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Informationen zum Dokument  BGer B 31/1999  Materielle Begründung
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BGer B 31/1999 vom 31.03.2000
 
[AZA]
 
B 31+32/99 Bn
 
Ière Chambre
 
composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Schön,
 
Spira, Widmer et Ferrari; Berset, Greffière
 
Arrêt du 31 mars 2000
 
dans les causes
 
Confédération Suisse, Berne, recourante, représentée par l'Administration fédérale des finances, Bundesgasse 3, Berne,
 
contre
 
X________ , intimée, représentée par Maître A.________, avocat,
 
et
 
Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne
 
contre
 
X________, intimée, représentée par Maître A.________, avocat,
 
et
 
Tribunal des assurances du canton de Vaud
 
A.-X________ a enseigné au Centre de langues de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (ci-après : EPFL), en qualité de chargée de cours. Durant ses années d'activité dans cet établissement, X________ a été rétribuée de manière variable, le revenu annuel de son travail oscillant entre 5'830 francs et 63'954 francs. Une partie de celui-ci provenait d'honoraires directement versés par ses étudiants.
 
Le 10 janvier 1996, la direction de l'EPFL a informé X________ qu'en raison de la prochaine privatisation du Centre de langues, elle avait décidé d'une part de l'assimiler à une employée permanente pour tenir compte de sa longue duréed'emploiet, d'autrepart, delalicencierpourle30septembresuivant. Lalettrecontenaitenparticulierlaphrasesuivante : "3. le licenciement étant dû à une suppression de fonction, il est non fautif au sens de l'article 43 des statuts de la CFP", c'est-à-dire la Caisse fédérale de pensions.
 
Après avoir donné à X________ la possibilité de s'exprimer, la direction de l'EPFL a confirmé ses intentions dans une première lettre de licenciement datée du 22 février 1996, puis dans une seconde, du 19 mars 1996, annulant et remplaçant la précédente. Saisi d'un recours de Q.________, leConseildesÉcolespolytechniquesfédérales(ci-après : EPF) l'a rejeté par décision du 19 septembre 1996.
 
Le 30 avril 1996, le service du personnel de l'EPFL a demandé à la CFP d'affilier rétroactivement X________ ainsi que d'autres collaborateurs du Centre de langues. X________ fut informée de cette démarche par ce service le 7 mai 1996. La caisse lui communiqua toutefois, par lettre du 30 juillet 1996, qu'elle ne pouvait donner suite à cette demande, au motif que selon la réglementation applicable au corps des maîtres des EPF, les privat-docents et chargés de cours ne sont pas liés par des rapports de service en ce qui concerne les cours qu'ils donnent et sont exclus de l'assurance obligatoire selon la LPP.
 
B.- Le 11 février 1997, X________ a ouvert action contre la CFP devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud en demandant à cette juridiction de dire que "la défenderesse doit affilier la demanderesse à son régime de prévoyance pour toute la période où la demanderesse a travaillé au service de l'EPFL et entreprendre en conséquence les démarches qui s'imposent à l'égard de l'EPFL".
 
Représentéeparl'Administrationfédéraledesfinances(ci-après : AFF), la Confédération suisse "agissant par la Caisse fédérale de pensions" a conclu au rejet de la demande.
 
Par jugement du 22 juin 1998, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a partiellement admis la demande dans le sens des considérants et "dit que la demanderesse est soumise à l'assurance obligatoire LPP pour son enseignement à l'EPFL pour autant qu'elle n'ait pas déjà été affiliée à une autre institution de prévoyance professionnelle pour les années en cause".
 
Dans les considérants auxquels renvoie le dispositif, la juridiction cantonale a notamment jugé que la CFP n'ayant pas la personnalité juridique, c'est la Confédération suisse qui est défenderesse et que cette dernière "est simultanément l'employeur et l'institution de prévoyance, ce qui a pour conséquence que si elle n'a pas qualité pour défendre à ce second titre, elle l'a, dans tous les cas, en tant qu'employeur".
 
C.-La Confédération suisse(ci-après : la Confédération) interjette recours de droit administratif contre ce jugement et conclut à l'annulation du jugement attaqué, sous suite de frais et dépens. L'EPFL qui n'était pas partie à la procédure de première instance en fait de même et conclut elle aussi à l'annulation du jugement attaqué. Elle produit diverses pièces à l'appui de son recours.
 
X________ conclut, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours de la Confédération et à l'irrecevabilité de celui formé par l'EPFL. Par ailleurs, elle demande la production du dossier ouvert à la CFP au nom d'une ancienne collègue, Y________ qui aurait été affiliée à la caisse, alors qu'elle avait également le statut de chargée de cours au Centre de langues de l'EPFL.
 
L'Office fédéral des assurnaces sociales propose au tribunal de confirmer le jugement entrepris "pour ce qui est de l'obligation d'assurance selon la LPP".
 
Considérant en droit :
 
1.- Les recours de droit administratif concernent des faits de même nature, portent sur des questions juridiques communes et sont dirigés contre le même jugement, de sorte qu'il se justifie de les réunir et de les liquider dans un seul arrêt (ATF 123 V 215 consid. 1, 120 V 466 consid. 1 et les références; Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. I, p. 343 ss).
 
2.- a) La contestation ici en cause relève des autorités juridictionnelles mentionnées à l'art. 73 LPP, tant du point de vue de la compétence ratione temporis que de celui de la compétence ratione materiae (ATF 125 V 168 consid. 2, 122 V 323 consid. 2, 120 V 18 consid. 1a et les références), et les recours de droit administratif sont recevables de ce chef.
 
b) Le jugement attaqué n'ayant pas pour objet l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le Tribunal fédéral des assurances doit se borner à examiner si les premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par l'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si les faits pertinents ont été constatés d'une manière manifestement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).
 
c) Lorsque le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral des assurances est limité par l'art. 105 al. 2 OJ, la possibilité d'alléguer des faits nouveaux ou de faire valoir de nouveaux moyens de preuve est très restreinte. Selon la jurisprudence, seules sont admissibles dans ce cas les preuves que l'instance inférieure aurait dû réunir d'office, et dont le défaut d'administration constitue une violation de règles essentielles de procédure (ATF 121 II 99 consid. 1c, 120 V 485 consid. 1b et les références).
 
3.- Le litige lié devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud oppose l'intimée X________ à la Caisse fédérale de pensions (CFP) dont les statuts font l'objet de l'Ordonnance du Conseil fédéral du 24 août 1994 régissant la CFP, approuvée par l'Assemblée fédérale le 15 décembre 1994 (RS 172. 222.1). C'est dès lors à juste titre que le jugement attaqué a été rendu entre la prénommée et la Confédération, cette dernière étant représentée non pas par la CFP, comme elle l'allègue inexactement, mais par l'AFF, conformément à l'art. 35 al. 5 de la Loi fédérale du 6 octobre 1989 sur les finances de la Confédération (LFC; RS 611. 0).
 
En revanche, c'est de manière erronée que les juges cantonaux ont considéré que la Confédération avait qualité d'employeur de l'intimée. En effet, les EPF de Zurich et de Lausanne sont des établissements autonomes de droit public fédéral et elles jouissent de la personnalité juridique en vertu de l'art. 5 al. 1 de la loi sur les EPF (RS 414. 110). Il est dès lors indiscutable que c'est l'EPFL et non la Confédération qui était l'employeur de X________ jusqu'au 30 septembre 1996.
 
Or, le jugement attaqué a des effets directs importants pour l'ex-employeur de l'intimée, dans la mesure où il reconnaît à cette dernière le droit d'être affiliée à une institution de prévoyance professionnelle, dans le cadre de l'assurance obligatoire, pour ses activités d'enseignante à l'EPFL. Cet établissement est donc directement atteint par le jugement attaqué et il a un intérêt digne de protection à ce qu'il soit annulé ou modifié. L'EPFL a ainsi qualité pour recourir en son propre nom contre ledit jugement, en vertu de l'art. 103 let. a en liaison avec l'art. 132 OJ (ATF 118 Ib 358 consid. 1 et les références), contrairement à ce que soutient l'intimée.
 
4.- Les deux recourantes soulèvent des griefs d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu (ATF 124 V 92 consid. 2).
 
La Confédération fait grief aux premiers juges d'avoir violé le droit de l'EPFL d'être entendue, alors même que le jugement entrepris lui ordonne d'affilier ses chargés de cours à une institution de prévoyance.
 
De son côté, l'EPFL se plaint, dans son propre recours, de n'avoir pu participer à la procédure de première instance, alors qu'en sa qualité d'ancien employeur de l'intimée, elle était directement intéressée au sort de la cause. Le grief est bien fondé.
 
Il n'est cependant pas nécessaire d'examiner plus avant si cette violation du droit d'être entendu de l'EPFL (art. 29 al. 2 Cst. ) nécessite l'annulation du jugement attaqué. En effet, celui-ci doit de toute manière être annulé pour une autre raison, ainsi qu'on va le voir.
 
5.- Selon l'art. 2 al. 1 LPP, sont soumis à l'assurance obligatoire les salariés qui ont plus de 17 ans et reçoivent d'un même employeur un salaire annuel supérieur au montant limite fixé à l'art. 7 LPP. L'assurance obligatoire commence en même temps que les rapports de travail (art. 10 al. 1 LPP, première partie de la phrase). Les critères juridiques de l'AVS sont déterminants pour décider de la qualité de salarié au sens de la LPP, sans toutefois que le statut de cotisant dans l'AVS soit formellement obligatoire (ATF 123 V 277 consid. 2a, 115 Ib 41 consid. 4 et les références).
 
Aux termes de l'art. 2 al. 2 LPP, le Conseil fédéral définit les catégories de salariés qui, pour des motifs particuliers, ne sont pas soumis à l'assurance obligatoire. C'est ce qu'il a fait en édictant l'art. 1er OPP 2.
 
Par ailleurs, l'art. 17 al. 1 de la loi sur les EPF dispose que le Conseil fédéral règle, dans le statut juridique, les rapports de service et la prévoyance professionnelle notamment des professeurs (lesquels se divisent en plusieurs catégories et se distinguent des privat-docents et chargés de cours, comme le précise l'art. 13 al. 1 let. a de la loi). Ce statut juridique doit permettre des rapports de service de droit public et de droit privé. Quant aux autres collaborateurs, le second alinéa de cet article prévoit qu'ils sont, en principe, soumis au statut du personnel de l'administration fédérale mais que si les besoins particuliers de l'enseignement et de la recherche l'exigent, le Conseil des EPF peut, avec l'autorisation du Conseil fédéral, adopter une réglementation extraordinaire.
 
Selon l'Ordonnance du Conseil fédéral du 16 novembre 1983 sur le corps des maîtres des EPF (RS 414. 142), les privat-docents et chargés de cours ne sont pas liés par des rapports de service en ce qui concerne les cours qu'ils donnent (art. 3); en vertu de l'art. 3a, introduit dans l'ordonnance le 22 décembre 1993 et en vigueur depuis le 1er janvier 1994 (RO 1994 295), ils sont exclus de l'assurance obligatoire selon la LPP et ne sont pas affiliés à la caisse fédérale d'assurance en ce qui concerne l'indemnité qui leur est allouée pour leur enseignement.
 
Les premiers juges sont d'avis que le Conseil fédéral pouvait certes exclure ces deux catégories d'enseignants de l'assurance obligatoire, dans la mesure où il s'agit de salariés exerçant une activité accessoire, mais à la condition qu'ils soient déjà assujettis à l'assurance obligatoire pour une activité lucrative exercée à titre principal ou qu'ils exercent une activité indépendante à titre principal, comme le prévoit l'art. 1 al. 1 let. c OPP 2. Par contre, dans la mesure où il est établi que l'activité de l'intimée à l'EPFL constituait son activité unique ou principale, on ne pouvait l'exclure de l'assurance obligatoire du seul fait qu'elle exerçait la fonction d'une chargée de cours.
 
Ce point de droit peut toutefois rester indécis en l'état. En effet, même en admettant que la délégation législative figurant à l'art. 2 al. 2 LPP couvre l'exception à l'assurance obligatoire statuée par le Conseil fédéral à l'art. 3a de l'Ordonnance du Conseil fédéral du 16 novembre 1983, cela ne peut avoir d'effet, pour les personnes concernées, qu'à partir du 1er janvier 1994, date d'entrée en vigueur de la novelle. Or, l'intimée a exercé son activité à l'EPFL depuis 1985 et la LPP est entrée en vigueur le 1er janvier de cette année-là.
 
D'autre part, il ressort des pièces produites par l'EPFL à l'appui de son recours et qui sont, dans le cas particulier, de nouvelles preuves admissibles, que même après l'introduction dans l'ordonnance de l'art. 3a, la situation juridique des chargés de cours à l'EPFL, en ce qui concerne leur soumission à l'assurance obligatoire, n'était pas claire tant aux yeux du service du personnel de l'école qu'à ceux de la CFP, comme en témoigne l'échange de correspondance qui a eu lieu entre le 7 septembre 1995 et le 25 juillet 1996.
 
La cause doit en conséquence être renvoyée au Tribunal des assurances du canton de Vaud, afin que celui-ci élucide, en fait et en droit, la situation des chargés de cours aux EPF entre le 1er janvier 1985 - date de l'entrée en vigueur de la LPP et de ses dispositions d'exécution - et le 1er janvier 1994, date d'entrée en vigueur de l'art. 3a de l'ordonnance sur le corps des maîtres des EPF. S'il y a lieu, c'est dans ce cadre que la preuve offerte par l'intimée en procédure fédérale, à propos du statut d'assurée d'une de ses anciennes collègues, pourra être administrée. Il paraît en outre nécessaire d'examiner de plus près la ratio legis de cette disposition de l'ordonnance, notamment en ce qui concerne les personnes pour lesquelles l'activité d'enseignant à l'EPFL constitue l'activité lucrative principale, voire unique, comme cela semble avoir été le cas de l'intimée pendant plusieurs années.
 
En outre, il n'est pas exclu que les juges cantonaux soient appelés à se pencher sur la question de la protection de la bonne foi de l'intimée, non seulement durant la période qui a précédé l'entrée en vigueur de l'art. 3a de l'ordonnance précitée, mais également après cette date, eu égard, en particulier, au caractère contradictoire des renseignements donnés à l'intimée par la direction de l'EPFL dans ses lettres des 10 janvier, 22 février et 19 mars 1996, en ce qui concerne son statut dans la fonction publique fédérale.
 
Enfin, si la juridiction cantonale parvient à la conclusion que l'intimée doit être affiliée à titre rétroactif à la CFP, il lui incombera de se prononcer sur l'effet de cette mesure dans le temps et les conséquences pécuniaires qui en résulteront pour l'EPFL, en sa qualité d'employeur de X________.
 
C'est dans ce sens qu'il convient d'accueillir les conclusions des recourantes et d'annuler le jugement attaqué.
 
6.- Les frais de la cause (art. 134 OJ a contrario) seront mis à la charge de l'intimée qui succombe. Ni la Confédération, ni l'EPFL ne peuvent prétendre des dépens.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances,
 
prononce :
 
I. Les recours sont admis et le jugement attaqué est annulé, la cause étant renvoyée au Tribunal des assurances du canton de Vaud pour instruction complémentaire et nouveau jugement au sens des motifs.
 
II. Les frais de justice, d'un montant total de 1000 fr. , sont mis à la charge de l'intimée.
 
III. Les avances de frais versées parles recourantes, d'un montant de 1000fr. chacune, leur sont restituées.
 
IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 31 mars 2000
 
Au nom du
 
Tribunal fédéral des assurances
 
Le Président de la Ière Chambre :
 
La Greffière :
 
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