BGer 1P.15/2002 | |||
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BGer 1P.15/2002 vom 03.04.2002 | |
Tribunale federale
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{T 0/2}
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1P.15/2002/col
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Arrêt du 3 avril 2002
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Ire Cour de droit public
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Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président du Tribunal fédéral,
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Aeschlimann, Fonjallaz,
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greffier Parmelin.
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T.________, recourant, représenté par Me Yvan Jeanneret, avocat, rue du Conseil-Général 18, 1205 Genève,
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contre
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Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale 3565, 1211 Genève 3,
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Cour de cassation du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, 1211 Genève 3.
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art. 29, 32 Cst. et 6 § 3 CEDH; procédure pénale; assistance d'un avocat; nécessité d'une confrontation; appréciation des preuves
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(recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation du canton de Genève du 14 décembre 2001)
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Faits:
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A.
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Par arrêt du 18 juin 2001, la Cour d'assises du canton de Genève a condamné T.________ à la peine de dix ans de réclusion et à quinze ans d'expulsion du territoire suisse sans sursis, pour infractions graves à la loi fédérale sur les stupéfiants, séquestrations et enlèvements aggravés; elle a en outre révoqué le sursis accordé le 18 mai 1999 par le Juge d'instruction du canton de Genève à quatre mois d'emprisonnement pour infraction simple à la loi fédérale sur les stupéfiants.
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Le jury a retenu en substance que T.________ avait, de concert avec M.________ et A.________, contraint B.________, S.________ et G.________, ressortissants albanais alors âgés respectivement de douze, treize et quinze ans, en échange de leur hébergement, de se rendre dans le secteur d'Uni Mail, à Genève, et à proximité de la piscine du Grand-Lancy pour vendre des sachets de cinq grammes d'héroïne, ce à raison de sept à huit sachets par jour durant une dizaine de jours, au prix de 250 fr. le sachet. Le jury a également admis que les accusés avaient retenu les trois mineurs prisonniers pendant près de six heures dans l'appartement mis à disposition de ces derniers par T.________, afin d'obtenir la restitution d'une somme de 13'500 fr. provenant du trafic de drogue, que les jeunes auraient conservée à leur insu, et que, pour ce faire, ils les avaient frappés avec les poings et les pieds sur le visage et sur tout le corps, qu'ils leur avaient ligoté les mains dans le dos avec du câble d'antenne de télévision, qu'ils les avaient menacés à l'aide d'un couteau, et qu'ils les avaient frappés avec des bouteilles de bière sur la tête et avec un câble d'antenne de télévision, avant que l'accusé ne se rende avec M.________ et les deux plus jeunes sur les lieux où ces derniers avaient caché l'argent.
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B.
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Statuant par arrêt du 14 décembre 2001, la Cour de cassation du canton de Genève (ci-après: la Cour de cassation ou la cour cantonale) a rejeté le pourvoi formé par T.________ contre ce prononcé. Elle a refusé de voir une violation des droits de la défense dans le fait que l'accusé avait été confronté aux mineurs le 11 octobre 2000 alors qu'il n'était pas encore assisté d'un avocat d'office, dès lors qu'il avait refusé une telle assistance lors de son audition par la police. Elle a estimé que les dépositions des mineurs étaient parfaitement claires quant à la participation de T.________ dans le trafic de stupéfiants et quant aux sévices subis, excluant tout arbitraire dans l'appréciation des preuves. Elle a enfin jugé qu'au regard de l'ensemble des circonstances, la peine infligée à l'accusé n'était pas excessivement sévère.
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C.
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Agissant par la voie du recours de droit public, T.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Il voit une violation des droits de la défense garantis aux art. 6 § 3 let. c CEDH, 14 ch. 3 let. d Pacte ONU II et 29 al. 2 et 3 Cst. dans le fait qu'une audience d'instruction a été tenue le 11 octobre 2000 alors qu'il n'était pas assisté d'un avocat. Il soutient en outre que les art. 6 § 3 let. d CEDH et 14 ch. 3 let. e Pacte ONU II auraient été violés, car il n'a jamais été en mesure d'exercer valablement son droit à l'interrogatoire des témoins à charge. Il prétend enfin que sa condamnation reposerait sur une appréciation arbitraire des preuves et violerait la présomption d'innocence garantie aux art. 6 § 2 CEDH, 14 ch. 2 Pacte ONU II et 32 al. 1 Cst. Il requiert l'assistance judiciaire.
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La cour cantonale se réfère à son arrêt. Le Procureur général du canton de Genève conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable.
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Le Tribunal fédéral considère en droit:
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1.
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Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral n'est pas ouvert pour se plaindre d'une appréciation arbitraire des preuves et des constatations de fait qui en découlent (ATF 124 IV 81 consid. 2a p. 83) ou pour invoquer la violation directe d'un droit constitutionnel ou conventionnel, tel que le droit à l'assistance d'un défenseur ancré aux art. 6 § 3 let. c CEDH, 14 ch. 3 let. d Pacte ONU II et 29 al. 2 et 3 Cst., le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge, garanti aux art. 6 § 3 let. d CEDH et 14 ch. 3 let. e Pacte ONU II (ATF 127 IV 215 consid. 2d p. 218), ou la présomption d'innocence, consacrée aux art. 32 al. 1 Cst., 6 § 2 CEDH et 14 ch. 2 Pacte ONU II (ATF 120 Ia 31 consid. 2b p. 35/36). Au vu des arguments soulevés, seul le recours de droit public est ouvert en l'occurrence.
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Le recourant est directement touché par l'arrêt attaqué qui le condamne à une peine de dix ans de réclusion et à son expulsion du territoire suisse pour une durée de quinze ans; il a un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cet arrêt soit annulé et a, partant, qualité pour recourir selon l'art. 88 OJ. Interjeté en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance cantonale, le recours répond au surplus aux réquisits des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ.
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2.
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Le recourant voit une violation des droits de la défense garantis aux art. 6 § 3 let. c CEDH, 14 ch. 3 let. d Pacte ONU II et 29 al. 2 et 3 Cst. dans le fait qu'une audience d'instruction a été tenue le 11 octobre 2000 alors qu'il n'était pas assisté d'un avocat; la confrontation avec les mineurs intervenue à ce moment-là ne constituerait pas une occasion adéquate et suffisante de contester leurs témoignages à charge, au sens des art. 6 § 3 let. d CEDH et 14 ch. 3 let. e Pacte ONU II.
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2.1 En l'occurrence, nul ne conteste que les conditions à l'octroi d'un défenseur d'office étaient réunies eu égard à la peine à laquelle le recourant était exposé (cf. ATF 126 I 194 consid. 3a p.195/196 et la jurisprudence citée); le Juge d'instruction lui a d'ailleurs désigné un avocat d'office en la personne de Me Yvan Jeanneret deux jours après l'audience incriminée du 11 octobre 2000. La seule question à trancher est celle de savoir si le recourant aurait déjà dû être assisté d'un conseil à cette occasion et, dans l'affirmative, si la confrontation avec les mineurs est intervenue dans le respect des droits que lui confère l'art. 6 § 3 let. d CEDH, étant précisé que l'art. 14 ch. 3 let. e Pacte ONU II n'a pas de portée plus étendue sur ce point (cf. ATF 122 I 109 consid. 3c p. 114; 120 Ia 247 consid. 5b p. 255).
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2.2 A teneur de l'art. 6 § 3 CEDH, tout accusé a le droit notamment d'être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui (let. a), de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense (let. b) et de se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix (let. c). L'art. 107A du Code de procédure pénale genevois (CPP gen.) prévoit que, lorsqu'une personne est entendue comme auteur présumé d'une infraction, elle est rendue attentive, sans délai, par la remise du présent article dans une langue comprise par elle, à ce qu'elle a le droit d'obtenir la visite d'un avocat et de conférer librement avec lui, dès la fin de son interrogatoire par l'officier de police, mais au plus tard à la première heure ouvrable à l'issue des vingt-quatre heures suivant le début de l'audition par la police (let. g), qu'elle peut, si elle ne connaît pas d'avocat, s'en faire désigner un (let. h) et qu'elle peut, le cas échéant, faire appel à l'assistance juridique, aux conditions prévues par la loi (let. i). L'art. 41 al. 1 let. a CPP gen. dispose qu'au début de la première comparution devant le juge d'instruction, tout inculpé doit être expressément informé de son droit de choisir son ou ses défenseurs ou de s'en faire désigner d'office.
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2.3 En l'occurrence, le recourant a été interpellé le 3 octobre 2000, puis entendu par la police, après avoir été rendu attentif à la possibilité de se faire représenter par un avocat, conformément à l'art. 107A CPP gen.; il n'a pas sollicité la désignation d'un défenseur d'office et ne s'est pas opposé à son audition par la police. Le Juge d'instruction l'a entendu le 4 octobre 2000; il lui a donné connaissance du contenu de l'art. 41 CPP gen. et l'a rendu attentif à la possibilité de se constituer un défenseur d'office, ce à quoi il a renoncé en l'état, acceptant d'être interrogé en l'absence d'un avocat. Le Juge d'instruction a interrogé les trois mineurs, en présence de leur conseil, dans son cabinet le 11 octobre 2000; à cette occasion, ils ont été confrontés aux prévenus. T.________ n'était alors pas assisté d'un avocat, contrairement à A.________, qui avait sollicité la désignation d'un défenseur d'office à l'issue de son audition devant le Juge d'instruction le 4 octobre 2000. Il aurait donc aussi pu bénéficier de l'assistance d'un avocat lors de l'audience du 11 octobre 2000, s'il en avait fait la demande. Dans ces conditions, le fait que cette audience se soit déroulée alors que le recourant n'était pas assisté d'un avocat ne consacre aucune violation de l'art. 6 § 1 et 3 let. c CEDH. A cet égard, la référence à l'arrêt du Tribunal fédéral paru aux ATF 113 Ia 218 est dénuée de toute pertinence, s'agissant d'un cas concernant l'absence de l'avocat du prévenu à l'audience de jugement. Reste ainsi uniquement à examiner si la confrontation avec les mineurs intervenue dans ces conditions lors de l'audience du 11 octobre 2000 respectait les droits de la défense.
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2.4 L'art. 6 § 3 let. d CEDH reconnaît à tout accusé le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d'obtenir la citation et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge. Ce droit, qui découle également de l'art. 29 Cst. (ATF 125 I 127 consid. 6b p. 133; 124 I 274 consid. 5b p. 284; 121 I 306 consid. 1b p. 308 et les arrêts cités), ne vaut pas seulement à l'encontre des témoins au sens classique du terme, mais à l'encontre de toutes les personnes qui font des dépositions à charge, fussent-elles également impliquées comme coïnculpées dans la procédure pénale (arrêt du Tribunal fédéral 6P.65/1999, consid. 1b, paru à la RVJ 2000 p. 204). Les éléments de preuve doivent en principe être produits en présence de l'accusé lors d'une audience publique, en vue d'un débat contradictoire (ATF 125 I 127 consid. 6b p. 132). Cette règle tend à assurer l'égalité des armes entre l'accusateur public et la défense (ATF 121 I 306 consid. 1b p. 308; 104 Ia 314 consid. 4b p. 316). Il n'est toutefois pas exclu de tenir compte des dépositions à charge recueillies durant la phase de l'enquête, pour autant que l'accusé ait disposé d'une occasion adéquate et suffisante de les contester et d'en interroger ou d'en faire interroger les auteurs (ATF 125 I 127 consid. 6b p. 132/133 et les arrêts cités). Exceptionnellement, le juge peut prendre en considération une déposition faite au cours de l'enquête alors que l'accusé n'a pas eu l'occasion d'en faire interroger l'auteur, en particulier s'il n'est plus possible de faire procéder à une audition contradictoire en raison du décès ou d'un empêchement durable du témoin (ATF 125 I 127 consid. 6c/dd p. 136; 105 Ia 396 consid. 3b p. 397). Cette exception ne vaut pas toutefois lorsqu'une confrontation était possible durant l'enquête et apparaissait indiquée parce que le témoin pourrait ne plus être disponible par la suite et lorsque, pour des motifs qui ne sont pas imputables à l'accusé, cette confrontation n'a pas eu lieu et qu'il s'avère ensuite impossible d'y procéder; dans un tel cas, la déposition faite par le témoin en l'absence de l'accusé ne peut être retenue à la charge de ce dernier (arrêt 6P.43/1999 du 15 juin 1999, consid. 2c). S'il n'est pas possible d'organiser une confrontation avec les témoins à charge, l'accusé doit avoir la possibilité de faire poser par écrit des questions complémentaires à ces témoins (ATF 124 I 274 consid. 5b p. 286; 118 Ia 462 consid. 5a/aa p. 469 et les arrêts cités). Tel est en particulier le cas lorsque ceux-ci se trouvent à l'étranger et qu'ils ne peuvent être entendus que par le biais d'une commission rogatoire (ATF 125 I 127 consid. 6c/ee p. 137; 118 Ia 462 consid. 5a/bb p. 470 et les arrêts cités).
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L'exercice du droit à l'interrogatoire des témoins est soumis aux dispositions de la loi de procédure applicable, qui peut poser des conditions de forme et de délai; il peut aussi être renoncé, expressément ou tacitement, à ce droit; une telle renonciation ne rend pas nulles les dépositions recueillies en cours d'enquête et ne donne aucun droit à ce qu'elles soient répétées (ATF 125 I 127 consid. 6c/bb p. 134; 121 I 306 consid. 1b p. 309 et les arrêts cités). La volonté de l'accusé de renoncer à son droit d'être confronté aux témoins à charge ne doit pas être admise trop facilement, en particulier lorsque celui-ci ne maîtrise pas la langue de la procédure et qu'il n'est pas assisté d'un défenseur et d'un interprète, mais doit être établie de manière non équivoque et s'entourer d'un minimum de garanties correspondant à sa gravité (ATF 121 I 30 consid. 5f p. 37/38).
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Dans sa jurisprudence, la Cour européenne des droits de l'homme s'emploie à rechercher si la procédure, examinée dans son ensemble, revêt un caractère équitable (arrêt de la CourEDH Van Mechelen c. Pays-Bas, du 23 avril 1997, Recueil 1997-III, § 50, p. 711). La question de savoir si le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge garanti à l'art. 6 § 3 let. d CEDH est respecté doit en conséquence être examinée dans chaque cas en fonction de l'ensemble de la procédure et des circonstances concrètes de l'espèce.
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2.5 En l'espèce, le recourant a été brièvement confronté aux mineurs lors de l'audience tenue le 11 octobre 2000 dans le cabinet du Juge d'instruction, en présence de ses coaccusés; les adolescents ont confirmé avoir vendu des sachets d'héroïne sur une période de quatre à cinq jours pour le compte des accusés et leur avoir remis l'argent en provenance de ce trafic; ils ont aussi réaffirmé avoir été privés de liberté, frappés sauvagement et menacés par les trois hommes durant plusieurs heures dans l'un des appartements que T.________ avait mis à leur disposition, parce qu'ils ne voulaient plus travailler pour eux. Un interprète en langue albanaise assistait à l'audience; le recourant connaissait ainsi les déclarations faites par les mineurs à cette occasion; il pouvait les comparer avec les informations qui lui avaient été communiquées par la police lors de son audition le 3 octobre 2000, puis le lendemain devant le Juge d'instruction, et leur poser toutes les questions utiles quant à d'éventuelles contradictions. Or, interpellé par le Juge d'instruction, il s'est borné à déclarer connaître les trois mineurs depuis sept jours et ignorer qu'ils vendaient de la drogue, ajoutant ne pas avoir de questions à leur poser. La possibilité offerte au recourant de répondre aux témoignages des mineurs a donc été adéquate et suffisante, même s'il n'était alors pas assisté d'un avocat. La Cour européenne des droits de l'homme a d'ailleurs conclu en ce sens dans un cas analogue (arrêt de la CourEDH du 19 février 1991 dans la cause Isgrò c. Italie, série A 194 A, § 30 ss), contrairement à l'avis de la Commission européenne des droits de l'homme, qui avait été jugé décisif pour admettre une violation dans le cas paru aux ATF 116 Ia 289. Par ailleurs, la Cour d'assises n'a pas refusé d'entendre les mineurs à l'audience de jugement. Elle n'a cependant pas pu le faire parce qu'ils avaient été refoulés à destination de leur pays d'origine, à l'issue du jugement rendu le 31 octobre 2000 par le Tribunal de la jeunesse du canton de Genève. Le fait qu'ils n'aient pas répondu à la convocation par voie édictale n'empêchait cependant pas de prendre en considération les déclarations faites durant l'enquête (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6P.65/1999, consid. 1b, paru à la RVJ 2000 p. 204). Enfin, les déclarations des mineurs ne constituent pas les seuls éléments à charge; la Cour d'assises a également forgé sa conviction sur le témoignage de l'inspecteur de police qui a procédé à l'interpellation des mineurs et qui a recueilli leurs déclarations, suivant lequel T.________ était connu dans le milieu comme un trafiquant de drogue, respectivement pour récupérer l'argent par d'autres trafiquants, ainsi que sur divers indices matériels corroborant la réalité de la séquestration et des sévices subis.
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Dans ces conditions, les droits de la défense n'ont pas été violés.
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3.
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Le recourant prétend que sa condamnation reposerait sur une appréciation arbitraire des faits et violerait le principe de la présomption d'innocence ancré aux art. 32 al. 1 Cst., 6 § 2 CEDH et 14 ch. 2 Pacte ONU II.
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3.1 En tant qu'elle a trait à la constatation des faits et à l'appréciation des preuves, la maxime "in dubio pro reo", déduite de la présomption d'innocence, est violée lorsque l'appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute insurmontable sur la culpabilité de l'accusé (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 IV 86 consid. 2a p. 88). Elle n'a toutefois pas de portée propre lorsque, comme en l'espèce, elle est invoquée cumulativement avec l'interdiction de l'arbitraire dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 2e p. 31; 118 Ia 28 consid. 1b p. 30). Saisi d'un recours de droit public mettant en cause l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral examine seulement si le juge cantonal a outrepassé son pouvoir d'appréciation et établi les faits de manière arbitraire (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4 p. 211). Une constatation de fait n'est pas arbitraire pour la seule raison que la version retenue par le juge ne coïncide pas avec celle de l'une ou l'autre des parties; encore faut-il que l'appréciation des preuves soit manifestement insoutenable, en contradiction flagrante avec la situation effective, constitue la violation d'une règle de droit ou d'un principe juridique clair et indiscuté ou encore qu'elle heurte de façon grossière le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 118 Ia 28 consid. 1b p. 30). Enfin, il ne suffit pas que la décision attaquée soit fondée sur une motivation insoutenable; il faut encore qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41, 54 consid. 2b p. 56).
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3.2 En l'occurrence, T.________ a été condamné pour infractions graves à la loi fédérale sur les stupéfiants pour avoir, de concert avec M.________ et A.________, contraint B.________, S.________ et G.________ à se livrer à un trafic d'héroïne, en échange de leur hébergement, en leur procurant la drogue et en encaissant chaque soir le produit de la vente de celle-ci. La Cour d'assises s'est fondée sur les dépositions des mineurs, jugées suffisamment concordantes sur ce point, en retenant la solution la plus favorable aux accusés s'agissant des quantités de drogue écoulées. La Cour de cassation a vu des éléments propres à confirmer les déclarations des mineurs dans le fait que T.________ jouissait de plusieurs logements, qu'il venait d'en trouver un à Versoix lorsqu'il a été interpellé, ainsi que dans les déclarations des accusés. Le recourant se prévaut des contradictions émaillant les dépositions des trois jeunes, quant à la quantité d'héroïne qu'ils auraient été contraints de vendre, et du fait que la perquisition de ses appartements n'a permis de découvrir ni drogue, ni argent, ni matériel susceptible d'être utilisé pour couper la drogue, la peser ou la conditionner, afin de contester toute implication de sa part dans un trafic de stupéfiants. Il ne se prononce en revanche pas, comme il lui appartenait de le faire en vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (cf. ATF 127 I 38 consid. 3c p. 43), sur la valeur probante des autres éléments qui corroboraient, selon la Cour de cassation, les déclarations à charge des mineurs. La recevabilité du recours sur ce point peut cependant demeurer indécise. L'autorité intimée pouvait en effet sans arbitraire voir dans le fait que T.________ jouissait de plusieurs appartements, qu'il a mis à disposition des trois jeunes et de ses coaccusés, un indice en faveur de l'exploitation des jeunes dans un trafic de stupéfiants qu'il aurait mis en place avec l'aide de ses coaccusés. L'implication du recourant dans un trafic de drogue impliquant des mineurs repose également sur les déclarations de l'inspecteur de police l E.________, suivant lesquelles les trois jeunes auraient, de source confidentielle, été passés à tabac par leur fournisseur, le nom de T.________ étant alors évoqué. Lors de sa première audition, A.________ a déclaré savoir que les mineurs se livraient à un trafic de stupéfiants, car ils revenaient tous les soirs avec une somme d'argent importante. Il a également affirmé que T.________ avait voulu récupérer l'argent que ceux-ci avaient retiré de ce trafic et précisé avoir obtenu la somme de 13'500 fr. Le recourant a tenu des propos semblables lors de sa première audition, avant de se rétracter. Il n'était dès lors nullement arbitraire de tirer de l'ensemble de ces faits des indices corroborant la version des mineurs; il était parfaitement soutenable de préférer les déclarations des prévenus faites à la police, puis confirmées devant le Juge d'instruction en présence de deux interprètes différents, à leurs rétractations ultérieures, fondées sur une prétendue retranscription erronée de leurs propos. Le fait que les perquisitions ordonnées par le Juge d'instruction n'ont pas permis de mettre la main sur de la drogue, de l'argent ou du matériel lié au conditionnement ou à la préparation de celle-ci n'est pas déterminant, dans la mesure où le recourant avait été condamné pour une infraction semblable, après qu'une balance électronique et des sachets minigrips aient été saisis à son domicile. Il en va de même des variations entre les mineurs quant à la quantité de drogue revendue, ceux-ci ayant en effet intérêt à minimiser celle-ci pour ne pas se charger.
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Pour le surplus, la culpabilité du recourant des chefs d'enlèvement et de séquestration aggravés résulte des déclarations concordantes des mineurs, confirmées par divers indices matériels, tels que la présence de traces de sang compatible avec celui de G.________ sur un drap, un short et un câble d'antenne noué à l'armature du lit, des traces de vomi ainsi que des bouteilles de bière et un bocal de cornichons dont T.________ se serait servi pour frapper l'un des jeunes au bras, dans l'appartement dans lequel ces derniers déclarent avoir été retenus prisonniers. L'examen médical auquel G.________ a été soumis le 29 septembre 2000 a d'ailleurs confirmé la présence de lésions compatibles avec les sévices qu'il déclare avoir subis, confirmant en particulier le fait qu'il a été frappé, puis ligoté à l'aide d'un câble d'antenne de télévision; l'absence de lésion constatée chez les deux autres mineurs quatre jours après les faits tend il est vrai à relativiser l'ampleur des coups qu'ils prétendent avoir reçus, mais elle n'exclut nullement qu'ils aient fait l'objet de menaces; elle ne remet nullement en cause le fait que les trois jeunes ont été privés de leur liberté contre leur gré, par l'usage de la violence, pour G.________, et de la menace, pour les deux autres.
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En définitive, on ne discerne aucun arbitraire dans l'appréciation des preuves à laquelle se sont livrées la Cour d'assises, puis la Cour de cassation; le grief tiré d'une violation de la présomption d'innocence est ainsi mal fondé.
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4.
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Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable. Les conditions de l'art. 152 al. 1 OJ étant réunies, il convient de donner suite à la demande d'assistance judiciaire présentée par le recourant et de statuer sans frais. Me Yvan Jeanneret sera désigné comme avocat d'office de T.________ pour la présente procédure et une indemnité de 1'500 fr. lui sera allouée à titre d'honoraires (art. 152 al. 2 OJ). Il n'y a pas lieu d'octroyer de dépens (art. 159 al. 2 OJ).
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
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1.
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Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
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2.
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La demande d'assistance judiciaire est admise.
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3.
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Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire, ni alloué de dépens.
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4.
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Me Yvan Jeanneret est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral.
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5.
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Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Procureur général et à la Cour de cassation du canton de Genève.
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Lausanne, le 3 avril 2002
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Au nom de la Ire Cour de droit public
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du Tribunal fédéral suisse
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Le président: Le greffier:
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