités fiscales ont donc la faculté de laisser passer ce délai annuel sans réagir, puis, invoquant le principe de la solidarité, réclamer directement à l'aliénateur de l'immeuble le paiement du droit de mutation, dû normalement par l'acquéreur.
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Cette réglementation vise à faciliter le recouvrement des créances fiscales par les collectivités publiques. Elle n'est manifestement pas destinée à protéger les intérêts privés des débiteurs solidaires du droit de mutation. Certes, si le vendeur, en raison de la responsabilité solidaire, a cependant dû s'acquitter du droit de mutation, il est normalement subrogé aux droits conférés à l'Etat et à la ou les communes par l'hypothèque légale (art. 4 al. 3 LMSD/VD), pour autant que celle-ci (dépassant 1'000 fr.) ait été inscrite au registre foncier dans le délai légal d'un an. Le demandeur soutient que l'Etat de Vaud a violé cette norme destinée à protéger ses intérêts en ne lui transmettant pas les droits de gage auxquels il était subrogé. Mais il est pour le moins douteux que le demandeur puisse invoquer cette disposition, dans la mesure où il ne s'est pas encore acquitté de ce droit de mutation. De surcroît, comme on vient de le voir plus haut, du moment que l'Etat de Vaud n'avait pas l'obligation de requérir l'inscription de l'hypothèque légale garantissant sa propre créance, il n'avait pas non plus, a fortiori, le devoir de transmettre ces droits de gage auxquels le demandeur prétend.
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Ainsi, l'Etat de Vaud n'avait aucune obligation juridique de sauvegarder les intérêts financiers du demandeur. Il n'était dès lors pas tenu d'intenter une action en contestation de l'état de collocation pour contester le rang de collocation de sa créance fiscale garantie par l'hypothèque légale, quand bien même il aurait très probablement obtenu gain de cause, encore que l'issue d'un procès civil est toujours aléatoire. L'Etat de Vaud ne se trouvait pas vis-à-vis du demandeur dans une position de garant l'obligeant à prendre toutes les mesures de précaution nécessaires pour éviter que le demandeur ne doive s'acquitter du droit de mutation sans être subrogé aux droits de gage conférés aux collectivités publiques. Compte tenu du système légal vaudois, l'aliénateur d'un immeuble ne peut se prémunir contre les inconvénients d'une telle situation qu'en exigeant la consignation d'une partie du prix de vente en mains du notaire instrumentateur.
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En résumé, les art. 4 et 62 LMSD/VD ne constituent pas des normes protectrices dont le demandeur pourrait se prévaloir.
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Il est donc superflu d'examiner plus avant si ces normes légales ont été violées par l'Etat de Vaud.
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d) Par ailleurs, le demandeur prétend que l'Etat de Vaud aurait agi de manière contraire aux règles de la bonne foi. Mais le Tribunal fédéral refuse, en principe, de considérer l'art. 2 CC comme une norme de protection fondamentale dont la violation est propre à entraîner une responsabilité; l'art. 2 CC ne fonde en effet pas une obligation indépendante, mais s'applique en rapport avec des droits et obligations déjà existants découlant soit d'un contrat, soit de la loi (ATF 124 III 297 consid. 5c p. 301; 121 III 350 consid. 6b p. 354). Or, comme on vient de le voir, l'Etat de Vaud n'a enfreint aucun ordre ou interdiction du droit écrit ou non écrit destiné à protéger les intérêts purement patrimoniaux du demandeur. Certes, dans des cas tout à fait exceptionnels, un comportement préjudiciable contraire à l'art. 2 CC peut être illicite s'il existe un rapport particulier de confiance entre le lésé et le responsable, même en l'absence d'un fondement contractuel ou délictuel (cf. ATF 124 III 297 consid. 5c et 6; 121 III 350 consid. 6b et c p. 354/355). Il n'existe cependant pas un tel rapport entre les parties au présent procès. Quoi qu'il en soit, l'Etat de Vaud n'a jamais, par son comportement, suscité chez le demandeur des attentes quant à la transmission de droits de gage, attentes qui auraient été déçues par la suite.
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e) A cela s'ajoute que l'illicéité d'une omission ne découle pas non plus de la seule création d'un état de fait dangereux lorsque, comme en l'espèce, aucune atteinte à un droit absolu n'a été portée et qu'aucune violation d'une norme de comportement destinée d'après son but à protéger le lésé contre un dommage purement patrimonial n'a été commise (ATF 124 III 297 consid. 5b p. 300 s.).
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f) Enfin, le demandeur ne peut manifestement pas invoquer - même pas par analogie - les dispositions du Code des obligations et en particulier l'art. 503 CO relatif aux devoir de diligence du créancier vis-à-vis de la caution quant aux droits de gage. Car il n'est pas établi - ni même allégué - que le demandeur soit lié à l'Etat de Vaud par un contrat de cautionnement au sens de l'art. 492 CO. L'obligation pour le demandeur de s'acquitter de la dette fiscale découle exclusivement de la loi vaudoise sur les droits de mutation, laquelle ne contient - comme on vient de le voir - aucune norme protectrice dont le demandeur pourrait se prévaloir. Faute d'un quelconque autre contrat liant les parties, une responsabilité contractuelle de l'Etat de Vaud est d'emblée exclue.
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g) En résumé, l'Etat de Vaud n'a enfreint aucune règle de comportement destinée à protéger les droits purement patrimoniaux du demandeur. En conséquence, sa responsabilité ne saurait être engagée, faute d'illicéité.
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5.- Au vu de ce qui précède, la demande doit être rejetée, avec suite de frais (art. 156 al. 1 OJ) à la charge du demandeur. Celui-ci versera en outre au défendeur, représenté par un mandataire professionnel (art. 159 al. 1 OJ), une indemnité à titre de dépens, l'art. 159 al. 2 OJ n'étant pas applicable en l'espèce.
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Par ces motifs,
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le Tribunal fédéral :
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1.- Rejette l'action du demandeur.
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2.- Met à la charge du demandeur:
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a) un émolument judiciaire de 4'000 fr.;
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b) une indemnité de 7'000 fr. à verser à l'Etat de Vaud à titre de dépens.
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3.- Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties.
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Lausanne, le 31 janvier 2000
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LGE/mnv
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Au nom de la IIe Cour de droit public
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du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
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Le Président, Le Greffier,
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