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Informationen zum Dokument  BGer 2P.38/2001  Materielle Begründung
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BGer 2P.38/2001 vom 30.08.2002
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
2P.38/2001 /mks
 
Séance du 30 août 2002
 
IIe Cour de droit public
 
Les juges fédéraux Wurzburger, président,
 
Hungerbühler, Müller, Merkli, Berthoud, juge suppléant,
 
greffière Kurtoglu-Jolidon.
 
1. Association cantonale des droguistes fribourgeois,
 
2. A.________,
 
3. B.________,
 
4. C.________,
 
5. D.________,
 
6. E.________,
 
7. F.________,
 
8. G.________,
 
9. H.________,
 
10. I.________,
 
11. J.________,
 
12. K.________,
 
13. L.________,
 
14. M.________,
 
recourants, tous les quatorze représentés par Me Dominique Morard, avocat, rue Rieter 9, case postale 236, 1630 Bulle,
 
contre
 
Conseil d'Etat du canton de Fribourg, rue des Chanoines 17, 1700 Fribourg.
 
art. 27, 49, 94 Cst.: liberté économique, primauté du droit fédéral,
 
(recours de droit public contre le règlement du Conseil d'Etat du canton de Fribourg du 28 novembre 2000 concernant les produits thérapeutiques).
 
Faits:
 
A.
 
Dans le canton de Fribourg, l'exercice de la profession de droguiste a été régi jusqu'au 30 décembre 2000 par la loi cantonale du 6 mai 1943 sur la police de santé et son règlement d'exécution du 16 mars 1948. Depuis le 1er janvier 2001, il est soumis à la loi du 16 novembre 1999 sur la santé, entrée en vigueur le 1er janvier 2001. Le 28 novembre 2000, le Conseil d'Etat du canton de Fribourg a adopté le règlement concernant les produits thérapeutiques, qui a été publié dans la Feuille des avis officiels du canton de Fribourg du 29 décembre 2000.
 
Ce règlement contient notamment les dispositions suivantes:
 
Art. 3 - Fabrication des médicaments
 
1 Quiconque fabrique des médicaments doit être au bénéfice d'une autorisation délivrée par la Direction de la santé publique et des affaires sociales (ci-après: la Direction) et est soumis à son contrôle.
 
2 L'autorisation est délivrée par la Direction conformément aux directives de l'OICM concernant la fabrication des médicaments ou aux directives de l'autorité fédérale compétente.
 
3 Avant de délivrer l'autorisation, la Direction s'assure notamment que le fabricant:
 
a) dispose du personnel compétent, des locaux nécessaires ainsi que de l'appareillage et des équipements adéquats afin de garantir le respect des règles de qualité du médicament, d'hygiène et de sécurité;
 
b) possède un système d'assurance de qualité correspondant au type et à l'ampleur des activités qu'il exerce;
 
c) travaille conformément aux règles reconnues des bonnes pratiques de fabrication et aux exigences de la législation concernant le contrôle de la fabrication.
 
4 Le fabricant est tenu de fournir à la Direction toutes les informations nécessaires démontrant qu'il remplit les conditions d'autorisation.
 
Art. 5 - Principe
 
Les fabricants, distributeurs et répartiteurs fournissent les produits thérapeutiques uniquement aux personnes et aux maisons qui possèdent une autorisation de les délivrer. Tous les médicaments distribués ou vendus doivent être autorisés par l'OICM ou par l'autorité fédérale compétente. Les produits thérapeutiques pour les essais cliniques ou au bénéfice d'une autorisation spéciale pour usage dans un cas isolé font exception.
 
Art. 8 - Spécialités de comptoir
 
1 Les spécialités de comptoir que le pharmacien ou la pharmacienne ou le ou la droguiste fabrique lui-même ou elle-même doivent être annoncées au pharmacien ou à la pharmacienne cantonal/e qui autorisera leur fabrication et remise conformément aux directives de la Direction.
 
2 Les spécialités de comptoir doivent satisfaire aux exigences de la Convention intercantonale sur le contrôle des médicaments, à ses dispositions d'exécution et à la législation fédérale en la matière et ne correspondre qu'à des spécialités de liste C, D ou E de l'OICM.
 
Art. 13 - Présence
 
1 Le/la ou les pharmacien-ne-s responsables assurent personnellement la direction de la pharmacie. A cet effet, ils doivent être présents aux heures d'ouverture.
 
2 Si un pharmacien ou une pharmacienne n'est pas toujours présent/e, il lui incombe de désigner un pharmacien remplaçant, ou une pharmacienne remplaçante autorisé/e à pratiquer pour assumer la responsabilité de la pharmacie durant ses absences.
 
3 Le nom et le titre du pharmacien ou de la pharmacienne ou de son remplaçant ou de sa remplaçante présent/e dans la pharmacie doivent être clairement affichés à l'entrée de la pharmacie ainsi que sur le comptoir.
 
Art. 33 - Autorisation
 
a) Principe
 
1 Toute création, reprise, transformation ou tout transfert d'une droguerie exige, du ou de la droguiste responsable, le dépôt d'une requête adressée à la Direction. L'article 11 al. 1 à 3 ainsi que les articles 12 à 15 sont applicables par analogie.
 
b) Conditions personnelles
 
2 La Direction délivre l'autorisation d'exploiter une droguerie lorsque les conditions suivantes sont remplies:
 
a) le requérant ou la requérante possède une autorisation de pratique en tant que droguiste;
 
b) le requérant ou la requérante qui n'est pas propriétaire de la droguerie dispose d'un contrat de bail et/ou d'un contrat de gérance lui garantissant l'indépendance nécessaire à l'exercice de sa profession;
 
c) le requérant ou la requérante n'est pas déjà responsable d'une autre droguerie.
 
3 Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'une même droguerie, chacune d'elles doit satisfaire aux conditions personnelles liées à l'autorisation d'exploitation.
 
Art. 37 - Travaux
 
1 Les drogueries peuvent exercer le commerce de détail des drogues, substances médicamenteuses et homéopathiques, ou des spécialités pharmaceutiques des listes D et E de l'OICM, des produits chimiques et substances toxiques pour l'agriculture, l'industrie, les laboratoires scientifiques et les ménages.
 
2 Il est interdit aux droguistes:
 
a) d'exécuter des ordonnances de médecins, de dentistes ou de vétérinaires, et cela quel que soit le produit thérapeutique prescrit;
 
b) de préparer, de détenir et de vendre tous les produits dont la préparation, la détention et la vente sont réservées aux pharmaciens et pharmaciennes;
 
c) d'employer, dans leur enseigne, leur en-tête de lettres, leurs factures et réclames, des désignations propres à induire en erreur.
 
Art. 58 - Dispositions transitoires
 
a) Spécialités de comptoir
 
Les spécialités de comptoir qui ont été annoncées au pharmacien ou à la pharmacienne cantonal/e en vertu de l'ancien droit doivent faire l'objet d'une demande d'autorisation au sens de l'article 8 dans un délai d'une année dès l'entrée en vigueur de la loi sur la santé et du présent règlement.
 
Art. 61 - d) Remplacement
 
1 Pendant une période transitoire de trois ans passé la date d'entrée en vigueur du présent règlement, le pharmacien ou la pharmacienne responsable d'une pharmacie peut demander à titre exceptionnel à être remplacé/e, sous sa responsabilité, par un assistant pharmacien ou une assistante pharmacienne, les exigences de l'article 86 de la loi sur la santé étant réservées. La demande doit être adressée à la Direction.
 
2 Pendant une période transitoire de trois ans passé la date d'entrée en vigueur du présent règlement, le ou la droguiste responsable d'une droguerie peut demander à titre exceptionnel à être remplacé/e, sous sa responsabilité, par un ou une droguiste au bénéfice d'un certificat fédéral de capacité, les exigences de l'article 86 de la loi sur la santé étant réservées. La demande doit être adressée à la Direction.
 
B.
 
Agissant par la voie du recours de droit public, l'Association cantonale des droguistes fribourgeois, A.________, B.________,C.________, D.________, E.________, F.________, G.________, H.________, I.________, J.________, K.________, L.________ et M.________ demandent au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler les art. 3, 5, 8 al. 1, 13 al. 2, 33 al. 1, 37 al. 2, 58 et 61 du règlement du 28 novembre 2000 concernant les produits thérapeutiques et d'assortir leur recours de l'effet suspensif. Ils invoquent la violation des art. 49 Cst. (primauté et respect du droit fédéral), 27 Cst. (liberté économique) et 94 Cst. (principes de l'ordre économique).
 
Le Conseil d'Etat du canton de Fribourg conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable. L'Office fédéral de la santé publique propose son admission partielle.
 
Les parties ont confirmé leurs conclusions lors d'un second échange d'écritures.
 
C.
 
Par ordonnance du 17 mai 2001, le Président de la IIème Cour de droit public a rejeté la requête de suspension et d'effet suspensif. Il a confirmé le rejet de l'effet suspensif le 18 janvier 2002.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 128 I 46 consid. 1a p. 48; 128 II 13 consid. 1a p. 16, 46 consid. 2a p. 47 et les arrêts cités).
 
1.1 Au regard de l'art. 84 OJ, la voie du recours de droit public n'est ouverte que si l'acte attaqué émane d'une autorité cantonale agissant en vertu de la puissance publique et qui affecte d'une façon quelconque la situation de l'individu, en lui imposant une obligation de faire, de s'abstenir ou de tolérer, ou qui règle d'une autre manière obligatoire ses rapports avec l'Etat, soit sous la forme d'un arrêté de portée générale, soit sous celle d'une décision particulière (ATF 125 I 119 consid. 2a p. 121; 121 I 173 consid. 2a p. 174 et les arrêts cités). En l'occurrence, il n'est pas contesté que les dispositions critiquées du règlement cantonal concernant les produits thérapeutiques (ci-après: le règlement cantonal) sont des mesures juridiques de portée générale. Le recours est dès lors recevable au regard de l'art. 84 al. 1 lettre a OJ.
 
1.2 L'exigence de l'épuisement des voies de droit cantonales prévue par l'art. 86 al. 1 OJ s'applique également aux recours de droit public formés contre les arrêtés cantonaux de portée générale (ATF 119 Ia 321 consid. 2a p. 324). Le droit fribourgeois ne prévoyant aucune procédure de contrôle direct des normes cantonales de portée générale, le présent recours, interjeté directement devant le Tribunal fédéral, est donc recevable.
 
1.3 D'après l'art. 89 al. 1 OJ, l'acte de recours doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours dès la communication, selon le droit cantonal, de l'arrêté ou de la décision attaquée. Dans le cas particulier, le règlement cantonal a été promulgué dans la Feuille des avis officiels du canton de Fribourg parue le 29 décembre 2000, de sorte que le recours du 31 janvier 2001 a été interjeté en temps utile, compte tenu de la suspension des délais de fin d'année (art. 34 al. 1 lettre c OJ).
 
1.4 Lorsque le recours est dirigé contre un arrêté de portée générale, la qualité pour recourir, au sens de l'art. 88 OJ, est reconnue à toute personne dont les intérêts juridiquement protégés sont effectivement touchés par l'acte attaqué ou pourront l'être un jour (ATF 125 I 173 consid. 1b p. 174, 474 consid. 1 p. 477; 125 II 440 consid. 1c p. 442). En leur qualité de droguistes, les treize recourants sont directement touchés dans leur activité professionnelle par les dispositions contestées du règlement cantonal. Ils ont donc qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ.
 
Une association peut également agir par la voie du recours de droit public en vue de sauvegarder les intérêts de ses membres, même si elle n'est pas directement touchée par l'acte entrepris. Il faut notamment qu'elle ait la personnalité juridique et que la défense des intérêts de ses membres figure parmi ses buts statutaires. En outre, la majorité de ses membres, ou tout au moins un grand nombre, doivent être personnellement touchés par l'acte litigieux et donc avoir la qualité pour agir (ATF 125 I 71 consid. 1b p. 75, 369 consid. 1a p. 371; Walter Kälin, Das Verfahren der staatsrechtlichen Beschwerde, 1994, p. 268). Ces conditions étant remplies en l'espèce (cf. art. 1 et 4 des statuts du 3 avril 1976), la qualité pour recourir doit également être reconnue à l'Association cantonale des droguistes fribourgeois.
 
1.5 Selon l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit, sous peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation. Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier d'office si l'arrêté attaqué est en tout point conforme au droit et à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (ATF 128 III 76 consid 1d p. 81; 127 I 38 consid. 3c p. 43; 127 III 279 consid. 1c p. 282; 126 III 524 consid. 1c p. 526, 534 consid. 1b p. 536 et les arrêts cités).
 
1.6 Saisi d'un recours de droit public dirigé contre un arrêté de portée générale, le Tribunal fédéral contrôle librement la conformité de celui-ci au droit constitutionnel fédéral ou cantonal (ATF 128 I 46 consid. 5a p. 54; 123 I 313 consid. 2b p. 316; 119 Ia 321 consid. 4 p. 325; 114 Ia 350 consid. 2 p. 354 et les arrêts cités; voir aussi SJ 1998 p. 473 consid. 3b/cc p. 480, 2P.210/1996). Il n'annule toutefois cet arrêté que s'il ne se prête à aucune interprétation conforme au droit constitutionnel. Le juge constitutionnel doit ainsi rechercher dans quelles circonstances pratiques les dispositions litigieuses seront appliquées et ne pas se borner à traiter le problème de manière purement abstraite; il y a lieu de prendre en considération les explications fournies par les autorités sur la manière d'appliquer les dispositions en cause (ATF 125 I 65 consid. 3b p. 67, 369 consid. 2 p. 374; 125 II 440 consid. 1d p. 443; 124 I 11 consid. 1c p. 14, 193 consid. 3c p. 195; 123 I 112 consid. 2a et c p. 116/117, 313 consid. 2b p. 316 et les arrêts cités). Si une réglementation de portée générale apparaît comme défendable au regard de la Constitution dans des situations normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l'éventualité que, dans certains cas, elle puisse se révéler inconstitutionnelle ne saurait en principe justifier une intervention du juge constitutionnel au stade du contrôle abstrait des normes; les intéressés gardent la possibilité de faire valoir une inconstitutionnalité de la réglementation lors de son application dans un cas particulier (ATF 120 Ia 299 consid. 2b p. 302; 118 Ia 305 consid. 1f p. 309 et les arrêts cités).
 
Lors de l'adoption du règlement cantonal en cause, la loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux (Loi sur les produits thérapeutiques, LPTh; RS 812.21), entrée en vigueur le 1er janvier 2002, n'était pas encore applicable. Or, la constitutionnalité d'un acte cantonal est en principe examinée sur la base du droit en vigueur au moment où il a été adopté. Toutefois, pour le contrôle abstrait d'une norme, le Tribunal fédéral peut tenir compte d'une modification ultérieure de la situation juridique et, en particulier, prendre en considération des règles de droit de niveau supérieur qui sont entrées en vigueur postérieurement (ATF 120 Ia 286 consid. 2c p. 290; 119 Ia 460 consid. 4d p. 473).
 
2.
 
2.1 Les recourants soutiennent en premier lieu que quatre dispositions du règlement cantonal relatives aux spécialités de comptoir violent le principe de la primauté du droit fédéral garanti par l'art. 49 al. 1 Cst. Il en irait ainsi de l'art. 3 du règlement subordonnant la fabrication des médicaments à l'octroi d'une autorisation délivrée par la Direction cantonale de la santé publique et des affaires sociales; de l'art. 5 du règlement dans la mesure où il soumet à l'autorisation de l'autorité fédérale la distribution et la vente des médicaments; de l'art. 8 du règlement prévoyant l'annonce au pharmacien cantonal en vue d'autoriser la fabrication et la remise des spécialités de comptoir et de l'art. 58 du règlement imposant le dépôt, dans le délai d'un an dès l'entrée en vigueur du règlement, d'une nouvelle demande d'autorisation pour les spécialités de comptoir déjà annoncées au pharmacien cantonal en vertu de l'ancien droit.
 
2.2 Selon l'art. 49 al. 1 Cst., qui a remplacé la règle déduite de l'art. 2 Disp. trans. aCst., le droit fédéral prime le droit cantonal qui lui est contraire. Cela signifie que les cantons ne sont pas autorisés à légiférer dans les domaines exhaustivement réglementés par le droit fédéral (ATF 128 I 46 consid. 5a p. 54; 127 I 60 consid. 4a p. 68 et les arrêts cités; Ulrich Häfelin/Walter Haller, Schweizerisches Bundesstaatsrecht, Die neue Bundesverfassung, 2001, no 1185 à 1187, p. 335/336). Dans les autres domaines, les cantons peuvent édicter des règles de droit qui ne violent ni le sens ni l'esprit du droit fédéral, et qui n'en compromettent pas la réalisation (ATF 128 I 46 consid. 5a p. 54; 127 I 60 consid. 4 p. 68; 126 I 76 consid. 1 p. 77; 125 I 474 consid. 2a p. 480; 125 II 56 consid. 2b p. 58; 125 II 315 consid. 2a p. 316 et les arrêts cités). Les règles fédérales et cantonales ne peuvent toutefois coexister qu'en l'absence de conflit (Andreas Auer/Giorgio Malinverni/Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol I, no 1037 et 1040, p. 367/368).
 
2.3 L'art. 118 al. 2 lettre a Cst. donne à la Confédération la compétence de légiférer sur l'utilisation des denrées alimentaires ainsi que des agents thérapeutiques, des stupéfiants, des organismes, des produits chimiques et des objets qui peuvent présenter un danger pour la santé. C'est sur la base de cette disposition constitutionnelle que les Chambres fédérales ont adopté le 15 décembre 2000 la loi sur les produits thérapeutiques, entrée en vigueur le 1er janvier 2002. Entre le 17 octobre 2001 et le 9 novembre 2001, le Conseil fédéral a édicté les ordonnances suivantes:
 
- Ordonnance du 17 octobre 2001 sur la pharmacopée (RS 812.211)
 
- Ordonnance du 17 octobre 2001 sur les autorisations dans le domaine des médicaments (RS 812.212.1)
 
- Ordonnance du 17 octobre 2001 sur les médicaments (RS 812.212.21)
 
- Ordonnance de l'Institut suisse des produits thérapeutiques du 9 novembre 2001 sur les exigences relatives à l'autorisation de mise sur le marché des médicaments (RS 812.212.22)
 
- Ordonnance de l'Institut suisse des produits thérapeutiques du 9 novembre 2001 sur l'autorisation simplifiée et l'annonce obligatoire des médicaments (RS 812.212.23)
 
- Ordonnance du 17 octobre 2001 sur la publicité pour les médicaments (RS 812.212.5)
 
- Ordonnance du 17 octobre 2001 sur les dispositifs médicaux (RS 812. 213)
 
- Ordonnance de l'Institut suisse des produits thérapeutiques du 9 novembre 2001 concernant l'édiction de la pharmacopée (RS 812.214.11)
 
- Ordonnance du 17 octobre 2001 sur les essais cliniques de produits thérapeutiques (RS 812.214.2)
 
- Ordonnance du 9 novembre 2001 sur les émoluments de l'Institut suisse des produits thérapeutiques (RS 812.214.5)
 
- Ordonnance du 28 septembre 2001 sur le personnel de l'Institut suisse des produits thérapeutiques (RS 812.215.4)
 
- Ordonnance du 28 septembre 2001 sur l'organisation de l'Institut suisse des produits thérapeutiques (RS 812.216).
 
2.4 La loi fédérale sur les produits thérapeutiques définit les spécialités de comptoir comme des médicaments préparés notamment par une droguerie, d'après une formule propre à l'établissement et qui sont remis aux clients de cet établissement (art. 14 al. 1 lettre c LPTh).
 
Au plan fédéral, les spécialités de comptoir sont régies par l'art. 5 al. 2 lettre a LPTh pour ce qui concerne leur fabrication et par les art. 9 al. 2 lettre c LPTh et 14 al. 1 lettre c LPTh pour ce qui a trait à leur mise sur le marché.
 
2.4.1 L'art. 3 al. 1 du chapitre 2 intitulé "Dispositions concernant la fabrication et la distribution" du règlement cantonal subordonne la fabrication de médicaments à l'autorisation de la Direction de la santé publique et des affaires sociales. Selon les recourants, cette disposition viole le droit fédéral puisqu'elle ignore le système des autorisations fédérales et des dérogations mis en place par la loi fédérale sur les produits thérapeutiques. Selon l'art. 5 al. 1 lettre a LPTh, quiconque fabrique des médicaments doit posséder une autorisation délivrée par l'Institut suisse des produits thérapeutiques (ci-après l'Institut). D'après l'alinéa 2 lettre a de cette disposition, le Conseil fédéral règle les dérogations au régime de l'autorisation et peut notamment soumettre à une autorisation cantonale ou à l'obligation d'annoncer la fabrication de médicaments d'après une formule magistrale, une formule officinale ou une formule propre à l'établissement, conformément à la Pharmacopée ou à une autre pharmacopée ou un formularium reconnus par l'Institut (art. 9 al. 2 lettres a, b et c et 14 al. 1 lettre c LPTh). Faisant usage de cette compétence, le Conseil fédéral, à l'art. 6 de l'ordonnance du 17 octobre 2001 sur les autorisations dans le domaine des médicaments (OAMéd; RS 812.212.1), entrée en vigueur le 1er janvier 2002, a prévu que quiconque fabrique des médicaments selon une formule magistrale, selon une formule officinale ou selon sa propre formule (art. 9, al. 2 lettres a, b et c LPTh) doit être au bénéfice d'une autorisation cantonale en lieu et place de l'autorisation de l'Institut. En vertu du droit fédéral, la fabrication des spécialités de comptoir est donc subordonnée à l'autorisation de l'autorité cantonale compétente. L'art. 3 al. 1 du règlement cantonal, qui soumet la fabrication des médicaments à l'autorisation de la Direction cantonale de la santé publique et des affaires sociales, est donc conforme au droit fédéral, les spécialités de comptoir étant définies comme un type particulier de médicaments. Il ne viole donc pas l'art. 49 al. 1 Cst. Les recourants n'invoquent par ailleurs aucun motif d'annulation des alinéas 2 à 4 de cette disposition, de sorte que leurs conclusions sont irrecevables sur ce point.
 
2.4.2 En ce qui concerne la remise des spécialités de comptoir, l'art. 8 al. 1 du règlement cantonal prévoit que le pharmacien ou le droguiste qui fabrique lui-même des spécialités doit les annoncer au pharmacien cantonal qui autorisera leur fabrication et leur remise. Selon les recourants, le règlement cantonal va au-delà des exigences du droit fédéral en soumettant à autorisation la remise des spécialités de comptoir préparées en petites quantités, et son art. 8 al. 1 violerait ainsi le principe de la primauté du droit fédéral. L'Office fédéral de la santé publique partage cet avis.
 
Il faut noter ici que la réglementation fribourgeoise, contrairement à la loi fédérale sur les produits thérapeutiques, ne mentionne pas la mise sur le marché (chapitre 2, section 2 LPTh). Elle traite en effet seulement de la fabrication, de la distribution (chapitre 2 du règlement cantonal) et de la remise (chapitre 3 du règlement cantonal). Ceci dit, la notion de mise sur le marché se retrouve intégralement dans celle de distribution et de remise puisque, selon l'art. 4 al. 1 lettre d LPTh, la mise sur le marché inclut la distribution et la remise de produits thérapeutiques. La réglementation fribourgeoise contient donc les mêmes phases de cheminement d'un médicament que la loi fédérale.
 
L'art. 8 al. 1 du chapitre 3 intitulé "Dispositions concernant la remise" du règlement fribourgeois soumet donc la remise de spécialités de comptoir à autorisation. Au plan fédéral, la mise sur le marché de médicaments est réglée à la section 2 du chapitre 2 de la loi sur les produits thérapeutiques, dont l'art. 9 prévoit ce qui suit:
 
Art. 9 - Autorisation de mise sur le marché
 
1 Les médicaments prêts à l'emploi et les médicaments à usage vétérinaire destinés à la fabrication d'aliments médicamenteux (prémélanges pour aliments médicamenteux) doivent avoir été autorisés par l'institut pour pouvoir être mis sur le marché. Les accords internationaux sur la reconnaissance des autorisations de mise sur le marché sont réservés.
 
2 Sont dispensés de l'autorisation:
 
a. les médicaments qui sont préparés sur ordonnance médicale par une officine publique ou une pharmacie d'hôpital ou, sur mandat de celles-ci, par un autre établissement titulaire d'une autorisation de fabrication, et qui sont destinés à une personne ou à un cercle de personnes déterminés ou à un animal ou à un cheptel déterminé (formule magistrale);
 
b. les médicaments qui sont préparés en petites quantités par une officine publique, par une pharmacie d'hôpital, par une droguerie ou par un autre établissement titulaire d'une autorisation de fabrication, conformément à une monographie spéciale de la Pharmacopée ou encore d'une autre pharmacopée ou d'un formularium reconnus par l'institut, et qui sont destinés à être remis aux clients de l'établissement (formule officinale);
 
c. les médicaments qui sont préparés en petites quantités par une officine publique, par une pharmacie d'hôpital, par une droguerie ou par un autre établissement titulaire d'une autorisation de fabrication, d'après une formule propre à l'établissement, dans les limites du droit de remise de la personne responsable de la fabrication (art. 25), et qui sont destinés à être remis aux clients de l'établissement; le détenteur de la formule peut charger un autre établissement titulaire d'une autorisation de fabrication de fabriquer les médicaments destinés à ses propres clients;
 
d. les médicaments qui sont destinés à des essais cliniques;
 
e. les médicaments qui ne peuvent être standardisés.
 
Les spécialités de comptoir, mentionnées à la lettre c de l'al. 2 de l'art. 9 LPTh, sont dispensées de l'autorisation de mise sur le marché délivrée par l'Institut, à la condition d'être préparées en petites quantités. La notion de "petites quantités", dont la définition incombe au Conseil fédéral, n'a pas encore été fixée dans les ordonnances d'exécution de la loi sur les produits thérapeutiques publiées à ce jour. Les spécialités de comptoir qui ne sont pas préparées en petites quantités sont soumises à une procédure simplifiée d'autorisation de mise sur le marché dont la mise en oeuvre incombe à l'Institut, conformément à l'art. 14 al. 1 lettre c LPTh. L'art. 8 al. 1 du règlement cantonal, quant à lui, n'opère pas de distinction entre les spécialités de comptoir selon la quantité préparée puisqu'il prévoit qu'elles doivent toutes être annoncées au pharmacien cantonal qui autorisera leur fabrication et remise. La question se pose dès lors de savoir si le droit fédéral réglemente de manière exhaustive l'autorisation de mise sur le marché de spécialités de comptoir préparées en petites quantités ou si les cantons disposent encore d'une compétence résiduelle en la matière.
 
L'art. 9 du projet de la loi sur les produits thérapeutiques prévoyait une autorisation pour la mise sur le marché des médicaments. Par contre, les médicaments préparés par une droguerie d'après une formule propre à l'établissement et "destinés à être remis directement aux clients de l'établissement" étaient dispensés de ladite autorisation (art. 9 al. 2 lettre c du projet de la loi sur les produits thérapeutiques). Selon le Message du Conseil fédéral du 1er mars 1999 concernant une loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux - soit la loi sur les produits thérapeutiques - (FF 1999 III 3151 ss, p. 3192), il n'était pas permis de stocker ces préparations sans quoi elles ne seraient plus destinées à être remises directement aux clients. Elle seraient alors soumises à l'art. 14 al. 1 lettre c du projet de la loi sur les produits thérapeutiques et, par conséquent, à une autorisation de mise sur le marché. Il en résulte que la dispense d'autorisation ne valait que pour les spécialités de comptoir fabriquées spécifiquement pour un client et remises directement à celui-ci. Ainsi, au stade de la remise, la protection du client était assurée par l'exigence de la remise directe et donc de la fabrication sur mesure. Par la suite, afin de supprimer une contradiction avec l'art. 14 LPTh, l'art. 9 LPTh a été modifié. La commission du Conseil des Etats, lors de la séance du 27 septembre 2000 de la Chambre des cantons, a en effet proposé l'introduction de la notion de "petites quantités" ainsi que la suppression, dans la formule "destinés à être remis directement aux clients de l'établissement", du mot "directement" à l'art. 9 al. 2 lettres b et c du projet de loi. Cette modification permettait de distinguer les spécialités de comptoir soumises à la procédure simplifiée de l'art. 14 al. 1 lettre c du projet de loi de celles qui en étaient libérées. L'art. 9 LPTh contient désormais une dispense de l'autorisation fédérale de l'Institut pour les spécialités de comptoir préparées en petites quantités et destinées à être remises aux clients de l'établissement, même si elles sont préalablement stockées.
 
A l'occasion de la modification du projet de loi, la question des compétences respectives de l'Institut et des autorités cantonales a été expressément abordée par le législateur. Il ressort de la discussion qu'un partage des compétences entre la Confédération et les cantons était prévu en fonction des quantités de spécialités de comptoir préparées et que la modification du projet impliquait une telle répartition des compétences. Ponctuant le débat, Mme Ruth Dreifuss, Conseillère fédérale, s'est exprimée en ces termes:
 
"Il est clair que cette délimitation quantitative, que nous fixerons par ordonnance, entraîne simultanément la répartition des compétences et des responsabilités entre l'institut et les autorités cantonales.
 
Dans tous les cas où le nombre de médicaments fabriqués est inférieur à la limite fixée, le contrôle de leur sécurité relève non seulement de la compétence mais aussi de la responsabilité exclusive des cantons. L'institut n'assumera cette tâche qu'à partir des nombres que je viens de citer ou, lorsque l'autorité cantonale lui déléguera cette tâche, en dessous de cette limite, par exemple en obligeant une pharmacie d'hôpital à soumettre une préparation fabriquée depuis longtemps à l'autorisation de l'institut. Toutefois, pour des raisons de police sanitaire, cette solution ne se justifie que si les cantons assument leur mandat et garantissent effectivement la sécurité des médicaments par leur contrôle.
 
Nous sommes persuadés que les cantons auront à coeur de le faire et nous vous prions donc de confirmer la proposition de votre commission" (Bulletin officiel du Conseil des Etats 2000 595).
 
L'art. 9 al. 2 lettres b et c LPTh, ainsi modifié et commenté, a été accepté par le Conseil des Etats, et le Conseil national l'a approuvé dans sa séance du 30 novembre 2000 (Bulletin officiel du Conseil national 2000 1319). Loin d'enlever toute compétence aux cantons, le législateur a, au contraire, expressément évoqué leur responsabilité pour garantir effectivement la sécurité des spécialités de comptoir préparées en petites quantités. Il a même appelé de ses voeux un contrôle efficace des cantons dès la phase de fabrication et jusqu'à l'utilisation finale des spécialités de comptoir (Bulletin officiel du Conseil des Etats 2000 593 et ss).
 
En outre, comme cela a été examiné au considérant précédent, la fabrication des spécialités de comptoir est soumise à une autorisation cantonale. Il en ressort, d'une part, que le système des autorisations n'est pas entièrement de la compétence des autorités fédérales et, d'autre part, qu'une autorisation cantonale pour la remise est un complément logique à cette autorisation de fabrication. Ceci est en outre attesté par le projet de loi initial et le système des autorisations qu'il prévoyait. Une autorisation cantonale va du reste dans le sens du but de la loi sur les produits thérapeutiques, tel qu'il est défini à l'art. 1 al. 1 et al. 2 lettre a et b, soit contribuer à ce que les produits thérapeutiques soient utilisés correctement et, d'une manière générale, protéger les consommateurs contre la tromperie. Il serait judicieux, à cet égard, de joindre auxdites spécialités toutes informations utiles pour le client (contre-indications, dosage, effets secondaires, etc.). Ainsi, l'art. 8 al. 1 du règlement cantonal complète utilement les dispositions de droit fédéral et ne constitue pas une violation de l'art. 49 al. 1 Cst. puisqu'il est susceptible d'une interprétation conforme au droit fédéral.
 
2.5 Les recourants critiquent l'art. 5 du règlement cantonal dans la mesure où il prévoit l'autorisation de l'autorité fédérale pour la distribution ou la vente des spécialités de comptoir. Seule la 2ème phrase de cette disposition est mise en cause par les recourants et leurs conclusions en annulation des phrases 1 et 3 sont irrecevables pour défaut de motivation (art. 90 al. 1 lettre b OJ; ATF 128 III 76 consid. 1d p. 81; 127 III 279 consid. 1c p. 282; 126 III 524 consid. 1c p. 526, 534 consid. 1b p. 536).
 
L'art. 5 figure au chapitre 2 du règlement entrepris, consacré à la fabrication et à la distribution de médicaments. L'art. 3 du règlement traite de la fabrication, l'art. 4 du règlement de la distribution en gros et l'art. 5 du règlement, qui limite la fourniture de produits thérapeutiques aux seules personnes et maisons possédant une autorisation de les délivrer, vise l'hypothèse de la distribution au sens de l'art. 2 lettre f du règlement, soit le transfert ou la mise à disposition, rémunéré ou non, d'un produit thérapeutique, à l'exclusion de la remise. Or, la remise au client est l'une des composantes de la définition de la spécialité de comptoir (art. 14 al. 1 lettre c LPTh). Dans la mesure où l'art. 5 du règlement cantonal ne vise pas la remise aux clients mais la fourniture d'un médicament à un tiers en vue de sa délivrance ultérieure, il ne concerne pas les spécialités de comptoir. Il ne viole donc pas les dispositions du droit fédéral consacrées à ces spécialités. Pour le surplus, les recourants n'invoquent aucun autre motif qui pourrait constituer une violation du principe de la primauté du droit fédéral.
 
2.6 Enfin, les recourants font valoir que l'art. 58 du règlement cantonal violerait lui aussi l'art. 49 al. 1 Cst. Cet article impose le dépôt, dans un délai d'un an dès le 1er janvier 2001, d'une demande d'autorisation de fabrication et de remise des spécialités de comptoir annoncées en vertu de l'ancien droit. Sans le formuler expressément, les recourants laissent entendre que le délai d'un an de l'art. 58 du règlement cantonal serait contraire à l'art. 95 al. 2 LPTh, selon lequel les autorisations cantonales de médicaments sont valables pendant sept ans à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi. Ils perdent cependant de vue que les spécialités de comptoir annoncées sous l'empire de la loi cantonale du 6 mai 1943 sur la police de santé ne faisaient pas l'objet d'une autorisation cantonale mais de simples contrôles des délégués à la Direction de la santé publique. Elles n'entrent donc pas dans le champ d'application de l'art. 95 al. 2 LPTh. La disposition transitoire consacrée aux demandes d'autorisation de mise sur le marché pour les médicaments non soumis à autorisation, ni par le droit fédéral ni par le droit cantonal, est celle de l'art. 95 al. 3 LPTh. Elle prévoit un délai d'un an dès l'entrée en vigueur de la loi fédérale, pour les médicaments soumis à autorisation selon le droit fédéral. Les demandes d'autorisation pour les spécialités de comptoir qui ne sont pas préparées en petites quantités pourront donc être déposées jusqu'au 31 décembre 2002 et le délai de l'art. 58 du règlement cantonal ne leur est pas applicable. En revanche, les spécialités de comptoir préparées en petites quantités, libérées de l'exigence d'autorisation fédérale de mise sur le marché mais soumises à autorisation cantonale au sens de l'art. 8 al. 1 du règlement cantonal, sont visées par l'art. 58 de ce règlement. Il n'y a donc pas d'incompatibilité entre les dispositions transitoires de droit cantonal et de droit fédéral et l'annulation de l'art. 58 du règlement attaqué ne se justifie pas.
 
3.
 
3.1 Les recourants font valoir également que les art. 3, 5, 8 al. 1 et 58 du règlement cantonal, examinés ci-dessus, violent leur liberté économique. Ils soutiennent que c'est le cas également de quatre autres dispositions; les trois premières (art. 13 al. 2, 33 al. 1 et 61 du règlement cantonal) ont trait au remplacement des droguistes devant s'absenter pour une courte durée, la quatrième (art. 37 al. 2 du règlement cantonal) fait interdiction aux droguistes d'exécuter les ordonnances de médecins, de dentistes ou de vétérinaires, et cela quel que soit le produit thérapeutique prescrit.
 
3.2 Selon l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1) ; elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF 128 I 19 consid. 4c/aa p. 29; Message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle Constitution fédérale in: FF 1997 I p. 1 ss, p. 176). Elle peut être invoquée tant par les personnes physiques que par les personnes morales (FF 1997 I 179; Andreas Auer/Giorgio Malinverni/Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II, 2000, no 605, p. 315).
 
L'article 94 Cst. impose à la Confédération et aux cantons de respecter le principe de la liberté économique (al. 1). Tous deux veillent à sauvegarder les intérêts de l'économie nationale et contribuent, avec le secteur de l'économie privée, à la prospérité et à la sécurité économique de la population (al. 2). Dans les limites de leurs compétences respectives, ils veillent à créer un environnement favorable au secteur de l'économie privée (al. 3). Enfin, les dérogations au principe de la liberté économique, en particulier les mesures menaçant la concurrence, ne sont admises que si elles sont prévues par la Constitution fédérale ou fondées sur les droits régaliens des cantons (al. 4).
 
Aux termes de l'art. 36 Cst., toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale. Les restrictions graves doivent être prévues par une loi. Les cas de danger sérieux, direct et imminent sont réservés (al. 1). Toute restriction d'un droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (al. 2). Toute restriction d'un droit fondamental doit être proportionnée au but visé (al. 3). L'essence des droits fondamentaux est inviolable (al. 4).
 
Les restrictions à la liberté économique peuvent prendre la forme de prescriptions cantonales instaurant des mesures de police proprement dites mais également d'autres mesures d'intérêt général tendant à procurer du bien-être à l'ensemble ou à une grande partie des citoyens ou à accroître ce bien-être, telles que les mesures de politique sociale ou sanitaire. Ces restrictions cantonales doivent reposer sur une base légale, être justifiées par un intérêt public prépondérant et, selon le principe de la proportionnalité, se limiter à ce qui est nécessaire à la réalisation des buts d'intérêt public poursuivis. Les restrictions cantonales à la liberté économique ne peuvent toutefois se fonder sur des motifs de politique économique et intervenir dans la libre concurrence pour favoriser certaines formes d'exploitation en dirigeant l'économie selon un certain plan, à moins que cela ne soit prévu par une disposition constitutionnelle spéciale (ATF 128 I 3 consid. 3a et b p. 9/10; 125 I 209 consid. 10a p. 221 et les arrêts cités).
 
3.3 Les recourants ne contestent pas que les dispositions critiquées du règlement cantonal sur les spécialités de comptoir poursuivent un but d'intérêt public, soit la protection de la santé des consommateurs. Ils soutiennent toutefois qu'elles sont disproportionnées, que la protection des patients est garantie par le niveau de formation exigé des droguistes et qu'elles restreignent à l'excès leur liberté d'exercer l'une des facettes de leur art, à savoir la préparation des spécialités de comptoir. Ils voient également dans l'obligation de solliciter une autorisation de fabrication et de remise une tracasserie administrative destinée avant tout à percevoir des taxes et des émoluments.
 
Le principe de la proportionnalité implique que le moyen choisi, propre à atteindre le but poursuivi, soit celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés, compte tenu du résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 127 II 306 consid. 8 p. 317; 125 I 474 consid. 3 p. 482, 209 consid. 10d/aa p. 223; 123 I 112 consid. 4e p. 121 et les arrêts cités).
 
Avant l'entrée en vigueur du règlement entrepris, les spécialités de comptoir ne faisaient pas l'objet d'une d'autorisation mais étaient soumises à des contrôles ponctuels des autorités cantonales. L'expérience a montré que les médicaments en question n'étaient pas toujours accompagnés des notices d'emballage nécessaires à une information complète des patients. Les informations relatives aux indications, aux contre-indications, aux limites d'emploi, aux effets secondaires et aux interactions pouvaient faire défaut. De par la nature des contrôles instaurés, la protection de la santé du patient n'était pas uniformément garantie. La nouvelle procédure d'autorisation prévoit la généralisation du contrôle et établit une meilleure égalité de traitement entre droguistes, toutes les spécialités de comptoir faisant désormais l'objet d'un contrôle identique. A cet égard, les mesures imposées par le règlement cantonal ne sont pas disproportionnées. Selon le droit fédéral (art. 5 al. 2 lettre a LPTh, art. 6 OAMéd), la fabrication des spécialités de comptoir est soumise à l'autorisation des cantons. L'autorisation de remise, qui certifiera la compatibilité du médicament avec les exigences d'information complète aux patients, pourra être délivrée simultanément, de sorte que les démarches administratives pourront être simplifiées et n'entraîneront pas la perception de taxes ou d'émoluments excessifs.
 
Il faut relever encore que les dispositions du règlement cantonal mises en cause ne privent pas les droguistes de leurs prérogatives en matière de préparation des spécialités de comptoir. Ces spécialités sont simplement soumises à un contrôle unifié et les refus d'autorisation devraient être l'exception, compte tenu du niveau élevé de formation des droguistes. Les griefs des recourants tirés d'une violation des art. 27 et 94 Cst. sont donc infondés.
 
3.4 Les art. 13 al. 2, 33 al. 1 et 61 al. 2 du règlement cantonal prévoient qu'un droguiste absent de son officine doit se faire remplacer par un droguiste autorisé à pratiquer et que pendant un délai transitoire de trois ans, il peut demander, à titre exceptionnel, à être remplacé, sous sa responsabilité, par un droguiste titulaire d'un certificat fédéral de capacité.
 
Les recourants font valoir que la réglementation antérieure, qui autorisait le remplacement d'un droguiste diplômé par un confrère titulaire du certificat fédéral de capacité, avait donné satisfaction et que l'exigence de la présence constante d'un droguiste diplômé était disproportionnée; elle entraînerait des difficultés pratiques considérables, compte tenu du nombre limité de droguistes diplômés; elle créerait en outre une inégalité de traitement avec les pharmaciens, sensiblement plus nombreux que les droguistes.
 
L'art. 94 al. 1 de la loi fribourgeoise du 16 novembre 1999 sur la santé dispose qu'une personne qui pratique à titre indépendant une profession de la santé peut se faire remplacer temporairement, pour cause de formation, vacances, service militaire, congé de maternité ou pour raison de santé et que le remplaçant ou la remplaçante doit avoir l'autorisation de pratiquer la même profession. L'autorisation de pratiquer en qualité de droguiste indépendant est réservée aux seuls droguistes titulaires du diplôme supérieur, à l'exclusion des droguistes au bénéfice d'un certificat de capacité (art. 1, 38 et 39 du règlement fribourgeois du 21 novembre 2000 concernant les fournisseurs de soins et la Commission de surveillance). En distinguant clairement ces deux catégories de professionnels, en fonction de leur niveau de formation, le législateur cantonal a voulu réserver, dans l'intérêt bien compris des clients, la responsabilité de l'exploitation d'une officine à ceux qui offraient les meilleures garanties au plan de la qualité des services. L'exigence réglementaire d'un remplaçant qualifié en cas d'absence du titulaire s'inscrit dans la logique de ce choix et constitue une obligation liée à la position de monopole accordée aux droguistes diplômés. Même si elles ne doivent pas être minimisées, les difficultés pratiques évoquées par les recourants ne paraissent pas insurmontables. Les craintes exprimées par ceux-ci sont inspirées par la nécessité de mettre en place de nouvelles mesures d'organisation. A cet égard, la disposition transitoire de l'art. 61 al. 2 du règlement attaqué leur permettra de s'adapter progressivement à la nouvelle réglementation. Les dispositions critiquées ne sauraient ainsi constituer une entrave inadmissible à leur liberté économique.
 
Enfin, c'est à tort que les recourants invoquent le grief d'inégalité de traitement entre concurrents. En effet, selon la jurisprudence (ATF 120 Ia 236 consid. 2b p. 239; 119 Ia 433 consid. 2b p. 436; 89 I 27 consid. 4 p. 35), dans le cas où deux professions différentes ou deux catégories d'entreprises se trouvent dans une situation de concurrence pour une partie de leurs activités seulement - tel que les pharmacies et les drogueries dont l'assortiment est partiellement semblable - le principe d'égalité de traitement des concurrents d'une même branche ne s'applique pas. De toute façon, même si les pharmaciens étaient considérés comme des concurrents des droguistes, il n'y aurait pas inégalité de traitement puisqu'il faut constater que les pharmaciens sont soumis aux mêmes exigences que les droguistes en matière de remplacements; en outre, il n'est pas certain que l'organisation de leurs officines, en cas d'absence, présentera des difficultés moindres du fait de leur plus grand nombre.
 
3.5 L'art. 37 al. 2 du règlement cantonal fait interdiction aux droguistes:
 
"a) d'exécuter des ordonnances de médecins, de dentistes ou de vétérinaires, et cela quel que soit le produit thérapeutique prescrit;
 
b) de préparer, de détenir et de vendre tous les produits dont la préparation, la détention et la vente sont réservées aux pharmaciens et pharmaciennes;
 
c) d'employer, dans leur enseigne, leur en-tête de lettres, leurs factures et réclames, des désignations propres à induire en erreur."
 
Selon les recourants, la disposition de la lettre b est inutile et celle de la lettre c est attentatoire à la dignité de la profession de droguiste. Les recourants n'indiquent pas en quoi les interdictions en cause constitueraient une violation des art. 27 et 94 Cst. et leur argumentation est insuffisante au regard des exigences de motivation de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ.
 
Pour ce qui concerne la lettre a de l'art. 37 al. 2 du règlement cantonal, les recourants font valoir que l'interdiction d'exécuter des ordonnances médicales, même pour des produits thérapeutiques en vente libre ou autorisés en droguerie, n'est pas justifiée par la protection des patients et viole le principe de l'égalité des concurrents.
 
Comme on l'a vu ci-dessus, la jurisprudence considère que les pharmaciens et les droguistes ne sont pas des concurrents. Le principe de l'égalité de traitement entre concurrents ne peut donc pas être invoqué. Par contre, les limites imposées à la liberté économique par l'Etat doivent respecter l'art. 8 Cst., soit le principe d'égalité de traitement (entre non-concurrents). Ainsi, en toute circonstance, l'exploitant peut faire valoir qu'il subit une atteinte contraire audit principe (Etienne Grisel, Libéralisme et droit économique en Suisse, 1995, p. 45). Le principe de l'égalité de traitement est étroitement lié à celui de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Il est violé lorsqu'une disposition établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut également que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 127 I 185 consid. 5 p. 192; 125 I 1 consid. 2b/aa p. 4 et les arrêts cités).
 
L'art. 37 al. 2 du règlement entrepris exclut l'exécution des prescriptions médicales par les droguistes et réserve en conséquence cette compétence aux seuls pharmaciens. Une telle restriction figurait déjà à l'art. 4 des directives du 25 septembre 1988 de l'office intercantonal de contrôle des médicaments. Cette disposition concourt à réglementer de manière précise les compétences des droguistes et des pharmaciens. Lors des débats parlementaires, le législateur fédéral s'est lui aussi montré soucieux de bien délimiter les champs d'activité respectifs des droguistes et des pharmaciens et d'éviter la confusion des rôles entre ces deux professions (Bulletin officiel de l'Assemblée fédérale 2000 IV 1322). Dès l'instant où un médicament fait l'objet d'une prescription médicale, il n'est pas arbitraire d'exiger que le suivi du patient, au plan de l'utilisation adéquate des médicaments, soit assuré par un pharmacien, soit par un professionnel de la santé (art. 2 lettre h OAMéd). Les droguistes ne sont pas rangés dans cette catégorie professionnelle et ne sont pas soumis aux exigences réglementaires imposées aux pharmaciens.
 
En outre, l'Association suisse des droguistes a expressément admis, dans un document du 27 mars 1997 signé conjointement avec la Société suisse des pharmaciens, que le pharmacien est le spécialiste de l'accompagnement des patients qui suivent un traitement médical et que l'exécution des ordonnances médicales relève exclusivement de sa compétence. L'association faîtière des droguistes s'est même obligée à s'engager activement pour que ce principe soit respecté et mis en pratique dans les cantons et sections. L'exclusivité de la compétence des pharmaciens pour exécuter les ordonnances médicales est donc reconnue dans les milieux professionnels respectifs. Elle vise à garantir un traitement optimum pour le patient qui a consulté un médecin ou un dentiste. A ce titre, l'art. 37 al. 2 lettre a du règlement cantonal ne viole pas le principe de l'égalité de traitement; les distinctions qu'il opère entre droguistes et pharmaciens, au demeurant reconnues par les représentants de ces professions, sont fondées sur l'intérêt prépondérant de la protection de la santé des patients. Au vu de ce qui précède, les griefs articulés par les recourants à l'encontre de cette disposition réglementaire ne peuvent pas être retenus.
 
4.
 
Mal fondé, le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable.
 
Succombant, les recourants doivent supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ). Il n'est pas alloué de dépens (art. 159 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de fr. 5'000.- est mis à la charge des recourants, solidairement entre eux.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants et au Conseil d'Etat du canton de Fribourg ainsi qu'à l'Office fédéral de la santé publique.
 
Lausanne, le 30 août 2002
 
Au nom de la IIe Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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