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Informationen zum Dokument  BGer 4C.308/2001  Materielle Begründung
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BGer 4C.308/2001 vom 21.02.2002
 
[AZA 0/2]
 
4C.308/2001
 
Ie COUR CIVILE
 
**************************
 
21 février 2002
 
Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Corboz,
 
Mme Klett, Mme Rottenberg Liatowitsch et M. Favre, juges.
 
Greffière: Mme Michellod.
 
__________
 
Dans la cause civile pendante
 
entre
 
A1.________, défenderesse et recourante, A2.________, défenderesse et recourante, A3.________, défenderesse et recourante, A4.________, défenderesse et recourante, B1.________, défenderesse et recourante, toutes représentées par Me Jean-Pierre Gross, avocat à Lausanne,
 
et la
 
Commune de X.________, demanderesse et intimée, représentée par Me Jean-Michel Henny, avocat à Lausanne;
 
(promesses d'échange et d'achat/vente)
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
 
les faits suivants:
 
A.- a) Selon le plan général d'affectation de la Commune de X.________, le secteur de Y.________ regroupe les parcelles 220, 221, 222 et 223.
 
La parcelle 220 était propriété de C.________, la parcelle 222 propriété de B1.________ et de B2.________ tandis que la parcelle 223 était propriété de A.________, décédé le 8 août 1994; A1.________, A2.________, A3.________ et A4.________ sont ses héritières.
 
La Commune de X.________ était elle-même propriétaire de la parcelle 217, située en zone agricole. Le 27 mars 1991, le Conseil d'Etat du canton de Vaud a refusé à la Commune l'affectation à la construction de la parcelle 217, sur laquelle à l'origine devait être développée l'urbanisation du village. L'idée d'un échange entre la parcelle 217 et la parcelle 223 est survenue.
 
b) Le 30 mars 1994, la Commune de X.________ et A.________ ont passé, devant notaire, une promesse d'échange immobilier (ci-après: promesse A). L'acte notarié expose que A.________ est propriétaire de la parcelle 223 et que la Commune est propriétaire de la parcelle 217; il se poursuit en ces termes:
 
"C. Ces immeubles sont actuellement affectés en
 
zone agricole sur le plan général d'affectation
 
approuvé partiellement par le Conseil d'Etat du
 
canton de Vaud en date du 18 octobre 1989.
 
D. La Commune désire acquérir la parcelle 223
 
en vue de l'affecter en zone à bâtir pour des besoins
 
de développement communaux.
 
Cela exposé, il est convenu de ce qui suit:
 
A.________ promet de céder à la Commune, qui
 
promet d'acquérir par l'intermédiaire de ses représentants,
 
la parcelle 223 susdésignée. (...)
 
En contrepartie, la Commune promet de céder à
 
A.________, qui promet d'acquérir, une surface de
 
11'914 m2 environ à détacher de la parcelle 217
 
susdésignée (...).
 
(...)
 
6. Pour que la présente promesse d'échange immobilier
 
puisse être exécutée, les conditions suivantes
 
doivent être remplies, à savoir:
 
a) l'adoption par le conseil général de la Commune
 
de X.________ du nouveau plan général d'affectation
 
comportant l'attribution du secteur
 
Y.________ en zone village,
 
b) l'approbation dudit plan général d'affectation
 
par le Conseil d'Etat du canton de Vaud,
 
c) l'autorisation du conseil général de la Commune
 
de X.________ à l'exécution du présent acte,
 
d) l'autorisation de morcellement de la parcelle
 
217 (...),
 
e) l'exécution des promesses de vente et
 
d'achat signées entre l'hoirie B.________ et la
 
Commune relative à la parcelle 222 d'une part, et
 
entre C.________ et la Commune relative à la
 
parcelle 220 d'autre part.
 
Ces six conditions sont réservées.
 
L'acte d'échange immobilier définitif sera instrumenté
 
dans les deux mois qui suivront la réalisation
 
de la dernière des conditions ci-dessus, à
 
la réquisition de la partie la plus diligente
 
(...).
 
7. Si toutefois, les conditions prévues ci-dessus
 
n'étaient pas réalisées au 30 juin 1996, tous
 
délais de recours échus, la présente promesse
 
d'échange sera considérée comme caduque (...).
 
8. Sous réserve de la réalisation des conditions
 
énumérées sous chiffre 6 ci-dessus, la présente
 
promesse d'échange immobilier est ferme et
 
irrévocable en ce sens que si l'une ou l'autre parties
 
ne peut pas ou ne veut pas donner suite, dans
 
le délai convenu, aux obligations résultant pour
 
elle de la présente convention, l'autre partie
 
pourra contraindre la partie défaillante à l'exécution
 
de ce contrat. Ainsi, la partie défaillante ne
 
pourra pas se départir du présent acte par le paiement
 
d'un dédit. "
 
c) Le même jour, la Commune de X.________ d'une part, et B1.________ et B2.________ d'autre part, ont passé, devant notaire, une promesse de vente et d'achat portant sur la totalité de la parcelle 222, le prix de vente étant fixé à 200'000 fr. (ci-après: promesse B).
 
L'exécution de cette promesse était subordonnée aux mêmes conditions que celles mentionnées dans l'acte conclu avec A.________ sous chiffre 6, lettres a à c. En outre, elle était subordonnée à l'exécution des promesses d'achat/vente et d'échange signées par la Commune avec C.________ sur la parcelle 220 et avec A.________ sur la parcelle 223. Suivaient les ch. 7 et 8, identiques à ceux cités ci-dessus pour l'acte conclu entre A.________ et la Commune.
 
d) Le 31 mars 1994, la Commune de X.________ et C.________ ont passé, devant notaire, une promesse de vente et d'achat portant sur 450 m2 à détacher de la parcelle 220 dont C.________ était propriétaire (ci-après: promesse C).
 
L'exécution de cette promesse était subordonnée aux mêmes conditions que celles mentionnées dans l'acte conclu avec A.________ sous chiffre 6, lettres a à c ainsi qu'à l'autorisation de morcellement de la parcelle 220. En outre, elle était subordonnée à l'exécution des promesses d'achat/vente et d'échange signées par la Commune avec B1.________ et B2.________ sur la parcelle 222 et avec A.________ sur la parcelle 223.
 
B.- a) Par courrier du 29 mars 1995 à la Municipalité de X.________, l'avocat consulté par A1.________, A2.________ et A3.________ a indiqué ceci:
 
"Agissant au nom de Mme A.________, usufruitière
 
de la succession de son mari défunt, de
 
Mme A2.________ et de Mme A3.________, toutes deux
 
héritières de leur père à raison d'un tiers
 
chacune, j'ai l'honneur de dénoncer pour lésion
 
(art. 21 CO) et vices du consentement la promesse
 
d'échange immobilier, passée entre la Commune de
 
X.________ et feu A.________ (...) et concernant
 
les parcelles 223 et 217 du cadastre de votre commune.
 
En conséquence, agissant au nom des susnommées,
 
j'ai l'honneur de vous déclarer formellement
 
qu'elles résilient la promesse d'échange immobilier
 
en question et qu'elles n'entendent pas la maintenir.. "
 
A4.________, également héritière de A.________, n'a pas dénoncé cette promesse.
 
Dans un courrier du 2 mai 1995, l'avocat de la Commune de X.________ a fait savoir que sa cliente allait exiger l'exécution de la promesse d'échange immobilier en application de son chiffre 8, en recourant, s'il le fallait, aux autorités judiciaires.
 
b) Par courrier du 6 octobre 1995, l'avocat de B1.________ a écrit à la notaire qui avait instrumenté l'acte du 30 mars 1994 portant sur la parcelle 222 ce qui suit:
 
"Les clauses 6 et 7 de la promesse de vente et
 
d'achat du 30 mars 1994 prévoient que l'exécution
 
de la promesse est subordonnée à la réalisation de
 
4 conditions. La quatrième n'est manifestement pas
 
réalisée, de sorte qu'il est prématuré d'inviter ma
 
cliente à signer l'acte de vente définitif.. "
 
c) Le plan général d'affectation de la Commune de X.________ a été adopté par le conseil général de la Commune le 29 juin 1994 et approuvé, sous réserve des droits des tiers, par le Conseil d'Etat du canton de Vaud le 23 décembre 1994. Le conseil général a en outre autorisé l'exécution des actes passés par la Commune avec les propriétaires des parcelles 220, 222 et 223. Enfin, la Commission foncière a autorisé le morcellement de la parcelle 217 par décision du 25 août 1995, devenue exécutoire le 12 septembre 1995.
 
Il s'agit des quatre conditions énumérées sous chiffre 6 lettres a à d de la promesse d'échange conclue entre la Commune et A.________.
 
d) Par courrier du 10 octobre 1995, la notaire G.________ a convoqué B1.________ et B2.________, A1.________, A2.________, A3.________ et A4.________ ainsi que C.________ pour le 24 octobre 1995, en vue de l'exécution des promesses d'échange et d'achat/vente conclues avec la Commune de X.________.
 
A la date prévue, ni B1.________ ni les héritières de A.________ ne se sont présentées. Seuls étaient présents B2.________, C.________ et les représentants de la Commune de X.________. Ces derniers ont signé avec C.________ l'acte de vente de l'immeuble détaché de la parcelle 220.
 
e) Par acte notarié du 9 novembre 1995, B2.________ a cédé à sa soeur, B1.________, sa part à la parcelle 222.
 
Cette dernière a repris seule tous les droits et obligations concernant la promesse de vente et d'achat signée avec la Commune de X.________, son frère étant déchargé de toutes obligations concernant cette affaire.
 
C.- Par demande du 21 décembre 1995 formée devant la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois, la Commune de X.________ a pris les conclusions suivantes:
 
"A/A l'encontre des hoirs de feu A.________ qui
 
sont A1.________, A2.________, A3.________ et
 
A4.________:
 
1. La Commune de X.________ est propriétaire de la
 
parcelle 223 (...), en contrepartie de quoi
 
A2.________, A3.________ et A4.________ sont
 
propriétaires d'une surface de 11'914 m2 à
 
détacher de la parcelle 217 (...).
 
2.(...)
 
Subsidiairement:
 
3. Ordre est donné aux hoirs de feu A.________,
 
qui sont A1.________, A2.________, A3.________
 
et A4.________, sous la menace des peines
 
d'arrêts et d'amende prévues par l'art. 292 CP,
 
de signer les actes nécessaires au transfert de
 
la parcelle 223 (...) à la Commune de
 
X.________, celle-ci cédant en échange 11'914
 
m2 de sa parcelle 217 (...), sans soulte.
 
4.(...)
 
B/A l'encontre de B1.________:
 
5. La Commune de X.________ est propriétaire de la
 
parcelle 222 (...) moyennant paiement par la
 
Commune de X.________ à B1.________ de la somme
 
de 200'000 fr.
 
6.(...)
 
Subsidiairement:
 
7. Ordre est donné à B1.________, sous la menace
 
des peines d'arrêts et d'amende prévues par
 
l'art. 292 CP, de signer les actes nécessaires
 
au transfert de la parcelle 222 (...) à la Commune
 
de X.________ moyennant le versement par
 
cette dernière du prix de 200'000 fr.
 
8.(...)
 
C/A l'encontre de B2.________:
 
9. B2.________ est le débiteur de la Commune de
 
X.________ d'un montant de 45'000 fr. au moins,
 
la Commune se réservant d'augmenter cette
 
conclusion en cours d'instance. "
 
Dans leur réponse du 23 janvier 1997, les défenderesses ont conclu au déboutement de la demanderesse.
 
D.- Par jugement du 22 février 2001, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a ordonné à A1.________, A2.________, A3.________ et A4.________, sous la menace des peines prévues par l'art. 292 CP, de signer les actes nécessaires au transfert de la propriété de la parcelle 223 (...) à la Commune de X.________, en échange d'une surface de 11'914 m2 à détacher de la parcelle 217 (...), propriété de la Commune de X.________. Elle a également ordonné à B1.________, sous la menace des peines prévues par l'art. 292 CP, de signer les actes nécessaires au transfert de la propriété de la parcelle 222 (...) à la Commune de X.________ moyennant paiement par cette dernière de la somme de 200'000 fr.
 
E.- Les quatre héritières de A.________ ainsi que B1.________ forment un recours en réforme au Tribunal fédéral.
 
Elles concluent à la réforme du jugement attaqué en ce sens que les conclusions de la demanderesse sont rejetées.
 
Elles concluent également au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les dépens de première instance.
 
Dans sa réponse, la demanderesse conclut au rejet du recours.
 
Considérant en droit :
 
1.- En instance cantonale, les défenderesses invoquaient l'invalidité des promesses A et B en vertu des art. 20, 21 et 28 CO. La cour cantonale a rejeté ces griefs.
 
Les défenderesses ne critiquent pas le jugement cantonal sur ce point.
 
Les défenderesses soutenaient en outre qu'elles ne pouvaient pas être condamnées à exécuter leurs promesses dès lors que la condition suspensive de la simultanéité d'exécution des promesses n'était pas réalisée. La cour cantonale a estimé que les promesses A et B étaient à elles seules constitutives de contrats principaux et que, par conséquent, le contrat d'échange avec A.________ et le contrat de vente avec B1.________ et B2.________ étaient réputés conclus. Considérant que la condition suspensive était ainsi remplie, la cour cantonale n'a pas examiné si cette condition impliquait, comme le soutenaient les défenderesses, une exécution simultanée de leurs promesses.
 
La cour cantonale a ajouté qu'au demeurant, les défenderesses, défaillantes le jour de la signature des contrats définitifs, ne pouvaient se prévaloir du non avènement d'une condition dont elles avaient empêché sans droit la survenance (cf. art. 156 CO).
 
2.- Dans leur recours en réforme, les défenderesses soutiennent qu'elles ne peuvent être condamnées à exécuter leurs promesses d'échange et de vente puisque la dernière condition suspensive figurant dans ces promesses n'est pas réalisée.
 
a) La condition suspensive en question est formulée dans la promesse A de la manière suivante:
 
"pour que la présente promesse puisse être exécutée,
 
les conditions suivantes doivent être remplies,
 
à savoir: (...) e) l'exécution des promesses
 
B et C".
 
Dans la promesse B, elle est formulée comme suit:
 
"pour que la présente promesse puisse être exécutée,
 
les conditions suivantes doivent être remplies
 
à savoir: (...) d) l'exécution des promesses
 
A et C".
 
b) Partant du texte de cette condition, les défenderesses considèrent que les parties ont convenu que l'exécution de leur promesse était subordonnée à l'exécution des deux autres promesses, soit à l'instrumentation de contrats définitifs. Cela implique, à leurs yeux, une exécution simultanée des trois promesses.
 
Les défenderesses estiment que cette condition était destinée à protéger les intérêts des deux parties à chaque promesse. D'une part, la Commune, qui voulait échapper à l'obligation d'acquérir l'une des parcelles si, pour quelque raison que ce soit, les deux autres ou l'une d'elle lui échappaient. D'autre part, les propriétaires vendeurs, qui voulaient éviter de consentir un sacrifice si les propriétaires des deux autres parcelles ne faisaient pas le leur.
 
Les défenderesses rappellent que la Commune voulait s'assurer qu'elle deviendrait propriétaire de tout le secteur de Y.________. Il fallait pour cela que toutes les promesses soient exécutées. Si seule l'une d'entre elles n'était pas susceptible d'exécution, par exemple du fait qu'elle avait été valablement dénoncée pour lésion ou vice du consentement, les deux autres ne l'étaient pas non plus.
 
Elles estiment en outre que si l'une des parties à une promesse refusait de l'exécuter, cela permettait aux parties aux deux autres promesses de refuser à juste titre d'exécuter la leur, que le premier refus d'exécution soit ou non fondé. Un tel refus suffisait à lui seul pour permettre aux parties aux autres promesses de se soustraire à leur obligation de s'exécuter. Selon les défenderesses, il s'agit du sens parfaitement clair du texte de la condition suspensive.
 
c) La demanderesse conteste l'interprétation des défenderesses. Elle considère que la condition suspensive litigieuse ne prévoit nullement la simultanéité d'exécution des promesses. Celle-ci aurait été au demeurant impraticable puisqu'il était impossible de réunir toutes les parties pour les faire signer, à la seconde près, tous les actes de vente et d'achat de façon simultanée.
 
La demanderesse ajoute que cette condition suspensive ne permettait pas à une partie de refuser d'exécuter son engagement au seul motif qu'une partie à une autre promesse refusait de s'exécuter. La demanderesse estime qu'une autre interprétation aurait pour conséquence de vider totalement la promesse de contracter de son sens puisqu'elle pourrait être rompue si deux parties à une autre promesse se mettaient d'accord pour ne pas exécuter leurs obligations réciproques.
 
La demanderesse précise qu'elle n'aurait jamais accepté une telle condition.
 
3.- a) Pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, il y lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO).
 
Le recours au principe de la confiance intervient lorsque la réelle et commune volonté des parties n'a pas pu être constatée (ATF 126 III 59 consid. 5a p. 67); il permet d'interpréter les déclarations faites telles qu'elles pouvaient et devaient être comprises de bonne foi par leur destinataire en fonction de l'ensemble des circonstances; cette interprétation est une question de droit que le Tribunal fédéral peut revoir librement en instance de réforme (ATF 126 III 59 consid. 5b p. 68).
 
En l'espèce, la cour cantonale a considéré que les contrats définitifs étaient réputés conclus et que la condition suspensive invoquée par les défenderesses était par conséquent réalisée. Ce raisonnement, critiqué par les défenderesses, est fragile et ne convainc pas entièrement. Il convient donc d'interpréter la condition suspensive litigieuse.
 
La cour cantonale n'ayant pas établi ce que les parties avaient réellement voulu exprimer en prévoyant que l'exécution de leur promesse était subordonnée à l'exécution des deux autres promesses, il est nécessaire d'interpréter cette clause selon le principe de la confiance.
 
L'interprétation objective consiste à établir le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune des parties pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Pour ce faire, il convient de partir du texte du contrat avant de l'examiner dans son contexte; dans ce dernier cas, toutes les circonstances ayant précédé ou accompagné sa conclusion doivent être prises en considération (ATF 122 III 106 consid. 5a, 420 consid. 3; 121 III 118 consid. 4b/aa p. 123; 119 II 449 consid. 3a). Dans l'interprétation objective, la jurisprudence n'attache plus une importance décisive au fait que les parties ont utilisé une expression juridique précise. En effet, la qualification juridique dépend du sens et du but d'un contrat et l'art. 18 al. 1 CO prescrit clairement qu'il ne faut pas s'arrêter aux dénominations peut-être inexactes que les parties ont employées.
 
Les circonstances retenues par l'autorité cantonale relatives à ce que les parties avaient en vue lors des pourparlers et au moment de la conclusion du contrat, ce qu'elles ont alors voulu et déclaré, relèvent du fait et lient le Tribunal fédéral en instance de réforme (ATF 121 III 414 con-sid. 2a; 117 II 273 consid. 5a p. 279).
 
b) Le texte de la condition suspensive litigieuse est en soi relativement clair: les parties à la promesse A conviennent d'exécuter leur promesse lorsque les promesses B et C auront été exécutées, c'est-à-dire lorsque les contrats définitifs de vente B et C auront été instrumentés.
 
La condition suspensive est toutefois problématique puisqu'elle figure également dans les promesses B et C et qu'elle engendre de ce fait une sorte de "subordination réciproque" entre les promesses: l'exécution de la promesse A est subordonnée à l'exécution des promesses B et C; l'exécution de la promesse B est subordonnée à l'exécution des promesses A et C; enfin, l'exécution de la promesse C est subordonnée à l'exécution des promesses A et B.
 
Une interprétation littérale de ces trois conditions suspensives semble permettre à chaque partie de refuser de signer l'acte définitif de vente ou d'échange tant que les deux autres promesses n'ont pas été exécutées. Cette interprétation conduit toutefois à une impasse puisque chaque partie peut invoquer ce droit; même une exécution simultanée des promesses ne résout pas le problème. Une partie pourrait toujours refuser de signer l'acte définitif en même temps que les autres, au motif que les deux autres contrats définitifs ne sont pas encore signés.
 
c) Les défenderesses reconnaissent que la Commune souhaitait acquérir les trois parcelles et qu'elle voulait échapper à l'obligation d'acquérir l'une des parcelles si les deux autres ou l'une d'elle lui échappaient. Elles admettent aussi que la condition suspensive litigieuse devait permettre à la Commune de ne pas devoir exécuter l'une des promesses au cas où une autre promesse ne serait pas susceptible d'exécution.
 
Les propriétaires des parcelles 220, 222 et 223 étaient au courant des intentions de la Commune d'acquérir les parcelles en vue de développer le village de X.________.
 
Cela figure d'ailleurs en tête de chaque promesse de contracter.
 
Vu la formulation de la condition suspensive litigieuse dans chaque promesse, chaque propriétaire pouvait et devait de bonne foi comprendre que la Commune voulait acquérir les trois parcelles ensemble. Les défenderesses ont d'ailleurs compris la condition suspensive en ce sens.
 
En revanche, il n'est pas possible de suivre les défenderesses lorsqu'elles soutiennent que cette condition leur permettait de refuser de s'exécuter si un autre propriétaire refusait lui-même de s'exécuter, que son refus soit ou non fondé. Il ressort en effet du chiffre 8 des promesses A et B que les promesses étaient fermes et irrévocables en ce sens que si l'une ou l'autre parties ne pouvait pas ou ne voulait pas donner suite, dans le délai convenu, aux obligations résultant pour elle de la convention, l'autre partie pouvait la contraindre à l'exécution.
 
Les promesses A et B ne prévoyaient donc pas de "délai de réflexion" ou de "droit de résiliation" en faveur des parties. Chacune était tenue de s'exécuter et ne pouvait pas se libérer de ses obligations en payant un dédit. Dès lors, on ne peut pas interpréter la condition suspensive litigieuse en ce sens que le refus de s'exécuter de l'un des propriétaires, même totalement infondé, ouvrait le droit aux autres de ne pas exécuter leurs promesses. C'est pourtant ce que soutiennent les défenderesses.
 
Étant donné l'impasse à laquelle conduirait une interprétation littérale de la condition suspensive litigieuse, l'objectif poursuivi par les parties en prévoyant une telle condition et le caractère ferme et irrévocable qu'elles ont souhaité donner à leurs promesses, cette condition suspensive doit être interprétée en ce sens que la promesse A est exécutable si les promesses B et C sont valables et susceptibles d'exécution, et que la promesse B est exécutable si les promesses A et C sont valables et susceptibles d'exécution.
 
d) Le 29 mars 1995, trois des quatre héritières de A.________ ont déclaré résilier la promesse de vente conclue par leur père le 30 mars 1994 pour lésion (21 CO) et vices du consentement. La défenderesse B1.________ a, pour sa part, refusé d'exécuter sa promesse en se prévalant de l'invalidation de la promesse conclue avec A.________.
 
L'autorité cantonale a constaté que les conditions d'ordre administratif prévues dans les promesses A et B étaient toutes réalisées lorsque la notaire a convoqué les parties pour l'instrumentation des actes définitifs en octobre 1995. Elle a en outre jugé que la promesse A n'était entachée d'aucune lésion, dol ou vice du consentement et qu'elle était valable. Cette conclusion n'est pas remise en cause par les défenderesses.
 
La promesse A étant valable et susceptible d'exécution, B1.________ ne pouvait pas se soustraire à son obligation d'exécuter sa propre promesse. Il est rappelé pour le surplus que sa promesse a été jugée valable par la cour cantonale, ce que B1.________ ne remet pas en cause. Sa condamnation à signer les actes nécessaires au transfert de la propriété de la parcelle 222 à la demanderesse moyennant paiement par cette dernière de la somme de 200'000 fr. ne viole donc pas le droit fédéral.
 
En instance cantonale puis en réforme, les héritières de A.________ ont invoqué le refus de B1.________ d'exécuter sa promesse pour se soustraire à leurs propres obligations.
 
La promesse signée par B1.________ étant valable et susceptible d'exécution, la condamnation des héritières de A.________ à signer les actes nécessaires au transfert de la propriété de la parcelle 223 à la demanderesse en échange d'une surface de 11'914 m2 à détacher de la parcelle 217 ne viole pas le droit fédéral.
 
e) Au vu de ce qui précède, il n'est pas nécessaire d'examiner si la cour cantonale a violé le droit fédéral en retenant que la condition suspensive litigieuse était remplie du seul fait que les promesses de contracter étaient assimilables à des contrats définitifs. De même, il est superflu d'examiner si les défenderesses ont empêché la survenance de la condition suspensive de manière contraire aux règles de la bonne foi, comme l'a estimé l'autorité cantonale.
 
4.- Le recours doit être rejeté et l'arrêt attaqué confirmé. Il appartient aux défenderesses, qui succombent, d'assumer les frais judiciaires et les dépens de la procédure fédérale, conjointement entre elles (art. 156 al. 1 et 7, 159 al. 1 et 5 OJ).
 
Par ces motifs
 
le Tribunal fédéral :
 
1. Rejette le recours et confirme le jugement attaqué.
 
2. Met un émolument judiciaire de 6'500 fr. à la charge des défenderesses, solidairement entre elles.
 
3. Dit que les défenderesses, débitrices solidaires, verseront à la demanderesse une indemnité de 7'500 fr. à titre de dépens.
 
4. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois.
 
____________
 
Lausanne, le 21 février 2002 MSI/dxc
 
Au nom de la Ie Cour civile
 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
 
Le Président,
 
La Greffière,
 
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